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imiinBATiON
TOME XII
Septembre, Octobre, IVovembre, Décembre
1848
Janvier, Février
1849
A. LE CHEVALIER ET C '^ ÉDITEURS
60 , RUE RI C H E Ll E U
L'ILLUSTRATION,
Ab. pour Paris. 3 mois, 8 fr. — 6 mois, 16 fr. — Un an, 30 fr.
Prix de chaque N", 7S c— La collection mensuelle, br., 2 fr. 7ô.
N» 288. VuL. Xll.
SAMEDI 2 SEPTEMBRE 1848.
ui' nicliellrii, 60.
Ah
pourlesdép. — 3 mois, 9 fr. — 6 mois, 17 fr. — Un ai>,32fr
pour l'c^tranger, — 10 fr. — 30 fr. — 40 fr.
SOMMAIRE
IliBfoirp de la semaine- Portrmi iic m BuirhoTi. — s<^ance dn 25
aorti 18tl8 — Coiirrlcpile l'arls. l'urlniil île l». CaïuttUiérc , Dislribii-
litiH lit V r'V(ii»/'(n.<( .1- /'('(/ r- l'fj-iiD^ithn de lfi»8; D stnbiition de nouftc aux piiu-
'1"
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, I.TlIM—c.olc.
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X. - Lrllrpsd'iin flânear. Vlll.
liloNlovalaiiiiP, i'aiti.lp. Bijoux
1 •liiun'-ii imtwnnlell : l'trwurhen : Huile
iz: Tn-iiuiieli : liliil .«i. ,rD|. i.M. II..11.
iveriiiri' de la rli,i>^si> flt^iiiii-
lim dex hilmriil. — <:ili'unti|
cp<« morale!» elpolllii|ue!i
Mbus-
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Hipulp. — VraflPiiiliMl
ra/.cisi», — BerzOliUB-
vvr
ll-ll-
Histoire de la semaine.
Coite semaine tout entière a vécu sur le grand événement
parlementaire qui a terminé la semaine précédente , et au
récit pittoresque duquel Vlllustration consacre un article
-■ipécial. Ici , clironologiste e\acl , reprenons les débats de
I Assemblée où nous les avons précédemment laissés.
.\près ceux de ses travaux que nous avons mentionnés il
y a nuit jours, l'.4ssemblée, qui avait ordonné une enquête
sur les opérations électorales de l'Hérault , dont la nomina-
tion de M. Laissac avait été le résultat , a entendu le rap-
port que lui a fait sa commission , après envoi sur les lieux
(l'une sous-commission qui avait procédé avec beaucoup
d'activiléot desoin.Laconnnission, à l'unanimité, concluait
a l'annulation de l'élection. L'Assemblée s'est montrée
beaucoup moins unie dans sa décision , car les conclusions
du rapport n'ont été adoptées qu'à une majorité relative de i
13 voix.
MM. les ministres se sont ensuite succédé à la tribune
pour la présentation do mesures qui rivalisaient d'impor-
tance. D'abord , M. le ministre de l'intérieur a présenté
d'urgence un projet de décret pour rétablir, au profit du
budget de la ville de Paris, le droit d'octroi sur la viande de
boucherie, qu'avait supprimé brusquement, avec un consi-
dérant déclamatoire , un de ces innombrables décrets du
gouvernement provisoire, <|iii («lursiiivait, |)liis IVffrl i]ii il
ne se préoccupait des résultais. Les irsullats de sa iiicsiiri'
étaient, un profit insignifiant pour le consommateur qui cnii-
tinuait ii payer la viande il peu prés comme par le passé,
un déficit de cinq millions dans la caisse de la ville, la dimi-
nution de son crédit avec ses ressources, et par conséquent
l'impossibilité pour elle d'emprunter, d'entreprendre de
grands travaux et de venir l'hiver au secours de la popula-
tion nécessiteuse , si des ministres plus prévoyants ne se
fussent hâtés de parer au mal. — M. le ministre des finan-
ces est venu donner lectun^ du pi'ojel de décret qu'il s'était
engagé ii produire, en icliranl la lui sur les créances hypo-
thécaires, et qui a pinirliul ircUihlirun impôt desoixanle mil-
lions sur If
18i!l, impôt inlruduil p:
nistre de la niarinr a pn
qu'une indemnitiMlr qu,
aux anciens prnpiiclain
de l'émancipation l) api
spéce pour l'année
ilion. — M. le mi-
lle II
,li. rep
;i Sun tour, un |irojet pour
i;l-ili\ millions soit accordé •
l.ives aux colonies ii rai.sun
ijjet, l'indemnité serait ])ar-
tagée en dix annuités dont la première seulement , formant
une somme de douze millions, serait payée dans les années
1848 et 1849.
Puis est venu le vote d'un décret éle\ant le chiffre des
primes pour l'exportation des iimrui's de pèche française
Cette pèche est une branche lonsiilérable de notre coni-
nierce maritime. Elle emploie pies ilo 400 liàlimeiits jau-
geant près de 30,000 tonneaux et occiqiant l!i.000 marins
environ. — Ensuite a été volée l'aiitorisiliiiii iliin i^uprunl
de vingl-eiiiq millions pour l;i \ illcdr l>,iris —En lin est m-
nue la réforme piisinle (le -!■ nippcllr. el immis ;i\"ns ru
occasion de leilireihinsrrllr rniillc, qu m l.Si.'i la clnuiiliiv
des di'pnir'S, sni.-r il uni- pi.i|His:tMiii auiiil pour base k
syslèinrilr l;ii,i\c iinh|iir >■■ il i\ isa au moment dii voto en
dru\ p;ii lll s v'j,:i\i-. 17(1 piMir il 170 contre). Personne au-
jourd liui , uxcrpic Jl. D^sliingrais , n'a soutenu la taxe
progressive et n'a voté pour elle. Los calculs de la commis-
sion de 1844, basés sur des documents officiels, ont on effet
établi :
" Qu'il n'y a qu'uni' différence d'environ Fj centimes entre
la dépense (icca.-iiirinre par la lettre qui |)arcourt la plus
grande dislaiii-e cl la (|i''p('iise occasionnée par celle qui par-
court la distance la pluscourle: la surtaxe grevant la prc-
niiiT.^ ne d'vniildonc pas dépasser cette faillie diUérence
Ce|iendanl la lettre qui ne ]iarcourl (pie iO kilnmelres . et
qui rm'itr environ 10 centiiiirsilr Irai:., .U(|uill(' une taxe de
il)rriitÎ!iii"s:elle paye par ruiisn|u,'iii m, iiii|'ni delOcen-
liiiirs Tandis, au contraire, qiir la Irllii- qui parcourt la
distance la plus longue et qui coûte enxiron l'i centimes
de frais paye une taxe de 1 franc 20 centimes, ou 1 franc
3 centimes d'impôt; c'est-à-dire un impôt onze fois plus fort
que la preitiiére ~
Le ili'liat il anjiiurd'hui S3 trouvait éclairé et épuisé d'a-
vaniv pai liiiii .V qui avait été précédemment dit et publié:
aussi 11 a-l-il .ipporté aucune lumière nouvelle et n'a-t-il
offert qu'un médiocre intérêt. Le décret ne s?ra applicable
qu'à partir du 1" janvier 1849. Le chiffre de la ta>e uniiiue
est de 20 centimes. Le poids de la lettre ordinaire esl de
7 gramines et demi.
.M. Bauclcirt, r.-qiporleur Je la commission d'emiucte.
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVFRSLL.
C/csl, iipiês ccttiî suiU' ili' lni\iui\ f]iir I A--i'niblw, ;i cii-
liHiit! la discussion sur \c ni|i|jnrl de M l!iiiiilhirt. au nom
(1(3 la commission drnqiKMc des (M'iiiiociiN d(! mai et. de
juin i;\-^-;cMilil('r('Uiil c.invo.iiir,. ,i ini.licl ,i\anl riicurc
niilh|(hf Ir- lv|iiVMiiI;ilil, rhlhlil .1 Iriii |,n-lr l.c pulllic
cl \r- |,ri\ili-jh- (Ir-, lui - M-,-i\.'i- ;i\;iirii| ,'.|i'. cnciilX'
|,lil- |,iviii;.Mnviii,.,,l r\,,rl^ \ > ;ilil .hi.c..r(lcr l;i |i,irol(.inl\
,,|Mh.|ll- k|.M-hlrMl, M \l;.ll,i>l ,1 lllMlc I A>M 'l. 1 1 .1. r , |iMr
,|ii,'l.|ih'- liiri, -ciiti-. ,i ^;nilri le ciliii,. cl l;i di;..ml('
<1 iicr:--;iic - ^Lin. une 1 1 l-CH- loii lie (elle lijliiic Cei ;i|,-
|1CI il (''.II' |Jie-i]lie L'eiUT.lleillClLL (■llteilllll . l't, SU ul (|1I('I(|U('S
]nl(MTU|ilMHi- ileel hiiics (111 (1(! iiiauvais ^'oiU, aucun in-
ciilcnl ririvlhilile ii i-i M'iiu ji'tcr dans \c déUuL la violence
Le (li'lial si'st ouvert par les questions de détail. Il n'a
olîciL |in'S(|ue aucun intiTtH. Le seul incident curieux est
celui (|ui s'est (ilevé entre MM, Portails cl Landrin d'une
|iarl et MM. Arago et l,c(liii-l{(>llin. Uo chaleureuses pa-
roles de M. Landrin, un iirand accent d'honnêteté et de sin-
c(!'rili' lui ont valu de vils a|i|ilaudissements.
Celte partie (In (l(''li;U, l'enn(''e , la parole a été donnée à
M Ledrii-Knllin .S(i[i diseonissecomposait de deux parties:
la première n'était i;iiere(pi une re|ir(iduction pins étudii'-e.
I liais aussi moins entrai liante p;irce (pi Clic l'-tait nKtin.^spen-
lanee. de la irpdn.se immi''(liale iinil a\;iil. I.iile i|iiirize |iiiirs
auparavant après la lecliirc liii rapport de .\L liaiicliart l.a
seconde partie était un pnii.'i;nnnie .senii-socialiste , seiiii-
(•iniiniiinisle (pii a en peu de Micces dans I .Vs.^emlilce et (|iii
ne nous parait pas plus piii|iii' a r.i>-.iirer les intcr(''ts ipia
attirer à lui les novateurs ( c-i mi |ii-ie milieu |ieu si''(lui-
sant et peu pratique. Foi l min-ii' iii\ei. I .iiineiine oppo-
sition, ce discours, du nmiii- 1! ele iiHiileie .M Ledril-Kol-
liii , en lioininedc cieiii-, ,i\,iil co!ii|ni-,|ii il iie(le\,nl pas,
1 rhisiili>r:i(iiiiiiilese^iiiili|Mlliie, ;t|.ii-,|ii il nCLiil pas,
lui, inculpe, a^L'iiner la silu.ilion de deux colle;jiies ipn
l'étaient, en j(\lant une irrilati i,iL:eiiM' (I,mi>, le (lelml
A M, Lcdru-Uollin a succède .M l.oiii> HLine Lu pivniiere
partie de son dùscours a tenu I A>>eiiililee iciinie |ll^(|ll a
lires de six heures. Une suspension d une heure etdeniie a
été pr(inonc(''e |iar .M, .Marrast, X sept heures et demie les
repn'.senlanls étaient de noiiNcau à leurs hancs et M. Louis
lilanc a la triliune. — Kst \eiiii cnsiiileM Cinissidiére, qui
a lu un discours fort liiiii;, lueii (|ii il ml i i n devoir l'abré-
ger en passant un certain lumiliiv de leinllels
A la suite de cedernierdi^i iiiii>, .M le président a donné
lectiii(> d un iVvpiisitoiic de .\L le procureur L'énéral pr(''S la
Cour d'appel de Paris, lenilaot a olileiiir raiiliiiisation de
|i(iui>uivic.M.M. lilancetCaii.s-idieic .\ piirlirdc ce uioiuent
le dchat , jusi|ue-la i,'rave et inipo-.mi -,iii> doute, s'est as-
somliri. Le chef du pouvoirexeciilil i-i moule a la tribune
a une heure du malin pour soiileiiii' celle diiiiande, et le
ministre d,' l,i pi~liee p • i-eeliimei liirL'enee .\pics un
(l(''liat prololIL'e'l iir-eliee;i eh' deehiive p.ir V.I:î\oi\coiiIic
"27-2 Alois s. si oiueil lu ili>eii«-i"n, M liac a parlé a\ec
plu- d ,diond,Mi.v ,| le -eriMliilileeii l'avour de M. Louis
Ifl.inc l,;i dcm.indi' d iiiiton-iil le poursuites contre ce
repnsenliiiil , a I oeejMoii d' 1; iiliit du L'i mai , a été
accueillie par VMi bilhUs blancs eoiilre ±'i2 billets bleus,
M. Flocon a trouvé en faveurde .M C,aii>.-iiliere (pielipies
phrases do cœur qui ont \iveiiieiil cimi I \^-,'iiililee, i77
voix se sont prononcées pniir iiiiloii>er le pioenreur i;rnr-
ral a poursuivre cerepre>"iil:tnl (|n;int ,i I ,i lien lui dn I '1111(0;
:2I1S ont refusé cette iiutoi i>.iIimii .\1iii> pour hiticiilal d((
juin l'autorisation de poursuivre i\l Caussidiere a été re-
riisee pari.^)8 représentants; 251 seulement ont été d'avis de
l'accorder,
A six heilnsdil malin , le samedi, le piésidcnt (l(''cl,ir;iil
'Pieles en on-, ,,\,,ieiil , pin- encore ,|nr ., dniVv >,,n>
exemple, conlnbuc ,1 rendre -1 leli-iinle ei -i pénible.
Lundi un di'cret sur I cleclioii de- |n;_-e- 1 nn-ulaircs a été
\ote par rAssembli'v II allribiie le deoil cleeloralcn même
Icinp- (|iie IY'Il;:ilidile ;i tous les comniel (;,iiils [iiilent('>s (le-
|iiii- cim| ,111- el don ne die. de|iius deux ans au luoinsdans
le ii—nii d l.niLil In meideiil curieux a manpié la lin
de cette se.iucc. .M le nnni-liv de riiiteneiir avait cru de-
voir donnera la Iribune i|iiel(|iie> explications ipii eussent
peut-être été mieux plac(''e>, -dus lonne de note, dmis le
Moniteur, sur les pn''caiilioiis (pic le i;oii\crneiiieiil a\ail
prises pour ipie des délournements de papiers commis aux
Tuileries après la lévoliiliou de février, ne pussent pas élre
renouvclf's aujourd luii. Il allait ipiitlerla tribune, lorsipie
M Laussedal lui a demandé de sa |.l,ieesi le couvi-rneineiil
était pour (picl.pie chose dans la piibli, alioii de la l{rnir
rrlrosi>erlhu\ .Sur la réponse néuatuc de .\1 .Scnard , une
autre \(iix de la M(intai;ne a exprimé le mimi ipie la Rrriic
rrliiispcrlifr fut suspendue. M, Taschereau est miuilé il la
Inliuue pourconlirnier le dire de M. Sénard et dc-ap-r éga-
lement la responsabilité de ladminisl ration antérieure ('. Cst
sous lei;(iu\eriieiiicnl provisoire ipie la llrriir rétrospective
a eu communication, non pas des papiers dont piiihiil
M. Sénard , mais de- deux iioilefenilles déposes au paripiet
de M. le procureur uenei.il 1,11c s'est tron\ee eealement,
au 21 février, en |in-.e--i(ni de> papiers compos.mt le ca-
binet du secrétaire d un ain icii minislrc du ;;ou\eriieioent
(leiuillcl (-.(Si a ces deux sources (pi'ellc a pui>é Klle iiu-
prune intc-ralement toutes les pièces trouvées dans les deux
poitchaiillis s.ins choix aucun, .sans le moindre letranche-
ment, sans nulle exception: elle inipriiue, d'un autrii coté,
tout ce qu'avait recueilli de curieux M, (ienie. .Si ces docu-
ments et ce> cmiosilcs ne compromettent pas les liomnics
ipiela Monla-neMindraitvoircompromis, el s ils uni dévoilé
M lilan.|ui ci i|iicl(pies-uns(les anciens correspondants oli-
siMpiieiixile M (lui/ot et de M (ieiiie, aujourd'hui Monta-
gnards il tous crins . en vérité M Taschereau n'en peut
mais. Que M, Laussedat s'en prenne il ceux qui ont eu la
maladresse d'écrire el non à celui qui a le courage d'ini-
priincr.
Mardi a été lu le projet revise de la ( oii-^liliilion. Non.-,
aurons a en rendre compte la .scnidiie |.iin li.iinc, (|uand le
ra|ip(irt aura été distribué, et (piaiid (le|,i l.i di-cu.ssion su
trouvera commencc'H!. — Apres celle leiime \1 Laii-scilat,
poursuivant sa canipagno de la \eilli ,1 |Mo|i,,.e la Im ma-
lion par l'Assembh'M; dune caimiii--Miii ili,ii_-ee d iii.enio
rier et de publier, .s'il y a heu, le- papici= de.-. Tuileries
Il a dein:iiiile I invemc i|ni a ele ie| ssi'œ. Sa proposition
a ele ivn\o;,ee ,in\ lime,in\ . |m ,i i n on I .1 sO prOnOncer SUr
la ipie-lioii de -.iMiir M 1 .\>-emlilee doit OU non prendre
en con.sideration cetle eolleeliou diine autrearnioire de fer.
Que M. Laussedal prenne liiiMi garde de ne trouver la en-
core ([ue des aiitdgraplies de ses amis!
La commi.ssion d'enipiêtc, cpii a fait imprimer ii la suite
du Happorl de M, Bauchart trois volumes de pièces justili-
catives, n'a pas voulu, pour abn'.ger, grossir ce rctueil de
la correS|ioiidance des deleLou-s de l.i Commi^-iiiu des clubs
dans les dépailemeiiL-, a\ei le pic-uleni de . elle (!oinmis-
sion, le sieur l.oiiL'e| I (Jiiali-e-Miii:l-M\ do— lers. ,se rap-
portant ,iu\ .pi.llie Miivl MX dep.nleinenl-, oui (■■l(■■d('■pll^(■•S
aux arclll\eMle I A-enil.lee II- ividelliienl le- lell,c-de,
CCS lnl"loliliai|-e> dcinoenalc- .Non, iiell ne pelll ivndre le
SU le, lorlliograplie. la logapie, lcs>ciitinierits de ns epislo-
l,iiivs di. la M'ille (In eiml iè\er! Il serait a jamais icL'ret-
table pour Ihistoire de notre temps el pour l'enseignement
des Lmigepied liilurs ipie cetle coricspoiidancc ne lïit jias
iiiiprmice II \ a parlieiihcrenienl de- lellre- d un citoxcn
loiy-d'Aiiioiii-, en\o\('' dans l';iirc-(i l.nir, (pril tant il l'ont
prix arracher a l'oubli. Quand on a lu ces epitres, (piand
on voit il quels hommes notre pauvre France s'est trouvée
livrée, on peut se dire :
Nous l'avons, en dormant, madame, échoppé belle 1
Le,s journaux et les correspondances de l'étranger n'ont
rien apporté de bien nouveau dans la situalion des afl':iires
eiiro|H''eiiiies l.llaliec-l a^ali'c de haile- m, rie- de inniive-
liienlM'onlnaires, en alleniianl I elTet de- iie;joei,il mn- pour-
suiMcsparla Fraïuat et rAiiglelcric Ces iiegoci, liions ne
paraissent piis jusipiici avoir inllue sur la e Iiiile des Au-
trichiens, ijui est toujours la conduite d'un vainipiciir, cl
d'un \ainiiiieiir irrité dans un pays conquis. Cependant
Vienne la i a|iiiale de l'Autriche, est livrée au désordre de
Ile- liriiii> d intervention armée courent en ce moment ii
Paris. On annonce qu'une nouvelle division , qui doit faire
partie de rarniée des Alpes, se forme actuellement il Dijon.
Lord llardinge, commandant en chef des forces réunies
en Irlande, e-i de retour en Angleterre, sa |iii-eiii c n étant
plusjugec nece-Mllle daUS les provinces irl:illil,ll-e-
Les joli ma 11 \ belges ont annoncé l'an iMeen liclgiqiiede
.M Louis lilanc; il aurait été arrêté |iendaiit ipielques heu-
res, r.iiile de passe-port, puis remis en liberté par ordre du
f^oiiM'inemcnt : M. Louis Blanc aurait annoncé rioleulion
de .se rendre en Angleterre; réalisant ainsi une prédiction
de V Illustration, impriméB quelques jours après la révolu-
tion de février
On assure que M. Caussidiere a ('gaiement passé il Gand
la nuit de dimanche ii jeudi.
■iii Heaiice du S 5 août.
Mémorable séance! D'autres la jugeront; nous nous con-
tenions de la peindre.
On -axail, dès le début, (pie le eoiuenieincnl et le pn''-
-iilenl de 1 \-. milice (■■laienl d .lecord | ■ e|iiii-' r l;i dis-
( II--1..1 1 d une haleine, dii.-s ail lis i,'|iiv-,ail,iiil- rester
sur leurs sièges jiisipi'a niinuit : mais on el.iit bien loin de
]in'Miir (|iie cetle séance vraimeni re\ohili(inniiire durerait
dix-huit heures cl (judo en sortirait au grand jour, a|ires
toute une nuit d incidents, de luttes fébriles et d'émotions
dramatiques.
Dès le matin, des dispositions militaires extraordinaires
sont prisî^s sur tous les points de, Paris l'ne léL'ion deiiarde
nationale, un reL'imeill de Iilmic el des delacliemelils de
toutes iiniics lien mail lmi lu-ini . >,i ii> -:' ni ici , aiiloiir du
palaisdela rcpre-enl.ili i.ilieiiale dont I ,i-peel exlcrieiir
lioirrcdii reste aiieiin (Ml aelele in„,lile La lonledescu-
riiaix, solhcil.inla inaiii- |oiiile-, in,i i< iiiiirilemenl , rentrée,
est seidemiail plus eoinp.iele ipie d li,iliiliidc I es blllcls(h'S
Iriliiincs haiilcs el b.is-e- on! ele reelier, lus depuis huit
jours avec un eiiipre-senieiil siii-iiliei-, cl Imn a\anl l'heure
■|ix(''e pour I ouxerliirc (le l.i sciiice Imile- le- places réser-
vées au corps diploniatiipie, iiii con-eil d II, il, aux anciens
pairs ou députes, aux journalisles .ms -i, noeiaplies et au
|iiiblic sont envahies par une atlliience piodiuieuse d hom-
mes niari|uants, pour la plupart, el de h'mmes, tilles ou
mères de représenlanis parmi lesipiels on remaniue entre
autres maihiine Ledru-Uollin, ainsi ipiela mère et les siriirs
de l'ancien préh'l de police Caussidiere.
Le commencement de la séance justifie assez mal celle
avide curiosité, .\ midi et demi le pr(''sident Marrast dé-
clare lii discussion ouverte. Il recommande, dans ipiel(|ues
paroles pleines de conv(Miance, l'alteulion. le rccueilleiiient
cl le silence a .ses collègues. Mais, tout d'abord, une foule
de (piestiiuis incidentes et personnelles S(iule\ees par di-
verses deposi lions ou faits énonces dans les pièces d'cinpir'le,
se produisent a la Irilnine, l'Assemblée avant décide (pie
ces débats subsidiaires seraient ininiedialei'iienl Miles,
Voici en premier lieu M, Uicrosse (pii reproche ou a re-
proché il MM. Cazy et ('.barras, l'un l'ex-minislrede la ma-
rine, l'aulre sous-'.secrétaire d'Flal au département de la
guerre, de n'avoir point été vêtir leur uniforme et faire
battre le rappel au l."i mai, au lieu de rester sur leur banc
de ministres en lialiit noir, en face de l'invasion Ces deux
rcpirs'Utanls se defendenl euergiipiemeni d'un tel repro-
che ; ils allèguent surtout l'uuile du (duiniandcment alors
confié il M. Courtais, eldansle(iuel, disent-ils, ils n'avaient
point il s immiscer.
C'est ensuite M Ovra», un orateur ipii «était déjii fait
lenianpicr ihins 1 allaii'e du million pour le- eanipagnes. el
n,l |i,i- de peine ,, lepnil-el laceii-allon ipioli loi iuipUte
d,non slIlM a I Ilolel^le-Ville liaibes el -e- adheicols .
tandis ipiil est allé le reprendre sur eux , avec .MM, 1 edru-
Uollin et Lamartine, ce qui est un peudiherent .M Oyras
a de la verve : mais il est un peu trop [ilaisiint, vu la nature
du sujet. 11 se plaint qu'on 1 ait changé en route el s'écrie
comme Sosie : « L'enquête a fait de moi un moi... qui n'est
pas du tout moi ! «
Voici venir maintenant MM. Portails. Landrin et .\rago.
qui se livrent un duel il trois il propos de ce que ce dernier
ajipelle les conciliabules nocturnes du ministère de l'inté-
rieur.
Signalons en passant une petite pantomime expressive de
M. Marrast , lequel , en entendant parler de jeter I Assemblée
par où vous savez, mesure narquoisement de l'oul la hau-
U'or desdites fcniHres , situées il quelques trente pieds au-
dessus du niveau du .sol.
Il lut un temps , el ce temps n'est pas loin , où la question
était fort a Tordre du jour; où il n'était si mince candidat
il un grade dans la garde nationale qui n'eut à s'expli-
(pier sur le poinl de savoir ce ipie l'on devrait faire de
l'\-eiiililee-i elle ne Inariliail pa-illoil ( ' e.| ce (pii sem-
blerait n-,illeidise\plicaliiiii-e, I L'ee-iailre MM l.edru-
KoUiu et Ar:ig(i, celui-ci tenant le pu. pu- de celui-là el
l'ayant répété en y attachant plus d importance que de
raison.
Autre combat à trois. — MM. Edgar Quinel et Baune
prennent le citoyen Turck il partie pour certains cancans
nieurliiers qu'il' aurait tenus sur leur compte. Le commé-
rage, en ce qui louche M. Baune, est sanguinaire. Il s'agit de
([iiatre ou cinq cents têtes ii retrancher de l'Assemblée, à
droite, il gauche, un pou partout. M. Baune se fàclie tout
rouge : il y a de quoi. Nous tenons jusqu'il preuve con-
traire ce ti"i lible exieiininateur pour incapable de charger
sa couse leiiee piilil npie de lassassinat d'un insecte. M. Turck
aura eei l.iiiieinent 111, il entendu.
Apres une iiielee assez confuse , il laquelle prennent suc-
ccssivemenl part M.M Denjoy, Larabit , Alex. Martin , Bac.
liaiichait, rapporteur de la commission , Pierre Lefranc et
Jules Favrc, la série (les incidents pei'sonnels et acccs.soires
est (lelinitiNcmcnt close, et M. Lcdru-RoUin a la parole |K)ur
présenter sa jiisliticalion,
M. Leihu-Kollin n'est certainement pas un grand ora-
teur, tant s'en faut, mais il a la fougue, l'action , le tempé-
rament oratoires. Aoilii plusieurs fois depuis quelques se-
maines qu'on lui fournit en l'amenant sur le terrain brûlant
le la (leleiise pei-oiiiielle I oeea-ion d'un trés véritable
siicecs lue arme ilelen-i\e ipu lin e-t familière . c'est , je
ne (lirai |i:is 1 iiiNccIne, mais 1 all,n|iie Aujourd'huisurlout,
il rciii|iloie avec élan , avec hardiesse, 11 ne daigne pas si-
ilisenlper, — Ce ipi il a fait, dit-il, il la fait pour fonder et
poiirsanvei' la Hcpiililhpie . ce que ses adversaires ne veu-
lent pascompreiidic on ce ipi ils ne lui p irdonnent pas.
Il s'att,i(|iie a I op|Hi-iih)ii d\ ii;.-liipieile-,li\-huit années,
lui reproche son iiideei-niii , s,i -lialeuie iiie-ipiineel sa sté-
rilité d'idées. Il termine par i c lui leiix coup de boutoir con-
tre le chef de 1 ancienne gain lie prc-idenl de la commission
den(|iiêle. au milieu des .ipplaiidissenients du coté gauche
de lAssemblée. Le cote droit attend, dit-on . une autre oc-
casion pour rcndrejusticeà la fécondité d'idées de la Répu-
bliipie rouge.
.M. Ledru-Rollin a été passionné el. .sinon mesuré, du
moins sobre , ce dont il faut lui savoir gré. Il a tenu à peine
une heure la tribune.
On n'en pmitdire autant ileM. Louis Blanc. Dans la pre-
mière partie de son discours . ipii a dure plus de trois heu-
res , il prend a tâche de jusiilier ses doctrines du Luxem-
bourg, iviiudie l'organisation des mouvenienlsdes 1" mars
et lu avril, et deliiiit , dans un langage fini remarquable
assuréiiicnl , mais entaché de rhétorique, les trois dogmes .
les trois svmboles du calechisnie républicain, ipii peut-être
n'avaientquefaire encelle ihe-e I il.erle Igalité, Frater-
nité, Cela estions, lent , de. i.im.iioii e .l.l.iie sur un Ion
emphatiipie elsur un diap.i/oii tr..p el.'ve iiiii épuise l'ora-
teur et l(> force a kmI.iiiici de lauditoire , déjii fatigue lui-
même , une suspeii-ion .1' -e.ince,
1 adeuxiemepaitiede son discoui-s, quiouvrcii luiilheures
la séance de nuit, (^sl inliniiuent supérieuri' il la première.
Autant .M. Louis Blanc a été nuageux et ampoulé à son
début , autant il devient iirecis. clair, faïuilieret naturel lors-
ipie, suivant l'enipiélepied ii pi(Hl, il rehileavec une modéra-
lion , une mesure ipiisont . très malheureusemeul pour lui ,
peu habiluellesii cet orateur, les accus4itionsdirigirsconln'
lui. Son argmnenlalion est spécieuse: sa narration habile el
digne de liiistorien des Dix Années. Il la fait suivriMliine
C(iiirli> et véhémente péroraison où. proleslanl desim inno-
cence, il se défend avec énergie de la lAchelé insigne qu'il
v eût eu pour lui a ne pas prendre part dans une insur-
rection il laquelle il aurait pous-siv
l'ne vive agitation succihIc il ce discours dont la set-onde
moitié a plusieui-s fois obtenu l'adhésion pr(>siiiie unanime
ih' rAssemblee.
Apres un court débat entre M. Trclat el l'oralour au su-
jet do propos très grave de M. Kniile Thomas, signalé par
le rapport d enquête , le pivsidcnl donne la parole au ri-
lineii Caussidiere.
I.'ex-piefel de police dechiffi'e avec peine . mais dune
voix forte el avec beaucoup d'accentuation el de vivacité ,
le volumineux manuscrit pour la rédaction duquel un ami
la aidé , dit-il . mais (lui est en («riieson œuviv . on même
temps (pi il est la lidèle expn^ssion de sa |>eusée. Bien que
ce plaidover habile porte en elTel la trace d'une main exer-
cée, il n'a pas la luoilié du succi-s qu'oblienl M. CiUissidièn-
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
lui-même, iiiterronipanldc temps en temps sa lecture pour
lancer, avec ce naturel et cette bonhomie admirables qui
lui valaient, il y a deux mois à peine, tant de suffrages
iourjcois; pour lancer, dis-je, quelqu'un de ces traits im-
prévus, quelqu'une de ces boutades piquantes et naives
qui font de lui un type si tranché, un orateur à part, po-
pulaire, excenlrii|U('' et (pielquefois si émouvant. 11 y a cer-
tainement |ibis que (lu ilrinusu dans ces improvisations
parlielles; abrupte et iui|)nipre, le mot n'est pas toujours
parl;inentaire; mais ce dclaut devient une qualité même
et les cffels surtout abondent d'autant plus qu'ils ont l'air
d'être moins cherchés. — Citoyens, sécrie-t-d dans une de
ces expansions oratoires, j'ai amené ici ma mère et mes
sœurs : elles sont l,\-!iaul (pii m écoulent. Je n'aurais pas
le cœur de mentir devant elles. Citoyens, vous devez me
croire. » — Et plus loin « —Je n'ai' cependant pas fait
les circulaires de .M. Jules Kavre, et, quand j'ai été préfet
de police, bien que je n'eusse aucune force régulière, on
n'est pourtant pas venu me faire des barricades contre mon
nez! » (Ceci pour M. Trouvé-Chauvel). —Explosion d'hi-
larité
Il est minuit lorsque M. Caussidière quitte la tribune.
M. Marrast annonce alors une cmnmunicalion impor-
tante. Il donne lecture it l'Assemblée d'un réquisitoire de
M. Corne, demandant l'autorisation ilediri,L;er des poursui-
tes contre Louis Blanc et Caussidière. Cette communication
soulève dans la salle une véritable tempête. La gauche se
récrie et proteste en masse. Les spectateurs des tribunes ,
dont aucun n'a quitté la place , cni:.!!;!')!! eux-mêmes de vifs
collo(|ues Le tumulte est e|i(in\;Mii,il.|r On se croirait re-
porté a soixante ans en arnnr in iilcme Convention, dans
la nuit du .31 mai, ou celle du N llierniidor. — C'est un as-
sassinat politique! s'écrie une voie forte partie de la Mon-
tagne.—C'est un coupde tliéàlre! dil M. Bac.
Cette dernière parole appelle a la tribune M. le général
Cavaignac. Il proteste, de ce ton net et incisif qui lui est
propre, contre l'idée de surprise et l'intention d'effet dra-
matique que l'on semble inqiuter au gouvernement. 11 ne
fait point difficulté de déclarer que la demande en autori-
sation de poursuites, fondée non sur l'enquête, mais sur
l'instruction judiciaire qui a marché concurremment, a
l'entier assentiment du pouvoir exécutif, et il émet le vœu
que la Chambre statue sans désemparer sur la demande.
Celte déclaration ferme et catégorique impressionne vive-
ment l'Assemblée.
Auparavant M. Lagrange a prononcé , d'une voix lugubre
comme un tocsin d'alarme ou un glas funèbre, une longue
harangue à peu près inintelligible, que l'Assemblée a inter-
rompue par ses cris d'impatience.
Une discussion animée, une sorte de mêlée s'engage sur
le point de savoir si l'incident judiciaire sera vidé en lais-
sant son cours il la question politique. M. Ledru-RoUin se
prononce dans ce sens. M. Louis Blanc demande qu'il y
aitjonction. M. Gontays, un orateur intrépide qui se cram-
ponne il la tribune, malgré les violents orages qu'excitent
ses mercuriales maladroites à l'Assemblée, désire savoir où
sont les preuves recueillies par l'instruction judiciaire. M. le
président du conseil fait connaître qu'elles sont dans l'en-
quête même.
.M l'Inron demande une contre-en(|uête sur les menées
bnii:i|i;iiii-ir- li'';;iti!iiislcs, (irléanistcs, (pii ne paraissent pas
avdir |ii'i-("cu|ii' l;i l'iiiuiiiissiiin. Il Uni ressortir ce qu'a de
graM.' une mesure qui tendrait a dépouiller de leur inviola-
bilité deux représentants dans la situation actuelle du pays,
sous létatde siège dont l'effet serait de les rendre justicia-
bles des conseils de guerre, et, à la rigueur, même passi-
bles (l'une transportation sans jugement.
M Ma ne explique qu'en effet l'autorisation des poursuites
aurait cette portée en ce qui touche les journées de juin ,
mais non laltentaldu 13 mai.
On entend encore plusieurs fois MM. Louis Blanc et Caus-
sidière. Le premier a la voix brisée et presque éteinte, mais
l'énergie ne paraît faire défaut ni il l'un ni à l'autre.
M. Caussidière allègue que l'on n'a pas pris connaissance
des nombreuses pièces énoncées dans sa défense et déposées
sur le bureau du président. Il produit, dans quelques paro-
les, qui cette fois sont bien exclusivement do lui, un grand
effet sur l'Assemblée.
Enfin , M. Dupin propose et fait adopter l'ordre du jour
sur la question politique. Ainsi éhuiile et allégé, le débat
marche rapidement à une solution pii''viie M. Marie de-
mande il son tour et fait déclarer l'urgence de la discussion
et du vote sur le réciuisitoire de M. Corne. Le scrutin de
division récl;i;iié donne, sur 7.S,") votans, 493 voix pour l'ur-
gence conire 2!I2 qui la rejettent.
Ce résultat produit une sensation profonde. 11 est trois
heures et demie du matin. M. Bac monte il la tribune et pré-
sente, à l'aide des notes recueillies par lui, dit-il , comme
membre de la commission chargée d'examiner la première
demande de poursuite la défense de Louis Blanc. Il s acquitte
de cette tâche avec talent sans doute: mais il ne fait guère
que reproduire ce que M. Louis Blanc lui-même a développé
avec plus de force quelques heures auparavant. Son plai-
doyer—car c'est le mol — tient beaucoup plus de l'avocat
que de l'orateur politique. Cependant, l'Assemblée subit la
réaction des émotions et des fatigues de la journée cl de la
nuit. A une surexcitation fébrile ont succédé un silence
qnasi-lélhargiqueetun accablement profond BciiocoiiiMl'l lo-
norables membres succombent ii un somiiKil im'>isiililr ,
et l'épidémie narcotique sévit parliculièrcmcnt sur li'> Imiics
(lu i:oiiviTnement où elle ch'it les yeux de M Bastide, courlx^
la l,ii;:i' tête (le M. Goudchaux et ne respecte même pas
cclli'dii -[•iicnd Cavaignac.
Un se reveille pour voter après le discours de M. Bac, et
trois scrutins de di\ isinn ont lieu consécutivement. Le pre-
mier autorise, ii une majorité de bOi voix contre 2S2, les
poursuites contre M. Louis Blanc. Le second accorde , en ce
qui touche M. Caussidière, l'autorisation de poursuite rela-
tive aux événements du 13 mai , :i une majorité de 477 vo-
tants contre 2G8. Mais, avantqu'il y soit procédé, M. Flocon
a prononcé, en faveur de celui qu'il appelle son vieil ami
de vingt années, son coreligionnaire politique et son coni-
■pagnon d'infortune, quelques paroles chaleureuses et biiMi
senliesqui obliennent l'adhésion sympathique de l'auditoire,
et ne sont assurément pas sans iniUience sur le sort de Vc\-
préfet de police ; car, consultée sur la demande en autori-
sation de poursuite relative aux événements de juin , et
dont l'effet serait de livrer les représentants poursuivis
aux commissions militaires , l'Assemblée décide il une très-
forte majorité ([u'elle ne donne pas l'autorisation demandée.
Entre CCS deux .scrutins, nous ne remarquons pas sans sur-
prisr M CiMis^idicii.' s'approchant du banc des ministres et
y (jiisiiit lonj:ti'mps, du ton en apparence le plus calme ,
avec io clu'l du pouvoir exécutif.
M. Marrast, qui a présidé les débats avec énergie et ta-
lent, a voté ostensiblement contre cette deuxième demande
en autorisation de poursuite. Le gouvernement a voté pour.
11 ne l'a fait , dit-on , que sur le vœu formel de M. Corne qui
aurait déclaré au momentdu vote , qu'il ne voulait pas être
abandonné commeMM. Landrin et Portails et donnerait sa
démission , si le ministère ne soutenait pas ses deux de-
mandes.
Il est six heures du matin , lorsque le président proclame
le n'siillat du dernier vote, et un jour triste et gris éclaire
enlin le ternie de cette formidable séance qui n'a pas eu de
pré'ci'dont etiiui n'aura pasdesuite, souhaitons-le du moins
ardemment, dans les annales parlementaires de ce siècle!
AUX ABONNES.
Quelques-uns de nos abonnés ont mal compris l'avis par
lequel nous accordons il titre de prime les Journées illus-
trées de la Révolution de 1848 à ceux qui s'abornent ou
qui renouvelleront leur abonnement pour un an jusqu'au
13 septembre. Il est bien entendu que le renouvellement
doit partir de l'époque où finit l'abonnement en cours de
service et non du l"' septembre, ce qui ferait double em-
ploi avec l'abonnement courant. Ainsi tousceux qui s'abon-
nent pour un an , quel que soit le départ de l'abonnement
ou du ren(iii\('ll('ment d abonnement, ce départ fùt-il il un
an de date, reccNront les lllll livraisons de^ Journées i//«s-
Irées de la Itéculution de 1848, sans augmentation de prix
|iour Paris et sans autre augmentation pour les déparle-
menlsipie les frais d'affranchissement du volume des Jour-
nées illustrées , affranchissement calculé ;i 5 francs les lOU
livraisons.
Cela veut dire que l'abonnement ou le renouvellement
doivent être faits dès aujourd'hui, ou d'ici au 13 septembre,
pour donner droit il la prime.
Plusieur abonnés qui ont renouvelé pour un an à partir
d'août I84'J, terme d'expiration de leur abonnement cou-
rant , l'ont compris ainsi. Ils ont reçu , en conséquence, les
livraisons en vente et recevront les suivantes à mesure
qu'elles paraîtront.
Courrier «le Paris.
Les menus propos de cette semaine ne devraient pas être
de notre domaine puisqu'ils appartiennent il la politique. On
retrouvait partout cet hôte inévitable; il était assis à tous
les foyers, il s'associait aux occupations les plus contradic-
toires et parlait toutes les langues, depuis le jargon raffiné
dessalons et l'argot de la Bourse jusqu'à ce beau langage
parlementaire qui a toujours fleuri à l'ex-Palais-Bourbon.
Voici cependant l'Opéra ressuscité d'entre les morts , qui ,
dans la même soirée, vous joue un mystère à grand or-
chestre et danse un nouveau ballet. « Mais , dites-vous en
secouant la tête, voyez la belle surprise et que l'Opéra a
bien pris son temps , comme si nous n'avions pas nos affai-
res, c'cst-ii-dire l'enquête! » C'est donc en vain que la pré-
sente quinzaine aura vu s'accomplir les petits faits les plus
piquants par la-propos ou l'imprévu ; il quoi bon , par
ex(Mnpl(> , sdcc'uper de l'ouverture de la chasse, des prix de
peinture ou de la prochaine élection académique? A vrai
dire, cette quinzaine n'aura eu qu'un jour, le jour de l'en-
quête, et qu'un seul genre d'illustrations, les illustrations
de l'enquête.
Un nom principalement s'est trouvé dans toutes les bou-
ches , un iiom auquel le caprice public attachait récemment
encore l'auréole de la popularité. Maison France, a dit quel-
qu'un qui s'y conn;ii,^-.;(il Kicholieu, le cardinal) , rien ne
tient bon, et nulle ( liii>c n Cst jamais prévue. QuoHe idée
nous ferons-nous doue iuijoiird hui de M. Caussidière, puis-
que c'est de lui qu'il s'agit ici et de son portrait 1 M. Caus-
sidière est-il un républicain de la bonne trempe , une âme
antique et sto'i'(iue ? ou bien ne faut-il voir on lui qu'un
brouillon et qu'un factieux ? Il n'a probalilrnu'nt hi('/((c ni
cet excès d'honneur ni cette indiijiiilé. ( l ili < i|i'li;il... pro-
chains auront pour but d'éclairer le ni\-lnv jnsi|u ,i pré-
H'iit inexplicable (le la conduite de ICx |iiclcl ilc police.
l'iHir le iiioiiiciil . M ('aussdicic reste il nos; eux un vrai ar-
h-li'cii i('\olution . uni' ligure originale, un type Dans ce
tl■.lll|i^o(l Ic^ iinilalioii- sont si tort en Migiic. ou celui-cisinge
Danton, on n-\ .luin tiiinclicdii Rolicspicnc , on presqiie
tous chercliciit il iniiiM'iit uiiocaniiiigiiolc a l(Mirtailk-(hins
le vestiaire des grands et pelils lioniiiic- ronges du pa.ssé,
M. Caussidière n'a emprunté la driidiini' lie |"'i-onne. Pendant
quatre mois, ses manières, son ;Hliiriiiisii,iiioii, ses maximes
et sa conduite ont été pour les l'.iii.-icii- une grande nou-
veauté Groshomme, partant bon homme , comme dit Cer-
vantes , doué d'un bon sens trivial et d'une éloquence pitto-
resque, faisant de l'ordre ii sa manière dans le désordre
universel, il aspirait, ce semble, au titre de Ma itre-Iacques
de la IU''piil)liipie et d'arbitre de tous les dillcnnils ; il eût
fait vdIoiiliiTS (le la capitale un grand caiiiir,'t on Io partis
se fussent allablés pour le salut'de la iialne II ( si cMilent
d'ailleurs (|ue sa politique procédait du système liomœnpa-
tliique et opposait le mal au mal ; jamais empirique ne pro-
céda plus résolument dans ses cures, et il semblait attendre
chaipie démêlé de la rue comme une crisesalutaire. Les plus
sé\ eii's vont jusqu'il dire que l'habitude des conspirations
lui avait eijlevé la faculté de les discerner, et qu'en vrai fa-
naliipiede son art il eût fait volontiers de In police jusqu'au
bout et, comme le juste d llonicc, >ur l.s riiiiio du monde.
Il va sans dire que les esiints lii(Mi\i'ill;iiil< et lcsani('s(''(pii-
tables n'ont pas oublié les serxices rendus a notre Paris
dans ses jours sombres, et il font des vœux pour que
l'ancien édile sorte de l'accusation la conscience nette et
l'honneur sauf.
Du portrait d'une célébrité nous passons à un tableau de
mœurs qui n'est plus vis.lile maintenant que dans nos co-
lonnes ; le Marrhé aux journaux. Cet échange, vente ou
trafic se faisait l'autre jour encore dans la rue Montmartre,
et plus d'un Parisien a pu s'en procurer le spectacle, en
allant voir lever l'aurore , sur la grande ligne des boule-
vards. Le jour où nous nous passâmes cette fantaisie , une
fraîche brise matinale soufflait sur la chaussée, et de rares
oiseaux chantaient joyeusement dans les arbres encore plus
rares de la porte Montmartre. Tout à coup des cris confus
retentirent, c'était nos industriels qui procédaient au libre
échange sur l'asphalte; c'était l'esprit parisien, toute sa
pass;(ui et ses colères qui circulaient de main en main.
coiiiiiii' lii salade et les caroltcs au iiKirclié voisin. Il y avait
des liottesdc Conslilulionnel et des cliarretées do Preise. I!
fallait voir ces feuilles encore humides , s'échappant du
grand panier ou elles seront bientôt replongées, et heurtant
dans les airs leurs arguments et leurs Premiers-Paris.
Quant il notre deuxième ou troisième dessin ( car aujour-
d'hui nous ne sommes guère que montreurs de figures et
descripteurs de vignettes), il vous représente une distribu-
lion de vivres faite par les soldats de la garnison aux indi-
gents de Paris. Que si vous demandez dans quel temps et
dans quel endroit de la ville cette bonne œuvre a eu lieu,
nous répondrons que c'est une scène de tous les jours, vi-
sible il toutes les heures et qui se passe partout où il y a
un camp et des soldats dans Paris. La bienfaisance et l'es-
prit d'humanité qui anime le soldat français sont aussi
écliitants que sa valeur ; on en pourrait citer mille preuves,
une seule suffira : Depuis la mise en état de siège, la gar-
nison de Paris distribue journellement aux indigents trois
mille soupes et autant de livres de pain Le pauvre , l'in-
firme , l'éclopé , la veuve , l'ouvrier sans travail , ont leur
part du brouet militaire et sont les convives de cette provi-
dence en tunique et en képi, Charlet, dont le cravon fin el
rieur a si bien peint les pelilcs misères des gens de guerre,
a oublié leur (-('itésplendide et bienfaisant. Personne encore
n'a songé, peintre on iiutre , a reproduire un camp volant
dans son déshabillé, tel ipidn peut le voir aujourd'hui aux
quatre points cardinaux de la ville. .Quchpics heures pas-
sées au quai Morland ou sur l'esplanade des Invalides don-
nent une haute idée des efl'ets de l'association quand elle
est dirigée par la discipline. La nécessité oblige le soldat ii
se faire successivement, comme Robinson dans son île, ter-
rassier, maçon, tailleur, cuisinier et le reste Cette main
qui manie le fusil et l'outil, s'assouplit dans l'occasion et se
prête aux travaux d'aiguille. Mais ce n'est rien encore que
le vivre et le couvert , le soldat n'est pas seulement archi-
tecte de sa demeure, il en devient le décorateur; des or-
nements guerriers ii tendance patriotique sont disposés
dans l'intérieur de ces cloches de toile. Le sol a beau être
ingrat et tenir de l'espèce marécageuse , comme au quai
Morland, notre troupier saura bien en venir à bout. Tout ii
l'heure il se faisait architecte, le voilà maintenant jardinier
et ingénieur hydraulique. Il connaît l'art de créer les jar-
dins, et c'est un rival de Fourret, qui au besoin inventerait
une autre machine de Marly , seulement ils ont placé une
sentinelle pour garder leur cascade ; un brave trop altéré
la boirait en un clin d'œil.
Le soldat français est sensible et galant, et l'on peut dire
qu'il a toutes les mémoires du cœur. Le beau sexe obtient
ses hommages, et plusduii glori(;ux mort a emporté ses re-
grets. Le terre-plein de rarchevêché est émaillé de petits
Jardinets en forme de (» m ulus. consacrés aux citoyens moris
pour l'ordre et la Repulili(pie. Les intervalles des tentes
figurent des rues ipii tontes rappellent des noms héroïques :
rue Duoivier, rue Bréa, rue Négrier. Jocrisse deniiinderait
assurément où le soldat prend le temps de ne rien faiire,
car sans compter l'exercice, les revues, les appels, la cui-
sine, l'astiquage du fourniment et les autres menues occu-
pations dont nous avons parlé , au camp tout s'importe et
s'exporte à dos do héros. Cet ouvrier , ce chaussetiier, ce •
guerrier, cet ingénieur et ce poète (car notre brave fiiit
aussi des verses) , dans l'occasion il se charge , comme un
dromadaire, de bois , de paille , de cordes , de matelas , de
biscuit, de gibernes et de haricots.
Une vie si pleine et si chargée aboutit parfois à la mé-
lancolie et même au suicide. Dans son dernier rapport sur
la situation de la capitale et des environs , M. le préfet de
police enregistre dix suicides . au iioiiibre d('S(piels figurent
trois soldats. L'un doux, dans un ('"crit p(.islhujiie, ;( donné
pour cause détcrmiiiiinti' de sa mort, ce motif bizarre cl
touchant : Il ii\ait (lis|>osé de cinq francs qui ne lui appar-
tiMiaiciit point, et on il trouvé sur luila somme même moins
(pi[|(|iics siiiis' S ('lier la vie pour un déficit de cinquante
(■(■iiiiiiic^ , js~iiréinent le point d'honneur ne saurait être
■ iichimIIi' encore plus lugubre et qui a causé une pé-
emotion , c'est la mort fatale de M, de Sainte-Alde-
pnll-
Cl
nibic
\
l.'II.IXSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
|i;him'i!S suiiout lu
ciii' ils perdent en
liiili'ur el un piTc.
llllr ilr IVlM|iirli'
iluiii' i^ninilc ri'iiiiliili
(Ir l;i luiljil
l;ill,iiiv
qui i)0.-le
■i la ban-
!■ notaire
•nd'hon-
Sa con-
'•- et mis
u\ grief»
(iuinie si
l'irp res-
niv .l'un
(liM'rillr.-imnl.nn-, Ir- ,i,,t;uiv>
'I;' l'.ins se di.-<lin,^u. lient pur
I iiiic;;iilé de leur vie , ils se
l"'i n:iii'iit à recevoir les acies
'1 .1 ;^iirder leurs notes, de
sorte que les charges avaient
peu de valeur. Aujourd'hui
que le prix en est fort élevé,
les mêmes mal -intentionnés
prétendent que les salaires
du travail ne suflisent plus ii
i'ajiiiétit do quelques-uns, et
i|u ils demandent à la spécu-
ialiim ce qu'elle leur reprend
ensuite.
Nous voici au spectacle pour
nous égayer. Life Mobilier de
Rosine ( théâtre Montansier )
ciui.^liiiii' une de ces joyeuses
('\li'iiv;ii^an(i'.-i dont on ne sau-
rait rendre tuinptc, mais dont
on rit toujours. Les amours de
Uosine el de Bougival , tel est
l'épisode dans sa plus concise
expression; il a servi et servira
encore il loiites sortes de vau-
deville.s (j-pendani voici quel-
que I liii-p (Je moiIl^ prévu, la
Rosine de laventure est une
grisede quasi -sentimentale,
et Bougival veut l'épouser , la
doter et faire son bonlicurpour
la rareté du fait. Un oncle
inapprécialjle souscrit au pro-
jet et le cautionne de sa
bourse. Mais quel motif rend
cet oncle aussi coulant sur un
article où les oncles ne le
sniii -mil..' M Ijadjnguel a
lu 1.- .)/,/,(,,,-., de /'urw, elle
pii-.iiii.iLMMliUi^'oletlerasé-
duit parsim invraisemblance.
I.'m rêve à la Rigolelte, c'est
Uosine (lui va le réaliser; seu-
lement il veut en juger de fi»u.
(In n ot pas oticle de conlé-
dii' [iiMir rien. Je vais voir el
adniiriT. se dit le lîadinguel,
le nidliiliiM- de Kit;olette . la
vertu de liij;nleHe, la cham-
liii'llr it liiinocence de Rigo-
li'ltc H(i-iii(_. a du cœur, mais
SI v( riu ii'(..,t pasdesplusraf-
linri-: le chapeau de rosière
la roiUrrail mal, toute Rosine
qii illr i-t ; en outre son mo-
liilirj a disparu dans une Icm-
péle de créances et de Créan-
ciers Ou reirouver le fauteuil
alisent, la lalile de palissan-
dre et la harpe de Rigolelte?
.\ lors voici venir l'e.xtravagant
et le fantastique , mais on
n'en rira que davantage. Trois
créanciers , trois barbons .
amoureux évincés par Rosine,
remplaceront le mobilier que
détientleurindéliealesse.Lun
s'arrondit en table, l'autre se
disloque en fauteuil el le troi-
sième sera pincé sous forme
de harpe. Badinguel est ravi ,
puis il découvre la ruse, puis
il pardonne, et tout s'arrange
a merveille pour Rosine cl l'es
a'ilrcs inléressi's
ans l'h.Smii vcIp do l'hiolule» Beaiix-AiU, He^, léconip.-nscs ace.
iircti^ps MU .irlislcs |i.
L'ILLUSTHATION. .lOUP.XAL IMYCnSEL.
L^ .M;ucliO ;,ii\ Junr.L.ux, ru.; .M..iilnia. L.
()
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
;i(Jmi' ,
iiiiMit i:i
a l(Mii I ,
c\>l .Mirlirl (|l
V(lll;i n.i>;iiiLV
lini^M'nl, M lu
(|y lanl il|. Iirll
Mais voici bion une autre historiette : Deux Anges gar-
diens, c'est Baptiste qui eanlc Michel et Micliel (jui \cil|c
^ur Haptisle. I c premier i>l un ;iiii;r ii.ipu ri jhuIIIm , I.'m'-
cond a (les rides et porte nion^hn lies nuirnij I ari;;c Miel»'!
a trop l)u , ou qu'il n'a plu., de quoi iii;iiiLTr mi ipie la
l^outte le travaille, c'est l'ange Baptiste ipii mihI :, ^.,u si-
cours, il la déroliée, en catimini, l'ange d >on I m iii.ni dc-
ii:eiireiit parraileiiieiit invisililes et iil l'hil .le iii\,|(mc'
aillM.lr lî;i|ill^lr Inl-.pi,. le ilialllc Mil l:i ,„;,hH|,r .-...' t a
se> linii-.r<, il -,■ \,,ii iloili.li' , renie, lelc pur >uii anv'e
U'arilifo ,1 li.nlir L'M-:' I ,r Ni; sliTC (1 luvrii 1 1 C iic, ,M ■ cl !,.>,.-
MJr M Michel n'avait uni^ lillc i|iii' li.ipiiste
lii\ -lilv et qu'un lion poliivli:i~-c miimmIc-
il c>l jeune, vif, pattes vernies , lunneli. cii
^ielie~,i I ;ivenant, si bien ipie .Mulieliiie muik
leinlier diin instant il l'aiilrc (hiiis les an^'cs
e iiiiiieni , i-'est Baptiste qui délie le seilucteoi-
Il pK leiMl rroiser le ter pour .sa lille, et puis
s ipii s expliquent , qui pleiiicnl et qui s'em-
jiie .Michiline, s'iiUeiiiliis,aiit au récit
cliNiis, re-arde ISaplisIe ;i\,.e inlT'ièl,
piMsdeliiileiei Mil v,i |,inil)our ballaiil a I ,Miienr el de I a-
moiir au iiiari;ii:e II \ a\aiL Ijcaucoupde ninmle ,i .es deux
noirs de ItoMiie el de Micheline, et les théâtres ont deci-
ilémeiU retrouvé leurs habitués, leurs beaux jours et de
lionnes recettes,
.\inside la lilléraliire qui se réveille, des écrivains qui
reprennent coiiia-e el ili> Irujiix seneir, (|iii leprennenl
faveur. Histoire, rnniaiis. i ilsel ie\el,ii hm, |,n|iiii|iiis
le prochain aiil,,inlie neiis n-ene d ,ii;i e:il,le~ siiriMises ci
d'eMvIlelilesleelnres NMs|e > dm les ,1 Mellles relluni-
""■e,-,. leiiielteiil ,, lieiuic, el h, , imI |s,, I „ ,„ i,„ ,,1-lant
""'"■"■'''• -■ri'"'!'' ■•' > ■Icndrc ;uee l.^s ,„ mes |i;,ei|i,|nes
et ^ es, le -e, pliis uni îles ,^„r,i n I s |l,in, c 1 I e ;..ra l.de le-
vée il,' l.ni„.|,e,. ,1,1 e-l lie, lieux (le M, Il lieeellnr lin pre-
iniei- laii^' les (,|iis eliKpii'iils ,.| les plus halnles , <■ Vsi a\oir
noninié AI. Thiers, dont le li\ re De ta Proinirlr ^rr.i piihlio
prochainement. En répondant avec le plus len.ilile empivs-
senient ii l'ajmel de ses collègues des .scieiK es inmales et
|iolili(pies, 1 ilhislre ('crivain croyait n'écrire qu'un livre do
circoiislance, mais par le fait il aura doté son pays d'un
miiiiniliipie ouvrage de |ilus. Ces bonnes fortunes de l'im-
pro\isalion n'arrivent jamais qu'aux orateurs émincnts et
qu'aux ('rrivains d'élite.
Voila ipid nons reste tout juste assez d'espace pour une
iiicnlion (lui aurait du trouver sa place plus haut et que
iiécessile hi plus grande de CCS vignettes, il s'agit de la dis-
IrilmlKin des prix et médailles faite aux élév(''s (le l'école
des beaux-aris dimanche dernier, La distinction des tra-
vaux couronm'^sajoutait ii l'éclat de la solennité , et VIllus-
tralion ne l'ait (lu'acquiltersa dette en la célébrant.
EieKres il'iiit Flâneur.
VIH,
.1 oïdi PEUT seuvir use nr.i.NE,
lia-s
la lidiii
'pelle
ll-p,.e
Ils, iiHuisienr leDirecteur.— piii-
iiis mil resser il moi , — je ne -
I ii'iiil ,li' desin siiieetenient que la KraiN e
bien que le c/™,r /;,/», H,-; el je m,, seii- InnI
|irendre noire i',n i .-i.niHl.uiei' -nliiteiiienl ml
('•(■rire, c'est que j ai du devoir lain. a I étranger un jietil
Miyage. dontje, vais avoir l'honneur devons eiitrelenir. Du
reste , j'ai constaté avec plaisir, ii mon reloiir. que vos
ahoniii''s avaient piolet gagné ipie perdu a mon absence
Un critique plus ingénieux , pins savant et plus malin ipie
moi les a tenus au courant, beaucoup mieux cpie je n'au-
rais su le faire , de toutes les publications — livres, bro-
chures et journaux — qui ont vu lejuurdepuis mon d'é|iart
.le I en remercie en reprenant aujourd'hui possession de
mes ancienni\s fondions : mais j'ai ponrlant un reprochi. a
loi adresser : il a iilui-e ,1e si, si,|„.,.iei ,ie: ,i je me deniande
avec anxiété si ces i-iniN ,1 l'Iih^ ,{ii il ,, «i iii,iL'iiili,nii'nieii|
ri:'gali'>sseconlcntcr,iiil ,ks,,Miiais,l,' iiuui niodest,' ordinal le.
Vous \oiis i,ip|K'liv -ans doute ([u'apres le I,"; mai je
m elais réliigi,' a .'^.nnll loud , me promettant bien de passer
eu ,\niéri(pie I,- j,,iii m, ii M, T. Thoré deviendrai! piV'si-
ili'iit dune répnhliipie ipielconque, A la suite des événe-
inenlsdi^jnin, bien iiue je n'eus.se Jilus aucune crainte de
\oir kylrapeau rouge remplacer le (Iraiieaii tricolore , j'ai
cmigir Je me suisemliaripié, non pour les filats-Unis.'mais
pour r,\nglelerre. Loin de moi la pensée de (piilter sans
rclour ma chère Krance. Je l'aimais d'autant plus (pie je la
cro\ais — ainsi (pic je la crois encore — di'^harrassée pour
un cerlain nombre d'ann(''es(le.ses plus grands eniieiiii,s Je
n a\ ais pas non plus l'inlenlion de conspiivr conire la liépu-
bliqiie ipi cil,' s'e-l donni'.e, on pour[iarler pins exad, 'nient
M" elleaac'pl,,' , mais qu'elle préicnd c,,nser\ er el iprello
coiisciMMa, |,.l,-|,ei,. .■,„i,in,.|efiliisrali,winel, 1,'pliis pisie,
lephisloil ii'plusprogressiti'l h' pins liaii, pull,., en ienips
"rilin.mv d,' le.i- lis gonvernemenls possiblivs Monbulelad
'"'" I''"' 1'"' 'leesl pour cela ,pii' je me permels lie vous
di nd'iiiiier ,l,is|,.nicnl affligé et indigne de ivl ordre qu'on
laisait a Paris avec du désordre, selon l'expression du ci-
toyen Canssidiere, j'eus l'idi'-e d'aller éludier a Londres
celte admirable organisation de la police ihml j axais ap-
précie par moi-même, quelipies anm'-es auparavant , les
merveilleux résultais. Je pensais— et peiil-élre n'avais-je
pislorl — ipi il y avail quelip». chose ii apprendre en l'ait
il ■suivie et lU- Iran.piilliié pnhliquesde l'autre coté du i\('-
Iroil; mais, iioiirélri' xerilalilement utile, ce travail que je
me proposais il enireprendre demandait à être nouveau et
complet. Il me fallait m'attaclier il recueillir lesdocumonls
aiillMiiliiines ipii, bien qu'iniprinu'-s, ne sont pas dans le
coiimiiii e II -mloiil l'aire causer sur une série de ques-
li'i'i- |H, |i,ii,r-(|iielqiies-iins des hommes tiratiques les plus
n,iiipel,.iils(ii-,-,.||,.,|,,ul,l,.e,„i,lili,„ij,. ,„■ puiu,iis|„,sla
remplir sim-, die im-n, ,m qniiph' -mie ,| m, , ;,, ,,,i,.re
"ni,ael Jeiiiiidi,^-;Miimi,;m,mnv,,immi-l,v,|,.|,, |„-|„.,,
lui deinaiid.ml iimi p,is un,' im-simi, mais ,les li'llivs,lr re-
commandai i, m ipii me hjiirms,seiil les mmensile compleler
dans un inli'rèl gi'iieial des l'iudes parlii-'iiliens, pour les-
quelles je ne sollicitais irailleuis aucune espèce de ii'coni-
jiense, Kiirt et lier de mes intentions, je bravai les odieux
venis d'ouest qui couvraient toute la surface (lu déiroit
d'une éciune nienai.'anle, et, a peine débarqué a I''olki'sl,ine,
,-eMllu,led'N llMinereli lini\,llll unelepmise 1, m,, ,„',|,||,,„'
Huit jours s,'emil,'rent. el celle repiuLs,' ,i,i,' les i.xcu,i,i.x-
(;i:s du (i/i'uii déchu se fussent empressées de m'eiivo\er,
malgré mes opinions politiques, moi réiiiMieainûc. la i-c'Ule,
éprouxe depuis dix-huit ans, je ne l'obtins pas du citoxen
ministre ii ipii je m clais adcssi' telle est la vie, mon-
sieur le Directeur, pi, in,' de I - 1 /.a rreries et de déceptions.
Toutefois, n'allez pas cmin'ipie ce soit par esprit (le ven-
geance que j'aie pris, pmii siijel de ma lellre, ce Ihi'uie
un peu vieux de r»^/i7c' dis rrnirs (Jii, l,pi,' mauvais tour
que me joue la liepiihlnpii' liam.aise, ji' ne cesserai jamais
de l'aimer, de la défendre et de la louer!
Je suis rt-publicuin, je le suis, je veux l'èlrel
Si j'essaie de vous démontrer que. dans l'état actuel de
l'Europe, une reine — remarquez, je vous iirie. (pie je ne
parlepasdesrois— peut encore être bonne a quelque cho.sè;
c'esl nimpieiiienl parce que, ;;race a riniliri,'iii,r,' peu |„,|ié
d,' M le miiiislri'de lajnsliee, je nai dirent, tI pendant
mon séjour a Londres aucune xeiilé nuuxelle utile a ré-
véler,
La capitale de la Grande-Bretagne est toujours la ville
que vous connaissez el ([ue tous vos abonnés connaissent.
J'en ferais une description détaillée que je n'apprendrais
rien à personne. Elle ne m'a pas semblé toutefois aussi
brillante, aussi animée et aussi gaie que messieurs les
r(\ictionnaires se plaisent ii la re[irésentor. On s'y ennuie
tout autant que par le passé; faut-il l'avouer, on s'y ennuie
davantage, caria misère, la fumée, la boue ont augmenté
avec la popnhilion,,'! ces rues, si monotonemcnt semblables,
qui ne conimencenl el ne linisse.nt pas, La misère surtout
\ (lexienl de plus en pins alTieiise. Pour moi, je ne puis pas
la conlempler un insliiiil s.ms iMie ému jusqu'aux larmes.
Les classes paiiMvs pi.i ,ii-si'iil d miliinl plus mi.si'rablcs en
.\iigldem' qu elles -enl xdii, - ix.id, nient coiiime les clas-
ses riches, L hoii ipii inendii'a un haliilit et un pantalon
noirs, la reiinne qui tend la main porte un chapeau, un
chtile, et quelipiefius une rulie a lalbalas. liien de plus usé
de plus rapièce, de plus troue, de plus crasseux, de plus
boueux, de plus froid, de plus mouille, de plus |iiiaiil, de
plus navrant a voir que ces deliris informes de xélemènls
de luxe, ipii l'xidemnieiil niml pus ,'li' l'ails pmir les mal-
hdiieiixilonl ils, a, II,. m a i,,' |i s memlnvs dedi.iinés
le corps ,Mii,ii:_.ri .li.m.iis, „,„,, jumiii, |r i, eiiUie: ,ii une
se,. ne eiiraderisliipie a laquelle le hasard me lit as.sisler la
\eill,. ,1,. mon départ.
(. diiii \m diiiianche, vers quatre heures, La pluie venait
pm exila, irdiuaiie de suspendre sa descente sur la terre;
el i|ii,.l,pii.s eliauils laMiiis (le soleil, perçant une couche
e|i,iisse ,1e mi.igi's gris, ,.ssiiMiient commc par enchante-
nidil les ilallis des Imiimis lleja de brillants équipages
se dirigeaient de tous coli's \,.|s l,.s parcs. En ce mo-
ment je me promenais peiisd d snliLni,. dans l'un des plus
beaux ipiarticrs de la jeun,. \ dl,. ,1,. Imsiiis le tour de Bel-
graxe-Square, Les arbres du |iii,li,, sicmnii, ni surlei;azim
louflu leurs feuilles i iiisseliinl.s ,1 cm. ,i diimi déniants,
les oiseaux d'alenlmii- leliiiMiiini en l',i/ Il, ml sur le lur'f
humid,', les n,.||is ,1,.- ,.,i,l„.i||,.s, a'iH.lIle leelMldle,.- s,.
;'';'l''''""''"l I"' "■'d-im leurs liges ln,pln.|es ,1 ,seiii-
blaieiil-,.||.,i,ei,|,.|,i\n,.| 11,11, 1-1. mil,, ,|,s,,,,,ui, .111, -,.|emi..s
'■''II'' '■'■■-""'■,■ in,.sp,.re.'il,.|a n.iliire coi,l,a-lail ,sinL.ii-
lidcinent axi'c I asp.'cl .les palaisipii liordi'iil celle place que
l.i legilmiile lr.ine,,ise a n'udii.. laineuse depuis .piel.pies
années. l'Iiis le ciel devenait riant, plus 1(« oiseaux se
montraient joxeux, plus les arbres et les fleurs se rani-
maient , plus cette grande et monotone ligne d'habitations
princiér(>s, semblait triste et morte l'as une léle aux fené-
Ires-pasmcm,. I.s p.iii- x..„\ |i,.|v s duii enfant ciiri.-iix
derrière h's gLees I, ,.|i,|,i,.ii,. ,„, | usie,',' ..e .slupide l\ran
ijui Irouxe a I „n,l|..,s ,|es su|,'ls si ,s..,\il,.s. le defeni'l. et
joiit le monde obéit, surtout dans ce ipiarlier L'cneral de
aristocratie et de la sottise. Aucunexoix liiunaiiie ne trou-
blait le silence solennel de cet insipide di'sert On eût cru
voir une rang e de riches tombeaux bâtis a des distances
égales sur un modèle iiniforine par le même architecte
Certes, je n enviais |ias le sort des haliitanls de ces iiiau-
solecjs, mais je me demandais comment et pourquoi il v
a (Micorc en Anijlotcrre un nombre si considérable de
forlunes cnlossahîs, car, pour vivre dans de pareilles di^
meures, il faut avoir au moins un revenu ceuluiile du
mien, . '
Tout il coup un cri de douleur vint me tirer de ma rêve-
rie. Je hnai la tête et je \is ii cinquante pas de moi, s'a-
van(,'ant a ma rencontre, un homme et deux enf.mts. Nous
nous lûmes hienlot rapjiroches. Cet homme devait être tout
jeune encore. .Mais sa ligure était si maigre, si pAle, si f,i-
li II e: sa barbe si longue et si inculte, son dos si
voûte qii on 1 eût pris pour un vieillard. Il n'avait ni sou-
liei-sni bas. Son pantalon, compose de vinït morceaux de
(Irapdecimh.ursdilïerentes, el d,'elii,piet,''a l,i partie in-
f rieure. ne ten,iit ,pie p,,r un seul hmilon a un xieux in.ir-
coau de corde ipii lui ser\ait de bretelles. Quelques lam-
beaux de grosse toile pendants sur ses l'paules en guise de
chemise laissaient voir, entre leurs trou» aussi larees que
nombreux , une poitrine os.seuse et enfoncée , d'un blanc
mat. Les manches de son habit de drap noir trop étroit
pour sa taille et usé jus<iu'ii la coriJe , dépassaient ii [leine
ses coudes. Enlin son chapeau était trop [lercé pour mettre
sa tête il l'abri de la pluie. .Mais ce qui me frappa surtout
ce fut sa phvsionomie. A xoir ses yeux on sentait que cet
h.iinm,' s.iulli.iit iion-si'ulenieul de la faim el du froid, mais
d allieus..s douleurs moral,- Jamais regard plus expressif
eimi II . i,nt,.,i,pla!l ;uec l'amour
. la plu-, le,. 1,1,1, nie un.'pc.tilehlle
il liii.iil d.ii,- .-..-bi,,.-. et dont la
e m axait plus vivemei,
' plus tendre et l'anxii't
e trois ans environ qu
■le inanimée n'|
,.| ,1
d.il.i
\diail--il reii.iil'e.i l„
même pas sans doute
semblait égarée, tant sa d
derrière lui une autre pi li
de haillons, et (pii. -e, ,,,i,
poussait des crisd,. .1. - -i
be,au s'agiter le ]
onepauh-. Une calèche, remplii!
idants paré'S, venait de la ren-
Imirdiinc rue. Était-elle morte : la
,■ .' il lignorait encore. 11 ne savait
il len, portait ain.si, tant sa raison
était profonde 11 traînait
le six ans au plus , vêtue
Il aux pans de son habit.
- p.'iiis pieds nus avaient
pe— iiil.. sur les dalles encore
(h^nlelle, d
pas une n
épouvantable misère
mouillées, elle ne pouvait pas suivre son malheureux père
courant au hasard c(mmie un insensé...
Pas un ('qiiipage ne s'arrêta ; pas une porte ne s'ouvrit ;
pas un xisiig,. Iiiimiii,, ne -e n, outra sous les ritleaux de
- .1, ,1 - palais de Belgrave-Square;
n,' ji I., une faible aumône il ccIIjî
Ah .' .si jetais peintre, monsieur,
quel tableau instructif et saisissant je voudrais faire avec
une pareille scène qui ré'sume si bien la situation actuelle
de ci^tte Angleterre trop riche el trop pauvre pour pou-
voir subsister longtemps encore telle qu elle est eonstiluée
aujourd'hui.
Mais je vous ai promis — je ne l'oublie point— de vous
prouver l'utilité des reines. Tout chemin mène à Rome dit
le proverbe. Un peu de jiatience, vous arriverez au but sans
vous en douter.
Il y avait jadis ii Londres un théâtre qu'on ap|X!lail de-
puis l'avènement au troue de mademois^'lle Victoria , Her s
Mnjesly théâtre, ou en français : Théâtre de Sa Majesté. Ce
théâtre, situé dans le plus beau quartier, avait pour direc-
teur un nommé Liimley ipii y faisait chanter et danser
pcniliiul h, s.iis.in. c'est-a-dire (l'avril à août, les chanteurs
et Ils .l,,,,,se,,,, , l.s cantatrices et les danseuses les plus
jusl.iiienl I ,.|,.|,,i.s du monde entier. On assure que ce com-
merce lui rapportait bon an mal an d'assez jolis bénéiiciv.
Ce qui est po.sitif, c'est c|ues'il ne s'enrichissait pas, il ne
ruinait pei-sonne ; au contraire, il faisait vivre autour de
lui plus de deux mille individus ,|e i,,,,i ,me et dy tout sexe
Par malheiirpoursonélaMi- ,iii.,ii |, - iheoriesdeM, Louis
Blanc en inaliere de conçu i, m , .1, m ni alors ou complè-
tement inconiiiies ou mal .Diupi.M^s. ou même définitive-
ment jugées en .\ngleti-rrc comme elles le sont aujour(J'hui
en France. .Suit jalousie , soit avidité , soit mauv ais carac-
tère , soit tout autre motif, un jour les principaux artistes
de M. Lumiey, refusant de travailler plus longtemps a l'c-
dilice déjii fort élevé de s;i fortune . l'onder('nl ;i peu de
distance et il grands frais, un théâtre rival. L'entreprise
était téméraire; elle fut mal dirigée: elle échoua. La pre-
mière société ne vi'icut qu'une année De son côté le theiltii-
de la reine, plus heureux cependant ipie le royal Italian
opéra, f'oiei>t (larilcn. vit diminuer considérabl eut le
nomliredesesabonnés Ils allaient peut-être mourir tous les
deux d'une mort tragique, ou se voir obliges pour ranimer
leur existence menacée, d'adopter , il leirr grand rcgrol, le
sxstème Louis Blanc , lorsque deux cvènemenls imprévus
les sauvèrent en même temps. L'un s'assura la possession
ex( lusive d'une cantatrice sui'^doise et qui obtint un
de ces succès d'engouement (pie les artistes vocaux ne
jieuvent guère espérer qu'il Londres. L'autre fut relevé.
s,,,,|.^n,i p.,, un j,',i,ii' amateur ipii ne sivait trop comment
. i,,|ile\ ,., se,, Il ,,i|.s .1 1,1, e iiiagiiih.iue fortune ipie son père
1,11 .,\,,,1 l,\^,,e,. I,,, ,1, -,,nt actiielleuient lescho.ses? Hi>-
l.,> ' je snis Inr.i' d eu convenir : un seul théâtre ci'it pros-
père, deux thi'^àtres huit de niau\aist>s affaires. Je ne con-
nais pas le budget de M. I.umh'y , mais. nial,gi-c Jennv
l.iuil. d'après l'opinion publiipie, ses Recettes doivent rester
inférieures ii ses dépenses, pliant il M. de La Field . le d-
recteur de t'ovent (iardcn. il perdra cette anni'e plus de
KMI,OIIO fr L'(-\ènemeut m'a donné raison . s'écrierait ici
M. bonis HIanc s'il nie faisait riioniieur de me lire, el 11
reciterait pour la millième hiis, a ipii voudrai! recoulcr. s;i
plus éloquente iniprov isalioii sur les épouvantables consi''-
quences de cette abominable coucurnuice qu'il antipalhe,
— comme dit Arnal — si conlialemeul. et il ne manquerait
pas d entonner en terminant ce refrain trop connu : Écra-
sons l'infilme !
Je n'éprouve pas. je vous l'avoue rranchenient . mon-
si(>ur, une vive ten(lres,se pour la concurrence: elle abus:'
(pieliiuefois au detrimeni du pauvre de la libellé illiniiliH'
qu'on lui lais.se : aussi la verrais-je avec plaisir soumis;' en
certains cas. par des lois s vères. il une prudence e! a une
(liarité (ju'elle n'a pas toujours , qu'elle n'aura peul-iHrx'
jamais, j'en conviens, si on l'abandonne trop ii ellesmênie
Mais il ne faut pas ipie des esprits mal faits ou des larlufes
sociaux, comme celui dontje me propose de vous esipiisser
un jour le périrai! s'armenl de si\i ern'ui-s et de ses fautes
poura!!a(pier ses bienfads Ilaisiuinonsdoncun peu sj'rieuse-
nient . nionsii^iir rorg.iiiisaleiir du travail . monsieur l'ami
du peuple en général et de m.ssieurs les garçons tailleurs en
parliculier: et ii'cherchons ensemble, s'il vousplail. il ipii.
dans cet exemple qui m Occupe, a pu nuire Vinfame! Pour
moi . j'ai beau rellecliir et compter, j'arrive il une conclu-
sion lolalemeiit opposis- il la vi'itn-, el au lieu de crier :
Mort ù lu coneurreiiccjo crie : Vive Ut concurrence. Quels
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEF,,
iTsullats n-t-cUe produits, en effet? Elle a ruiné ou emptVhé
lie s'cnrifliir, et encore le fait n'est pas iirouvé , deu>c spé-
t'ulntevirs ou deux sociétés d'aclinnnnin's , sortes de gens
i|ui . vous ne iiouvez le nier, viiii> in-piiinl pou d'intérêt.
La ih'slruclion d'un capital no \nii- ,i jjiii.n- ipieje sache,
arraché une larme. Je ne pleur('r;ii lu^imn plus liss"omim'S
d'argent imprudrinm^'iil ili^^ipi'c-, djiis co lioiix cnln'-
prises . car , en di'liiiiliM' , i'llc< cmi ilnniif de r.iis;incr cl
du pain à un noiulin- mr.ilriihiMi' il nuvricis : c-li.iiilcois,
danseurs, chorislos, ligin'.iuls, iiiu.-;irH'ns, pi'niln'<, ilcrora-
tours , machinistes, lampisUs. cn|iisli's. onipliiycs , mar-
chands de billets, sans faire culrcr en ligne lic coinplc tous
Iej3 frais de toilette, de voilure, de souper, etc.. (pi'ellesont
rendus nécessaires, sans parler enfin des progrés dont l'art
musical , l'art chovégraphique et ceux qui en dépendent
l.^ur sont redevables.
Ces réiloxions je les siumettais à l'un de mes compa-
triotes , qui avait eu la générosité de me gratifier d'.un bil-
let pour le théâtre royal italien. Nous étions assis à côté
l'un do l'autre dans deux excellentes stalles du prix de
'î") francs, trop élevé ])Our ma bourse. On venait de termi-
ner le qu.ilriêim' .nie îles //«(/ucnots. Jamais cette belle
musiqiir ne m :i\;iii ciii^r .iiii.int de plaisir, car jamais je
ne l'jN.iis ciilrndiii cvrciiirr |iarun orchestre aussi nom-
breux ri ,iii-;-,i |iarlail, des cliœurs aussi exercés, des ar-
tisli'.- ;iii-.-i Mi|ii'rieurs. Tamburini représentait le comte de
Siiiil-lii ,. \ jlfiitine et Raoul avaient pour interprètes ma-
dame r.iidiiir Viardot et il signer Mario. Nourrit lui-même
cl iiiad.iiiuij.'ll,! Falc'on étaient surpassés. A la chute du
rideau l;i salle entière séUiit levée en poussant des accla-
niiiliniiN livni'liques et en battant des mains avoe un l'n-
IImii- ,i-:ii ■ d;llicile à décrire. Tnns (,„< II, m, ni d \";ilci,iiii,.
a\;m'iii rir iililiL'csde reparaître [hmii- ivrrMnr dr nniucinx
Ici L'ii 1,^;- iU\ l'admiration puliliqur M.iifnu:' \iard.i|
surtout, qui a\ ait atteint dans ce rôle, connue cantatrice et
connue actrice, les dernières limites de l'art, s'était vue en
un instant entourée de plus de bouquets qu'elle n'en pou-
vait pnrlrr: mais aussi cpieson jeu et son chant avaient été
sublimes : cpicls gestes vrais! quelles poses irréprochables!
quelle [ihysiiinoniie saisissante et variée! quelle voix
étendue, forte, habile et sûre! quels aiicnls tour ii tour
tendres et déchirants ! et comme .Miirm ra\:iii bien secon-
dée! avec quelle âme et quel limlne i.i\;ssant il s'était
écrié : Tu m'ami, lorsque . pour lenq.ièclier de courir il la
mort , elle lui avait fait , dans un moment d'égarement et
de désespoir, l'aveu de son amour.
— Heureux , disais-je a mon voisin , le maestro qui crée
do pareils chefs-d'œuvre, et qui trouve de tels iiiler|irelrs ,
et bénie soit l'ennemie mortelle du citoyen Louis Bl.inc.
Sans la concurrence, les //«^«eKotiou.Gii't'i/oHfiHi, comme
dit le livret italien , n'auraient jamais été si parfaitement
exécutés.
— Vous n'avez raison qu'à demi, me répondit-il ; ajou-
tez et sans la reine.
— Sans la reine ! ni'écriai-je. Qu'a-t-elle à faire dans
une p.iivillc aM'iilurr? ir i-nnais (|u rlli' nr s'iiccupait pas
plu? du IhiMlic i|ii.' du u..u\riiHiiiriii .sr- Iniici nms princi-
pales niTdii-isleul-cMcs pa- ,i |iiol(>lrr cliaque annéecon-
tre la dociniiede .Mallhus, au risque de se faire adorer par
le citoyen l'riiudliun ?
— Détrompez-vous, la concurrence a créé ce IhéAtre;
pour y attirer les habilui'S du llu aire de la Reine , elle l'a
décore, trop richemenl |iriil-riii : illr a réunion une seule
troupe les artistes les plii.s riiuncnls et les plus chers du
monde entier, ii part Jenny I nul ; elle dépense résolument
des milli ts de livres sterling dont elle sait bien qu'elle ne
retirera jamais un penny, aucun sacrifice d'argent ne lui
coûte, ma-s il est d'autres sacrifices auxquels elle ne se fût
jamais décidée si la reine ne les lui eût pas imposés.
— Je ne vous comprends pas.
— La chose est bien simple cependant. A votre air étonné
je devine que vous n'avez jamais connu d'artistes un peu
intimement.
— Jamais.
— Tant mieux pour vous alors, car
Ils ne sont pas, liébs 1 ce que le public pense.
la plupart n'ont pas pi us de mérite que les chiens qui jouent
aux dominos, ou les perroquets ([ui demandent il déjeûner,
— bien entendu que je ne parle pas des exceptions. On
leur a appris tout petits il souffler i ans un inslrunient ii
vent, ou il chanter un air quelconque , et tant qu'ils ont
assez d'haleine ilsrépétent la même irrdu incipulilr-qu'ils
Svuit d'eu .ippriMiiIre une autre. Il \ ;i i|iirli|u(- ,ii,ii,t^ l'.n i^
s'en èlail eiignué outre mesure; iiiai- il c.iminiiMr ,i r-vim-
nailre et a aiijiirerson erreur. — L) .lillcm- 1(< ,ir(;-ii^ luil
en gi''iieral ledefaut, fort grave il mon aM> dVh i' rL'Mi,|rs.
L'haliiliidc qu'ils roniractent forccmeiil d.- Imi I ,i- àgo
de changer sans cesse de résidence les eiiipèclie do luijiier
des r.'lalions durables; ils n'ont ni patrie ni amis; ils ne
s'intéressent un peu vivement (|u'ii leur larynx ou à leur
cornet il ]iiston. Mais ils sont surlout envieux et jaloux...
Il allait achever ce portrait i]u il iniiinienriiit je le lui re-
prochai, avec trop d'animalion pmiM'Iie ju^le. lorsque le
rideau se releva. Nous ap|ilaiiiliiue> .uee d aiiiapil plus de
transport le trio du cinipiieme acte que madame Viardot .
Mario et Marini, — un excellent Marcel que MM. Dupon-
chel et Roipieplan devraient engager a l'tlpéra , — avaient
rivalisé de perfection. Quelques minutes après, nous rega-
gnions , bras dessus bras dessous , notre domicile.
— Quelle belle représentation , disais-je il mon compa-
triote, j'iui g.Miliiai loii^ieiiips le souvenir ! Ce sont lii de
— Vous pi m I M,- 11. I 1. Il Mm... Il s procurer il Paris si vous
y reloiirnez. Madame Viaidni diiil débuter il l'Opéra, dans
les Hiigiicnols, la prunier,' s. Miiaine de uoven:bre.
— Je le sais, mais Mario...
— Vous aurez Roger qui le vaut bien :
— Le croyez-vous!
— J'en ai eu la preuve il y a ileux jours.
— Oii donc?
— -\u Ihéàtre d'où nous sortons. Mario . qui avait chanté
le oi.udi et qui vient de chanter ce soir, n'a pas voulu chan-
ter le jeudi , parce que c'était le bénéfice de madame Viar-
dot. Mario est un adorable lénor, un joli gariam et le re-
jeton d'une bonne famille. .M.iij il a en' le ili.dlieiir de faire
il Paris une mauvaise ((lunais.s'iiiee ipii I en! raine dans bien
des fautes. Il cousent tnip ïiiu\ent a s' dire m.il.iile ipiarnl
on ne veut p.i, ipid .e pnrle liieii Jeudi , pur exemple il a
refusé di^elmnler pivlexi.inl un euriiiienieul .snliil dan- ie<-
poird'eniperlier lelieneliee aiimince, qui pnini.'ll.iil d être
aussi brillant que lucratif. Mais il avait compté sans Roger
et la galanterie française. Bien qu'il n'eût pas eu le temps de
répéter un seul morceau. Roger consentit il se charger du
rôlede liaiiul Sun-; l,i seule londiliim ipi'il h' chanterliit en
Irine.iis Nui dexiairmenl a eli. récompensé. Accueilli dès
^'""'""■' nMvnep.irnne triple s;il\c d'applanilissements,
il a (iliteiin il, MIS tous ses muive.inx un suive- de bon au-
gure pi.nr Klpera de Pans el qui uihtiim .M.nmde tousses
maux de gerge Inliirs Le |)ublic .i diiniii' ee Miir-lii ii l'im-
poli et ca|iricieux Italien une leçon qu il n oubliera pas de
sitôt , je vous en réponds. Il est vrai qu'elle était bien mé-
ritée.
— Mais vous ne m'avez pas encore appris, lui dis-jo. pour-
quoi je dois remercier la reine Victoria du plaisir que j'ai
éprouvé ce soir-lk.
— Vous allez le savoir. Le théiilre royal italien a
éli' l'nndi' el il e-i siiulenu [lardes spéenliilenis.iiiLdais mi
benelire excliisit de.- Il.diens ipii ferment la m.iinni,'. de sa
li-iiiipe el qni enmpii.-enl une ligue tellement furie ipic .son
chef, il signer Costa, le directeur suprême de la musique
s'est réservé dans son traité le droit fabuleux d'interdire
aux bailleurs de fonds l'entrée de leur salle pendant les
répétitions Or civile ligue entasse intrigues sur intrigues,
pour empêcher de chanter les artistes français engagés
par les direeleurs el pour s'opposer il l'exécution des ôu-
vragi's ri;iiii:m> el .dlemands I,lii>lnire sirivle de l;i saisim
delSiXMili-edilM.iil -il,:_.lllirlvilH'lll.-lirleri,liiplede me-,
SlellIS el de Iiir-Jimr- le- ,iili-|es enrnles S.lll.s la bannière
Cii-la .liisipi au mois d août leurs machinations eurent un
plein -II, , e- Kii^cr, qui avait un engagement de 30.000 fr..
n a\,iil ( haiile que trois fois. Les Huguenots, pour lesquels
ou depensiil de- sommes considérables et qui promettaient
a inadanie \ i.inliil un de .-es plus grands trionqihes, étaient
toujours retailles snii- un prelexte ou sous un autre. Peu
imporlail .i la liijiie h mmiilianle que la direction se ruinât
Elle avait des ;i|ipiHnlemi.|il- lises el earaiilis: il'aillcurs
elle eût sacnlie penl-eliv -r- mlirels ,i la -alislaclion de
son amourqiruiire el a s,i jiiliiu-ie Tel l'iaii fei.n des choses
lorsque la reine intervint l'nl-re de-ir irenienilreun chef-
d'œuvre admirablement exe, uie liii-i ee-|i,iii d être agréa-
ble il son royal époux, en pnili'LiMiil Li mii-iqiie allemande
Victoria I'" déclara que tel jimr. ,i telle liem ■ . elle \ oulait as-
sister à la première represintalinn de n- l'i;, molli depuis
si Jongtemps promis Tonle icsi-taure ileMuiail nuilile. On
se si.umit Cene-I |m- que l,i reini I le dinil d'exiger
i|U"iired,il ,1 -,in iMprne m, pi,ii\,i,l lui de-nlieir , car.'en
matière de L'nuvememenl. elle n exeire p.is plus d'autorité
que la dernière de.-,- -iijeiie- M,,i- m, i|i,,,ii,v abandonné
par la reine I eût ele ieili,iie il p.i,- r.mslocratie qui
seule peut le faire \ i\ le, m,ii- un iipera que la reine a dai-
gné ili-iier , deiiiandir. écouler, applaudir, toutel'Angle-
terre lii-liinn.dile- lellessont les mœurs de ce singulier pays
— se I nul iililigee de venir l'entendre au plus vite; à la se-
conde represeiil.iliiui le prix des placesfiit triplé, et lesama-
leurs — si on peut diinner ce lilre a de pareils (ajurtisans —
se dispulaieul les billels aux eneheies .. Depuis, lesuccèsa
loujours éliTi-iiis-mil:- cèliiii eesi.irla .seplieine représen-
tation:—un Il eu ,1 j ;iis \ii un pareil a I, 1res; mais ne
1 allribuez pi- iiiiiqiiemnil ,i l,i l,e,inle de lu musique, il la
perfection de l'execuliuu , an talent merxedleiix des prin-
cipaux artistes; la sottise des sperlalem- en ,i -;i liunne
part; et si vous croyez devoir un p ■n de n rniiun— imee a
la concurrence, remerciez-en aussi, iiininie |e|ier-i-le n muis
le recommander, lu.id.ime Alherl , en -nnirninl ,iM',' mm
qu'une reine, inè eiuisliluliiuiiielle peiii eneme iviiilivde
temps à autre quelque- ser\ lees.iL'Ie.il.le- ,1 -e- sn|els ,■
Il était deux heiinsdn imilin Nmi- iinii- -epariimes, et,
avant de nienilnr je medilai liuiLmenienl -nr les plus
graves ipie.-; H III- de Imilie |ii.liii,|iie M.h- IIh'u me garde
de viin- enirelenir j.iiiim- de p.iivil- siijels D'ailleurs, j'ai
'''"piele dejii ,-nr le In r; le me- \ i,i,-iiis. Agréez donc pour
aai"oril liiii . i -iriii le liireeleur, 1 .issurance de la con-
sidération de votre tout di'voué
Le viEcx Flâneur.
itlbuni JMoIflo-Valaqiie.
(4"^ .\rlicle.)
BIJOCX ET VASES d'oH MASSIF TBOCVÉS EX VAl.AClllE.
A lieux ou trois lieues N.-O. de liouzéo , petite ville de
la principauté de Valachie, située sur la route de Bucliarest
il Ja— X lies p.iy siins. Irav.iillanl à la terre, dans un champ
il mi-eiiie de 1 les inimLiLines tenant à la chaîne des
(',ar|i:illie-. hiMueieni , Ml- Il lindel838,pliisieursobjels
qui, offrant d alimd i|nel,|ne i e-islauce â leurs inslrumenls
de travail, dureni l'ti,' e\ii ni- de la terre avec leurs mains.
Bien loin, cependant . ileMiiipmnner la valeur matériellede
ces objets qui. ii la première vue, leur parurent être d'un
métal ordinaire , ils vendirent à vil prix le plus massif de
tous à une de ces troupes de Bohémiens faisant mélier de
ferrer les chevaux et d étamer le cuivre.
Ot ustensile, qu'à sa forme on aurait pu prendre pour
une grande aiguière, fut fendu à coniis de haches par les
nou\eaux acipiérenrs : ils voulurent ainsi s'assurer et de la
nature du métal et de l'usage qu'ils en pourraient faire.
La terre qui le recouvrait, sa configuration, ot plus encore
la modicité du prix auquel il leur avait été concédé, éloi-
gnerent Inul a l'ait de leur esprit , même après qu'ils curent
piiHede ,1 relie opération , la pensée que ce vase fût d'un
aiilie mii.d que de plomb ou d'étain.
Il l'iiiit d'ur pur!... ainsi que les autres objets trouvés
el i|iii demeurèrent en la possession des inventeurs.
Itieniiit informé de tous ces détails , le gouvernement va-
liipie senquit du lieu où ces précieux objets avaient été
lioines el lii innnédiatemcnt procédera l'arrestation des
p,i\-,ins el l!i il lemiens mêlés aux moindres circonstances de
celle deriiuverle.
Les objets qu'ils livrèrent se composaient de deux an-
neaux ou grands cercles, un hausse-col, quatre lampes dont
une représente un faucon, deux, lafigured'lris, laquatriènw
n'a pas d'ornement figuré, trois vases à anses, un plateau
et une patère ou coupe très évasée.
Sur un des anneaux se trouvait une inscription qui de-
vait être d'un indice précieux : bien qu'elle fût on langue
grecque, chacun dans lesdeux principautés eut la modestie
de se déclarer incompétent pour la .solution de l'énigme. A
Vienne même, où la reproduction lithographique exacte du
dessin de ces objets a été ordonnée, l'inscription a été dé-
clarée, ainsi que les objets eux-mêmes , d'une origine im-
|inssible il délerininer.
Imil 1 lioiiiienr delà description et de l'explication de ces
l'ie. leiix iilijeis était destiné à l'un dos membres les plus
ilL-liiigui> de lAcadémie des inscriptions et belles-lettres a
Paris, M. Berger de Xivrey.
Ayant reçu , par M. Saint-Marc Girardin , communication
d une lettre détaillée que lui écrivait sur cet intéressant
sujet M. Adolphe Billecocq. agent et consul général de France
dans les principautés du Danube, M. Berger de Xivrey ne
tarda pas, à l'admiration et à la plus grande reconnaissance
du pa\s moldo-valaque tout entier, à donner, des objets
que liiMis reproduisons ici, la description, puis l'explication
si lenliliqiie qui suivent :
Luniement du cou, s'élargissant au milieu comme nos
hausse-cols, est doublé d'une plaque d'or unie, et la partie
de dessus, en or travaillé à jour, a les vides remplis avec
des pierres taillées (cristal de roche ou pâtes vitreuses co-
lorées). La portion du cercle disposée pour s'adapter der-
rière la nuque est jointe à celle du devant par des charniè-
res et n'est qu'en or uni. Les dimensions de cet ornement
sont : diamètre supérieur, ISO millimètres; inférieur, 200-
épaisseur, 2. Il pèse 15/32 de livre de Leipsig. '
Les rfcH.r anneaux sont tout unis , ouverts et susceptibles
de se fermer par l'insertion du crochet d'une desextrémitcif
dans une on\eilureou porte d'agrafe, pratiquée à l'autre
bout. L, un de ces grands anneaux est strié à ses extrémi-
tés : c'est celui qui porte l'inscription dont je parierai tout
à l'heure. Son diamètre est de 153 millimètres: son épais-
seur de 12; il pèse I livre 7/IG. L'autre plus large, mais
beaiieiiiip plus mince (diamètre, 170inilliinèt.; épaisseur 5
1,,.-,, J\,'i;i ,io i;,.,.n ' '^ ' "
e. IKj millimètres; petit diamètre, 165. A la base,
id diamètre, 00; petit diamètre, 75. La profondeur esi,
05 millimètres; l'épaisseur, d'un millimètre. Il pèse 5
pesé ii.'v'lii de livre.
La coupe est un vase octogone, en forme de coriieille et
un peu ovale, le bord supérieur prolongi' a plal aux deux
extrémités, de manière à offrir un poinid .qipni .mx p.illes
de deux léopards qui s'élancent du bas de hi eoiqie et for-
ment ainsi les anses. Un des deux léopards manque. Le
corps du vase est travaillé à jour par di\erses combinai-
sons de vides carrés et ovales, remplis par des pierres di^
crislal de nulle et de pâtes vitreuses colorées, qui s'en-
clià-seni ,111 iiHiumde rainures pratiquées dans l'or Les
diineiL-iiin- de eelte coupe sont ; à l'ouverture, grand dia-
melre. \Ki millimètres; petit diamètre, 165. A la base
.rand -i-— •■'— "" --■-■ ^- -■ — - - •
de 10.1
:;'32.
le dernier des ustensiles reproduit par ces dessins est de
lieauemip le plus intéressant ; car il ne représente pas moins
de dix-lluit figures humaines. C'estune patère, ou coupe
lie- r\,i-ee. avec cette particularité qu'au milieu de l.i con-
eiiMle -e trouve, comme omp/iafos, une peliie slalue doi-
assi-e I 1 loule en relief, qui sert di' boiilnn piinrenlexer ce
plal parle indien La m,'. ili-pn-iiinn exi-le dan- quel-
ques-uns de nus ii-leii-des de Lilile |i,iiir le ser\ ire du des-
sert. La petite si. due a--i-e e-l une ligure de teninie, leii.int
des deux mains un pot ou amphore sans anses. A ses pieds
dans un cercle intérieur, sont représentés en bas-reliefs six
animaux fort mal figurés, et un homme couché près d'eux.
Le cercle du bord est orné deuninlenieiils, de feuillnL'es et
de perles. Le cercle intcrmeili.nre lie.iiirniip plus Im-e qui'
les deux autres, contient seize liLmie- delmni iiuii--i-:,s a
peu pies ilég.ile ^randem-el uii'l mieiil i.m de repiv-nh'r
desdieux du p,iLMni-iiie piii ail eMilimie li.iix de re- lemn.-
Sonlniie-:uerl,i,h|,,nni|epi,-,,.n p,.,, p,,.- n riinliqiie: les
autres s pin- nu mnin- \nlnes lliin- d lllin manière inii
rappelle (le-di-pn-ilinn-eiinnii. '-lie I ,,M ,ii,rie„. I :,,||,. |„.||e,
paiere a un dnid.le l 1 en nr uni Le- ilinieiisinns -mil ■
dlailiel|-e2.'.7 imllllnelles , ep,,i-eii|- •_> || pe,e i lis ,-es ,'i/:!2
élanl sépare de I,, pehie-l ■.l.iqii.'llepe-el.-i.dSdelivre
Elle est IhiiiledeT,'. mdlimel n- l;ii-e il,-J(l L'or v a on
milliiuelrç il epai.-,-rur. Nous ne saxons pas si les 'li;;ures
sont ciselées ou repoussées au marteau.
Les monuments dont on peut ainsi apprécier l'exécution
par (a^s dessins, offrent un singulier contraste entre l'ex-
Iréme paiiMeli' du shledeeel art et la richesse du mêlai
En i.qi|ii,irli,iiil ces deux eiir, instances et Celle dis sujets
liaieiis ie|ire.-eiili's sur le dernier vase que nous venons di>
décrire, on est embarrassé d'assigner une époque à la fa-
brication de ces ustensiles. On ne peut guère supposerquils
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
IJijoiixctv.isesiror massirdetrivailb
furent, commo l'admirahlo colluclioii des vasîs
ilari^Hnl il» lii'niny, les uslcn.'îik'.s sacns il'uii ti>m-
|ile païen, onlouLs par la (lé\<it,ion déediiragée d'un
des dernior.s prôtrna du paganisme. Car alors, le
slyle de l'ornementation aoeuserait une épofjue de
l'art antérieur à la complète décadence Ce qui
restait encore de pn'Tieii\ fl;iii> h'- tciii|ilr. p.iî
lor.sque le oliristi;iiii^iiir cniiMiinii
remontait à une rpnipir licj.i jh
iiisme n'aurait pu m numIu t;iiic i
cet ancien culte à une é]iuqiie di
prononcée que celle des scnlpliiii
>iles: e.ir il est inipossilile d'iillrilii
nph,
rine.iirecli
Irop rere,,
.lipl„,ne>,.
'm ce st\'le
idilM
(- I..
Illlill V
iioniKri
nllerlinl
(les I
fort 1
Mtl"
r 1,1 repre-eiihilion
es. En rapprocliant
lie la matière, ne
pie ae si riches us-
Constantinople vers
tensili^s auraient été faliriqué
le sixième ou le se|itième siècle . pour être donné
vn présent a quelque chef de ces liordes barbare
ipii des rives du Danube piuis>;iieiil lems exeiuxion
inenai.anles juscju a peu
Hom(\ ? Li'S dons offerts i'
,ivnnt tout s;ilisr,iiiv lein
lai , et enuieinr Innp-p
coup d'ornriiiinl- .M;ll^
Hyzance eut eoiiii
nation en livrant
de (li>l,i
di'
elle
MIT jMiliie p;ir le prix du mé-
- pljiir ,1 liMirsyeux parbeau-
l^ 1,1 (leNoliiin des césars de
lie- ^riiluilement une i^'ofa-
ces barbaies méer(''aTUs des
sculplures a sujc^ts elu-éliens, sujels ({tu d ailleurs
S'seraieni mal aeeonle^ :.\er le^ -eene- dnrjie ,)ii
devaieni sans doiiler IrjuiiT ilr, \,i-r~ d .,r iilTeiN
pi'Ul-élri' a ipielque rhrl ,lr- lliin- mi d- Ammts
l)n V lit donc représenter de.> li^iav> iii\liiul(ii;iques
ou Ton reconnaît l'intention de rappeler tant bien
que mal certain.^ attributs caractéristiques. C'est
priili;dil;'iucnt Apollon qui joue dr l,i Kiv. N piune
qui e-l ^k-isis.sur un poisson. Mar> qn ■ !■•. mum.- nne
eollede mailles et qui lient une e-peecl,. tn>udeou
d(^ massue . etc.
(Juant aux caractères gravé.s sur un des ijrands
anneaux, s'il faut y lire la salutation bachique kœré
kœ piné, prends et bois!... (la première syllabe de
ce dernier mot étant écrite par un epsilon el un
i.ota, genre de faute qui se rencontre même dans
de fort b(
|ilace de l'i'l
sur la eon,
,1 e\pli(|uer,>
sanl qu,. r
mer, el.iil |
is), on doit avouer que la
iipiien sérail bien plus naturelle
-m ((' cercle ou anneau; mais
lii/:irn^ circonstance, en suppo-
' ! fer-
LatourdeColtzi,bdtiealiu(,in i. tparles>u lo deCharlesXII.d'aprèsJI.Doussault.
pu peut s ouvrir et se I
s anses de [ilusieurs coupes
lit manière à pouvoir offrir
toutes ens?mble au donataire les coupes d'un cer-
tain nondire do convives.
L.l TOI B DF. r.OLTZ.\ , B.ITIF. PA» LES Sl'KDUIS
-\ IIlT.HAnEST.
iN etait-ee point assez pour cette terre il la fois si
riehe el si iidortunée , ipielle fût succes.-ivement dc^
venue, [lendani tant de siècles, le lieu détape de
toutes les inva^iiuis funnidabli'S dnnl nous avons
p:irli''? Nnii , lin ilr-lin m'x.t,. liML'ird.iit |)0Ur der-
nière epreiiM' ivllc(|ni , HMn |,|n--Hn- r.ispeel brute
de l;i ciiriqui'le, ni;ii> Inrn -hii- le \..\l- île la confra-
lernite religieuse, devrait bientôt résumer tous les
iinillirurs !
Nous \oulons parler du protectorat des Russes.
Celait en vain que, des l'année 1709, un im-
mortel Suédois était venu placer sa valeureuse épce
en travers du chemin qui menait de Moscou a Con-
stanlinoplo ; aux instincts fauves des hordes niosco-
viles deuieuréis affamées et sanglantes .sur le
c hamp de baladle de Pultawa. une terre promise
s était tout-a-cou]) révélée abondante et prochaine:
et de même (pic la baguette miraculeuse de Moïse
avait ouvert devant Us Hébreux les llols de la mer
Ll> Aoi-.i, >J.in«.-. Éi.ili.,li,il^.> v.d.i.UKï, ,r,.iiiv> .\l. l)^Hl^».l
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
<t
lîouge , do niiMiie l'aflinile ilt^s croyances
orthodoxeji ouvrit à l'ierre-le-Giand , ii
sa politique, l'accésdcs provinces nioldo-
valaques I Lo miracle aussi s'opéra
donc I
Mais il nous reste à dire , et c'est là
la vérité historique dont cette tour de
(jjltza 'monument élevé ]iar les Suédois
au milieu de la ville de Bucharost) est
11' symbole ! il nous re?te à dire com-
mejit un Dieu venijeur referma hicnlôt
après, sur la politiipie drs lînssos, lo
Ilot qui était destiné a eni^luulir leurs
cliimériques calculs?
La Russie , en généra! , si âpre et si
rude dans ses allures asiatiques au mi-
lieu du mouvement des intérêts euro-
[«V^ns , na cessé depuis cent vingt ans
a lieine quelle conqite pour quelque
cJiose dans réi]uilihre univei'sel , de
Hionlrer une àiiri'le jiarlicnliiTC'menl
éludié*' , des resscntimenls |iaiticuliérc-
nient systématiques a légard îles peu-
ples et des nations ipii ont cnUiuré son
berceau, qui ont ainsi, pins ijoe. d'an-
tres, assisté à ses velleiti's enfa'ntinrs
de réveil iiolilicpie, et ipii plus t:ird enfin.
jKiusses jiar une mission sainte . par un
pressentiment tout propliélique , ont
<lierclié à ctrcindre et ii terrasser,
dans son adolescence, un colosse dont
les proportions pouvaient ellectivoment
donner grandement à
]ienser d'abord à des
voisins ! ^__
Ces peuples appar- ^
tenant tous à des Etals
swondaircs, étaient 1rs ^
Polonais, les Lettes. les ^^,
Turcs et les Moldo-Va- —s
laques.
Parmi les nations , ^
une surtout a longtemps _
marqué par ses colli-
sions et ses duels avec —
U^ géant des (pi'il ap- _
liariitCesl la nalionsué- _
doise. Et Charles XII , .==_.=
il Narwa , descendant ,
comme David, de rois
souvent armés par la
main de Dieu, apprenait
au monde que le nou-
veau Goliath était ce-
pendant vulnérable au
front ; et , soldat .de la
|)ensée libre et ■ géné-
reuse contre la matière,
contre la matière oppres-
sive, le successeur glo-
rieux des Gustave le fai-
sait rouler dans la pous-
sière des vaincus, en
s'ccriant : Qui vivra
verra il"!
Que s'est-U passé ef-
fectivement depuis prés f
quanta années que ni r-|
a été jeté à la face ili> |u 'nm'ics con-
vulsions guerrières île l.i Russie . par
l'antagoniste glorieux du czar Pierre-k-
Grand? La matière russe, incessamment
fécondée, vivifiée, entioblie par ta pensée
constamment rentie du dehors de l'em-
pire, n'a cessé de peser sur l équilibre
européen! Depuis Ic's rlrarin'ntiers de
Saanlani jumiujun pi',iir'> ilr la phi-
losiipliie liii ili\-liii]iirii r -ii'iliv Pierre-
Ic^Grand cl ^; s siircr-- iiiv ii mit ccs.-;é
de recruter partout on Europe . pour
leur enqiire conmie pour e.ux-mén-.cs .
d,\s précepteurs de tout genre!
Lesterons venues dcl étranger, il faut
CJ>|iendant f" hâter de le reconnaître,
araicnlétéquetque fois fort rudes! Et les
plus rudes, celles enlie ;iulrr.-. que Char-
les XII avait prodi.L'un- r.innne précep-
teur dans l'art de m' ImIIiv m guerre,
n'avaient ]ia>|irér>r m iiniic Ir^ l'iiiils
les plus miiiT,-' niir ~i I-- lin- -
avaieni éli'liin-'lriii|i> iii.|nh-i.'~ li:iri rlr:-
par tant il
mençaient
l?s cnseigi
de colère
Pleiesches, chasseurs dans les montagnes, d'après M. Doussault.
Halte de chasse dans les steppes, d'après M. DinissauU.
nt cin-
lero'ique
>lirilli
ll>
l'pi'jHl.ilil ;i llirMlT il profit
urnl.-. ivi;n- iIjil^ îles jours
Ll■llelo^ suédois avait eu lo
sort de tons les grands capitaines... Il
avait formé . dans Pierrc-le-Grand , un
di.sciplo qui l'avait battu !
Mais, il cette phase même des annales
du Nord , ouvrons l'histoire , et à l'une
(I) A quarante licuis ilc Piler-bourg, ou
l'^signe encore à chaciue vo)a;;ei;r le relaU
de poste de H''((iy(ir(i, api es .Narw.i, comme
liranl son nom de celle exclain.iliou : qui
vi\ia verra!... arrachée à Cl.arics XII au
iiiomeiil où il allait entrer dans la lice de son
iinuiorlellc vicloire conlrc les soldats de
l'ieire-le-Giaud.
des pages, il est vrai, tes moinscounues
des Français, nous y trouverons un de
CCS exemples extraordinaires par les-
quels il plait parfois à Dieu de conl'nndre
les surii-^ Ir-i pins fjiils pniii- l'hlnuir ;
nous \ iiiiii\rinii,~ un lie 11'- l'xrjiiples
exlraorilinaiirs p.ir lisqurls il pliiil a ni
toute-puissance de briser les plans hu-
mains qu'on croyait, en les formant, lu
plus à l'abri de la faiblesse et du néant!
Nous y verrons que si , dès ranné'C
17U9, il avait suffi au farouche czar de
trouver en travers du chemin qui mène
il Conslaiiliniiplr , pour le réduire, ce
Suédiii.< , qiir les Turcs d'aujourd'hui
appellent eiirnrr dans leur reconnais-
sance du nom de Heniirbash ou Tète de
fer : — \ ingt-ipuitre lieures ne se pas-
saient pas sans que le vainqueur enivré
ne rencontrât cumme prisonnier sons sa
tente, au lendemain de la victoire de
Pultawa (encore une fois lliisloire est la
pour l'atlester», cet astucieux Moldo-
Valaqne Di'ini'liiiisCantemir. le dernier
des pniiios indigènes, qu'un Dieu ven-
geur |ieut-étri' tjui vivra verra ! ) . aji-
pelait il montrer aux Russes, pendant la
paix . le chemin qui devait les conduire
à tant de guerres nouvelles!
Démétrius Cantemir , enfin . faisant
entendre pour la première fois , il l'o-
reille du barbare étonné , le langage de
la haute diplomatie le-
vantine , lui déroulait
tous les trésors sédui-
sants de cette action po-
litique qu'il j avait il
exercer au lïioyen du
lien religieux , et par
l'esprit des dogmes eux-
mêmes, sur lésinasses
conipacles de ce* Grecs
orthoiInM's , Miuiiiisaux
sultan> ilr l'.iiii-l.inlino-
ple. Ce n est point im-
punément alors qu héri-
tier d'une race mêlée de
sang polonais et de sang
byzantin, et liii-mémesi
longtemps mêlé iv tous
1rs inneiiiis de Pierre ,
iir.li.iilr> Ml. iiJl. zep-
|i.i Diiiirliios Cantemir
liii'rrli.'i .1 agir sur l'es-
prit et sur l'avenir de
Picrre-le-Grand et de
ses successeurs Démê-
lant bien vite , chez le
czar ignorant, sa manie
d'apprendre . il ne tarda
pas il exercer sur lui le
presliLre d'un savant
joni.ssant déjà sur le
Irone d un crrl.iin re-
nom coiiiiiir liiiiiinieéru-
dit cl Irliri': cl M'iiina-
rant au plus vite de toutes ces \ieilles
théories, qui , de la part des riches et
astucieux possesseurs des vastes et fer-
tiles provinces du bas Danube, avaient
toujours consisli' , ilrpiiis des sircles , à
lancer contre 1rs uwitrrs ilr Ih/ance.
ijuels qu'ils fiis-i ni, 1rs li.n Ii.iits rampes
aux steppes du litlor.il de la mer Noire .
ilrpnisles Huns jusqii aux .Mongols de-
puis les Gotlis jusqu'aux Ciisaques-Zapo-
ili'monslrations
lie mépris et de
iM^rs et tous les
|iiv-rnl ri sut iii/hi itllumer
'l,l„ czar rc in rmwr senti-
rottisc à i cf/ard deConstun-
Dornb\utz, districts deRomanatz, — Tirgoriclis,— Shtiiia, d'iprOs M. .M. Itouquel
rogues: il .iiipi
d'un fonds inrp
haine, mêla Im
danijrrs.lr I'.im
du 111" ni |iiv-
dans I cprild;
ment de l
tinople!
Il ne s en tint pas la . il accompagna
Picrre-le-Grand clans pliisiiMirsdesvilles
de son empire; et dans millr entretiens
.subséquents, qui de\iiiirnl plus lard la
substance de longs mi'iiini 11 'S iiiaimscrits
remis an larniirr rnipriviir ru~s|. . il
préseiil.i .'^,iiiilr-S.i|iliir (niiiine un nou-
veau liinilii'iin a ileli\rrr îles mains des
infidèles; il trouva facilement , au sein
argenté des aurores boréales de tant de
nuits polaires qui protégeaient les glo-
rieux bivouacs de Pierre , un nouveau
labarum il faire espérer à ce nouveau
Conslayitin ; et par la plus profonde ,
comme par bi plus habile perfidie poli-
tique, introduisant au cœur des lau-
riers recueillis récemment sur les Sué-
dois vaincus , le ver qui était destiné à
les réduire un jour en poussière, il sa-
Miit en\elopper, dès ce moment, l'ave-
nir de la jeune capitale qu'une main
niir.iinleu.se venait de faire surgir des
eaux de la \e«a . d'un inextricable ré-
s;au. en mariant pour toujours ses de.--
10
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
lijiws et cuile (lo l'cMiipiro (lu'cllc était appelée ii com-
Miiinder à ces insolubles questions de Constantinoplc , du
( aucase et des DardaneUes.
VX c'est ainsi ipic, |iirri<i''mi'nt an bas dos colonnes
,1 llnriili' d(^ I hi>h,ire nulil.uir ,\r. Snnlnis. un Mnldo-Vu-
la(|ne, Déniclrins Caritcniir, |MirHv ilr.aniK-, prinrc prison-
niiT, prince dcclin : en e\rill,iHl cl../ le M..sco\ile vain-
ipieui-, chez le prenuer iMMp.Mi'ni- aiitnciale i iiss.v la llirorie
si'diiisiintr,mais pàillruse des jirnlerluidts piAiliiiues et re-
liiiini.r, loi L'i'.iil ivl anni-in an.pii-l un sii'cle et denn après,
,\r\ ,1.1.1 .II.' ii\.- (l.uislaiiiiistiiiiid'Oricnl, Ions li's eni-
l,;ii,,.> ,].• 1,1 |,.,lili.|...'.l.i ,al..nil lie SainM'elersIjourii.
I li.i , la \oila celle i uili; \erilé dont la tour de Coitza est
Klevi'c au milieu do la ville de Bucliarest par des ingé-
nieur suédois, compagnons de la captivité de Charles Xll a
liendor, elle résume là, les plus grands enseignements!....
Un terrililo tremblement de terre renversa, en 1802,
Imite sa partie supérieure... Mais Dieu permet qu'elle soit
assez dehiuit |iour nous dire encore aujourd'hui que cent
années déjà, .ivanl IKI2, un immortel capitaine, comptant
nnssi de nonilireu>: et valeureuv Polonais dans les rangs de
s's soldats, jetait du haut de son sommet, et de manière à
ce qu'il fût entendu sur toute la ligne européenne etasiali-
(jiie do la longue frontière russe, ce cri de : Xun procèdes
<imptius:...iifu n'iii-diiirids jias davanla/je! .. » que Dieu
aiis.>i . dans un jour .1. . i.l. iv .1 de miséricorde, avait op-
poséau\ Ilots de la i.i.T en c ..iiiroux !,..
Oui, latourdeCollza ie>l.- i.i. -vnihnle vi\anl de l'accord,
.le la corrélation , de la piii-.ii..v il.' .-.'H.' |.iil-.ili..ii .pii , à
partir de la rivière de Torn.,. jii-i|ii .m l.a.il .1'' I \-i.',civ
p.issant ]iar Stockholm, Var,M.\ie, la.s.^j , liuclKl^e^l, C.on-
>lanrmople, le Caucase , le Liban et Alexandrie, bat dune
foire a l'aire trembler, ch3(|ue jour, sur son trône, oùeffec-
liMMiiiMil il y Iremliln, renipereiir Nicolas' ,.
l'iii.-seilonc I iil.'v .|iii' iv|,n-iMil!- (.■ ilel.ri^ fivl.' .'I déjà
niiilil,'. parle.ael, i.lei' .^ mmi.'.mi |...ii.l il.' \ ...■ .1,. I l.i-l.iire,
i.lée si consiilaiile pour la cim1i>: n .1 p.. or 1 h.ini.inité ,
pi iis,-e celle iilé(\ telle que je la lu re a un.' p..lil i.|ii.' /lon-
iii'le cf pur conséquent iiulinniile , inérilia ,.\.'. l.' I.'inps
lalli'iilion el les n.i'dilalions il.' ipK^lqiH'S-niis il.' c.s LTands
pri'ciirseurs des \éi liés éternelles! Puis,se-t-elle , à un jour
qui n'csl |ias loin, ins[)iier il Victor Hugo une épopée nou-
\elle, à Lamartine un manileslo, à l'radier une statue,
a ('outure un lableau!... lit, Hin>i coniliais.'.' ,i\.'.' I inspi-
ration divine, dans les hautes spl.ei.-^ .1.' 1 n.l.Hii;.'!.. .• Im-
maine , puisse-t-elle bientôt reloinl..a .'n .un' r.w,'.' ,-.,il.il,.in'
.sur ces race-, inli'ro-anl.'- .pii , ..pie~ ,-i\ ..ir .'1.' p.'i..l,ii.l
lanlde sie.l.'. 1 ..l.|.l .l.- | I.!.'.-!...!.- .1.' la IV,.M.l.'n.'.' .
snnt, an ii...i.h'iiI ...ij.' In..'.'.'.- liLai.'>, li\ ces a il.'> appi.-
hensions si teirihles ! ..
LE DOllOU.ANTZ.
Honneur soit rendu au souvenir militaire que représente
ce paysan soldat!... il est aussi, lui I un débris respectable
.le ces milices hardies, qui, du treizième au dix-septième
sieile . il.'li'nilirenl l'occident contre les terribles invasions
\eiuies de l'Kst et du Midi,
IncessamnieiU n.clé a .'.'s pli;.lani;.s .■.in.p;icli's il.'s H.'n-
grois, des Lithuani.i.-. , .!.■> r.ili.n.n^ il ii ;. l'.'-v.' .1 .i |-.' nu
lies anneaux de ce- cl.,iii.; - l..riiiiil,.ljle> , .pu , |,.ii;.'is >.,.is
les coups d'une f..i i.lii;ieii-i' .il.irs mililanle et vive, servi-
rent a |iré.server la .l.i .'I leiil.' ' ,
Son nom, tout sm'ilnis . .ninonee qu'il combattit aussi
dans les rangs ile^ -'.M,.i- .!.■ I ha ries XII, et que l'Europe
du dix-neuvicm.' .-a. li' p...irr.iil encore songer à l'opposer,
au besoin , au.r iiiro^lnns moscovites! ... Le mot « Doro-
lianl: , » n'est qn en.' ill.'i .lii.ii de l'appell.ilion guerrière
de ces (rflfcu»<s iiM/".,>. I.iaiil l.nr non. ilii \ .'i 1,,' /raia
'aller au Irotjl i .1,1.1 .'Ile.!. \. 'in. 'i.l s.iii- celle ,.lliin' pe-
sante qu'au ciiupueiiie acte de loulcs le^ L'i,.nil.'v ....'li'i's de
la guerre, de Trente-Ans, ces corps de ^i..--.' .,i\,!l.iie
. leslrabants suédois, » donlle dorobani/ \ .l,i,|..,' . -i n-
pendant resté une image, avaient la repnlaiii.n .1 ,111. \.r
loiijoiirs pour décider des dénoùments I,..
Longtemps condollière de la force , parfois bandit par
ilé.ses|ioir. toujours fameux comme pandour, la politiipie
d'aujourd'liui a trouvé moyen de faire de ce « dorobanti »
issu de tant de choses grandes et valeureuses , un invalide
ipii est tour à tour employé à servir le fisc, la police ou à
composer l'escoile d'Iioiineiir des consuls de ces mêmes
pnis>ances (/»■//.>■(>»/ secourues autrefois et quiles ahandon-
uenl uujourd'liui! ...
I. .\ c 11 .\ s s E A c X s T E P P r. s .
( In yaudiis faustw venulionis, sodatitus el amicis,
testimoniunt ! . , i
L un des nlaisiis les plus vifs qu'un élrang.'i- piii-M' L'onler
au pays niiildo-\alaqne. c'est, sans coiili. .1.1 1,. .li;.--!' '
La 'raison en est simple : le giliier y cM ,il:..i..l,...l, \,iii,.
et les pnipriélaires y sont rareniciit cha.-.s. nis, La guerre
conire renniini, on coiilre les bandes de brigands, a oc-
cupe la peiiilant loiiLliMiips une place si sérieuse, qu'il n'y a
pas, il prnpreinenl |)arl(U'. jilus de dix ou douze ans qu'on
est arrivé a coin|iieiidre qu une arme à feu pouvait être un
inslriimcnt de plaisir.
La chasse élaut. d'ailleurs, comme la musique ou l'arl
de travailler les niélaux . dans lesatlribiilions habiluelles
dos Bohémiens , celle dislracliou , si puissante dans le reste
do rKuropo. est généralenient méprisée des boyards; et tel
grand seigneur chez lequel , vous, passionne po'iir ce plaisir.
vous NOUS pré.si'iilezpour cliasscr, vous supplie cl cela
de la meilleure gr.'ice du monde , » de ne pus rous donner
■■ celle peine... Si cous vouiez absolument dcsiièrres ou des
" oisenuT... il enverra ses (/en s... qui sont luiliiles... en at-
'truper pour vous!... » l-.i.l ..'l .• .er. ..■.■ l.ii .-.'ii.ble clios.'
ridicule !... A ses yeux , c .■-! p.. '-.p..- ,.1. — . .■ .Irannlinaire
qu(^ d aller à pied, el , daii.> s,, bonté. dan^^oIl extrême po-
litesse , il serait porté à vous proposer de faire atteler la plus
belle de ses voitures. . . pour vous mener chasser au
marais !. .
D'un autre côté, perdrix, cailles, bécassines, lièvres,
coqs de bruyères, bécasses, pluviers, outardes, loin d'être
comme dans le reste de l'Europe et à l'octroi des villes,
l'objet des rivalités , des inquisitions les plus jalouses , y
sont " primo occupanti , » e'estrà-dire , au plus adroit !
Dans cet élat des choses , on comprend tout de suite de
ipi.'ll.' a.ln.n.ible ressource est la Moldo-Valacliie pour un
(has-.'sile in.intagnos, chasses de bois, chasses des step-
pes y aboiiileiil.
Les deux premières, moins bien entendues que partout
ailleurs, ne méritent guère qu'on s'y arrête , a moins que
ce ne soit pour dire bien vile que le paysan roumoun , en
général beaucoup pins l.i'..\.' . I. .--.'.ii qu'il n'est habile
tireur, se trouve .pielqiier...- la pi..i.' .le l'animal carnassier
qu'il poursuit ! C'est ainsi q.i.'.|e p.ii> .erlider avoir eu dans
les plus hautes monl.igiiesdes Carpalhes, pour c pagiinns
de chasse, d'inlrépi.l.'s iiteicsclics , ou i/itrde-fronlicrcs, sur
Icsquclsj'aurais pucompter, comme par faite ment absentes,
jusqu'à soi.raiile livres de chair qui leur avaient été man-
ijées par des ours !
CupetU incident n'arrêtait , toutefois, pas leur vocation
pour ce gi'in.' ilex.'i.ice : on les voyait retourner de iilus
belle à la rha^-r .l.'ii's terribles animaux, et. parfois,
dans le seul biil dj d. 'fendre, d'y préserver la vie des
chasseurs élraugers qu'on a\ail pla..'- s.ai- l.'iii ^ai.le
La chasse des bois, bi.'i. .|ii ,.li..i..l..iil.' .■.. -,.i.:jIi.'i> , en
loups , en lièvres et en b.'. ,.--.■- c pi .il pas l..iiji.iirs a
rai.son du danger que In..' p.. ...r " .les paysins moldo-
valaques à manier les an...". .. . .[.-..le , vous fait la plu-
part du temps courir ! One .1.' . I...>s.'s des bois n'ai-je pas
vues, apresle-,. |.i.'lles..n avait à regretter la mort dcplusd'un
bon et iiil.'.'pnl.' l;.i.. lin !...
C'est il..... (le I . .liasse des steppes que nous pourrons
parler a\.'.' !.' i.-.l.' l'eL'vcIs ,a\e.-le plus ilepl;.i-ii' '
car elle r.i.i.i.' ell.' ..n .1.'- ~.,.i\.'iiii> l.'~ pi..- ..ui.',.!.!.'-
qu'un eh,.--.'...- d.'l.'i i.j.i.e .piui. ami p,i.-.-ii.nn.' .1.' 1,. ..,.-
I..1.' p. .!->.' pl.'i .laiis sa vie !... (Juel bonheur pour un
l.,.b.l...i .1.'- ;j...i..li'- Mlles... pour un enfant de Paris, par
.',.'... l'ii' .1.' .-.' Ii.i.aer lout-à-coup devant deux ou trois
. .'i.l- Ile. les carii'cs d admirables terrains de chasse, et de
s.' .lu.' : ici je suis roi , seigneur et maître ; j'ai là mes chiens
iii.p.ii.enis et fidèles , mes beaux fusils... et , devant moi ,
tout les animaux de la création... moins le Garde Cham-
pêtre!....
Le [laysan roumoun , n'ayant commencé à possédei- on
même a cimnailie les armes a feu que dflpuis les dernières
giieir.':-.!.'- li.i— .'-, .'-I 1... la 1.1. 'a ..p|...-.'i-, a l'avance, a tout
gil.i.'.- .|.i.'l.|...' . ho-.'.li' l.i.'.i pl..> pr.'.i.'.i\ pii.irson compa-
gnon lie ili,.,--e .'li'.L.L'.'r, .p.e I ...li.'-se a liier le fusil ; ce
sontscs inslincls naturels de braconnier... c'est sa ruse !...
Alors, sa\ez-\ons ce ipii s'est passé dans les dernières
années : de brilla iilsilipl.nniles gens qui ne laissent pas que
il'èlr.' aiis-i p,.^s,il.l.'iiieiil iii-.'s, et, de plus, ceux dont je
pa.l.' II. Il ,..l....u .!.,.--.■...- ont tout-à-coup transformé la
S..I1I11.I.' .1.',- H.'|.p.'- .'Il nue \asle école de tir ! Là , sous les
couiis du cliassenr cosmopolite, s'aidant , ilcsl \rai desniille
et un secrels, des mille et une rubricpi..- .I.i p,n>,iii i...i~
moun , tombent en plein vol des myriades d oi-.'ans donl le
moins i.'ii.inimé, pendu à la devanture de Chevel ou de
( "I. .1.1 , .11. l'alais-Royal , suffirait déjà pour former, seu-
leii.eiil .11 . li,..-^eurs et en gourmands, les plus inolîensifs
allionpenieiils!.,.
Les premiers jours d'avril ne se passent donc pas sans ipie
par l'une des portes orientales de la ville de Bucliarest, on ne
voie cheminer, à grands renloris de surudgis et de che-
\a..\ de poste , maints cl. '^..iiN l.i.irgons portant fusils.
.I.i.'.is , tentes , cantines l.,.!!....'- .le cuisine et attirails
(léchasse!... Ce sont Jl.\l les Agciils et Consuls généraux
de l-'raïu'O, d'Angleterre et ilAiilriche . allant secouer, à
l'air frais el embaumé des premiers beaux jours de prin-
leiiqis , cet amas de trilnilations,,. de déceptions... de
soucis qu'a accumulés sur eux la Politiiiuc.
Arrivé après quatre ou cimi heures de marche à un
village qui a nom Tamadéo, el où résident , de pèn; en lils
depuis ile> leiiip- iiiiiiiemoriaux , lesfournis.seurs ordinaires
delà bourhi :lr^ l...-p...l,irs, on revoit avec bonheur les chas-
seurs de 1 , innée d ,i\ant... on SC prépare ii de nouveaux
jilaisirs; en un mot , on ne tarde pas à prendre possession du
steppe.
Tout n'est cependant pas « roses » dans la chasse que
j'entreprcuds de vous décrire. D'abord , pas d'autre abri
qu'une pauvre charrette recouverte d'une iiatle... plus île
visages féminins,,, quelquefois pas de feu,,, parlant pas de
noinrilure chaiiile ii....> ,.n--i , lu belle cloile... àdiscré-
lion pen.lani lie.- s.'.i.,i..i.'s ' p..- 1111 -eiil i;ibier que vous
pnis.-icz \oir anlicii..'..! .pi.' p,ii \r> \vu\ .!.■ \olre guide,,.
l.inl ilaiiscevasleil.'.serl uni comme bi surlacc des mers, est
la, lapi,, , blolli,,., au gite.,. toutse rase et selerre!... Le
gibier que vous pouvez voir debout, . , et vous en voyez, , , vous
Miil aussi et alors il fuit ou s'envole; et, dans ce cas, il n'csl
jamais alioid.ible ! Celui ipii \a devenir voire proie, est celui
ipii. obeissani a l,i douce loi du prinleinps. règle en pais les
plus chers inlerêls de sa future lune de miel. Le steppe,
c'est le grand marché des amours, la foiredelleaueairede
tous les cœurs, marchant sur deux on quatre pâlies . L'art
du chasseur con.sisie dimc il sa\iiir ap|)rocher doui-emenl
tout gibier, à celle époque des grands ra.ssemblcmenls qui
précèdent la saison des noces... Or. son accès n'est possible
qu'avec la pauvre charrelle du pav san des steppes ;,. encore
faul-il ipie, bien caches sous une'n.alle large cl épaisse vo-
ire compagnon et vous vous ayez bien soin de ne révéler
\olie |iie,Mni c paraucun geste, par aucun cri humain ; une
aiilre condilion du succès de cette chasse, c'est autant que
pi." ibic lie ne pas arriver tout droit sur sa [iroie, mais de
l.i iMiirn.r .-1 il.- 1 .-n. .'indre dans un cercle .pie léquipage
cri lu... . h, .1.1 1. 11.1 l.i.ijiiiirs de plusen pins pclit
ll.-l.' al.ir-1 irislinci merveilleux, incroyable, unique de
votre guide qui est à la fois pour vous, pendant tout le
temps de votre séjour dans ces vastes déserls, votre ro-
cher , votre ami , votre valet . votre chasseur , votre cuisi-
nier... souvent votre camarade délit! (;'estdans ses yeux,
c'est dans ses moindres gestes que vous aurez a lire: plai-
sirs de votre temps, succès de vos coups, syinpalhies d(-
vos chiens, émotions inallendues, bonheur enfin de votre
existence... C'est sur voire cocher que tout roule! .
(Chaque chasseur, nonchalamment étendu dans un iM'tit
équipage à trois chevaux, non sus[icndu, des plus agrestes,
n'ayant pour uonqiagnie que son cocher, se- 1..-.I- -, - eara-
binës el son chien, destiné à lui rapport, r Im.iI.- p... .• qui
tombe, va pa-ser la, ainsi que nous lavons dit, M'ion sw
loisirs de q.iinz.' jonr^ a trois semaines.
Dans h' ilroil ili'> g.'ns d.' ces pays.,, il est généralement
ailniis et rei.ii que , c'est dans celte position horizontale ,
(ju'on transporte régulièrement en avril les dignités consu-
laires.
Si canintus sylviis, sytvœ siiit consute dignœ I
Personne, d'ailleurs, ne s'en plaint!,.. Nos chasseurs di-
plomates en effet jinisent dans le s[ieclacle de cesvaslesel
ri.'he- -..lihi.l.- .•i.r,.p.'.'i.n.'sde grands enseignements poli-
ll.|.l.'-' La l.l.l',.p|,,.r,..l la solution lie phi- il nue ili'sques-
li.n.- q.ll a;jil '1.1 I.' in.ai.l.' .. » Ici demain se ilisi'iil-ils, fe
» clinmp (les batailles! ... oui, mais après-demain sera làle
•• rhanipdesiravailleurs... » Et puis nos brillants diploma-
tes se mêlent aux pauvres habitanlsde ces déserts, y porlcnl
les noms de pays grands et glorieux... y laissent quelque
[leu d'or dans dé misérables chaumières qui Wnissenl leur
mémoire , la terre qui les vit nallre... el puis, et puis. .
eiilin, ne l'oublions pas, nos chasseurs sont de si liabiles
tireurs, que la capitale valaque n'ignore pasipic, pendant
tout le temps de leur absence , elle va être régulièrement ap-
pr..\isi. innée, et c«(a j)orco«cricri «jfraordi'nai'rM, des rôtis
1.- pi..- lins.
I . p.ndant la chasse commence... ileslà peine petit jour.
(li.iqiie tireur , parti sous la tutelle de son Roumoun ne
sait |ias d abord où il est , ce qu'il fait , où on le mène: il
sait s.'iileiiienl que, vers midi , ou sur le soir, à un pointde
lliorizon il. ml son giiide a le secret, il doit retrouver ses
■oinpagn
eh.
liienini .|.-p,.r,.i--. ni toutes habitations humaines ; apris
quelques JOUIS oueïldejà à une trentaine de lieuesdesplus
r.qipnichées.
Placé, ainsi que votre chien, dans une douce position ho-
rizontale , vous vous apprêtiez à jouir dans un lé.gcr som-
III. 'il .!.' h. ni. 'S l.'s .'..ns.'.piencesde la position, lors(prii Ta-
gilal 1.1. 1.1. ' lie M. Ire aulomédon vous vous apercevez
qn une pi.'ce.l.' gibi.T est proche.
Le cocher, cn'effet, n'a pas seulement un regard d'aigle,
l'oreille alerte,., il est bien clair aussi... qu'i/ a du nez.
Domnule! Monsieur, vous dit-il, uich ics le iepori! Ici il
y a un lièvre! Le chasseur se lève amollie, tout heureux
de penser que la chas.se commence,... et régulièrement il
ne voit rien du tout! car le lièvre, dont la couleur se con-
l'on.l exaclenicnl avec celle de la terre ou des vieux débris
il.' \.'u.'i,.ii..ii . est admirablement tapi, que dis-je!... il est
cl..ii.'il,iii> M.ngile,
Vous commencez à exprimer tout votre désappoin-
tement au cocher , qui vous lance un regard de mépris
et qui . tout en continuant à vous indiquer le lieu où gil
l'ennemi, se met à faire tourner sur eux-mêmes équipages
et iliev aux . jusqu'à ce qu'après avoir fasciné et enveloppé
laniinal par un cercle maaique, il arrive avec l'une des
idiics de devant jusque sur les oreilles du patient Le Roii-
moun. alors, vous conseille de le tirer . et dans la tète;
c'est ce qui lui |iarail le plus logique au double pointde
vue de la charge ii économiser, et de la peau a ménager, la-
quelle doit ('Ire rendue. . . Mais vous étestléner.'iiv ... d'aulanl
mieux .pie vous n'aïu'rcevez rien encore:,, bientôt, toute-
fois, vous allezjonii- d'un spectacle ineffable...
Le Roumoun , parfaitement impatienlé de votre inexpé-
rience et qui connaît, lui. touleslcs rubriques de l'ennemi,
vous fait lout-à-coup signe de descendre... il descend avec
vous... puis, prenantsonfouel.il le claque à loiir de bras...
Cesl alors seulement que vous comnieniez à voir le lièvre:
vous êtes d'autant plus confondu de la scène donl vous êtes
rendu tcnioin. qu a chaque coup de fouet, l'animal, au lieu
de quitter son gile s.'inble entrer plus avant dans la terre., .
cl a celle quesl ion : (lie face? Qm' fais-tu? leRoumour, im-
passible, vous repond, mais en ayant bien soin de claquer
toujours: « Monsieur, c'est un vieux lièvre: le bruit de mon
» fouet lui fait croire à la pirsence des lévriers... cl il
» mourra plutôt sur place que de prendir la course . au
» lioul de hupiclle il sait le .sort inévitable qui l'allend. .
L'inb.'Iligencede la pauvre bêle, alors, vous louche au point
que, loin de vouloir la tuer, vous lui faites la \ ie sauve, en
lui cnjoignanl.iin début de sa coui-se que vous pnnoquez
d lin.' m.iniere ou il autre. A aller pcupterle steppe de gail-
lards aussi iniclligenis ..
Le Honnionn . peu ravi de voire excès de philanlhropii'.
remonte a sa place, vous à la votre, vous regaixle d'un aird •
parfait dédain mêlé d'un atroce niéconlenlement . el cepen-
dant vous l'ait signe de vous préparer à des émotions nou-
velles /)omni//c",ai'r/i.' Monsieur, p.nr ici! vous dit-il: vous
regardez. . mais, cette fois-ci, vous voyez bien moins que
l'autre, car il s'agit d'une outarde pi'/ij. e'esl-à-iiiro fOMcArV,
iC'esl même du mol valaque pitil que nous avons fail le
mot français peut, couché, qui se fait ;)f/i'f,donl l'élvmr-
lo!;ie n'cxisL' dans aucune des lamiucs mères de la noir, .
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVKRSEN.
11
Vous o\|iriine/. |inr une panloiiiiuie iilfrouso, et toujours ho-
rizontale que vous voudriez bienvoir, liir voire fusil de
Lepago osl nicrvcilleusemcnlcliargc, la poudre est du Lon-
dres, In capsule brijlanle, mais dàidéineiU vous ncvoyez
rimda tout!.- .
L'i iiuipaïe, alors, commence a tourner sur lui-même,
nuand eniin , au beau milieu d'une touffe d'herbes scelles
vous vi)\i'z crfi'clivenient, rasé p:ir terre, un oiseau, iirand
comnic 'iinr jiiliiulie, qui vuii< i ciarde d'un air bienveil-
lant cl ilnuv : Mille .iiiic s aUriiilrit, car le Roumouu vient
do vous r peler de tuer dans lu lilc. Non, vcms vous levc^z.
l'oiseau en fait autant... niai> :iu Innil .illrcuv ipie son vol
produit, il la poussière qu'il siiiilr\c, ;i I niuiiinn ipi il vous
donne, vous tirez avec un fivinis.M'niciil sjiis |i:iivil, et bien
qu'a vini;l-cinq pas de lui , vous ne lui enlevez seulement
pas une plume.
Le Rounioun se rasseoit près do vous avec une expression
inouie de déconsidération pour votre personne, et, tout-ii-
coup, il un signe qu'il a vu il l'horizon , il met réquipaa;e
au grandissime galop. Les secousses atroces auxquelles
vou.s êtes en butte vous portent naturellement k deviner
au moins de quoi il s'agit; vos armes se choquent entre
elles, le chien grommelle ; on croirait qu'en proie ii une vi-
sion VuImIc au 'milieu de ces grandes solitudes . chevaux et
thasN'iii^ -r «nilrnl irrésistiblement emportés par le vnisi-
naccilr quelque deuion ; mais non, « c'est un énorme louji
«q'ïii, celle lois, s'est levé, vous dit votre guide, a cin(]
.. cents pas devant vous. » Un éclair de jubilalion illumine
la phvsiononiie de votre guide; la marche de l'équipage se
ralentit, vous vouiez vous h-asarder à voir, tout a disparu...
le hiup s'est lapiconlre terre. ^
Yuusdire alors lesjoies de votre Roumoun, ses agitations,
.ses gestes ^loul cela cependant très silencieux] . ce serait
prélendr(^ saisir au daguerréotype un galop du grand bal
de l'tlpér.i un jour où Musard le dirige.
C'est maintenant qu'il va falloir ajuster la victime dans
la iéte , la pantomime de votre compagnon vous l'indique ;
puis il'se signe, il jette ii l'ennemi tous les sortilèges qu'il
connaît. Survient enfin l'inévitable Domnule.aich! et l'e-
(luipage commence à tourner.
Je vois tout d'un coup (car enfin je dois le dire, c'est
l'histoiie de mes premières heures de chasse aux stejipes
(lue je décris... de mes chasses it moi, qui arrivai il ac-
(luérir lii une vraie renommée), je vois tout d'un coup une
énorme béte couchée tout de son long dans l'herbe. Mais,
au poil enlierementblanc quila couvre, mevoilii convaincu
quiMc n csl pas le loup que je vois,... que, la fatigue l'ayant
etounliment delerminé a prendre place dans le voisinage
de quehuK! troupeau;... me voilà convaincu que l'animal
que j'ai lii sous mes yeux n'est que la plus belle, la plus
inoffensi\e des génisses. Erreur grossière , mirage impar-
donnable! je suis en présence d'un vieux loup tout blanc,
l'eiTroi des patres transylvains, connu dans le steppe par
mille batailles rangées contre les plus belles brebis de la
noblesse d'Hermanstadl !
11(111 naxsaii, (|ui, lui, voudrait avoir la foudre on main,
pduriiKîla !:iiicer d'abord, puis pour suppléer il mes h si-
latioris, a mes relirds, se pr pare il me battre, si décidé-
ment je ne lais pas preuve cette fois de plus de discerne-
ment Vt d habileté. Je me lève donc tout debout sur la
charrelle ; a ma vue l'animal s'enfuit; je prends ma cara-
biiKi (le Itenette, et, à soixante-dix pas, une balle dans lé-
iiaule droite fait rouler parterre le Nestor des loups avec
un bruit horrible... Mon chien, qui ne sait pas de quel gi-
bier il s'agit , saute de la voiture pour aller ramasser la
pièce tombée. Le Roumoun, auquel mon coup triomphal a
rendu tous ses sentiments naturels , nie crie de ra[ipeler
mon chien, que le loup n'en va faire qu'uni- liom lii'c .Mais
dt^a la senteur fauve de l'énorme loup a pend iv de leiicur
mon chien, qui vient reprendre sa place. .\nii> ii.iii> cip
après avoir fait le bonheur et la fortune de mes anciens
unis de Tamadéo , et riches eux-mêmes des plus di\ertis-
sante souvenirs de sport qu on puiss
Europe !
avoir aujourdhui en
Des fermes-écoles.
el mis en \alcuc un domaine de laiules de 000 licclaics. On ne
dira pas (pie le Iravuil a iiianf|U(i.
n Voyous d'apri-s cela quelles s(-roiil les receltcs el les dispenses
d'un jeune upprcnli dans une furme-école.
rrilurc.
loj;emenI, blaiicliis^oRe, ù 80 cent. 202 fr.
enlrelicn ^-^
P"
eluins alors doucement et prudemment du teriain ou la
ctiiiie se débat contre la mort: pour moi, je me réjouis
• dans une seule minute toutes mes écoles de
l'snérance vaine' le vieux loup, ipii. on mor-
,.| en 1,1 n.nlinl il.ili> la pnl,,.iere a el.inché
,,,;i,.|,ecie,ili-K ^nii allieii-eMe-iiiv irineild
i 111,1 pl;ice, I e.|iiquige le g,ilu|i, et, a|)ies plus
de trois heures (lu plus lanlasli(pie sleeple chose (chasse aux
Idcheis' sans rlorhers, j'arri
la halte du soir où, dans
mon paysan raconte il
me- iiiiiii'.iL'niins de rli-i--i' d ''n l'i'i'sence de moc/caiîs (les
ii.dre- ir, 111- \ l\. 1111^ ' qui reeuuliiii , eiimnie une légende du
boa Mcuv leiiips, 1 Itisliiirede miin luiip.
.^joutez a ces émotions tout le charme de cette vie aven-
tureuse et il ciel ouvert, les récits de vos compagnons, les
hasards d'une chasse abondante et variée , les ouragans et
1rs irombcs qui, de la manière la plus inattendue, se for-
ment autour de vous comme au sein des mers, les grandes
miL'iatiiins de tous les oiseaux d'Europe, les histoires des
bn'û.iniK \eiiiisla la veille el dont on voit encore les traces,
les .'iiinii.Mi- qiK^ VOUS donne souvent la nuit, dansées
iiraiiiie^ Milihiiles, le passage fréquentde loups enragés qui
metlcnl parfois en' moins d'une heure plus de quarante pi^r-
sonnes hors de combat;... et puis, ayez soin d'ajouter eiilin,
les doux revers de médaille... le retour, après tanl de jours
de votre vie de Mongol, vers quelque riche village ou vos
chasseurs vous prient de permettre qu'ils conmiandent le
bal joyeux, bruvant, pittoresque, au milieu du(iuel vous
retrouvez et les danses romaines des prêtres saliens, et les
pas belliqueux el nobles des guerriers du moyen âge... H
ces recils, tout rapides el ni-gligés qu'ils sont, pourront
l'ouniir il plus d'un lecteur, et notamment ii de jeunes et
riches .Vnylais, l'inspiration nécessaire [unir aller aussi au
loin yiiùtiM- ces plaisirs... tenter ces curieuse, ;i\eiilures.
Combien d'entre eux, en effet, qui, s ils pouMiienl soiqi-
eonner l'attrait de ces chasses des steppes moldo-valaques,
arriveraient dès la fin de mars dans le Danube, montés sur
leurs élégants jackts, pour n'en repartir que deux mois
Nous avons rempli un devoir en fournissant quelques do-
cuments qui sont de simples faits recueillis sur la (piesli(in
de l'aiiprentissage agricole (voir le n" du M août ISi.S',
afin.reclaiier lé|,inm„piil,li,|iie;u,iiill,i(li-.eii.M(in ;i 1' \s-
SOmblee NiillS ;i\nn, eile ,|llelqiie-i elulllv- 1M11| iMl nies ;i
M. (le (.:iS|i:inn (11. m le lloni liill ailhinle: M .lllle- HielTel ,
dont le savoir et l'expérience méritent une égale conliance,
proteste contre l'exactitude de ces calculs : comme nous
cherchons avant tout la vérité et le bien du pays , nous
nous empressons de lui ouvrir nos colonnes,
0 Bien des fois, en lisant Vlltuslrnlinn, j'iii su Rféil rc journpl
de nous eiilretciiir d'agricullure. C'e^t oirrii- la connaissance des
choses rurales ù une classe de leclcuis qui n'y auraient proba-
blement jamais pensé sans cela. J'ai surtout lu avec un vifin-
lérôt tous les arlicles portant la signaluce de M. Saiiil-Genuain-
Lcddc. Mais, enfin, tout le monde ne peut pas aller i f.orinlbe,
cl M. Sainl-Germaiii-Lcduc ne peiil pas tout savoir. Je lui de-
mande donc, au nom de la sympalbie que j'ai toujours éprouvée
pour lui, la permission de l'éclairer quelque peu (1 l'endroit des
fermes-écoles, où son cxrellenl esprit a fait fausse roule par man-
que de connaissances spéciales.
n M. Sainl-Germain-Lediic, en parlant de l'apprenlissaîîe aRri-
cole dans I lUusIrali-ii du 5 eouraiil, nous cile trois exemples
d'insiitulions de jeunes apprenlis, dans lesquelles l'enlrelien cl
l'instiuclion de ces jeunes gens coûleraicnl moins cher que dans
les fermes-iicoles, projetées par le niinisliede l'agriculluie.
» Eli bien, je n'Iiôsilc pas à dire, n]ircs dix-huit minées d'ex-
périence dans la direction d'une fcrmc-rcule, qu'il est impos-
sble de prendre une mesure générale de ce genre en France,
d,ins des conditions autres que les conditions adoptées par le
ininistie.
» Dans les premières années de ma direction, j'ai fail, mol aussi,
comme M. Balson, lequel ne compte pus le lait, ni le logement,
ni la boisson, ni les livres, et, dans mon enthousiasme, je disais
comme lui: «On va loin dans ce genre avec une guinée. •
I) Mais c'est lu de la charité chiclienne, ce n'est pas une insli-
lulion que l'on puisse généraliser, et la preuve, c'est que pres-
que rien n'a été fait en Krancejus(|u'iiu jour où le gouvernement
s'c-t décidé ù avancer lui-même quelques fonds.
» M. Turck, cite par M. Saint Geimoin-Lediic, fait de la cha-
rité, ou s'il renonce à la charité, je soutiens qu'il ne pourra pas
marcher dans les conditions indiquées.
1) A Hohenlieim, le bon marché de la vie et l'adjonction de
l'inslilul pcrmcllenl seuls une marche normale. M. S.iiiil-G(T-
maiu-Leduc nous dit lui-même que les jeunes apprentis de llu-
benhcim Irouvent ù se nourrir moyennaiil soixante centimes
par jour. J'ai vainement tenté ù Grand-Jouau riiistallalion d un
aubergiste dans le genre de celui de Hohenlieim, divers essa s mit
été fails, mais on a successivement renoncé à 65 cenlimcs, ù 70.
a 75; on me demande aujourd'hui qaaire-vin^jts ccifimes par
jour cl par létc.
n On sait que M. Ridolfi s'est retiré après un sacrifice de
40,000 francs qu'il a dit ne pas regreller. Je comprends cela
pnrriiilciiienl. Un cœur généreux peut soutenir à ses dépens une
création donnée pendant longues années ; mais ce n'est pas là une
instilulion normale.
» Il y a déjà huit années écoulées, j'ai publié une note dans
r Agriculture de l'Ouest où je provoquais les comptes de l'école
d'iiollwil cl où je soutenais que l'école ne payait pas ses frais.
Personne ne m'a répondu.
» Après avoir parlé de la dépense principale, car il y en a en-
core d'autres dont nous parlerons plus loin, il faut voir les re-
celtcs.
M. Sainl-Germain-Leduc évalue la journée de l'ouvrier agri-
cole à 1 fr. 61 c. cl conclut pour celle de l'ouvrier de 18 ans, âge
moyeu d'un jeune apprenti, ù I fr. 40 c.
» Il y a d'abord une première erreur à reclifier, c'esl que ."ou-
vrier agricole qui gagne 1 fr. 61 c. travaille douze et quatorze
heu res^p.ir jour L'élève d'une ferme-école ne travaille que .se|il
à huit heures par jour. Le lele du temps est consacré à l'ctnile.
Mobilie
Libres, plumes, papier. .
Médecin, médicaments, so
Véle(nents el récompenses.
Travail, 2 il journées il 50 cenlimcs.
Indemnité de l'État au directeur. .
Don de l'Étal à l'apprenli. . . .
Perle
402 Ir,
Eupii
lit le
el du
l.cilii
■ f.Kit il snpp(
.1 a ccl
del'hoiiu
[■si la seeoi
le Irai
le fait.
hiirro de M. .Saiilt-Gcr-
iière <|ue 90 c. ù compter; en-
du jeune lioinnie soit propor-
n Mais la est la seconde erreur. Quiconque a bien observé les
hommesfails cl l,s jeune- gens dans les travaux d'une exploitation
rurale, y a ccrlaincmenl trouvé une énorme dilTcicnce an poinl
de vue de la production. Quand il n'y a qu'un ou deui jeunes
gens au milieu d'un groupe d'hommes d'un ûi.-e mûr, la dilfe-
reiice n'est pas lies sensible; elle le devient énormément dans
le cas contraire, c'est-ù-dire quand il y a un ou deux hommes
f.iits au milieu d'un groupe de jeunes gens. Au poinl de vue
unique de la production, je préfète dix hommes de treille ans à
vingt ieunés gens de dix huit ans; el les premiers, au bout d une
année, anroul lait plus d'ouvrage que les seconds, cl la besogne
sera mieux faite.
■ ' ,1, est
n Ce que je dis ici des jeunes ouvriers agricoles en général, est
encore bien plus vrai quand il s'agit d'appreiilis. Après mut n'. n
esl-il pas ainsi dans loules les classes de la société ? L liumi e
est la même partout, .1 Dieu nous a faiis tous égaux bien avanl
h, république. Con.p.uez le travail el la manière de vivre d un
éludianl de dix-huit ans, avec le travail cl la mauicrc de vivre
dnn homme de Ireute ans, ayant reçu a même éducation pre-
mière.
„ Par tous CCS mntifs el d'autres qu'il serait véritablement lr(ip
long de détailler ici, je pose en fait qu'on ne peut pas évaluer 1.,
iournéc d'un jeune apprenti agricole, ûge de dix-huil ans dans
'les conditions que j'ai éaiis.^s, à plus de 50 ecnUincs. ht re-
marquez bien que chez moi les jeunes élevés ont eu lonjours ■-
travail des plus sérieux, puisque c'est a
i> Tels sont les chilTres réels; et celle peilc de fr. 31 50 est le
stimulant du directeur, soit pour bien faire travailler les jeunes
gens, sod pour trouver un plus grand nombre de jnurnées. J'ai
pris le nombre de jours donné par M. Saint-Gcnnain-Leduc,
mais je pense qu'on peul l'augmenter; de luèiiie qu'avec beaii-
coupde soins et de peines, on peut ariivcr i ne pus éprouver de
déficit.
» Maisces chilTrcs expliquent, d'un autre coté, pourquoi plu-
sieurs directeurs de fermes-écoles ont trouvé que rinilenin lé
de fr. 175 était insunisanlc. J'ai soutenu dans \fJournol d'nijr -
culture pr tique, n' dedécembre 18!i7, que c'étaitlii lechiffrc lé-
rilable, et le minisln l'a maintenu avec raison.
» Si je ne craignais pas de trop allonger cet arlicle, je dirais eii-
coreà M. Saint-Gerinain-Leduc que, dans le projet du ministre,
le nombre des élèves sera lonjours proponionnê ù l'étendue de
l'exploilatioii. Je lui prouverais qu'il se trompe élrangemeiit en
disant que les jeunes apprenlis seront l'élite de la population ; el
(|u'il se trompe encore eu croyant aux nombreux avanlagis
qii'apporlcronl les prorc-sscurs-adjoiiils Le seul bénéfice clair et
iicl, ce sont lesfr. 2,400 d'appoinlemcnls. Mais en vérité esl-ce
Irop? Vous ne savez pas toute la responsabilité qu'assume le
directeur d'une ferme école, et tout le travail auquel il est as-
treint s'il veut agir consciencieusemenl. Celui qui écrit ces ligues
n'a pas pu; depuis vingt années d'absence, revoir sa rjiiide,
parce qu'il lui faudrail quitter sa ferme pendant un temps impos-
sible ù trouver.
. Dans un autre ordre d'idées, je dirais de plus que le momcnl est
venu d'honorer el même d'enrichir tous les hommes qui sevouenl à
l'ao-ricuHure. Offrez leur des places nombreuses dans les cam-
pr"ues. Comment voulez-vous que les intelligences s'élèvent dans
uire rude carrière qui ne mène à rien, ni à la gloire, ni aux hon-
neurs, ni à la fortune. Aussi dès qu'un paysan a quelque instruc-
tion, il fuit vcrsla ville.
» Le projet de M. Tourrct en faveur de l'enseignement profes-
sionnel de l'agriculture csl un pas immense vers un ordre de
choses nouveau, et la presse entière devrait soutenir ce (u-ojcl à
cause de ses tendances agricoles cl sociales. La royauté a tout fait
pour atlirer la noblesse, la r chessc, l'iiilelligence dans les villes;
il faut que la République relourne le mouvem. ni, il y va du salut
de la France.
D Jules Uieffi'.l. »
Ouverture de In durasse «léniocpraticuie
tiniis Ira forêt de Suiiit-fteraiirain.
Oui ne connaît cette majestueuse terrasse , célèbre d'un
bout à l'autre de 1 univers civilisé, du haut de laquelle I œil
embrasse un des plii> beaux poinis de vue du monde? Qui
.Mil
ne s'est sur|iV
(|ui Idmbragent, re\,iiil
l-'ayette, ou a Louis XIV el a l.i leiidn
évoqué , le soir il la clarté amoureuse
voilée, les ombres des beaux geiilil;
(■■eiiiilés , murmiinint des paroles |
rlin
1.1 1
eiiiliipies
La
plu. ,11.1,1
l„larm;,l,les. |",eles,
il Paris toute laimee
saut, il n'existe pecM
pèlerinage, sa C(„n>
sur la majestueuse le
Quant au chiteau
le l'i
' V(
lient en pas-
eursion , sou
■r champêtre
sformé en pénitencier militaire .
\ tout au plus s'il existe à l'état de souvenir .
n'est ini',avec une diniculté extrême qu'on peut ree-
1 cstini .avec uneuniicune uwieon; >iu "■■ [-i'" ■ ^.
hisKiire de son passé en leparcom-anl. Une espèce de geo-
ier vous v montre bien encore le cabinet d'.\iine d .\utri-
: eux que j'ai défriclié
I
elle ètTonitoirëdë ïa^'reîne'd'.Vnglelerre . femme de Jac-
ipiesll; mais dans les pices (|i. .u, v,,,,- Mgiiale par c(s
indications pompeuses, on ii.' i,.,.!.,,.,,! p,. \.,lonliers l ,i--
sile favori delà femme la plus elei^miede >-,., temps, dont
Mazarin disait, un peu indiscia-tement peiil-elre , ipuj son
supplice en purgatoire consisterait a (■oiiclierd.nis do draps
d(, line toile de Hollande ; et on se demande si c elait bien
(1 ii,s cet humide el odieux caveau que venait prier cotte
,,,'., ,ie ,.i,,-erile ,li'V,uil h-s iiir,„lunes de laquelle s'était iii-
,.1„„,, I,, ,„,i,esle<lu plus t:,Mml el du plus herde nos rois
Mais si le château de Sainl-Cei-main a siili, les imlrages
des hommes, ces aveugles auxiliaires du le,,ips, il i, en est
pas de même do sa magi,,liq,ie lorél, -\iiires seeul.ures:
lonsues avenues allant se perdre (Uns des Imnlain. vapo-
reux ; ndrailes u,vsl('M-ie,i-r- : |.aMll.„,s e,,q,„is ou le ren-
dez-\o,H (le chasse ne l,,i m -",i\e,il q,"' ie pret(-xle du
rendez-vous d'amour ; vieux div-eois ,pii tressaillirent peut-
être en écoutant les savants accords de la trompe de Char-
les IX, ce maître en vénerie , tout a été respecte au mi-
L'ILLUSTRATION, .lOLRNAL LMVF.RSLL.
Iu;u des péripctios
(1(> l'histoire dp
iioàsoi\:into der-
nières années, et
le parc immense
de Saint - Ger-
main reste tou-
jours un des pins
he.nu llriiniTisd,.
(■|.||C I ..IlIMnillMll'
vu'illc'S rnriMsi|iip
lEurope envie i
la France.
Toutefois, ce
merveilleux état
de conservation
eut cessé d'exister
a dater de cette
année . s'il ne se
fiittrouvéunliom-
inedinli'IliLTccri
le.- 1,1
d'un.
rllel.
nel^- ,
spirees
liarlesperpelnels
lii'Sdins d ari;en'.,
()u éiirnuvc notre
économe Uépu-
liliijue. La forêt
deSaint-Gennain
a \ u son droit de
chasse mis en ad-
jiidicalifin le Hdu
niiiis dernier. Lo
cahier des char-
ires la divisait en
trois lots, clause démocratique s'il
en fut , car il suffisait de la coalition
de trois marchands de \iil,iillr pour
faire toniher entri' \r- in,i;H> ilr- >:'i-
Luenrs de la Valh;- h- i„)M do-
iii;iine dont nous a\ons lait I lll^lori-
((ue en ipielipies mots. M. l.éon lier-
Ir.inil directeurduyournnfdM Chas-
snirs, s'est in<lii;né, en noble fils de
■•^ainl Hubert qu'il est, à la pensée
de cette profanation . et , sans con-
idl(<r persoiuie . sans appeler
.-nll , U
cul , ni
-1 rendu
ipie a\riiliireii.-ienieiil . .i(l|iHlii:il.nre
de la forêt de S.nnl-iici in.nn . .ni
uioyendelasûumis-Hin-nr, c--i\i'(les
trois lots , ainsi renni> d.ni- iinr srnh'
main, Otte première victoire oblenun
cl eheiement achetée , M l.éon lier-
tranil . fermier pour neid'années d Un
des pins beaux domaincsde France, a
.11 I hi'ureuse idée d'y fonder un club
ili'ichiisxriirs pour sauver la science
de la vénerie du vandalisme do nos
mœurs, comme il avait sauvé la foriH
de Saint-Germain de relui de la spé-
culation , 11! plus implacable de tous
t Muette d ns U lo et de -^•llnt-Ge ni
sans conir.-dit
Le Club des chas-
seurs, en partie
constitué aujour-
d liui , se réuni-
ra pour la pre-
mière fois le jeudi
7 seplenibre. et
fera l'ouverture
de 11 rh'i'is'' .i
tir .1 1 is-uc (I un
joMux dijiumr
pu doit ivoirin u
lu paiilliin delà
Muille rldiiiiu-
- lui it ilii n ^-
liiK 111 (ciitn de
Il f ri t ( i SI ra
la (juc se ri*-
si inbltronl deux
I IIS |i ir M-m une,
du 1" s(pum-
bn au 1"' mars.
Il- 'OCHliire* de
.Saint -Oernuiin .
souslapri'-sidena?
de .M. Léon Ber-
trand . fondateur
du club.
IJu f.'ibicr en
abondance . une
meute excellent»-
pour la chasse
a courre , une
l'Onnelablcà bon
marché, la CJ-
n:aradeiie noble
et facile. d'hom-
mes bien cli*-
vés. des moyens
de transport d'une promptitude pres-
que fabuleuse, tels sont les avan-
ta'jes que nous avons été il même
de constater en examinant les statuts
d une entreprisedoni nous ne saurions
trop louer l.i i>ens cet l'exécution.
L un de nos dessins représente le
pa\ilinii de la .Muette, au iiiomenl=du
ili part dis Micii laires et de leurs amis
piuir l.i chass,- a lir du jeudi 7 si!p-
lenilirr: le Hcond donnera une idi'c
de ce que -eront les rcndez-vous de la
ch.isse a courre lorstiue quarante vig-
ueurs, revêtus d'un costunVe élépanl
et uniforme, s'élanceront, il la suils-
d,' livnlr iliicns nM^nifiques Ci ex-
irll m- -Uf le- II. in - iliin su|x'r!>e
ili\-ri.i ,. ( iiliii M'iliv linisleme plan-
clie ninnlicr.] k> N.iiiiipieurs du jour.
oubhant leurs l'alii;ues et buvant ii
Il iirs sucées, dans le vast? salon du,
pa\illoii de la Muette d'oii l'on aper-
çoit Tint rieur de la salle ii inanjier.
que la presse parisienne doit être in-
\ itée il inaiisiurcr samedi 2 s;'pteinbre
par un brillant dijeuiicr servi dans 1.-"
n yjl pavillon.
M ' fT. FnpfR.is
.-'/V.>.--^-.~ ~ " .
S.1I0D du Pavillon de la Muette
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
i:i
Algérie.
COLOMSATION PAR L LTAIlI.ISSKMKNr DE ri*::MTF.NClKRS Fr.RMES-
M. Alexandre Bouiln, nrcliilcrli' iii^'riiii'vu' , a présente.
au mois de mai, a M li' inini-h;' ilc \:i ;_■ ic, un mémoire
Mir la colonisation dr 1 Aliici ic |..ii l.i niMUon de colonies
pénitentiaires, agricoles, iiulustnelles el imlitaires. ou pé-
nitenciers fermes-modèle*, ("e travail , ré>iill:il il ■ ("ii-rien- I maines l'As-ii^nilili':' nationale , et méritera ce titre une
cieuses invi>slij;ations pendant un voy;i:.'' iti Aliinic, e:i mention pu IhuIhiv chms l'Illustration.
18Ki el 1847, nous a semblé sortir dé l.i rl.i-- ■ .ihluiaiic M. Boiui.i a i-u r>i p,is à faire ses preuves : il a conduit
des propositions dont le déluge inonde depuis quelques S3- | lui-même de grands travaux et connaît parfaitement la
clas.<e ouvrière, l.e 0 mai dernier il avait remis au direc-
teur des .■ih'liers nalionaux , M Kiiiile Tliom.is , en iirojet
(ror;;ani.<;ili.iii ,!.■ |(iii> [■sniuri.Ms ih' ImIiiuciiI [nrliri-
pidcs . ipi il s ciiLj.i,^!':!!! a diri,^ri' Mir Ir- i!r|i,ii icincnls ijui
manquaient de tel ou tel corps d état, et piiucipalrinrnt sur
IWlgérie , où tout est a faire. A ce projet d'organisation
était jointe la nomenclature d'un grand nombre de travaux
utiles et urgents à entreprendre à Paris : corps-de-garde ;
jardins de la colonnade et de la cour du Louvre : fimtaines
'sur les cotés de la place de la Bourse; liàliivient destiné à
réunir les Tuileries au Louvre, el élevé seulemi-nten char-
pente, pour être affecté â l'evposilion des produits de l'in-
dustrie qui doit avoir lieu l'année prochaine. Cette dernière
ment en pure perte aux Champs-Elysées, permettrait de ju-
ger l'effet définitif de l'achèvement du Louvre, de la place
ilu l'.:iir(m-i!'l cl lies Tuileries, de la fondation du Grand-
()prr:i sur ri'iiipl.iceinent du Château-d'Eau , el du prolon-
^eiiieul de la rue de Rivoli.
Tous CCS travaux auraient offert un bien plus grand
construction , en économisant les dépenses faitiS précédem- | avantage , celui d'occuper 30 à -10,000 ouvriers el d'assurer
•dl du péuitencier.
Costumes des colons hiver et été.
leur existence pendant deux ans ; les sommes qu'ils au-
raient coûtées n'auraient pas du moins été infécondes et
stériles , comme les douze ou quatorze millions si déplora-
blement absorbés par les ateliers nationaux.
Les vues de l'auteur, en ce qui concerne l'Algérie, sont
également conçues dans un bon esprit et dignes des encou-
ragements do l'administration
Chaque colonie , exploitée soit par des enfants trou\és de
France , de l'flge de IS a 20 ans , ou de jeunes détenus du
même Sge , soit par des cniiil.unni's civils ou mililaircs a
des peines correclionnellcs -iiini runipiisrc de I 2iil) |iim'-
sonnes , savoir: i, 000 colons -Hiit liiunmes de troupes pour
niainteiur l'ordre , la discipline , et assurer la sécurité de la
cohune . et (ÎO administrateurs el cmployés-
La création de ces colonies ne préparerait pas seulement
la (irospérité future de l'.Mgérie . par le défrichement des
li'iTi'-; iiis(|ii ICI ri'sh''i's inciillrs : rllr lnrnicriit avant tout
ilr lion- iMu riiT> |iiiiir h- lr,i\:iii\ ilrs rh;iinps, en leur ap-
prenant un l'Ial hdnor.ililr qui Irur pinrin-ciait des moyens
d'existence beaucoup mieux que ne le feront jamais les mi-
sérables états auxquels sont assujettis les condamnés dans
[ t 0 e o i-,r oie
l/l
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL
nos maisons de détention. Car la culture manque de bras
(Il France comme en Ali;érie ; les bras intelligents et exer-
ces trouveront partout et toujours de l'emploi , et par cela
iii'Mne les moyens de pourvoir aux premiers besoins de la
\ii'.
Siii\ant la disposition de ses projets, M. Borda voudrait
|ir>nvoir construire cliaqne colonie avec les élèves colons et
l 'S siil(l;ils, de manière il n'avoir pas besoin des ouvriers
du (Icllnis.
i.rs IIHMI pénitenciers seront divisés en 40 bripades , de
£', iHiiriMics chacune , suivant l'use et la force physique, et
siiiiiiiis au n'-iiimo militaire, La paye , fixée il un franc par
jiHir, suliira une retenue pour former la niasse du linge, de
1.1 ili.uissnre , de riialiijlenient, de la nourriture II y aura
par briLMdi' i|u,'ilre appointés et un serjjenl. Ces grades se-
Kiiilcniil'éiéscnnniuM-éciimpensede bonne conduite et d'ap-
liliiile ,111 travail ; et c;t!e récompense , indépeiuiaininent
d'un encoiirafieincnt pécuniaire ampiel elle donnera droit,
srra mentionnée sur le !i\rrl du colon et sur le registre
diirdre et déliit ci\il de l;i colonie.
I.e plan arcliili(liir:il , csaiiiiné parles membres compé-
tenls lie la ,'^nrii'li' liliir dis licaux-arts , à Paris , leur a
paru f;r,-inil, \asle cl l.icii iri-.|.(i>r :
A l'cnlrée , le paMllim il jiliiiiiiislralion , entièrement in-
(lépenil.-ilit des aiiliis liàliiiiiMiL-. : de ili;ii|iie n'ilé, 1rs issues
pour péni'trerdansla/'ccmf-Hioi/i'/f 1)11 ru Mipa«nfo/c, issues
ti'iniéi's par des fjriiles: a leur extrémité, deux pavillons
silues latiTalemcnt et pouvant contenir chacun cent honi-
nics de troupes , avec (oj^ements pour les officiers , cantine
ri accessoires.
Kn ailes , deux vastes corps de bâtiments devant conte-
nir Il s loijrmenls pour les nulle colons, disposés en cham-
lirérs lie \ini;t-cini| personnes, ceux des médecins . chirur-
yiriis, pliarmacinis rni|,I.MTiiM.|il |MMir riiiliniiprie : siillcs
(l'ellHlespimrl'.'liM'rjiicniciil mul iirl m Ir.inc.ii,-. ri ,-ii .ii;ili".
ilrsalrlirrs piiiir Ir > 'iMrr iiMlii-liirl ilrs rIrM's i (.luiis : iiii
liind lie rrs luIinimN Ir- rm-iiir> rrirr rs , boulan c-
rirs, lilMllilri M- .a\\- .!.■ Ii.mi. s.illr ilr polirr rt toutes les
déprniliinrrs nrrrsSiiiiT- riiliii niini ■uiii|ilrment , une
chapelle adossée au pavillon d'administration , des salles
pour les armes et des fontaines pour le service général de
la colonie.
Ollc pi'lilr
■il,. iMlisI,
,lle p,
rt défendue par un pre-
mip.ile . avec corps-de-
nt li> écuries, lesbouve-
l.is déprnilances de la colonie seraient également défen-
dii's par un dniviéme fossé, en dedans duquel les fermes
grandes et iniiynues seraient assez éloignées les unes des
autres pour ne pas se nuire soit dans leui-s divers services ,
soit en casil'incendie.
i-ji lnir:iiit son plan trénérnl de la colonie sur une aussi
^nn.lr ri'lirlj. M lliinil.i ;i\,iil un iloiilih' but D'alinril ,
pruil.iiil riiii| .iiis, rcl rl,ilili>-.i'iiii'nl serait ralimir prnilen-.
liane et cenlr;' il une |iupnliilioii aL'rii-nlr : mais |)his tard ,
lor.sque , les terres étant en plciiir rnliinc les colons se-
raient transférés dans une. autre paiiic ilc I Al^éiie , les bâ-
timents pourraient servir comme icnlieirune commune, et,
au moyen de queh|ii( ^ c linuiiiieiits, on trouverait, réunis
et bien di.sposés , un . jh ■ mairie, un hôpital , une
caserne, un manlie, ili~ r, olr^ ijr toutgenre, des magasins,
(les ;ili'liris, ilrs l'erines même, parla disposition des grands
bâliiiicnls ^■niiipés alentour.
La l'iiiislnirniin d'une colonie de ce genre devra, autant
que pos.silile. se faire sur un terrain d'un seul tenant, d'une
élendiie lie ;i,!2(IO hectares, au centre des terres à défricher,
alin d'éviter une trop longue course aux cultivateurs, et à
la proximité des voies de communication déjà ouvertes.
Une fois toutes les cultures achevées , les 3.200 hec-
tares . en cas de déplacement de la colonie , pourront être
conci'dc'ssoit il des colons libres ou a des militaires, à titre
de rc''compensi' de leurs services, soit même à des colons
du ]iénilencier (huit le temps serait terminé , et qui, par
li'ur bonne conduite , auraient mérité ces concessions. Un
règlement particulier déterminerait les différents travaux
.luxipiels ils auraient à se livrer.
Les dessins que nous publions représentent des colons dé-
IVichant des p.ilmiers nains. Costume d'hiver ■ un pantalon
lileu large , une ve.ste-calian , avec souliers et guêtres , et
une casquette portant un mmiéni ro.sd/mc (/'c(c' .• culotte
(le zouave en toile grise, guêtres srrranl la jambe, bourge-
ron en laine blanchâtre ; un graiiil rliapeaii Je paille portant
un numéro, a\ec un ciiinre-iiiniiie en étoile de laine.
D'après les calculs de M. lioiirl.i , le .succès des colonies
pénilrntiairrs projetées ne présenterait aucune chance diiii-
leu.M' Os calculs portent l.i dépense priiihinl cin(| ans. tiiiis
Irais f. Ils de materii^l ilél.ibli.ssement, île culture , de ni.iir-
nliiir, etc, a l, li'i.lKKI lianes. t,indi> que le revenu sele-
MMMit a ."i.iriO.IHHl lianes ; ce qui iliinnerait .■lo i;nuveine-
ment un bénélice de I .SA'i.IMMHr.incs Lt pendant cette pc-
iiodc riOataura hiil exécuter dis tia\.iii\ importants qui ne
lui cririteniul (|ue la \aleiii- de- maliMiaiix : il .iiira soldé et
enlirti'iui nu per.-nnnel de l.ilill iniliMiliis , crée un mati'-
nrl consiilerable. (h'S liuiiNrii.-, lie-, X aclicnes, drs bergeries,
nus eu euMure et en plein r,r|iiHiit lî.iOO hectares de terre,
fondé enfin un centre de population et de commerce.
("es avantages ne sont pas h^s seuls qu'offrirait le sys-
tème de colonisation de M. Itourla. Kn ciîdant , autour du
[.1 n.iencier, il des colons libres d(^s parties de terrain que
le Miisinagede létalilissement inel trait il l'abri d'un coup
de main contre 1rs .Vralirs, on ne tardera pas à attirer une
nombreuse piipiilation eiirnpi'enne ipii répandra l(>s bienfaits
de I agrieiiltiiiT perfectionnée, et léiissira il conquérir mo-
laliMiieiil les indigènes ii une assimilation plus jirompte et
plus coniplete. Notre colonie africaine, en effet, ne de-
mande que des travailleurs pour devenir la plus prospère
cl la plus riche de toutes nos colonies fran(;aises.
Clironiqiie ■■■■•sicale.
Le zèle des théâtres lyriques ii persuader ciuc tout est pour
le mieux dans le meilh'ur des mondes possibles ne s'est pas
ralenti . [lour ain>;i dire un seul jour depuis notre dernière
chriiniipii'. Nous ;,\. III- ilii |,n.iivl..|riiMriil a\rc' ipirllr acti-
vité surprenante la iiiii-iiini. - e-l |,;iilniil miiiiliei' pendant le
courant du moi.- il. I el Miii.i .pie , Mml.mt être de tunl
point digne du cnliillieiireiniiil et du milieu , la lin de ce
mémo mois nous ih m ne ,i \ mi- remlre eiimpti! aujiiiird hiii de
Iroisd'.uvnw nouvelle- a l.i lois; un ballet , un opéra-comi-
que et un niystiM'e.
Un mi/stire! Il a pour titre I'Éden. On y voit et
entend chanter Adam et Kve . le démon et le Père éternel
lui-même; mais toute leur art ion -e linrne a -e lever pour
dire leur morceau de chaiil . el ;i -e li-miui .i|iie-i|u ilslont
dit. Du reste . leur costume e-l p.iil.nleijienl -emlilalile ii ce-
lui que tout être civilisé a l'habitude de mettre lorsqu'il
veut se présenter décemment devant le monde, Ddii vous
devez commencer ii croire qu'il ne reste du prélimdn nns-
ti're autre chose que le mot , et qu'il s'agit tout imiml'nt
d'assister ii un concert. Mais ce concert él.inl compo-é
de musique de M. Félicien David et de vers de M. Met y.
vaut bien sans doute un peu d'attention particulière, inéme
par le temps qui court.
On a si souvent reproché il M. Méry l'abus desa verve poé-
tique , son in-.iliable lantaisie d innovations . qu'il semble
façon a r.ijeiiiiir un .-iijet pour le eiiiip all^^i \ ieux (pie le
monde. Nous na\iins donc pas a raconter de quelle manière
il a compris Ifolen et avec quelles couleurs nou\ elles il l'a
reiiilii. Vous avez sûrement lu la picmiere (jage ilii livre de
Moïse , ou tout au moins les pn^niei- alnieis du Discours
XII r l liisliiire uninersMe : vous .-a m/ iilnr- l'iilii'icmenl ce
lient il e-t i|iiesliiin. Toutefois 1" ]Hirle n :i p.i- entendu sa-
crilier I iilii'rrnirlil >.- illi.il- I..1 -lene -e p,i— e , COUime On
sait MilLMiremenl ilii lein|i- mi li> hete- parlaient; dans
ILilen de .M Mer\ , il ; a iiueiix ipii' cela : des chœurs et
des il;in-e- lie l'ieiirs , c'c'st-ii-dire que ces odorantes cho-
risle- Mini ren-ees danser, car au vrai , dans ce que nous
avoii- \ 11 , .iiieiine n'a bougé de dessus sa banquette , pas
plus les Fleurs jiremier et second soprano , que les Fleurs
ténor et basse. A cela prés, l'idée est ingénieuse et neuve.
La nouvelle partition de M Félicien David , disons-le de
suite, renferme de véritables beautés. On y reconnaît aisé-
mentl'autenrilii Di'sert et de (Itrisliiplie Coloiiib, a un cer-
tain cacliel de di;tincti(iii dans le tour des phrases qui lui
est tout particulier a de eerlaiiie- liiies,ses de détail dans
l'orchestralion qui lui app.ii lieniienl aussi en propre, enfin
à cette teinte tmit iiidi\ iiluell" ileilmiee rêverie , de poésie
tant suit peu entachée île ni\-lirile qn on trouve générale-
ment ilan-cliaeuiieile-e- \ le- importante-qiii ont preci''dé
celle-ci Cependant 1 iiiipre— uni que le publie en a leeiie n'a
pas été aussi ra\iiialile qii on aurait dû lattendre , d après
lo talent et la renommée du compositeur. Cela tient, croyons-
nous , bien moins an mérite intrinsèque de l'œuvre i^pi'au
choix du sujet lui
été présenti' Non-
par ce que iniii- a
rait rien cunceM
nant , que celle i
ce genre. I..1 inn-
barbarie el il ilih
rituels ( /»(/,, M r;ii
il voir. Lllllerel
complet
rhriili
et surtout à la manière dont il a
is assez fait comprendre, sans doute,
lit plus liant. En effet , on ne sau-
pliis froid , de plus désillusion-
• ilexpiiser une œuvre musicale de
n\ele de ce (lue , dans les temps de
un appelait lesjeuxscéniqiiesspi-
ihlilli eut été peut-être pivlelalile
nt ete
.lll-
liilllt a cela qile,(le|unte,-le- -alle-
enlrnil liiihitiiellement de la musique , celle de I U-
iil redit la iiinins propice il l'audition de ces
- Kriques, qui ne sent franchement ni mor-
t .'ni pièces de the.'itie C'est a ces diverses
I il tant atlrilmer I .
reni qn
Kll il ,r
ennie.- qi
l-'l-
■il pi
liait a YKiIrniU' MM F I),
,pi,-l,,,.nienl--enl,
iil,iudi,-jemeiil> Ce
;A(him), la cavatii
{E\e) , le chœur et I
reste, comme toute
doute besoin délie
comprise et miei
•,l|,l,l-ile
liplli
e-qile
l.lMlll
e-,|e
indifli
1 Mer
irin
,,
i.i|ller
M
le- Fil
lll lin
nr- ,\
r
lue j.lii-ieni- 1,11- piMir être bien
t.lni.i qn il en - mus rêpele-
ronsa M. F. Da\iil ce ,|ne inni- lin iimui- .lej.i dit dans ces
même- ci.liiiiiie- : qu'il iloil Songer eiiliii a almrder toiil de
liim leilranie iMiijue, Fn l'ait d'art musical, le drame ly-
rique-ml e-l leellemeut dans nos mœurs actuelles, d'il
Il e-l |i.i- il iiile -Miiphiuiie, d'oratorio, de mystère qui l'en
pni—e ilei.ii r D'.iilleurs si l'ode-symphiinie était une
heiiieu-e iiiiii\ eaiite , il n'iMi cst pasdc'mêiiie de l'espèce de
diame iiuenti'e par -aiiit Philippe de Néri . encore moins
parcoii-eqiieiildes repie-entalions Spirituelles du tempsdes
ciiiiNiilcs . et TiiitieMiciete prï'sente ne se IrouM' guère dans
aucune th'S conditions voulue- pour bien apprécier le mérite
des œuvres de ces deux deruiers genres
A tort ou à raison , notre monde parisien , frivole quand
même, iiréfère momentanément des ouvrages comme Itsi-
finor l'asi-iirrllii; il fuit bien l'avouer Ce'litre est celui de
I "pera-comique nouveau représente la semaine dernière au
théâtre de la rue Favart C'est un opéra comique véritable ,
ni plus ni moins, La . pas de vaine preteni ion au stx le ré-
trospectif, pas (l'ambitieuse tendance non plus aux fiinnes
encore inconnues. Le but des auleursest simplement d a-
iiiiiser le public pendani une soirée: ils v reus.-iisseut . el
Miilatiiut, M. lis bien que de prime-abord ci'la u ail l'air de
rien , c Cst cepenilant beaucoup . au teiiip-ou nous .■sommes,
(jue de l'.iire passer une soirée amusante a des gens ipic
tout semble MHiliiir éloigner des. iniiiseuients. Il signer Pas-
carello est donc un de ces héros de boulToniierie connue il
ne dé'plait pas <\^n rencontrer parfois. C'est un bon vieux
profess<!ur de chant, une variété de l'espèce de ces fameux
mailles de chapelle • dînant de l'autel el sounant du théà-
tn^ . » aimable vaurien dans sa jeunesse, philosophe com-
plaisant après l'âge mùr . excellent homme au demeurant
.Si bien que pour tirer deniliiiria- -mi -enlinieiilal filleul,
ipii n'a rien eu de plus pre--e que il 1 nleverdo couvent une
fort tendre novice , il pou--e I hênn-me jii.-iju'a epous<,'r SJ
\ieille bonne, acariâtre et dcspolu a légal de toutes les
\ iedli- bonnes connues deiiuis l'invention de l'opéra-corai-
qne Comment et pouniuoi cela se passe ainsi, nous ne
nous chargeons pas de l'expliquer; M>I. de Leuven cl
lirunsvick peuvent seuls le faire bien comprendre, au
moyen d une suite cf>ntinue de mots et de situati(ms copii-
fpies très agréables à voir se succéder comme dans une
lanterne magique.
Venons à la musique qui est plut('it noire fait. Olle à'[l
signor l'ascarello e-tile la ciimpo-ilinn de .M Henri Potier,
lil's de l'acteur célèbre ilmii li nieinmie e-l -1 chère a Ujul
bon rieur. .Sur un c. \,i- lie- le^ei 1er pu-iteura brodé
une niusiipie non iiioin- leuere . écrite avec simplicité, se-
mée de t il- gracieux, nullement fatigante a écouter; l'une
portant 1 autre, enfin, la [lartition et la pièce ont légitime-
ment réussi Fntre autres morceaux qui ont été 1res ap-
plaudis, nous citerons la romance de Paula : Sous séparer
c est impossible, et le trio final du premier acte. Au second
acie. ipii est aussi le meilleur de 1 ouvrage , nous signale-
rons plus -pici.ilenieiit II' cliariiianl duettino d'introduction.
I"s ciiiqilets lie i'iiM iiiellu . cou(;us avec beaucoup d'esprit
et qui mit en le- liuiineiiis du bis. ainsi que c(;ux de Paula,
dan- la -cène lie- eliii-.inle lin la |eniie pensionnaire se
lliillM- ile^lii-|.e en finilai le .li ill\ rlire, -celle pendant la-
quelle le nie ne ili-ciinlinne pa-, el qui -e termine par un
fort bon trio. Enfin, au troisième acte, la romance de Gae-
lano, morceau d'expression d'une mélodie et d une liarmo-
nie également distinguées.
Nous avons fait la part de l'éloge, la critique réclame la
sienne. Nous dirons donc que la partition de M. H. Potier
pèche par un excès bien rare aujourd'hui, lexces de sim-
plicité. Son instrumentation manque d'attrait et de variété.
Etre clair et intéressant à la fois, c'est la le secret des
grands maîtres ; secret , il est vrai, très difficile à pénétrer,
el qu'on peut reprocher à l'auteur de la musique d'il si-
gnor J'ascarello de n'avoir pas assez pris la peine de cher-
cher.
La pièce est jouée avec l'ensemble le plus satisfaisant
.M Mocker, par le rôle de Pascarello, est entré dans un
genre de nile tout nouveau pour lui. 11 fa joué d'un bout
a I antre en (excellent comédien ; et c'est, pour lui comme
pour le tliiàtie, une nouvelle source de succi'-s. Made-
m ii-elle l,i\ii\e a chanté comme ii son (ordinaire , par-
laiteiiieiit bien Les progrès de M .lourdan sont de plus
en |iliis iiiilalili- -iiii- liais les rappnrls F^nlin nommons
emaire inailaine ■|'liib:iiil, très benne ilnegne, ipii rciii-
|ilit dignemenl ilcpm- peu 1111 1 inplni qui était demeuré
\acant'a ce théâtre ilepiiis la retiaile de l.i spirituelle ma-
dame lionlanger .M (iri.Lnon et lune lil.inchard con-
courent cmnenablement a la bonne cxeriilinn du nouvel
opéra-comique de IIM. Pottier. de Leuven cl lirunsvick.
Revenons maintenant ii l'Opéra où nous convie une foule
d'autres séductions Le sujet du nouveau ballet, si tant est
qu'il y en afl un. parait avoir pour but dedcinontrcr qu'il
n'est aucune des inventions modernes qui n'ait été inventée
bien avant nous. Ainsi, sans remontera l'antique Scylhie
a-i,itii|iie I auteur de Msida a découvert que. ii uneé|K)que
pi- lrii|i I l.iejiiee de la nôtre, une phalange de JVsiii'ieniif*
e-p,i.jniile- ,i\.iit héroiquement franchi les mers et était alK-e
liiiiili 1 il. m- nue île île 1 Wniiipel des A(;ores;. une républi-
que 1 m elle.i m. 11 pln-iiin- -lecles affranchie du joug (îdirux
des li.nnnie- i;ile - .i|i|iel,iii l.i Képublique de Graciosa. el
a\ait pus peur tilre : la .■'ucietê des femmes indépendantes.
Ces miiilenies Amazones sont donc les hermiiesilu baMel de
.\(M'(/(i.el Nisida est la |ierle de 1 ile, Vuiis n attendez pro-
bablement pas (pie nous vous racontions I action d un ballel
(|ui , après tout , n'est (ju'un prétexte a pirouettes, enlre-
chals , pointes, ronds (le jambe et mille aulrcs évolutions
féminines plus ou moins fascinantes (> qui caraiteris<> par-
liciilierenienl celiii-n el le lait lin peu ililleivr île -e- pareils.
ce sont lie uenlll-ca-ipies lie le-eie-lilne- île x i iln |il llcUSeS
ciiiras.ses. de Imigiies el Unes Ir.unpelle- le liiiit lies bril-
lamment dore : |'iuis des alliires gi.irieiiseiiieni martiales et
des jupons de la hmgueur la pins exi^ne |.M-iblc, Dans les
pas (le danse mademoiselle Fiiocu a ele peiilLinle de viva-
cité : ses pirouettes sont tellement prodigieuses, qu'on peut
dire que pei-sonne n eut jamais autant d'esprit jusqu il la
|ioinle des pieds Mailemoi-elle Plunkelt est d'une grâw
charniaute dans se- pn-e- ni.nlemoisellc Maria d'une ra-
vissante lierte (l.iii- -e- ^e-ie- lie reine des Auiazoïiesi. Ma-
demoiselle l.nigi.i l.i-liiMii, lie 1,1 célèbre l.imilledece nom
a débute par un pas seul ipu lui a valu de bons applaudis-
semeuls l.es houuitfs. cmnnie on le pense bien . occu|ionl.
d.ius un b.illet de celte nature, un rang tout-a-fail secon-
daire; aussi n en avons-nous rien à dire. ii notre grande sa-
lisfiction ('ependani de sévères arist.irnues en matière clii»-
régraphique semblent prelendre que le ballel de Xisida
annonce la décadence du genre Si l'on n'y prend larde.
assureiil-ils. la dan-- sera'av;int peu delnmce par la plas-
liqiie, (M'I art seilncteiir récemment introduit eu France par
M et inail,ime Keller, Nous ne nous prononcerons |vis dans
iineaiissi grave ipieslion ol laisserons agir le temps suivant
ce qn il croira bon a cet cgard .Seulement . si la plastique
veut, en eflet, usurper le luuivoir de la danse, nous lui con-
seillons de s % mieux prendre qu'elle ne la fait dans colle
malencontren.se .scène de natation Transporter les bains
Lambert sur le plancher de l'Opéra, l'idée était assez pi-
(piaute ; mais elle n'y a pas réussi , et , franchement, m la
plasticpie ni les .Xmiizones des Açores ne se sont n.ontrée.-
en celle situalion avec avantage
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
lô
La miisiqiip dr Msida est d'un cnniinisili'ur i|ui .1 |ikis
<rinK'fni> donne dos prouves de talent à r(_)|iérii DmiMieles
(hi Uiiiblediiwiireux et les airs de danse de l'Apinirilinn,
déjà sortis de sa pUiine, assuraient d'avanee ([ue nons n'au-
rions que des éloges à donner a la nouvelle |)artitiiin de
M. Benoît. Aussi est-elle écrite réellenienl av<>e \ine loua-
ble franchise de mélodie et une grande richesse dinstru-
meutation.
Les deux premières représentations de Nisida ont été
liréeédées du premier acte du Comte Ory, dans lequel a
déliule madame Mulder-Duport, par U' rôieihipage Isolier.
Toute IreniManlela [iremiere fois, plus rassurée la seconde,
madame Mulder, (pi on a souvent ap|ilau(lie il y a deux uu
trois ans dans les salons sous le nom de niadeniuiselle Lia
Duport, a obtenu un succès très honorable, qui ne fera sans
doute que s'accroître, lorsqu'elle sera appelée h remplir des
rôles plus importants.
Enlin, pour achever dérégler nos comptes avec l'Opéra,
disons (pie M, Marié, qui s'en était retin'' il y a quehpie
temps avec une voix do ténor, vient d'y rentrer ces j(uus
passés avec une voix de baryton, et que le changenient pa-
raît devoir tourner à son plein avantage. C'est par le rtile
de Charles VI qu'il a reparu devant le |ud)lic de la salle do
la rue Lepelletier, (pii lui a fait le meilleur accueil.
M. Duprez et madame .hilian Van (icliler ont fait aussi,
dernièrement, leur rentn e dans les /fujuenof» et ont reçu,
principalement au beau duo du quatrième acte, de bruyan-
tes et nombreuses marques de sympathie.
G. B.
Académie des Sciences morales et
liolitiqiies.
rnEMIER SEMESTRE DE 1848.
L'Académie des Sciences Morales et Politiques vient de
recevoir un de ces hommages publics (jui sont trop rare-
ment d(''cernés aux corps savants N'.aguere, le chcrdu pou-
voir e\-eiUif, (laiisiuie \ isile ollieielle (|iii lui était faite par
rinslilut. deniand.iit.au président de cette .Vcademie le con-
cours actif de ses membres pour l'aider à r tablir l'ordre
moral si deplorahlement perverti depuis plusieurs mois, et
sans lequel la stahilile de l'ordre matériel ne saurait être
que passagère. Les titres de 1' .académie sont incontestables,
et on ne peut qu'applaudir à l'invitation qui lui a et' faite.
En attendant ce nouvel enseignement, il n'est pas sans
intérêt de reprendre les travaux aceom|ilis pendant le pre-
mier semestre de la jirési'nte année.
— Dans un Mémoire sur Y Im'gdlilc des richesses et les
causes (juilcs prodiiisnit. M. H. Passy s'est ]iniposé de d -
montrer (pie si dans lUrdre social le soin d en n ;;Iit I.i plu-
part des dévelôppenienls appartient il la sa-r^se liiiiii.iine,
il existe cependant des lois primitiv(>s (]ui en déterminent
les parties essentielles et des faits fondamentaux qui de-
meurent les mêmes sous toiiles les fiirnies comme il tous les
âges de la civilisatiiui. Parmi ces faits il n'y en a pas de
plus apparent et de plus incontestable que l'inégalité des
richesses. Jamais, en aucun lieu ni ii aucune épo(pie, les
hommes n'ont eu la même part aux biens de ce monde,
jamais pareille somme d'aisance ou de misère ne leur a été
dévolue; de tout temps, il y en a eu de plus riches ou de
moins pauvres que les autres, et avant mémo qu'ils fus-
sent sortis de la vie sauvage , l'indigence dont nul d'entre
enx ne pouvait se défendre, avait ses degrés et ne pesait
pas ('gaiement sur tous.
C'est que d(^s causes nombreuses et diverses trav.-iillent
sans cesse à différencier les conditions et les foilunes. < es
causes sont primordiales, et il n'est pas donné aux homnus
d'en supprimer ou d'en contenir l'inflexible et persistante
aclivit'''.
La première et la principale, c'est la disparité des qua-
lités natives. La nature ne dispense p.is .-ies dons d'une
main impartiale; elle a ses ( lus et ms délaisses : aux uns
elle prodigue toutes lesdistinclions, toutes les supériorités
du corps et de l'esiirit: ii d autn\s elle refu.sejus(praux ap-
titudes les plus vulgaires; elle produit des forts et des fai-
bles, des insensés et des sages , des idiots et des g nies uni-
versels, et des lioninies (iii'ellc ciéc (li^.^cnililaliles ne sont
capables ni des in(''iiie< cllnii^ m dr^ini' ,- -ii(c(''s.
A cette cause toiilc-|im-^,iiilc d inci-.ilitc >'en joignent
d'autres in peine moins ellieaces. .\insi la vie humaine est,
durant tout son cours, sujette à des accidents dont la va-
riété infinie .se reproduit dans les situations. Ni les malaises
ni les inrirmil('S ne sont également le lot de tous. 11 est des
hommes (pi'ils épargnent; il en est d'autres ipi'ils acca-
blent et mettent ihins limiiuissance de sulisister sans ra>-
sistanee d'autrui. De même la mort frappe au hasard, et
souvent ses coups, en tombant sur des chefs de famille,
vouent il d'affreuses misères ceux dont ils étaient les in-
dispensables soutiens. Dans cet ordre défaits; il n'y a pas
jusqu'à l'inégale fécondité des mariages qui n'ait sa part
d'innuenco et ne contribue sensiblement à semer dans les
fortunes de nomlireuses et considérables diversités.
Ce n'est pas tout : le sort aussi a ses caprices, et sur les
inivres de l'homme pèsent des éventualités dont la pru-
dence la ])lus éclairée ne saurait toujours tenir suffisamment
compile. Pas d'entreprise, pas d'affaire, ]ias do spéculation
industrielle ou mercantile dont les résultats soient jamais
complètement assuivs. Vainement une opération .'<einble-
t-elle réunir toutes les conditions de succès d( sirables, un
sinistre impossible il prévoir peut la faire échouer et en-
traîner la ruine de ses auteurs. En revanche, une cause de
fortune lient couronner une témérité folle et donner l'opu-
lence a (pii n'a\ait pas droit de l'attendre. Voici des cam-
p:ignes ou miiiissenl de riches moi.-,.-ions; survient l'orage
ou l'inondation, et sur le même sol ne s'étendent pas des
ravages semblables; bien plus ; le fléau ipii dévaste et sté-
rilise quelipies points du territoire peut ne faire iiue déposer
sur des ehiiiiips voisins de nouveaux éléments de fertilité.
.\insi encore, on voit I (iur,i.u:in (pii engloutit les vai.^-eaux
d'un armateur en en |loll^s,llll d'.nilivN plH> lapidement au
port. Partout l'homme n .il-iI ipie .^oii> l,i ijn'ii.ice d'acci-
dents dont le principe (m li,i|i|.c ;i ^, ,s i,vard>, et qui , sous
le nom de hasard, viennent se jouer des calculs de sa pré-
voyance et répandre de toutes parts des prospérités et des
disgrâces également imméritées.
Abordant une autre face de son sujet, M. Passy montre
comiiicnt la richesse tout entière est de création Humaine.
• L'Iiiiniiinite tout entière, dit-il, a commencé par subir les
misères de la v ie sauv.ige. A chaque |irogrès de son activité,
de noiiM'Iles riche.s.;es vinrent alléger le poids de sis m;uix
et donner laisanee a ceux dont (>ll 'S étaient liiiiN r;ige .\iiisi
s'éle\erenl siiccessivenieiit au-dessus de l'indigence com-
mune et primitive des familles investies des avantages de
la iiropriélé. Kieii (l;iiis le niouvenient ifascension de ces
familles ne fut préjudiciable aux intérêts de celles qui ne
surent pas aciiuérir ce bien-être. Loin de là , les éléments
de prospérité acquis par les riches fructifièrent au profit de
tous ; les capitaux et les connaissances recueillis descendi-
rent éclairer, féconder le travail des masses, et de nom-
breuses améliorations se réalisèrent dans leur condition.
Tels sont les faits dégagés de toutes les complications qui
en ont voilé l'essence. A mesure que la civilisation a né-
ployé sa puissance, on a vu grossir les rangs en ii(jsse.ssion
de l'aisance, s'édaircir ceux où se fafsaient sentir les pri-
vations, et dans ceux-lii même. Ic^s pii\.ilioi,isdii]unuerd in-
tensité et de rigueur. Eh bien ! l(Hd ailoïc ,|u i| on sera de
même dans l'avenir, (^'est a la science a degagei les sociétés
du joug des misères qui assiégeaient leur berceau, et plus
la science multipliera ses conquêtes, plus croîtra le nombre
des hommes appelés aux jouissances do la richesse, plus
s'amoindriront les souffrances de ceux qui ne parviendront
pas à les obtenir.
— Chaque année, l'Académie charge l'un de ses membres
de la mission d'étudier en Erance ou à l'étranger les ipies-
tions sociales, économiipies ou industrielles qui lui parais-
sent mériter de fixer .--on attention, (.l'est ainsi que la Corse
et la Bretagne ont été réceniuK^iil visitées par des acadé-
miciens, diplomates pour ainsi dire de la science. En 1841J,
M. Blanqui a été envoyé en Espagne [lour faire un raijport
sur la situation économique et morale de l'Espagne. C'était
une mine curieuse et intéressante a ex|iloiter. Car, comiiie
le fait observer le rapporteur, l'Espagne passe depuis long-
temps pour un pays inuiiobile, en dépit de sa m()bilité ap-
parente, et l'Europe, qui la visite peu dans son isolement,
la suppose toujours aussi arriérée que la Turquie. Il n'est
pas do contrée, en effet, qui ail conssrvé, d une manière
plus évidente, les traits les plus saillants de son caractère,
et qui paraisse être restée plus semlilable il elle-même mal-
gré les révolutions qui l'ont bouleversée. Mais, au travers
des vicissitudes agitées de son histoire, l'Espagne a subi;
comme les autres États de l'Europe, la loi du mouvement
social qui les emporte tous vers des destinées nouvelles et
inconnues. Les recherches du rapporteur se sont principa-
lement fixées sur l'agriculture , et de l'exposé des progrès
remarquables faits par l'Espagne dans ces deux éléments
de richesse il est arrivé à signaler leur influence sur les ha-
bitudes et les mœurs de la nation. Les changements sont
de deux natures ; ceux qui se rapportent ii la vie physique
et ceux qui ont modifié plus ou moins profondément la vie
morale des Espagnols. Les premiers frappent tellement le
regard de l'observateur, qu'il suffit de les énumérer pour
ajiprécier le chemin que la civilisation a fait en Espagne
dans ces dernières années. Le peuple espagnol est aujour-
d'hui mieux logé, mieux vêtu, mieux nourri qu'au commen-
cement du siècle. épo(pie il laquelle do notables progrès
s'étaient déjii réalisés. Et quoique le mouvement d'amélio-
ration varie d'intensité et de profondeur selon les provinces,
plus rapide et plus complet sur le littoral que dans l'inté-
rieur, dans les montagnes que dans les plaines , dans les
villes que dans les campagnes, on le retrouve partout ii des
degrés divers, florissant et croissant tous les jours.
La suppression des coineids ,i ci • Miuic de l;i ilisp;iri-
tion ]irogressive de la mcndicilc, (|iii c|,hI ahmcidcc sur
une échelle immense par les lilieijlne- udi'iosee.^ de- moi-
nes. Une fouled'honimesoi-d's -mil ;iiii-i re', eues l'ucccnient
au travail, pendant ipie le- \a-lcs d .niies ijin étaient
soumis au régime iiiiprodiiclii de l,i iiciiii-inoite. i-eidi'.iient
peu il peu dans la circulation et leeeMiient une iioiiNelle
vie. La grande excitation produite en i'.spaLeie |iciidanl l;i
guerre de l'indépendance, les e\eni|ilcs ineiiHnvdiles d ('■-
nergie donnés en même temps sur le ineine linei- p.ir trois
m-aiides nations. l'Espagne, l;i l'i.inee ci r.\n-|e|eiTe , ont
iie;iuconpconlriliU('' a y développer re-|,i]l deidirpiise, le
tr.ivail, les éléments de production. \\ elliniiton , d une |iart,
les maréchaux Soult et Sucliet, de l'autre, ont rendu de
nombreux services ii ce pays, et il faut lire leur vaste et
glorieuse correspondance pour apprécier la véritabli^ part
qu'ils ont prise dans la transform.ilion exlraonlm.iin^ de
l'Espagne dans ces derniers tem|is. L;i pliqcnl des essais
exécuti''S depuis la paix de 181 i avaiiuit ele conimences ou
indi(pies p:n' eux et on en trouve la trace brillante dans
lent .idininistialKin iiiilil;Mre Mais, si au point de vue ma-
t'.'riel I Espagne est en voie de progrès évident, sa richesse
morale n'a p.as suivi le développement de ..-a nidicsse indus-
trielle. Le progri's des honnnes ]\'c-\ p.i- encore .i l,-i liaii-
teur de celui des choses Lii ila-se nioM'iine, iiueslic du
pouvoir politiiiiie cl (pii L'oiueriie rcell ni [kic -e,- in-
fluences, niampie de- Iciiile- (|ii,ililrs inoiide- (|hi rendent
seules le pimvoir re,-pe( t.ilile .iiiv iH,|,iilali,.n.-. I.:i liherté,
dans ce pajjs, coiisiMve cucore Iroii les allures du despo-
tisme. Néanmoins il est juste de reconnaître que les Esp;i-
gnolsont fait un pas immense dans la carrière morale. Ils
s'attachent de plus en plus ii l'ordre, et ils se iirennenl
facilement d'une sainte colère contre les hommes (pii es-
saient de la troubler. Us ont une bonne ;irniee qui tend
complètement ii perdre les habitudes iireliaiennes. Ils es-
saient de mettre de la clarté al de 1 économie dans leurs
finances Iju'ils ;iclie\eid l'œuvre si bien conunencée et si
visild ' de leiM reueiiei.iiion par la création d'un bon sys-
tème d (' lia Miiiiji |Hilil ipie , et dans vingt ans d'ici ils au-
ront lait du clieniin pour un siècle.
— JI. Mignet a communiqué un mémoire sur la formation
politique et territoriale d'Espagne, qui fait suite il ses pré-
cédentes lectures sur la formation politiipieel territorial,' d;'
la France, de l'.MIemagne, de l'Italie et de l'Angleterre, .^i,
comme la France, l'Kspiiene se constitua p:ir la c(ui(picle et
eut pour l'iiniie (r;iiilonle l:i monarchie, des dil'fcrences es-
sentiidles cxisleiil |.niir ces deux |ia\ s (fins l;i nature et la
(lireclioii de l;i c(iii.|iiele (pu, pour [Espagne, r.'ndircnt la
ro\ aille pin- .iNsoliie cl l;i colicsion leriilonale moins forte.
Sim.iid la r,'iii;iii|iie de .M .MilmicI, celle c(MH|iiéte, au lieu
d'être eveclllce p;ir des rta- colllre de- lelld.llailTS , U
fut par de- Européens contre des ( Irienl.iiix. par des chri'^
tiens contre des Arabes. Au lieu de rajonner uniquement du
centre ii la circonférence, elle s'avança du nord au sud sur
trois lignes parallèles mas séparées. De lii vient qu'elle eut
pour objet 1 assimil.ilion (hideux races ennemies par l'é-
tablissement de riiniformilé de croyance, et pour résultat
l'incorporation partielle du territoire. La guerre étant reli-
gieuse, le principe de la monarchie fut catholique, et la dé-
possession des Arabes se poursuivant par trois endroits, il
se forma trois Etats distincts. L'esprit exclusif de la crov.ince
victorieuse domina dans le gouvernement, et la séiiaratiou
des royaumes d'Aragon, de Castille et de Portugal se main-
tint dans la Péninsule; il y eut moins d'unité et plus d'au-
torité qu'en Eranco. Le récit des luttes subies par l'Espagne
pour arriver à sa constilntioii polili(pie occupe la plus
grande partie du mémoire et explapie comment le peuple
espagnol, avec un esprit rendu eiitreiirenant par l'habitude
de la conquête, opiniâtre par la lon.ueurdeia lutte, altier
par la continuité de la victoire, implacable par la nature
particulière de la résistance, déborda sur le monde. Sa
croyance religieuse , étroitement confondue avec sa natio-
nalité, le réservait, dans le seizième siècle, à offrir l'expres-
sion la plus obstinée du système catholique dont il allait
être le gardien fidèle on Espagne et le soutien armé c'u
Europe.
— La séance publique annuelle de l'Académie a eu lieu le
23 août. Elle a été signalée par un discours de M, Charles
Dupin, dans lequel l'auteur a retracé un peu longuement l'his-
toire et les travaux des principaux membres de sa compagnie,
et par une notice de M. Mignet sur la vie et les travaux de
Jl. Bignon. Personne n'ignore avec quelle sûreté de jugement
et quel éclat de style le secrétaire perpétuel de l'Académie
sait périodiquement et ii la grande satisfaction de ses audi-
teurs mêler le récit des détails lexicographiques au tableau
des événements politiques. La vie de M. Bignon, sans avoir
l'importance historique de quelques-uns des portraits tracés
précédemment par M. Miguel , de Merlin , de Tallcyrand .
de Sieyès, etc., se recommande cependant par sa participa-
tion aux événements diplomatiques des dernières anniia's de
l'Empire. Le nom de M. Bignon doit surtout son éclat au
témoignage suprême que lui laissait le glorieux exilé d(!
Sainte-Hélène en le chargeant par son testamnient du soin
de transmettre ii la postérité l'histoire des traités et des
négociations de son régne. Dans cet oiivra;je, M. Bignon
s'est montré narrateur lideU^ , compilatimr exact, mais ses
conclusions ne sont pas toujours ai ceptables. ou du moins il
ne sait pas leur donner l'empreinte d une logique irrésis-
tible et entraîner les coinictioiis Notre époque n'a [las ou-
blie la p.irl (|iie M lliL'noii;ipri-' ;iii\liilles lil.er.ile- de la
ItesMliiali.ill S;i |i,irMle reccN.id un c;n,ielere d ,iii|i n ili' de
l;i part ipiil avait prise :iiix tniilés de ISi;i, |ioii]| de départ
du gouvernement de la Kestauration.
Cesl il celte même séance que l'Académie a proclamé U
résultat du concours ouvert devant elle. Dans la section de
philosophie, M. B. Haureau a obtenu le prix sur \ examen
critique de la pliilosophic scolastique. Dans la section mo-
rale, r.\cadémie demandait de recherchcset d'ejposercom-
paraticement les conditions de vwrali té dis classes ouvrières
agricoles et des populations vouées ai industrie manufactu-
rière. Deux mémoires, l'un de M. E. Bertrand, l'autre de
M. Edouard Mercier, ont obtenu des mentions honorables.
Dans la section de législation, de droit public et de juris-
prudence, le sujet propose i'[;i'dlarecherclte de l'origine des
actions possessoires et de leur effet par la défense et la pro-
tection de la propriété. Deux mentions honorables ont été
accordées, l'une a M. .T. Shnv/.vl, l'autre a M A .Seli^mann.
Le prix (piinquennal de la lonilation ik'. .\.. de Morogues.
offert au meilleur ouvrage sur l'état du paupérisme et le
moyen d'y remédier, n'a pas été décerné. 1 , Vcademie s'est
bornée a 'déclarer (piCllc avait ili-lingue deux ouvrages, le
premier de M M.iilc ni inlilidc du l'uiipérisme en France
et des miDjeiisd'ii lemi'dier.ini pi iiinjirsd' ecomimie chari-
table ; le Si'coiid de .M liiuard. a;.iiil pour titre lissai sur
l'étal du paupérisme en France et sur les moyens d'y remé-
dier. Le concours relatif au prix quinquennal de j.UOU Ir
de la fondation de M. Félix de.Beaujour, et dont le sujet
était Y examen critique du système d'instruction de Pesta-
lozzi, considéré principalement dans ses rapports avec le
bien-être et la morale des c/tM'sc» pniieri'.s , s'est terminé
avec plus d'éclat Onze iiiémoireMMil ele adressi's il l'Acadé-
mie, el 1,1 soinnie (le :; (1(111 l'r. a ele |ui i.r^ee enirc M. Rapet,
ipn ;i (ililenii un premier |irix de :i miil li , i I .\l. Pompée,
qui a obtenu un second prix de -2 (loil li-
Des éludes non i n> nides pro\(i.pienlde nouveaux ef-
forts de la part des c(iiiciiriciils liins les sujets (]iii leur
sont actuellement proposes, r.Vcadenne a su concilier l'iii-
tcrêt .siacntitiipK^ a l';iclii;ililé des solutimis C'est ;iinsi. et
]i(iiir n'en citer ipie (piehpics-uns, (pie dans la section d'é-
conomie p(jlitiipicet de statistiipieellea demandé de détcr-
;r,
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVF:iiSEL.
viiiin-, d iipii's irs j}! iiiciiKs (le lascicnce et les (loniu'ei) de
l e.ijiéiietire.lesioii (jiii diiiornt régler le rappurt priipiir-
tiuntieldc Idcirnihiliiin en bitletstirecla cirrulalian nulul-
liijiie, afin que l'Èlal jiiidsse de tous les aiatiluges du rrr-
dit.sansavoirà en reiloiitertesabus : dans la suftion d'his-
toire grnéi'ale cl |iliil"Mi|iliii|iii', de démontrer comment les
progrès de lajuslieervimiiielle. dans ta poursuite et la pn-
nilion des attentats contre hs personnes et 1rs propriétés.
suivent et marquent lesàges delacirilisation.depniit'état
saiirage pHi/u'à l'état des peuples 1rs mieti.r policés. Dans
ci'lk' lifiiiorali', l'Arail/'iirn' a i\i'm;\ni\(: i\ examiner . an point
de vue de l'intérêt public, comment et dans quelle mesure
l' iitat peut intervenir, dans les associations indnsirieites.
entre tes entrepreneurs, /«( capitalistes et les ouvriers: s il
e<t deseas où l intervention directesernit conciliablcurccla
justice, et aurait des résultais aussi bons ou meilleurs que
ceux qui naissent de la liberté dis Iriinsnctions indiciduel-
les ; jusqu'à quel point, enfin, tendent nuturellenient a se
former, sous le régime de la liberté, les association réri-
tablement utiles, et à se dévelonper parmi les hommes les
sentiments d'union et de sociabilité.
A laiiahrc rapide di'S tiawiin dr rAcadriiiio pendant les
six iiiiiis cpii \ienni'nt de s'ecoider, d ciiru iendrail encore
d ajouter, au moins a titre d(; iricnlion : un Miénioirc de
M. Tropjon;;, sur T esprit dcinocraticpie du (jjdc civil; un
niénioiro de M. Uunoyer. sur la liberté du commerce int<T-
nalional; une lecture dn M, H. l'assy, sur la liberté en ma-
tière de travail et d'indusiric; une communication de M (Cou-
sin , sur l'histoire de la |ib;losopiiie morale au di\-huiti<'me
siècle; enfin un mémoire inédit du duc de (Jioiseul rtynis
au roi Louis XV en nii'i. et ipii contient de curieux détails
sur l'adininistration et la politique de l'ancienne monarchie
l'ran.ase.
.lacnb TiiT/éliii- n;H|uil en Siirdi' \.t> l'.innée 177:;, Son
nptihiilr pniii' l.i il " M' lil ^{ii( r il<- iHiiine heure, et
il aclir\;i , > chhlrxl.iii^ rcllr MU iK r -nu- le patrona^edu
célebie (jalio, sim coUipaliKili-, p(jui' lr(piel il professa tou-
joui'S une grande admiration, lierzélius nous a laissé un
};rand nombre de ti-avaux qui sont des preuves ii'récusa-
llerzëliiiD.
blés de ses vastes connaiss.inics en minéralo.ie et en nia-
lliémaliques, et il est pi'U de sa\ards plus leinriils (|ue lui
en iniiénieuses supposilions. et <'n applications plus rii;ou-
reuses du calcul a la chimie. De moitié avec llisin er, il fit
des recherches sur un minéral trouve dans les mines de
cuivre do la Wcstmanie, en Suéde, et d,!couvrit l'oxvde
don nouveau mêlai auquil il donna le nom de cciinni. du
nom de la planele ilc Cerès , ipii \eriait d'élre découverte
par l'iaz/.i II a établi des lois cimslanles sur la eiuuiiosi-
I ion des owdis, et en a prouve l'evacliUide par des anal\.-es
complètes lU- ces conqio.V's, Herzélius dérouvrit le scié
nium en IrailanI la pyrile de l'aldun , et constata la pré-
sences du lithium dans les eaux de Carlsbail. I.is travaux
de Berzélius sont si notnbreux qu'il e.-l impo.ssible d en
diiiiner ici menu
1,1 II
inii'uclatur,' qu il n
aissul'liededir.'
(pi il est peu d ai
aivsi
s que cet illustre si
anl n ait faites
cnniinn es ou i
•Cllli
rs avec l'aide du
•al ni. Par une
suite d'experienc
■s. il
1 montra ipw les ipi.
liles proporlion-
nelles du soulre
élaie
it les nuVues dans
li-s sullales que
dans les sulfures
Celr
vail. qui lui a servi
le ba-e pour des
considérât i(ms in
liiirl:
nte>. est un de ceux i
uii r,.nl placé le
plus haut piiiMiM
LUiislcs d,' son lenq
s lai isni. lil-
lustre Suédois (it un vn\.i.^i- a l'aris. La gloire de notn-
Académie lui faisait une nécessite de venir s'inspirer à ce
centre qui rayonnait sur tous les iioinlsdu globe. Pendant
son séjour en France. Berzélius, oar l'afi'abilité de son ca-
ractère , sut captiver tout le monde , et il conserva jusqu'à
sa mort un souvenir bien agréable de l'accueil qu'd avait
reçu ries snvnnls français Les salons de Bcrthollet à Ar-
cueil el.iii'îii ,1 I {'tir epncpie le rendez-vous de ce que les
scienic^ Il le- |(!Im~ axaient de plus illustre. (Vcst la que
Berzeliii- inniimiir.i des relal ions avec Laplace. Gay-Lussac,
,\r.ig(p. Aiiipeir. Didiing, l'rcsnel, etc., relations qui n'ont
ele iiilenniiipiies ipie par la mort
I)i' ivloiirdanssa patrie, notre illustre Suédois fut nommé
secrétaire de l'Académie royale de Stockholm; puis, enfin,
baron et sénateur. Outre un grand nombre de mémoires
[lubliés dans les journaux étrangers, et particulièrement
dans A.fliandl'ingari fisik, journal suédois, on possi'dc de
lierzeliiis plusieurs ouvra.a'S traduits en français. Lesprin-
( ip.iiix MUil : Essai sur la théorie des proportions chimique»
cl su ri inpnencc chimique d r i électricité. Xouveau système
de ininéralof/ie. De l'emploi du chalumeau dans l'analyse
chimique, éléments de chimie, etc., etc.
t,)uoique la faveur royale ait élevé Berzélius au rang de
sénateur, il ne devint jamais homme politirpie: son labora-
toire ne fut pas négligé jKrnr sa nouvelle dignité. Il resta
.-impie el h.r, .lillriir eomme par le passe;, et par cette sage
riiiHJiiiie il l.ii-.-i' ,1 -:i patrie un nom illustre, inattaquable
Il lesp.irii-.i le- i.Mciioiis politiques. Utile enseignement
piiui l(^ssa^a^l^ de notre pays!
Berzélius est mort il Stockholm, le 7 août 1848.
F.Xri.lC.VTlIlN DC nEBNIEB IltDCS.
lu se gciidirnie eoiitie \o. prix iJIcmï ili'S denrée»; lo remids
est il.iiis les inaiiis île l'Assemblée tialionale.
t)n s'abonne diretlcmcnl aux bureaux, rue di' Uiclieliou .
n° (ill. par l'envoi franco tUtn mandai sur la poste onire
l,;'ch,ivalicr et C'. on piès des diivcteiii-s de poste et de
Messageries, d;>s principaux librairies do la France et de
rctraiiger. et des cumxspondancesde l'agence d'abonucmcDl
Paius .
PV111.1 — l»Pl\ia Ult l't 10>M1N, UCK PC FOVll AlST-CtRlIJIS, (3.
L'ILLUSTRATION,
Ail, (juui l'.ui». 3 nu
Prix de chaque N». 75
8 11-, — 6 mois, 16 fr. — Un an, 30 fr.
-Lacullection mensuelle, br., 2 fr.75.
SAJIElll 9 SEPTEMBRE 18
ruL'I'.ichelieu, 60.
Ab, pour les dép. — 3 mois, 9fr. — 6 mois, 17 fr.— Un .an, 32 fr.
Al), pour l'étranger, — 10 fr. — 30 fr. 40 fr.
SOUMAIRR.
Histoire de la semaine. U if/iii'ral Cmaigutic etsoa t'Iil-majur à l<t renie
</n 3 ftpitntbrt. ~ Corre»ipoiiflance. — 10,000 franc» de renie
pour 25 rraiicM. — Di^slnti^ressenieni, par M. Francis Wey. — Cour-
rier de Paris. Cérenwxûil de l'entrée du pr^sUlcnt de t' Assemblée nationale;
ViK r^'c^plion à ta Prtlsnlence ; Prtjjecliles diiiers provenant des insurgés de Juin,
Il une séance dex conseils ie;/»ertr. — Rapport de U, Armand Alarrasl
Mur le projet de CoustKiiilon. — K&quiftse d'une liutolre de
laïuOdedepuUun siècle. Kmpire, (9'ariiele.) 10 gravures. —Econo-
mie domestique. Le passé el l'avenir de la euisijieen France. — Adleuià
<:llAleaul>rluud- PnK.le^ et Riii'iqunleM Aristide Je Laloiir. — Lettres
d'un flâneur. IX. te* crieurs publics ; La houchc d'acier. Ucilnuen Primdlio
Madame de Girardin ; M. de Lamartine. — Bulletin lllbliogrupllique -
George steplienson Portrait. — l'iébus.
Ilii>,toirc (le lu H«i»uine>
Les actes du gouvernement provisoire s'en vont. Il est
bien quelques-unes de leurs conséquences qui se font et se
feront loni;tenips sentir encore, mais les abrogations de ses
décrets se succèdent. .4 la fin de la semaine dernière c'était
d'abord le rétablissement de l'ancien droit d'octroi sur la
viande au profit de la ville de Paris, impôt dont l'abaisse-
ment n'avait pas profité à l'ouvrier consommateur, et met-
tait la municipalité parisienne dans l'impossibilité de pour-
suivre ces grands travaux qui en provoquent tant d'autres
et font vivre des milliers de travailleurs. Puis venait le tour
de la contrainte par corps. Son abrogation prononcée par
décret du 9 mars a été défondue par quelques orateurs qui ,
du point de vue des principes abstraits plutôt que du point
de vue des faits et des n sultals , ont disserté sur la ques-
tion au lieu de chercher à la résoudre. Un représentant
qui s'est prononcé en sens contraire a procédé tout autre-
^7^ Um I ^^
Le général Cavaignac et son état-major à la lievue du 3 septembre 1848.
IS
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
iiipiit M lîonjc.nn a juslilii'; la contniinle par corps par ili's
liiii^dc >l,ili-iiiiii(; (lonl la moralilé n'est pas conlestable ;
((>! (|ii III iiiililé la conlrainle par corps a;;il surtout
Kiiiiiiii; iiiiiMii roiniiiinalnii'c, pt ipii' le noiiiliri' dos ili'ihi-
Icurs (piClIr iniM'il:' l.i lilurlr r-l inlinniinil ii-liviiit. A
Paris, sur siil\:inlr-i|iiMi/i' inllli' lii.Tliirlil-. lililiilrllrlliont
rendus cl unipoilinil l:i l'niilr.nnlr |i,irrMi|i>, di\-liuit cents
seulement sont remis pour I'cm'i ulmn ;iii\ ;j:inlcs du com-
merce, et, dans ce nombre, quahavr cnil.-. m moins se ré-
solvent en arrangements (pu nicilrni .1 iiiiiMTl, la personne
des débiteurs; de sorteipi m ili''iiiiiii\r lu minrnnr ilrs dé-
biteurs incarcérés ne di''|i:i>-r |i:i- rli.ii|ilr .ililirr I' rllilVro
de iOO. Ce qui résulte inrnii' ilr- iliniiiics |iniiliiilrs |)ar
M. Bonjean , c'est que la durée mnyi'nne dos délcnlions
n'excède pas cinquante-cinq jours. Voilà à quoi se réduit
une sanction pénale sous la protection, sous l'iniluence de
laquellesemeutun fondsdn inidriiirnl qui. imiii li riiiiuiierco
d(! la France, no peut élu- i'\;iliir .\ m - ih y, imlliards.
C'est en ce sens que la i|iir>lHiii ,i rir ir-nlnr [.n I Assem-
blée. L'abrogation du dii irl du il iii:irs i rir Mih'e par
4t>G voix sur 093 votards M;iw il:i\,iil vlv ilmilr il avance
(]u'on renverrait au cmniir dr Klji.-I.iIiiiii Ii ir\ir du Code
de rnnimi'ri-c rcl.ilifà la i miliauiLu rcl.dplie, piiur Icu faire
suliir liiiili'.s li's uiiidiliriiliniis commandées par l'équité, par
I riiii .iriuri ilr 11 ri\ 1 li-,ii 1. m et des mœurs et par l'esprit
de nos lll-lllllllnlls p,i|lll(|lll'^.
C'est Ir inii] ilii ilriiri II iliiisant obligatoirement la duréc
du trav.iil ilr^ i.NMin- ;i ili\ heures il Paris , ii onze heures
dans les ilrpinli nient.-. I, .\>si'iiibli'T a subi de loniis dis-
murs inl.is rlli' rn a l-\r ili'iInnilnllL'i'n |i,ir 1,1 ri'M'Iation
d'un InIrnI niiiiM'iin, M Itnllrl . i|iii ,- r- rs|,irUuel.
UlL;/'liirii\ cl haliilr a rajeunir 1rs ,nili liLs^ qu'il avait
à "emprunter aux économistes. Chacun est d'accord que
cette lixation est trop restreinte. Mais faut-il se borner à
l'élargir, ou toule fixation doit-elle être repousséc? Voilà ce
qui parta;:e l'.Assi'mlik'r et ce dont la solution a été ren-
vovee à la fin dr rnir smiiiirie.
Un crédit esliinnli r de 000,000 francs demandé à
liliv dr siiliMiilion pour lebénisterie et pour la fabrication
dis linin/rs ;i l'aris, a été voté à la presque unanimité. Il
n ;i\,iil iriiriinlré qu'un adversaire et qu'une objection
M S.iiilr\i,i si' iiI.iIl'iijiI (!:■ M.ir li'ssMnpalliii'sdnuiiUver-
riniirnl iriilmnrr^ iLiii, !;> linnl.-ilr I niivinlr dr la ca-
lai,ilr M, lis ,1 |ii'iiir I I r.ililc iv|iii-riit.iiii ili. I,i Urôme
ctait-il drsrrn.lii iK- la liiliniii' i|iir .M Ir ininisirr de l'in-
térieur y ,ip|iiirl:iil un ilimlilr |irii|rl di' Im . qui ;i\,iil la va-
leur d'u'iir |iriili'sl.iliiin ilr lail nnilrr Ir rr|iiiirlu' adressé
au gouverueincnl l'.ï'l.nl l,i diniianiliMle ilrii\ iiiilliuns pour
secours aux misrlrs dr l'.iris ri dr- lli'|i:iliclll('nlS.
Samedi une piii|iiisiiiiiii m m r,i|i|ini Ir.' , nlirée même par
son auteur a suiihAr nr nniii- nnr i|iir~liiin L-ravo, cel|e
de savoir si I ri. il dr sir^r sniiil lr\i' |iiliii,i ni l;i durée du
vote de l.i l'.iin-iiiniiiui I rilr |)rn|iii-]i n m ,i\,iii rtr primiti-
vement prcsrnliT p;ir M i.lrrlllrlllirl l' Il n-l \rliu faire
conuaitro les motifs qui l'ont décidé, non sans lui laisser
des regrets, à retirer sa proposition. C'est un sacrifice qu'il
a fait à la grande et irrésistible raison du salut public.
M. (jémieux, au nom du comité de la justice, qui avait
examiné la pro|)osition, a conclu dans le même sens. Enfin
M. Lcdru-liollin a pris la parole pour se borner, a-t-il dit,
à faire ciilniilir uni' pnilrslation. Son ton a été modéré,
mais les aniliiijir- liisiiii ii|iH's qu'il a fait servir de base à
ses rais nrnU ii.iiini irritantes pour l'Assemblée et
pour 11' ^cniial C.iMiigiiac. Selon lui la Convention avait
plus qiir lins ir|iii'snulants le sentiment de la modération;
car bien i|ii ilK' ini a lutter contre l'ennemi au\ frontières
et déjà siii imiir hii iiniir , contre la Vendée en feu , elle
ne ciins.in.i |i,i- !,i (unsiiliuii de 93 par létal de siège. A
cela .\1 le ^rnri.il I ,1 \ .1 i;jn,ic a répondu par un mot et un
mot dècisil : La (.nn\enlioij n'avait pas l'i'lal de siép;e sans
doute, mais elle avait la terreur, et. .1:1.1. r .1 In. n la com-
paraison est à l'avantage de la siliialinn .hIih llr M. Le-
dru-UoUin a cherché par delà les l'\ niHis I assuiiilalion
qu'il opposait , comme une condamnation . aux déposi-
taires actuels du pouvoir; il nous faisait voir un Nar-
vaez à la tôto des affaires. Le ])résidcnt du conseil . sans
laisser voir de dépit , a facilement récusé toule assimila-
tion entre les coups d'État frappés par une camarilla de
caserne et une mesure de salut public, imposée a un pou-
voir délégué par la volonté d'une Assi'inlilceipu représente
la nation tout entière. Un lîspagne, celle mesure a été un
moyen d'oppression omployé par la diclal are militaire contre
la souvcrameté des chambres et du pays; chez nous, elle
n'est qu'une arme défensive spontanément remise par la re-
présentation nationale aux mains du gouvernement dans
l'intérêt do sa propre liberté et de la liberté de tous, lin se
résumant, M. le général Cavaignac a déclaré qu'il était prêt
à déférer aux ordres de la cliaiiiliri\ ipii a voulu I état de
siège et à qui seule il a|i|iaiiiriil iTm iii;iri|iii<i' le tenue;
mais sa profonde c(ui\ himn r-i i[ii.. il.msl.i -iIii.iIium ac-
luello, la lovée de létal d.' su-,' i.ni nn 11 nisrd.ingcr
pour le pays, pour la liepiililii|iie ri pimr I .\ssninlilee elle-
même. — liien (|u'uue proposition de .M, Cresprl de La 'l'ou-
clie, relative à la suspeusinn des journaux . ne lut pas en
cause, le prèsideni du conseil , a\aiit de descendre do la
tribune, a cru dcMiir aborder cette (pa^stion et lègitiiner
ses mesures. Mil \ étants contre 1 ilt.se sont prononcés pour
le maintien de létal de siège: ipianl a la question des
journaux, le comité de législation a présenté un projet de
(lècTOl qui règle leur sort pendant l'état de siège et donne ,
durant ce temps cNceplionnel . au p(nivoir c\èi-iitiriedroil
do citation à (piaraide-huil lii'ures , el aux tiiluiiiaux le
droit de proncuicer la suspension exiTutable iuiuiedialeineril
et même sur jugemeid pardef,iul cinnuic sur jugement eeri-
tradictoire. "
Luiuli, l'Assemblée a ouvert l'ère très courte dis deux
séances par jour volée la semaine precedeiile peur liuit le
temps que durerait le vote de la Censtitulion, Il n'a fallu
qu'un jour d épreuve fiour ipie l'AssiMiiblée fût aineiièeà re-
coTiiiailre iinaiiuiieineiil qiiiinr Iiiiil'ih- -i- '■ rl.iil infini-
ment prèlènilile. Les seanres dm rnml ilnnr dr nmli a six
heures, cl plus tard quand les tia\aux a terniiiier l'exige-
ronl. Les ipiatre premi(us jours de chaque semaine seront
consacrés à la Constitution , les doux derniers à l'ordre du
jour ordinaire.
M. le uiinistre des finances, ne pouvant se flatter de voir
rAsseniblées'iieiuper en ce moment du budget pour IS49,
lui a pn'senli'' un prnjet de loi ipii en flètaehe , pour en faire
l'objet diin m.Ic s|ie'rial rliinr;:rmv. loiil ce qui esi relatif
aux emilriliiilHiiis ihieiirs Cri.ui !.. srni in..\en il.' meltre
prochaineiiienl li'- rniisrils L'iaiei .mx a me le iiinrliniiner
et d'éviter rexpèdient toujours fâcheux des ilouzieuies pro-
visoires. Le chifl're des impôts directs pour 18-49 reste ce
qu'il était pour 18.i7.
Avant d'aborder la discussion de la Constitution, l'Assem-
blée a été appelée à résoudre une question préliminaire,
celle de savoir si , après le vote de la Constitution , elle en-
treprendrait de faire les lois organiques on si elle laisserait
cette tàcbe à la législature ipi ■ I ■ -nlliiur universel lui
donnera pour liéritièÊ'e. D'exerll. ni - mi-ius ont été don-
nées |)0ur l'ajeurnement d'une ilrrisimi que la nécessité
peut justifier, (expliquer, enininaiider même, mais qui est
exposée a lieaucinip de critiques quand on la prend d'a-
vance el sans savoir si les i'\e iinits iiinèneront l'elte né-
cessité ou en feront reninn.nlir nnr riiiilr.nri' N.ms ne di-
sons pas comme nous l'aMnis rnlrniln dur : I r-l lii une
question de salaire. " in.ns nmis rrnyms qnr I \-srinblée
n'eilt riiMi penlii dr smi aiilnriti'' rimr.de a ne pas tniiiclier
dèsàprrsrnl mllr i|llesliiin de Inliglie \ie l,"a|i.iirnenient
a été reiMinssé par .'i'ii' voix enrilre LSI), el enlin lAsseinhlèi'
a proclamé sa volonté de compléter de ses propres mains
l'œuvre que le pays l'a appelée à édifier par 580 voix con-
tre 1H4.
Les discours se sont siieeèdé lundi el manli dans la dis-
cussion générale sur la I .iiisiiiiilniii I, \-~.ni|.ir,. ;i patiem-
ment laissé épuiser la lisir dr- iii.ii.iiis irsi ni- il nnutéun
volume tout iiii|iriiiie dr .M l'inir Leroux, qui a déclaré
que l'Ialiin el ,\iisiii!r. .'\liiiiir-i|iiieu et J -J. Rousseau ,
rAsseinble.' Ciaislilnaiile el la llenvention n'avaient rien
entendu a la science |)olitique. L orateur parais.sait très
convaincu que lui seul l'avait trouvée, mais rien n'a pu lui
faire livrer son secret. — La discussion générale close, on
a passé à celle du préambule. M. Gatien-Arnoult deman-
dait que le vote sur celte partie fût reporté à la fin de la
discussion de la Constitution. M. Dufaurc par un discours
plein de verve a fait repousser cet ajournement Mais alors
une bille |ilii- iiii|iortanle , plus grave. sVsl niL-aL'rr
M. rè\ri|iir .1 ( Il I. Mils a conclu à la Sli|i|iir— n.n lin |iivain-
bule en l.ii-.ml 1 nlmdre quelques ci in, pi. ■- dr i|,.|. ni que
M. le pa-lriu i:ii.]nrrrl a r.inili.lllllrs a^r.' .iiliv- r.'l eour-
toisie. .Mai- .a^llr (l.'.lara -|irrl.ir.. ilail dr-luirr n rece-
voir de pliis rnilr- iain|.- In Irr- jriinr 1 .■|.i .■-riilaiil ,
M Fresneaii, ipii pis.pi'iia n'avail iprnnr -mie Ims almide
la tribnnedanslineidenlrelalifa L s-N.qmlruii, M Lrr-
neau s'est |)nrté on\ertenienl l'adversaire de Imile espèce de
préambule , et la fait avec un talent qui a toujours com-
mandé l'attention de l'Assemblée, l'a souvent émue et par-
fois entraînée. L'argumentation de M. Fresncau est nerveuse
et vive, sa parole partiripe des im^ines qnalili's et il sait
la faire valoir par une ai rrnin.iiinn r\|iir— i\r II ,1 tiré le
plus habile parti des lirsiiaii.m- ri il. - 1 riiii.iilii iinns qu(?
l'on trouve entre le priMinlinlr du prnji'l |ii iiiiil il ri celui du
projet rèvi.sé , el sa InLi.iiir iiinsnr , s-s liiils aii:iiiscsonl
a la l'ois vivement iuipirs-iniinr ri li.'.|ii.aninriil ilrnde l'.Vs-
semblèe. — Un discours brillant de .M. de Lamartine a
néanmoins fait trioiBpher, le lendemain , la question du
préambule.
Dans le cours de cette même séance. In cliarnbre avait pro-
cédé à l'elertiiin inen-iirlle dr -.- M. r-|iir- driil-rt de deux
secrétaires. MM Hixni , fin l"iii , la.i.i-.', I ici -es de La
Kavette ont été réélus vire j.resiil.'nlsOn leur ,1 dnniié pour
col'IeriiesMM de M.dleville el l'a^'iierre en reuiplacemeni
de MM. Ciist.ivede Iteaumont et île Ciirnienin. MM. Landriu
ellierard oui èle appelés de iiiiii\eau au sern-l,mat.
Les troubles ipii ont agité .Miinl|i.'lli. r. .|iii mil même en-
sanglanté cette ville , sont an[riir.l liiii a|i,ii-, ( In ne dit
pas que l'instruction ail fait de. mn 1 n Ir- ir.i.r-.l nn com-
plot et qu'on doive voir autre chose il, m- rr- .Lphnaliles
événements qu'une collision entre des p.is-i.in- |iiililii|iirs
surexcitées par une lutte électorale ; le- nii'niiiihles diiiie
part , le triomphe de l'autre. Nous verrions un puis impuè-
tant syniptoiue dans le renouvellement des violences dont
quelques agents des contributions directes ont été l'objet
(tans plusieurs dè]iartemenls à l'occasion de la perception
de riinpol des l.'i eenlinies. Hs|iérons que la fermole du
gouveriuniient et I intérêt du salut public feront ces.ser ces
oppositions et ces résistances eeupabh's.
Nos vaisseaux cinglent vers lAdri.ilique , el . a Iheiire
qu'il est, noire pa\ill(Mi llnlte pent-êlreen vue de \enise ou
d'Aucoue. Notre armée des Alpes voit le nombre de ses di-
visiniis, ses a ppriivisiouneinenls.srs m uni lions s'augmenter.
Nos pro\ ini-esde l'Lst vont avnir eg.driuenl leur corps d'ar-
mée. Nous siiinines prêts a l,i gui'ire. Hieu nous conserve
la paix !
M. B. iiriisie pcinirc a l'nrmce des Alpes. Nous altciidoni^ ,
moiiïit'ur, l'elTil du vos promesses. Vllluslrution vcul suivre no-
ire armée; elle veut s'ouvrir ii loules tes seines de noire gloire
nalioiiale; signaler ii l'admiralion el ù la reconnaissance de ses
kcleurs el de la poslérilc les grjudes actions et les figures htroi-
(|ue5. Vous avez promis de nous y aider. Nous faisons appel pour
le même bul il lous ceux qui auront des dessins el des rcîcilt k nous
communiquer.
M. D. à Ount:erque. Nous n'avons pu être prêts pour ce numéro ;
mais allendez le numéro prochain. La Flandre sera cotileule
de nous.
M. Y. à liuchnresl. Nous recueillerons sous la forme d'un album
les articles el les gravures qui conrerneut vulre pays, l'uissiez-vous
dire vrai en annonçant le succès de celle pulilicalion !
M. Alherl N. a l'iiris. Vous Irouverez loule celle Ijisloirn, leilc
cl dessins, dans les Juurnces iUustrées de ta liêvoiution de 18i!5.
<^orrcs|iuiiilniire.
pn'sse pour rrcc\oir en prime les Jociix'khs illcstiikhs de ta lîévn.
iulion de ISiB, c'est que l'aboniu-inonl nnuxeau ou le rrnou\cl-
lemenl d'abounentenl , à partir de l'expiriilion de rabnnno«n-ii(
rouraiit , soit f.iit el jun/è ininuHlialcnt. t.'enc.ngciuoiil de remui-
\eler ne sallu pas. Kii itrlinilec , iniis m. us r.iiti'- piulilir plus on
moins ili- t'.n.inri' d'uni' li.'-s prlilr M.iiinii' cl iinns Mm- ili.iuiniis
(ir'tlis nu vnliiinr itiiiil le prix r;;,di' un abeniii nient de six mois,
ijui est le gOiieieuv ?
Dix mille francs de renie pour rlnpl-clnq francs.
Ils sont jeunes encore ceux qui se souviennent de la lo-
terie , supprimée , je crois , sous le ministère .Marlignac , en
1828. Ils priiM'iil rnlrndrr enriire, dan-lrnr niéiuoi're, le cri
de cesMi'illr- Irii.iiii- .i-i-r- an r.iin dr- iiir. populeuses,
offrant an p.niMr ili.i imllr frunrs jitiiir iiiii/l sous. C'était
le bon lrni|isdi'-j 11!- I,iii.ind un uv.iil a peu près perdu
tout son aiiirni ,1 l.i i.iiiliiir , un achetait un de ces billets,
et on avait piniLint Mii^|.|iialre heures, l'espoir de relever
sa fortune. Notre époque est plus morale, lille ne tente pas
le pauvre, et si elle accorde aux riches le droit de jeter
2o francs sur cette roue que le hasard tourne en fermant les
yeux, elle y met plusieurs conditions :
1" Kllr \riii qnr r,i|.|,.it du ^'ain serve ceux qui travaillent,
et prolitr a I inlrll,;_'rlirr |iillili(|ue.
2'' Si la ihancr duil enrichir quelqu'un, il faut qu'elle ne
rende personne plus pauvre. En d'autres termes, on veut
bien que quelqu'un gagne, mais on ne veut pas que quel-
qu'un perde.
C'est le problème que résout le prospectus que nous al-
lons reproduire ;
Son.icriptinn ouverte en Librairie arec participation des
Souscripteurs aux bénéfices de l'opération à répartir
entre eux par la voie du sort, autorisée par le Gouver-
nement, sous le patronnyr Je M le Préfet de ta Seine,
et sous la surveillance de MM. les .Maires des 10' et II'
arrondissements de Paris.
LES ItCRKACX SONT ÉT.^BLIS AU COMPTOIR X.\TI0S.VL d'eSCOMPTK
« Unedes plus importantes industries de la ville de Paris ,
la librairie, fait un appel à la bienveillance el à l'intcrêl
du public.
» Cette industrie qui embrasse dans ses niovcns de pro-
duction l'imprimerie, la papeterie, la fonderie, la brochure
la reliure et une foule d iiidiisliie- aerissoires, occupant
dans les temps ordinain- plus dr mhuI nnlle travailleurs.
toujours atteinte la pieininr p.ii Ir- 1 iis.'s commerciales ,
est aussi la dernière a .se relever |iar le retour de la con-
fiance et du crédit ; s'adressant aux intelligences elle ne
peut prospérer que dans les temps calmes, après les Siilis-
i'actions plus pressantes qui sont la condition même de
l'exislence.
" Ces circonstances exceptionnelles devaient la porter à
chercher des secoui^ par des voies également exception-
u elles.
» Elle a fait, par l'entremise de ses délégués, desdémar-
clies auprès du gouvernement, à l'elTet d obtenir laulorisa-
tion nécessaire pour réaliser une combinaison qui doit don-
ner, à son profit, comme au profit de l'intelligence publi-
que, un seciniis suffisant pour la sauver dans le pivsenl .
pour rendir. diii- un avenir prochain, le mouvement à ses
opécitiim- p.iiir assurer de travail à ses nombivux colla-
boratenis, el. -an- aucun doute, pour réagir, par le jeu na-
turel de la circulation, sur d'auln-s industries nationales.
» La sollicitude du gouverncmcnl pour des intêit^ls res-
pectables, sa vive svmpathii' pour les travailleurs qui souf-
frent ont rendu facile le zèle de ceux qui ont poursuivi ,
dans un intérêt public, le résultat de celle opération.
» Les délégués de la librairie ont rencontre dans les plus
hautes spherks de ladministiation une bieuveillaïu'e el un
accueil (pi il .-iera de leurde\"ir de signalera la reconnais-
sance de ceux cpii vont être secourus et soulages
L'opération consiste dans leuiission de 1 20,000 billets de
2o fr. chacun , dont les pixMieui'S recevront . sans distinc-
tion , au moment de la sousiription , 2,'i franc» de il» ces
choisis par eux dans un Catalogue di-ossé ii col elTel . com-
po.sé des meilleurs ouvragc-s de la librairie ilans lous les
aenitis, dans toutes les branches de la lillératuro el des
sciences ; Catalogue dont M le ministre de l'intérieur s'est
réservé l',ipprelialion.
Ces billets av aut déjà reçu leur valeur on livres , partici-
peront a un l'irage de MILLE LOTS, répartis ainsi qu'il
suit ;
Le Tremier Numéro sortant gagnera une inscription de
10.000 francs de renie;
Le Deuxième Numéro sorlanl, une inscription de ri,000fr
de rente ;
Les 3' et i' Numérossorlanls, une inscriplion de i,»H1 fr
de rente;
l.es.'i', 0', 7' et 8', chacun une inscriplimi de l,(XX) fr.
de rente;
Les Numéros de 9 à UM) , chacun une Bibliolliotine en
acajou, renfermant au minimum :i00 volumes relii^el do-
res sur tranche, chaque loi du prix de 5,000 francs.
Les Numéros loi a 500. une Bibliolheque reufermani
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
19
<nu niininiuiii :iOO voUmu'S \/t reliure , cliaqiio lot du prix
de 8,000 francs.
Les miniéros de 201 à 500, une Bibliothèque renfermant
environ 200 volumes, chaque lot du prix de 1,000 francs.
Les Niniiéros sortants de 501 ii 000 auront droit chacun
à 400 francs de livres;
Les Numéros de 601 à 800 auront droit chacun à 200 fr.
de livres.
Enfin , les numéros do 801 ii 1,000. chacun 100 francs
do livres.
« Cette combinaison est fondée sur le même principe que
le tirage des Obligations de la Ville de Paris.
» L'opération est placée sous le patronage do M. le pré-
fet de la Seine.
» Elle est administrée , sous la surveillance de MM. les
maires des 10' et 11" arrondissements, dans l'étendue des-
quels se trouvent les principaux établissements de librai-
rie et d'imprimerie, par une Commission comiiosée de mes-
sieurs :
P.\UL1N , libraire-éditeur.
PLt)N, imprimeur-éditeur.
FIHMIN DIDOT, imprimeur-éditeur.
LABOUL.^'i'E, fondeur en caractères.
BAILLIERE (Je.»n-Baptiste) , éditeur.
PAGNERRE, libraire-éditeur.
HINGRAY, libraire-éditeur.
FUUNE, libraire-éditeur.
" Le produit de la vente des billets est versé chaque
jour au Comptoir Xational d'Escompte.
» Pour la garantie du service des primes, il est laissé en
caisse la nidilié des sommes versées; et l'autre moitié est
employée coiiinu' à-compte pour l'achat des livres à remet-
tre aux souscripteurs et le payement des objets relatifs à
l'opéralidn.
» Le tirage sera fait publiquement à l'Hôtel-de-Ville, dans
les premiers jours de novembre, sous la présidcncede M. le
préfet de la Seine, en présence des maires des 10' et 1 1' ar-
rondissements, des membres administrateurs de la Sous-
cription et d'un délégué de M. le préfet de police.
» Le Catalogue, dont on s'occupe en ce moment, sera
adressé franco il tous les maires des communes de France,
ainsi qu'aux personnes qui enverront leur souscription au
moven d'un mandat sur la poste à l'ordre de M. Lebov, se-
crétaire-caissier de la souscription , rue des Petils-Augus-
tins, n" ti, au Cercle de la librairie.
» Les demandes et envois d'argent et de mandats de-
vront être adressés franco. Les lettres non affranchies
seront rigoureusement refusées.
» Un magasin contenant un échantillon des livres portés
sur le Catalogue est ouvert rue de Grammont, n" 28, au
coin du boulevard des Italiens. On y trouvera aussi le mo-
dèle des Bibliothèques il donner en primes.
» Les noms les plus considérables dans le gouvernement,
dans la finance et dans l'industrie ont voulu donner, par
l'exemple, un encouragement à cette opération dont l'objet
direct est de venir en aide ii une industrie respectable et
dont l'effet prochain sera d'assurer, par la reprise des tra-
vaux, la subsistance d'une classe d'ouvriers dignes, en leur
qualité d'instruments de la production intellectuelle, d'un
intérêt tout spécial.
L' lUiistralion publiera le portrait de l'heureux bénéfi-
ciaire du gros lot.
nésintéressenient.
Etre désintéressé . c'est consentir avec connaissance de
cause au sacrifice de son propre intérêt; c'est s'effacer au
profit de la chose publique sans aucune restriction person-
nelle.
Comme le vulgaire n'attache au mot intérêt qu'une idée
fort matérielle, il en résulte que l'on acquiert sans trop de
peine un renom de désintéressement au prix d'un sacrifice
pécuniaire fait à propos et avec bruit. Cette générosité est
parfois une bonne spéculation.
Etre désintéressé, c (•>l iiiuiinler au besoin son ambition ,
son orgueil, en un imil loulcs les passions dont la satisfac-
tion nous paraît prrli-i.ililr ,\<\\ jiiuissances de la fortune.
L'intrigue se rcviH piiifuis ilr^ apparences du désintéres-
sement. Quand on ciii lie, iili' (|ii!' Ii's icprésenlanlsdupeu-
iile recevraient une nidciiiiiiU' .lunlidienne de 2.5 francs,
nous avons vu des candidats hiigiier l'honneur du mandat
législatif en offrant de renoncer a l'indemnité.
Ce désintéressement se réduit à un marché dont voici les
termes : — Eaites-moi député , je vous donnerai 25 francs
par jour.
De telles transactions détruisent l'égalité au profit de la
richesse ; elles jettent de la défaveur sur un concurrent
pauvre qui ne peut consacrer gratuitement son temps à la
patrie; elles séduisent et corrom|jent fopinion publique.
Ces prétendus désintéressés étaient tout bonnement de très
mauvais citoyens.
Parlez-moi du désintéressement de ce ministre enivré du
pouvoir qui. dédaignant d'enrichir sa famille, sortirait pau-
vre de l'administration : mais qui , voulant y rester ii tout
prix, prodigue les deniers de l'Etat à la corruption, afin
d'opposer a son impopularité croissante une majorité par-
lementaire salariée. Son désintéressement ruineux assure le
succès (le son égo'iste ambition.
X"** a des prétentions modestes; il sait tout ce qu'il
vaut et ne s'en fait point valoir davantage. Retiré dans l'hé-
rilage de ses pères, il vit sans faste et sans parcimonie. Sa
philosophie douce à lui-même n'a rien d'importun pour au-
trui. Embellir son asile, distribuer des eaux vives a travers
l'émail d'un parc, aplanir des sentiers, greffer des arbres,
défricher les terrains rebelles, tels sont les paisibles amuse-
ments de son repos.
Mais X.... apprécie d'autant mieux les grâces du loisir,
que son principe a connu des orages dont il prétend exeinp-
ter son automne. Son génie a sauvé l'Etat, son habileté a
entassé l'or dans les coffres de la République ; le désordre
expirait à son approche; son nom qu'il cache sous des mas-
sifs de verdure avec la coquetterie des sages, est demeuré
dans tous les souvenirs, et les échos du forum ne font pas
encore oublié.
Que le peuple soit menacé , que les passions ennemies
fomentent la discorde et lancent les affaires publiques sur
le penchant d'un abtme, soudain la foule des citoyens dési-
gnera son sauveur, et le nom de X... sera invoqué comme
celui d'un demi-dieu.
Déjà le tumulte de ces acclamations a franchi les campa-
gnes, et porté jusqu'à l'oreille de X... un avant-goùt du
triomphe qui va l'atteindre. Vain espoir: X... reste sourd
aux prières; sa gloire l'obsède, sa faiblesse l'épouvante; les
honneurs ne le touchent plus; les trésors qu'on lui ouvre
n'ont pas de prise sur son âme ; il aspire au repos et de-
meure invinciblement retranché sous le majestueux rempart
de son humilité.
Lui seul, cependant, pouvait sauver la République; on le
sait, chacun se relire attristé, déplorant l'excès d'un désin-
téressement que cent voix admirent et célèbrent à l'envi.
X... estime son repos plus qu'il n'affectionne sa patrie;
il n'aime que sa précieuse personne, et il n'a pas eu la fer-
meté de se désintéresser d'un égoïsme affreux.
Cette maladie est si rare en notre siècle, qu'il a fallu, pour
la caractériser avec vraisemblance , emprunter la forme et
le style d'un écrivain de l'ancienne roche.
Toutefois, la conclusion morale do ces exemples divei-s
apjiartient à tous les temps : c'est que le vrai désintéresse-
ment consiste à immoler à son devoir tous les autres senti-
ments, et à l'accomplir sans faiblesse comme sans excès.
Ce fonctionnaire qui a brigué un emploi très lucratif et
qui consent à se défaire dune moindre charge afin de s'assu-
rer la conservation de la plus productive, risque de paraître
désintéressé lorsqu'il n'est qu'habile.
Cet autre qui recherche des fonctions honorifiques et re-
fuse tout salaire, est avide d'importance, à moins qu'il ne
prête, pour un temps donné, ses heures à l'Etat et qu'il ne
donne le grain des semailles à la condition de moissonner
plus tard."
Exploiter à long terme le loyer de la reconnaissance , ce
n'est pas être désintéressé.
Parlerons-nous du désintéressement qui recule devant des
honneurs dangereux, du désintéressement qui s'éclipse au
second rang pour briller au premier ; du désintéressement
qui se fait entrevoir sans cesse et va se cacher partout où il
est exposé à souffrir une cruelle et douce violence ! Les pois-
sons qui passèrent impunément sous le bec aigu du héron de
La Fontaine durent trouver l'oiseau fort désintéressé.
Méfions-nous de tout désintéressement qui s'affiche et re-
court à la publicité. La publicité est toujours un moyen, un
appât, et ce n'est pas en vain que l'on tend des amorces.
La plupart de ces hommes désintéressés se résignent à l'ab-
stinence à bon escient; ils attendent et convoitent un
poisson à la mesure de leur appétit.
Fbascis AVey.
Courriel' de Paria.
Pour cette fois no dites plus que nous manquons d'un été
pour nous amuser et prendre l'air; voici des journées ra-
dieuses, des nuits sereines et toutes sortes de plaisirs à la
belle étoile; le ciel nous devait bien ces dédommagements.
On n'entend que des bénédictions d'un bout de la ville à
l'autre, et des éloges sans restriction à l'adresse de ce beau
soleil , de cette nature souriante et de cet honnête calen-
drier qui a tenu toutes ses promesses. Oui, les promenades
sont des fourmilières et les maisons des solitudes , tant le
Parisien sent le prix de sa bonne fortune et veut en user !
Les joies du grand air, les délices du plein-vent, ce n'est
pas lui qui le^ répudiera jamais, encore faut-il néanmoins
((uelipie aiitie ;i-.~;ii>(iniie)uent à celle félicité de moineau
l'iMiii- peur i|ii il l'ii >,,\(inre l,i ilniiceur; l'art pour l'art ,
ce-l-,i-(lire l;i piiHiieii.iile pour II promenade, qui s'en con-
lenlrr;iil :iu|(Hiiiniur.' Car, sans compter que le temps
pré^'iii l'-l A—i-/. |ieu favorable à la rêverie, notre Parisien
ne fui p:i-M l"'n marché de son imagination, jamais il ne
lai>M' lelle /'"//(• ilii Int/is ,nu logis, c'e-l sa compagne insé-
par;ilile .lui p,iiliiul l'iMHile en eniiipe et galope avec lui.
Aux r,li;uiip-l-'.h N'e< iiienie. s:i \ilhi iiiirii-muros, ces vieil-
les amours du l'ini-icn uu il courl luujoiirs avec fempresse-
ment et l'émotion d'un premier rendez-vous, il a besoin du
tumulte des cavalcades, des chars fuyant vers la barrière et
du spectacle de la roue en feu rasant la borne fatale. Les
moins exigeants, les plus champêtres ne se contentent pas à
moins de l'orchestre du café Xlorel et du théâtre de Gui-
gnol. C'est ainsi que sans sortir de la ville notre homme
trouve la campagne, comme il est dit dans les épltres de
Boileau.
Il est vrai que dans les grandes occasions, et nous y
sommes, le cercle étroit des bonheurs champêtres s'agran-
dit passablement ; Septembre a ramené la célébration des
plus charmants anniversaires, les vastes parcs et les grandes
foréis c|ui enliHiirnl l;i ville d'uni' ceinture verdoyante ou-
vreiil Iriu'- n.iiile- rl.iinrri'S aux piipic-niipie du d'imanche,
chacune de ri> el.i|ii'> ;igrestes de i.i iiio\eniie propriété a
sa fêle du village ^ol^ill, avec accompagnemcnl de rosières
et do mirlitons.Voùtos ombreuses de Saint-Germain , cas-
cades diamantées de Saint-Cloud, et vous, maigres bouquets
de verdure de la plaine Saint-Denis, la séduction que vous
exercez, est toujours la même, mais quels efforts d'imagi-
nation ne faut-il pas à nos citadines pour s'y laisser pren-
dre ! on a tant de fois suivi cette route, parcouru ces sen-
tiers, gravi cette colline, on a tant de fois cueilli des pâque-
rettes dans celle prairie et mangé du melon à l'ombre de ces
chêne- inilolriirubles!
Vuii.i (lune ou nous en sommes pour le moment en fait
de plaisirs cl de distractions. Nous avons les plaisirs et les
distractions de la banlieue ; bien plus, la chasse est ouvertes
et c'est un peu beaucoup la petite pièce qui se joue à côté
de la grande Aux cris de joie de celte population qui arpente
honnêtement la grande route et suit paisiblement les sen-
tiers frayés à travers les vignes, le chasseur a mêlé sa \oix
rauque et lancé sa brutale fanfare. Depuis le 2i août, jour
de la Saint-Barlhélemy , date sanglante, le chasseur s'est
mis en campagne dansson attirail connu. Ce grand tapage
d'explosions, de capsules qui partent, de roquets qui aboient
et de volailles gémissantes, c'est le chasseur qui en est l'au-
teur. Prenez garde à lui et à son cortège; prenez garde à
son chien et à son fusil ; en voila un qui dépoétise furieuse-
ment le paysage qu'il emplit de bruit, de poudre et de fu-
mée. Voyez-le courir dans les guérets et s'y conduire en
vrai Proudhon. l'ennemi de la propriété. Il a mis la ban-
lieue en état de siège, il la bouleverse, il traque par ci, tire
par là et se livre à une fusillade sans trêve et sans rémission,
il crie : Gare aux lièvres, aux perdrix et aux bécasses ! et ce
sont les promeneurs qui s'enfuient. Il y a beaucoup de
chasseurs cette année , mais à vrai dire il n'y a plus de
chasse, et c'est un spectacle que le Parisien oisif ne saurait
plus se (irocurer aux portes de sa ville.
En effet ipii' sent devenues ces grandes fêtes de Saint-
Hubert qui ^e célehrjieiil a r.li.inldly ou à Grosbois. et dont
l'appareil seul l,iis;nl l;iMe;iu ! l, .'Lifenl les fins genêts mon-
tés par les bnlliuilM .i\.ilieis. 1 IiiIhI éi:irlate et galonné, les
poires à poudre siuipiees, le.. centiMUMle chasse et les fusils
damasquinés, c clail lliurmonieu-e laiil'are, et puis on par-
tait suivi de la meule aboyante; alors malheur au cerf, mal-
heur au renard et au sanglier ! Au lieu de la chasse splendide
et giboyeuse, aujourd'hui vous voyez nos Robins des bois
rentrer au logis, éreinlés, poudreux, les mains noircies
mais innocentes. Ils n'ont guère massacré que des crapauds.
Notre gibier n'est plus qu'un gibier vulgaire qui échappe
aux coups du chasseur citadin et se fait tuer sottement au
gîte par le chasseur rustique ; si bien que le gibier féodal a
disparu; c'était un ennemi de nos institutions elle progrès
politique en a fait justice.
Changeons de terrain. Nos mœurs tendent à s'uniformi-
ser, et, dans notre société tirée au cordeau et tondue
comme les eli.iiiiiilles de Le Nôtre, le tableau de genre de-
vient iiiipessihle; mais nous aurons toujours le tableau
d'iiistiiiie. la revue passée dimanche dernier au Champ-
(le-iMars est assurément l'un des plus beaux qu'on ait ja-
mais vus, quelle histoire! quelle armée! quels hommes!
quel enthousiasme ! C'est une démonstration comme nous
les aimons, comme tout le monde les aime ; et l'on se disait
que dans l'état actuel des choses, c'était le coup de canon
le plus pacifique qui se put tirer, et qui ne saurait man-
quer d'avoir son retentissement salutaire dans toute l'Eu-
rope.
Outre ces occupations champêtres et militaires, notre
semaine s'est empreinte du caractère le plus politique ; l'en-
semble des présentes vignettes le constate suffisamment. Par
malheur un sujet aussi grave se prête peu à des explications
de fantaisie. L'un de ces croquis vous représente une récep-
tion (liez M le l'résident de la Chambre; il la reproduit avec
cx^Hiiiiiile, et cependant ilymanque beaucoup de choses,
de ces ilelails i|u'on ne saurait peindre et qui resteront tou-
jours impossibles à décrire; c'est-à-dire la dignité de ces
entrevues , l'esprit de courtoisie qui les anime et l'esprit
de magnificence qui les décore. On connaissait M. Armand
Marrast pour un publiciste éloquent et comme un écrivain
spirituel , l'homme pohlique fait maintenant ses preuves
en homme du monde accompli ; les soirées d'agrément s'en-
chaînent aux soirées nflieielles dans ses salons; l'hôtel de
la Présidence est ilc\enii iiiiKinuaissable , et les magnifi-
cencesilela l(i'puhli(|iie s iru-ent les souvenirs de la mo-
narcliie C.epend.iiii uu ne peiina pas dire de la présidence
actuelle ce ipi'nn reprochait a I iiiicienne,à laquelle on avait
attache tant d avantages matériels que les honneurs y sem-
blaient étouffés ïuus les prolits. Cette réllexion nous amène
assez naturellement à la vignette n° 2, qui figure l'entrée
céréinonialedu Président dans l'Assemblée.
Il y a toujours quelque chose d'imposant dans celle opé-
ration; mais cela dorénavant tiendra davant:ii;e :i I idieque
l'on se fait de cette dignité et de rhomme qm I m , upe,
qu'à la pompe extérieure dont on l'environTii' l.e jneMilent
n'a plus de costume et il n'a d'autre cortège que celui des
secrétaires et des huissiers. Si la garde nationale forme en-
core la haie sur son passage, on n'y ajoute plus le salut du
tambour qui rappelait cette variante du Déserteur : a La loi
passait et le tambour battait aux champs » La révolution
de Juillet, en simplifiant les anciennes habitudes extérieures
de la présidence , n'avait pas nui à l'éclat qui doit s'atta-
cher à ce principatus mensuel ; elle avait compris qu'il n'y
avait pas de dignité possible avec une sonnette; un jour oii
l'autre la R(''p'iiMi,iiie eiiiiipieiMlr:i qu'il n'y en a p.n- plus
avec un cll,ipr;ni Knlml ,l ce elirlir]i.iite-lv-|H'rl -,,n ncuI
refuge dans le.- urjiules çn-es, le pre-ulenl ;cen m. il ilil
sans intention de calembour ) ne nous semble [w.-. ^ullisam-
ment couvert.
Voici le daguerréotype qui impose à nos représentants
d'autres épreuves. Ses innocentes malices ont fait bien
des victimes. C'est le verre grossissant de toutes les im-
pcrfeclions physiques. Il exagère d'une manière inconve-
nante les rugosités de la peau , le bistre des carnations ,
l'épaisseur des mâchoires et les protubérances nasales.
Hier encore, M. X.. représentant camard, se plaignait
L'ILLUSTRATION. JOURNAL UNIVERSEL.
a un collègue de ces
mauvais procédés de
rapparoil qui ont rendu
riiii|ii'rrcTtion plus aji-
parcnle; à quoi le col-
lègue répondit naturel-
lement par le mot de
Talleyrand : " Il suffit
qu'on ait mal quelque
part pour qu'on vous y
attra|]e? » On parle de
brouilleries qui n'ont
rien de politique et de
mariages manques grâce
à ces indiscrétions de
la chambre obscure. Un
autre détail parlemen-
taire qu'il faut bien en-
registrer ici, c'est la de-
mande de deux pétition-
naires pxc(-iitriqnr^; l'un
implonnlilr r.\^-,,'inMrr
la |>lniiilll;j,ilHiii iliiii
décret i|ui iMijiiiijiiil a
toutes les femmes de
couper leur chevelure et
de se montrer dans l'état
où Dahlila réduisit Sam-
son , vu l'influence fâ-
cheuse qu'exerce sur
l'autre sexe le dévelop-
pement illimité de cet
ornement séducteur ;
l'autre pétition , qui ne
semblera pas aussi tirée
aux cheveux et qui n'a
pas une portée capitale,
réclame une ordonnance
bui 11 défende de couper
les queues des chiens
(agitation en sens di-
vers), attendu que dans
la canicule les chiens en-
ragés , portant la queue
entre les jambes (on rit),
il devient impossible de
les distinguer s'ils n'en
ont pas. » L'Assemblée
consultée passe à l'ordre
du jour.
Cependant il s'est fait
un grand bruit du côté
du Théâtre -français,
l'hedre est revenue, Her-
njione va reparaître ,
nous allons revoir ma-
demoiselle Rachel. Pen-
dant trois mois made-
moiselle Hachel a pro-
mené a l'étranger et
dans nos départements
la tragédie française . la
poésie française , l'art
français, et partout elle
a obtenu les plus bril-
lants triomphes. On a
dételé sa voiture aux
portes des villes, on lui
a dressé des arcs de
triomphe , des maires
font haranguée , elle
nous revient criblée d'o-
vations , écrasée d'ap-
plaudissements, et char-
gée de dépouilles opi-
mes ; il ne faut donc pas
désespérer du beau, du
goût, de l'art, tant il est
vrai que ces instincts
élevés , la sauvegarde
de la civilisation , peu-
vent très bien s'allier
avec l'amour éclairé de
la liberté. Sans dout« il
vous est permis de ras-
sasier des populations
Cménionial de 1 entrée du Piésideiit de l'.Vs;
néceptioii dans le» salons du nouvel hôtel do l.i Piisidence de l'AsserabWo Nationnle.
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
21
1. Balle de calibre du fusil
de munitioD.
t't 3. Balles de calibres infé-
rieurs (tels que le fusil
de chasse ) , dont le jet
n'a pas été coupé. Dans
le n** 3 une partie du
jet est rabattue sur la
balle.
4. Projectile fondu dans un
dé. — Ils existent en
grande quantité et va-
rient beaucoup de ca-
libre.
5. Id. — Au fond du dé il
y avait des petits mor-
ceaux de cuivre qui se
sont imprégnés dans le
plomb.
6. Espèce d'olive en fonte
percée d'un trou dans
le sens vertical. Ce pro-
jectile fait partie des
munitions saisiesà l'Ile
Saint-Louis.
7. Feuille de plomb roulée.
8. Projectile percé au mi-
lieu et dont l'extrémité
est taillée en hélice.
9. Lingot de plomb traversé
de part en part par une
tige en fer.
10. Balle en plomb fondue-
dans un morceau de bois ;
trou fait avec la mèche
anglaise. Ces balles sont
en assez grand nombre
et varient sensiblement
de hauteur.
11. Cartouche contenant deux
projectiles : une bail»
spliérique avec jet et
un projectile semblable à
la ligure 10.
12. Balle dite Sobrier, per-
cée dans l'intérieur. Ces
balles ont été saisies le
15 mai.
13. Morceau de fer carré avec
rainures sur les faces ;
les angles sont à pans.
Ce projectile a été ex-
trait du dos d'un garde
mobile.
U. Projectile conique.
15, 16, 17, 18, 19. Modèles
pris parmi une foule
de projectiles de toutes
formes et de toute pro-
venance.
Projectiles divers provenant des insurgés de Juin 1848.
de théories industrielles , vous pouvez leur ouvrir des clubs
comme menus plaisirs , leur donner des journaux pour lec-
ture et des chemins de fer pour récréation , mais soyez as-
surés que cette abondance de biens ne leur rend que plus
sensible la disette des autres; un jour vient où ce peuple
se reprend de plus belle et de toutes ses forces à ces mer-
veilleux enchantements des grandes nations et dont les
grandes nations seules sont capables. Après des mois ou des
années d'utopies sociales , de rêves funestes , de périls re-
doutés et de bavardages inutiles , ce peuple fatigué s'en re-
vient à la liberté vraie, à la délivrance morale par ces
belles aspirations qu'on nomme l'art , la poésie , la littéra-
ture, la peinture et la musique , ces principaux agents, dans
le présent comme dans le passé , de toute civilisation et de
toute splendeur.
Aidez les arts et les artistes , encouragez les lettres , mul-
tipliez les œuvres, ouvrez des débouchés à leurs produits,
alors on vous applaudit , on vous bénit , on comprend que
la France n'a pas dévié de son sillon lumineux , voilà ce
qu'un pouvoir intelligent et protecteur de tous les intérêts
doit faire pour la pensée, et ce qu'il lente chaque jour, et
même ce qu'il a commencé de faire pour la librairie fran-
çaise. Elle se mourait . elle était morte ; tuée par le bruit
de la rue , par l'agitation du foyer domestique , par l'enva-
hissement de tout ce qui tue le livre , c'est-à-dire le]nianque
de sécurité , l'absence de tout loisir et de toute liberté d'es-
prit , si bien que la librairie se voyait menacée de devenir
un commerce absolument inutile ; comment ressusciter la
morte et lui dire : Lève-loi et marche? comment rendre la
vie , la force et la santé à ce cadavre ? C'était un problème
au moins aussi difficile que celui de l'organisation du tra-
vail et que la bonne volonté de quelques hommes intelli-
gents a su pourtant résoudre aux applaudissements de tous.
L'idée est si simple , comme toutes les bonnes idées ; qu'on
s'étonneseulement un peu qu'elle n'ait point reçu déjà et de-
puis longtemps un commencement d'exécution. Il est vrai
Les insurgés de Juin 1848
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
il -:
„l |H.,,ln. I.
li,|„OS '
lrani;ai
sait né
":'''''.'"■;',.';
iirilllu's, l:i \h
l'Ol do 1.1 lllil
^OllS un a>lrr l.i
1- |.^
I ilr. la |HMiséc
r [ic'ii i]ii'il
iii|inrl(' lie
lin mnri'lK' |iii;niin sur rue;, terres, inscriptions au grand-
livre , rien (|iieeela I Voilà le miracle, et , par exemple, noiis
ne miiis chargeons pasde vous l'expliquer. Oui , parmi ces
cciil viiiul iiiillo liillets il vingl^cinq francs, un millier ro-
cuiMlIcra cinq cciil> Ir.incs , mille , quinze cents, trois mille
l'I jiisi|ii a ili\ niilli' livres,... de rente. Assurément vous ne
sauriez Iniover ailleurs une plus belle sui|iiiM' , cl imlrc sr-
maine ne saurait vous otTrip un plusgraml cm ■un i uni
Cependant le fîymnase a donné un pclil
elle du 1„
Ml"
de tous les tciiipbl
, vers l'an de gnU-e
I trois pour cent s'é-
SUr une lli^tniicllc du Imll \icil\ Irlllp:
ISl'i. un il:- Cr.i
tailclliilM 1111 .jri
la Jeanne Miilhieu du (iMiui.Kr ni.iilciiniiM'Ilr \niil;iil être
.liiiii'c iiiiiirsiii-iiu'iiic . M liii'ii .|ii(. -.111^ une .iiliniic ma-
lUi'uVM'du |icrc . le- inirr-. nr ~rM'r;iiriil |i:i> I;mIc- an L'ré
de SCS \icu\.»Snii iirhl -nlilcrlu-j.. , qui l.iil iHiniiriii ,i li-
uia.miiatKin d'un liii,iiiri,.|, ,011-1-!, ni a Iraii^inrniiT le cen-
dre futur en un a^^l^tl■ Im'-ii;jiicu\ |Miur le Iic-mih ilr l.i
cause, comme disent 1rs |ii,ilMirii- ri l,i iuhr ilr\ ml Inm-
tÔt de l'amour. La niecr imuimUi' lr| hul 1 c r.u.nlrir
original , avec une logèrr \,iri,inlr l> n V-i |ms \i- prir c|ui
attrape sa fille, c'est la fille qui mystifie ici rxrriirni I nnr
11 destinait la main de Jeanne à un dipliuii.ili' , il 1 i'>l un
dessinateur qui l'obtient. Le cadre est luciiii et la pciniuri'
des plus minces , on s'est sauvé par la finesse de la touche.
C'est ce que les peintres appelleraient, je crois, un succès
pelure d'oignon.
- Avez-vous jamais été en France, dcinandc Candide ii
Martin' — Oui, répond l'autre, jai vu |iliiMruis
villes; il y en a où In moitié des liabilani- i'>l liillc
qucl-
liclr
il I
li'l r,-|irit.
-I lir r.iiro i'a-
iiiimr, ri 1.1 -rniiiile, de nicdiic On .1 l'.ni- illirnlilc
|,,utrscrM--|irce.s-la, c'est une |nv--e ,l,in- l,H|nelle hml le
niiinile elierrlie le plaisir et ou ple-que |.el-i r lie le
trouve. On dit qu'il y a des gens 1res polis il.uis celle ville-
lii , je le veux croire , quant à moi je n'y ai vu que trois es-
pèces de gens : la tourbe écrivante , la cabalante et la con-
vulsionnaire. » Et là-de^siis l'Iionnéte Candide est fort
impatient de voir Paris Cimlide n r,iii- ' i.inel Mindeville
ou vaudcvilisanfserail a— iv n-e puni I \ remlnne ' Au-m
le nÔtre( je [larlcdu Camlide jeue celle seiname au lliiViliv
des'Varii'li's ne \,i pas si loin , à bcaucoui) près. Chassé
de la faieii linniihiinie que vous savez, du cliâteaudeM. le
baron de Tliiinder leii-Tranck en Westphalie , son paradis
terrestre, ce pauvre Candide tombe dans lenler des Bul-
gares , puis il traverse les monts et les mer- a l.i 1 vi lierche
rie sa chère Cunégonde , et suivi à dislaine par mui maître
il finit par arriver tout droit dans le
le fameux Eldorado , cette terre
p.ii CM elleiiii' lin riiniiiuinisme , 1 lcanereali>
ee, ou il n v a
m reliL-imi, m l.innlle ni eiiunle jn^ln e, mi ,■!
a, -un \ildaiis
la COmmilIlllllIe de lous les lilen-el ,1c linili-
le- 1,. ^,
oùlesfonlaini-di-lnl.nelil le mi, , l,'-ii,r,-
1 la ,', 'II,..
où l'nr est limie , el par eniiscpieul eu il n,' -
,i^nl,,|ue,l,. >,■
baisser | r en pnniilre. uiienlin 1 on elail -i
ci'\q 1
endevenail inalheiiieiiv a faire pitic liieii ,p
.sodcdu MaiCaniliile , le Caudale ,1,- VanrI
'S aniail pu -e
faire pre-,n,l,ilil,' ,1 a,lu.'l , ni.ii- ii.iu- n ,i\.
II- p,i> \,inlu
voir bien, 1,111- ,1,111- ,ell,' m-, -ni, M,-.. -,ilii,. .1.
r,ipliini-nie.
et nous un aMin- ineinniin le,- :jr,iii,l,- ,•! p.
hle- ln,ilices.
Aussi bien ne hnnlie/ pas,, l,,in,l„l,' m,.
leiaierde
couplets, ne tmielnv pas.i r,in;:l,i>- ,'l .i s, - i
i-niineiiienls,
laissez 1 esprit , l,'-,ii','.i-iui'> el li'-plai-,iiil,-i i
■-,l,'\,iltaire,
où le dieu lui 111, 'lue les a places; vous r,,i
ipi.'lnv, qilon
s'est nieilMHivninil e^avéde ces perscinn.i-,-
r,ii-,'nneiirs.
dccetl';id,ir:i,l,, eu larton peint , etdeee l„,i
liile,|iuparmi
tant d'aventures qui lui arrivenl , ne -ni p,i.-
■n ImiiNcrune
scule comique. Va pour 1 opliini-in,- ' C,p,'n
laiil celui des
Van(f((,'s ne fera guère de proseKi.-, ei -,,ll^
les optimistes
lli'l le
sl-l,al,l lin ,1
travers le- \i
paroles peu,'
cela : — /'/„
rhnlel, el , ,'
I"
,-,,n,,
. pal,-
siégeant au-dessous du Instre , ce iiauvro Candide allait faire
naufrage tout net en vue de l'Eluorado.
Voici , à propos de
défaut, un pelil épis,
de fer pendani celle ;
Paris à |)iiiiUer,|iieel
viendra pineliaiiieiueiil i , i
élé prévenu- ,pi iinlepeiidai
de Pans le vendredi . deux ;
oniédie (jui nous fait aujourd'hui
pninle il l'histoire des chemins
e (In iiiaumnait le elieiiiin de
lais, yilhistnilinn y re-
I' que les iiiviles aviiient
du L-raiiil (ainviii parlant
l'Iaienl mis a h'iir dispn-
lall
sition pour le .saiiiedi. On veiil prniiler de celle f.iculle pour
ses affaires; on resie donc daiislacapil.ile jusipiau dernier
moment; on part enfin ;iiu est parli , maisim n'a pas prévu
l'organisation incomplète du nouveau service , l't la néces-
sité qui en résulte de ftiire soixante lieues sans pouvoir
mettre pied il terre pour la plus maigre collation. C'est
ainsi que nos voyageurs — ils étaient huit et des plus par-
lemiMitaires et des mieux huppés — arrivenl a ('alais , au
milieu de la nuil , parl'ailemenl all'amés, l'un atlcléa sa va-
lise , l'aulre tirant un sac de nuit . ctchercdianl lous un gîle
sans le trouver, de sorte (]u'on se résigne à entrer dans l'holel
Guillac pour y smijier. Nouvelle illusion '. Plus d'une demi-
heure s'était écoulée déjà , nous ècril un léiiinin oculaire.
sansi|u'on vil apparaiire aucun des prep.irald's du souper.
p,i- 1
pniir .sli-
ipi,.--.a.L','nl.,,l .,'pl,ilnlen -un p.ilnl-ile
stle persistance qui trouble le repos de la cité ; et il finit
par appeler la police il son aide pour mettre à la porte les
perturbateurs. On se perd on conjectures sur le dénoùment
qu'aurait eu cette grave affaire, si le maître de l'hôlel Meu-
ricc ,' obéissant il un mouvement d'attendrissement a l'as-
pect de ces grandes infortunes à jeun, ne les eût recueillies
il sa table comme ces rois méconnus que le Candide de Vol-
taire rencontre ii Venise ii une table d'auberge. Nos repré-
sentants v furent traités avec les égards dus il leur rang tl
i-,l,-ap|.élil>p
. ,1 .dli'i
l'Ilippiiill-
:,p,
d'clcdaii.s kl »al
du Cil
-01 V
leutaires.
innes'inau-
-llislorique,
a l'envi des
c ce soir, el
r, ses exer-
pique. Ce sont là
des restaurations qui obtiennent l'approbation de tous les
partis.
Hélas ' hélas I ii quoi nous oblige notre devoir d'annota-
li'iii- ,1,' l,,ii- le- lail- il,',-hr,Mii,pieiir-iiii-ereelde miroir plus
11,1111- liili'l,' ,1,'- ,'\,-i,,'iiii-iil- ' \,iila notre fin de Cour-
rue l^'iil .<\\n~lm\ii -[«■,[. i,lf Arr. i iiKseits de guerre. \'om-
,pi,H l,iiil-il ,pi,' la i-ai-iin ,1 |-:i,it el la lui su|irtine du salut
pu 1,1,,' n,. p,'i nii-ili'ul |i.i- en, ,iie ,r,iiiM ir l,-- cachots el de
i-,.|ei-iii,'r raliinie en en relu-.inl l.int di' inallieurcux ! l,'/t-
hislnilinii \,iii- lie 1, 1 |.i,urla dernière lois les dèplora-
lil,'- in-iruineni- il,' 1,1 LiuiTr,' (ivile ; pour la dernière fois
an— 1 l'Ile vini- iiili,i,luil il.ins le sanctuaire de cette terrible
justice , en faisant des vœux pour n'avoir à reproduire bien-
tôt que des scènes d'absolution , de clémence et d'oubli.
Kn|t|ioi*t de n. Ariiianii jTlarraet
Srn LE PROJET Dli
sriTCTION l'HESEXTE
N,VTI0NAL1.:.
Après ipialre mois de travaux el d'éludés préliminaires,
il,' |,,i- ,1,' lian^ilinii el lie ile,r,'l> ,1 ni-ç.'iice , de périls
^lave- el de Inr I,il,l,'- l'pn'inr- , v,ii,-l i-nlin l'Assemblée
nationale sur le seuil de l'edilice (|u'clle a mission de con-
struire.
Sera-ce le temple solennel et durable de la liberté , de la
fraternité et de l'égalité? .Sera-ce un monument éternel.
Cl ne l'avait in;.;i'Mii'inienl aiiL,uiii'' de sen leiivre [iriipre la
|iri'inier,' r,,,ii-lilu,iiile ,' La -,.,-,.i,,l,' n,' p,,rla^i' |m- ,,ssuré-
ut l'elleillusiiin Cniniiieiil ,-'v ahaiidi.iinei.iil-elle , lors-
que , depuis soixante années , la France a subi tour a tour
" les cruelles douleurs de la guerre civile , les brillantes dé-
ceptions de la gloire , les amerluiiies de la défaite , la mo-
narchie ah-uliie iln L'i'ine , la iniuian'lii,' lenipi'iee el sans gé-
nie, el l,i li'.iliiinl,' , et I illeL'iliniili' II- p,.uv,,n- t',indé3
sur (lesti-a,liliiiii-el II- piiuv,nrs|-,.ii,|,'s -ur ,li- il leièls ?...
Tout s'est usé , é]iiiisé , jusqu a ce qu'à ces souverainetés
usurpées, compressives ou défaillantes, le peuple en ait
substitué une qui ne saurait ni s'épuiser, ni jiérir ; la
sienne . n,if,ju,rtdeM Muerdsl 1
,\pr,'suii lel i,ihle,iii , il p,ii,ni ilillii'ilo d'espérer pour la
ihiiiM'll,. ,-li,irl,'r,'pul,li,-,nii,'. qui >e prépare la pérennité des
-1,', li'S — l';ii lail lie 1-1,11,-1111. lien , il n'v a d ('■ternel , dit
,s|i,ik,'speare, que le tr.iv.nl du |.,-in,'in- — Mai- la dé-
ni,',ne des vivants ne du;,' qu ,i la riiinlilien ,1,' -,■ ri'iinuve-
liT -ans re^se (j'ia est suilout vr.ii des institutions ré|)U-
hli, ,1111,'- In temps plus ou moins long , la lettre-morte,
pi'ul ii'jii une grande nation, la retenir, la comprimer,
couiine il.iii- un miMile imioiialile Maisil vient on |onr, une
heure , mi I,' pm-jn- lenleni.'iit l'ail l,n-e lenlrav,. , ,.ni-
porte lesi, -,-!,, m, - ,-l -e l,,il piiir p.n ,1e n-iiilil,'- ,1,', liii,'-
nienls, ^ ,\in,-i InmlH'nt l'ii pi,ii-siei-e IcmU na-l lesde ,iuiii/e
siècles.
En République , au contraire , sous le suffrage universel ,
les révolutions n'ont plus de raison d être, et l'insurrection
est le plus grand des crimes. Pourquoi ? — M .Armand .Mar-
rast va vous le dire mieux que nous :
« Le moyen d'éviter les secousses violentes et périodi-
ques , c'est d'organiser les institutions de manière que toute
idée juste, toute application utile puisse s'y encailrer sans
effort; que le mouvement des fsprits et des faits se régula-
rise en s'a|)pliquant, que toute amélioration ])uisse pas.ser
de la conviction d'urv seul dans l'opinion du plus graïul
nombre et de l'opinion dans les lois, sansautre trouble que
r-i^itation causée dans l'atmosphère politique par le mou-
veineiiTel la calme chaleur île l.i himiero.
» Oue faut-il pour cela,' ,\diiplei' une forme de gouverne-
ment flerilitc . pniétrahle aux iiitcrètsfommf niu idées , où
le sentiment public trouve toujours son expres-ion sincère ,
el dont la morale soit rebelle à l'ambition ou à la violence
des minorités,
• Voilii ceipie réalise legouverneinenl républicain à l'aide
du sulVr.ige univei-scl et direct cpii est son principal iiislru-
nieiil. Avec le sullrage univci-scl (oi// ;)fi(( itredrfrcluru.r.
niiii.i tinit est temporaire et rorrigilile. »
C'est la , en effet , la grandeur e; iieut-iHre aussi la misère
dessocièlcs démocraliipies. jeunes, luuùllantes, violemment
débordées d'un lit inonarchupie Longtemps, sans doute, il
leur l.iudra clieri-her à travers mille nbstacles la voie régu-
lière qu'elles doivent suivre un ieui —C'est dire assez ipie
I un ne piail viser, pour la con'sliliilioii élaborée acluelle-
iiieiii par l'Assemblée nationale , à la perpétuité d'une loi
iiiiisaiipie , 11(111 plus qu'a la solidité d'un monument égyp-
lieii .\l.iis si I \s-eu,l,lèe, qui ne peut ni engager l'avenir
dniil elli'n'e-i p.is luailresscv ni méconnaître le présent et
-, - pii--,inte- exi.çinei's , s,- lu, nie .i iiipusdoi r, |iour par-
le! \ 11 Ij. Il renient , une m.u-on , un veleun'nt a notre taille ,
-1 ell,'j,l!ed.in,les(.l le- loiidi'iuclit,- s.Tieux et stables de
1,1 |.,i m,' ri'pulihcaiiie . i- e-l assez pour sa gloire . el , quel-
,pi- ii'M-iiin, ipielipie iliaiii:,. nient qu .ip|„-ile ulléfieure-
iiient -lin leuvre, ses droits a nuire gratitude seront du
moins invariables cl imprescriptibles, et l'on pourra , l'on
devra même dire d'elle .-ans emphase qu'elle a bien mérité
de la patrie.
Eplièmère ou solide au reste, el <|uelles que soient ses
destinées à venir, 1 édifice constitutionnel gagne singulière-
ment il nous apparaître au travers du frontispice ou du uor-
tiquedonl.M. Armand Marrast est larchitectc , eidonllob-
jct n'est pas seulement de nous en laisser voir, mais de nous
en montrer sous ini jour lumineux les grandes lignes el les
assi-es principales
paf quatre départements el près
s, membre du gouvernement provi-
M Manasi, sur son banc de l'As-
I,iii ,1 -, - an, ii'ii-.inii- rêveur, sou-
cieux . presquealli i-ie s,, il li,i-,iiil , -,,il in-iin, t . ilallachait
souvent un regard pi, m de renoiiriiiunce p.irdon . cherlec-
ti'iii, -1 , ,11 M.ii iiv.'liitionnaire, j'niventeiin moldontj'ai
bisiiin , enipri'inl au— i d'une sorle de mélancolie . pour ne
pas due de convoi; isc et de regret, vers cette tribune où
nagui'ie et durant tant d'années il avait siégé, trôné pres-
que , en vertu de la royauté du sarcasme , de la verdeur el
de l'esprit Chaque fois (piun orateur inepte ou ridicule se
cramponait à la tribune, qu'un ili'hafnisenx s'élevait ou
qu'un membredu pouvoirinterp, li,- ei ie^',, vaut faisait sotte
mine sur la sellelle — toutes clm-e- ,l,,iii la r,,vauté en par-
lant n .1 p,,inl 11 ii.stré la Hepublique— .,ii eut dit queM. Mar-
lasl , heii'hail HIV (ilunlairenieiil dans sa |jni'he ou â son
oreille sa lu. une plume de Tolède . nu se elierchait lui-même
la-haut, dans cette tribune , parmi lous ces généraux d'A-
lexandre auxquels il a légué le sceptre.
La nomination de l'ex-rédacteur de tant de l'remiers-
llepii'seni
irilll inllllnl
ml iiiii
,1e -iill
soire el iii.ii
semblée nat
eilel'.
loqueu-
,lee na-
, - ' I . > -i-h'giaques
Il ilnilll qui , du reste,
lit Inndees , honorent
■ien piiblicisleilu.Va-
idcnl , dans sa splendeur.
- et nous l'en louons —
me écrivain el , descendant
l'nris élincclaiils , de tant d'Adr,
ses et fines portrailures, à la pi,-- ,':,,,. i \--i'
liona le, parait avoir fait trêve ,i , , : , , ■ i , , -,
V ers i'A uld lang sync el le hnquei
si ces apparences èl ces (onjc-tiii-e:
tout a la lois lecnair el lespnt de I
tional. (Juoi qu'il en s"il , le pr
n'a pas voulu laisser l'i li,i|ipi
l'occasion de rcappar.iiire eoi
de son fauteuil , il a revendiipié,avec instance les laborieu-
seset émineiites fonctions de rapporleurdu projet deconsli-
tiiliiin ipii , tout d'abord, avaient été confiées à son habileté
de plume cl même de parole.
Nous avons un double regret : c'est que , d'une pari , le
manque d'espace ne nous permette pas de reproduire en
son entier le rapport de M, .Marrast , et riue , de lautre, nous
n'ayons pas , pressé par les besoins de la publicité, tout le
temps nécessaire peut-être pour apprécier et analyser di-
gnement ce travail politique important qui puise un si haul
intérêt dans son sujet même et dans le nom de son auteur.
Ainsi que nous le pressentions , on retrouve tout il la fois
dans celteceuvreriinnime de style et le républicain sincère.
Efforçons-iiiiii- il.iliniil déjuger l'écrivain ; tout à l'heure
le répiililii .1111 le— ,11 In a dans l'analyse el dans les citations
par nous muliipliees autant que possible des passages les
plussignilicatds du rapport.
Ce document est d'un genre neuf dans ee qu'on est con-
venu d'appeler le style politique et la langue des alTaires.
Il y a de limage , de la période , du nombre ; la déificatien
de l'article de loi s'y trouve quelquefois portée jusqu'au
lyrisme. L'écrivain s'y défend de l'homme politique : il ne
v'eut pas perdre ses droits , et sous le démocrate on sent
pointer l'académicien , mais l'académicien révolutionnaire,
comme Kabreet Marie-Joseph . comme l'eussent élé Bar-
nave iM Vergniaiid, s'ils eussent vécu. Ce n'est pas ainsi
,pi l'i'i iraiiMil a— nri'inent un vieux ministre, un directeur
i:,'ii,r.il ,1,' I ,'iiiv;;isi rement , un honorable économiste ou
slalislieien ipi'nnt blanchis vingt commissions du budget.
gens experts en celte malien^ : sans doute ! mais alors qu'il
s'agit de constituer, de sauver, de régénérer le pays, il est
permis de s'animer, d'éclater, d'avoir de la pompe , de la
véliémenco, du style. De pareilles occasions ne so présen-
tent pas deux fois . sinon dans une vie d'homme , au moins
dans une carrière de rapporteur.
Je no conseillerais pas toutefois il qui n'aurait |>as le ta-
lent hors ligiu' île M Marrast de Se lancer à sa suite dans
celle voie un peu hasirileiise Son travail , connue toutes
lesiruvres composites, n'est pas. selon moi . un modèle sur
à proposer-, et tel qui viunlrail se garder, à son exemple, de
la séclieresso réglementaire cl officielle . pourrait bien . faute
de pos.<èder un peu de la verve . du goût el de la sûreté de
main d'un pareil o,«fur politicpu- . se précipiter dans l'en-
ffure et raccomumder net son auditoire avec le six le de
proces-verbal M Marrast lui-même, tout artiste qu'il est.
mais parie ipie le côte .saillant de son talent est bien moins
renlhousiasme germanique que la vieille ironie française ,
n échappe pas toujours à cet irueil . et l'on Iniuve , chemin
f,iis;inl . dans son Rapport, un peu de rliéloriqiic el des ex-
pres.sioiis ipii ne sont pas loujoui-s heureus<>s . ou certains
traits mal réussis. La société conipaiw n une machine gui
se Ji'lnuiiie. la ("(Uisliluliiui pas.si"e à l'étal d ii.re de In sphère
oii se meut l'aetirité nationale . le caractère des pnices qui
n'est piiinl ainialde. tout cela, el quelques lapsus de même
geniv. n appartient ni au slvie noble, ni ii l.i langue des af-
faires M.iis il V a des lâches au soleil : il (hmiI bien s'en
reiiionlrer dans l'iruvre de M. Marrast . vis-ii-vis duquel
nous sernuis honteux de ces petites chicanes . si elles ne lui
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
23
iiortaipnt hi iiiruvc cprtaiiie du soin que nous avons mis il
loliro, l'n MIC lenips qu'elles témoignent chez nous d'un
diiettantisiiic lilléraire, d'un culte de la forme, exagérés
|ieul-élre, mais que plus que personne M. Marrast aurait
intérêt à trouver dans la majorité de ses lecteurs.
Abordons maintenant le côté politique de son travail.
Le rapport débute par poser en principe la loi du progrès.
Méconnue, celte loi fait les révolutions. Le bon, le seul gou-
vernement est donc celui où elle aura toujours droit de cité
et de su|)rc'iiKitie, et ce gouvernement n'est autre que la
forme re|iidilir;iiiir, ;iidée de son moleur essentiel et de son
irréfragalilr ilcninil d m-ilre : le siilfioye universel.
' Km deu\ llllll^, ciiiu lut le nipport a ce sujet, la France
est une démocratie, le gouvernement de la France doit être
une répiiblii|iie. «
Conclusion d'autant plus juste, qu'en politique comme
en jurisprudence on peut toujours dire que ta forme em-
porte le fond.
Suit cette peinture de la France et de la fonction qu'elle
remplit (laii< le monde, toute de dévouement et d'initiative :
" Cette rniiiiinii, rlli' l'exerce dans Sa vic intérieure commo
dans.sa mimIc k IiIkhi .'^on travailconstant sur elle-même,
c'est rairriirlii-^cniciil Miccpssifde tous ses enfants; son tra-
vail au-dr.~-ii,. , r-l (Ir iv|i;iiidn' le- iilcrs qni Irlevent elle-
même, l'.r i|iii 1,1 ili-hn-iir. !■ rr-l (II' l.iiiv pidliler autrui de
ses propiv-. mminrli',:' Icjui-iiie lui ol anlipalliique , elle
n'a jamais acquis que pour dépenser.
» Changeant dagcnts et de iiiiiy.ens suivant le temps , elle
cherche toujoursa se communiquer, às'épandro; tantôt par
l'épée, quand la victoire ouvre les grands canaux de la ci-
vilisation ; tantôt par les révolutions, quand elles proclament
ces principes morauK qui unissent les peuples ; tantôt par le
rayonnement pacifiquedeson intelligence. Elle a sans cesse
le même moleur dans la même carrière, et tel est son besoin
de sociabilité qu'elle semble ne pouvoir se reposer qu'au
sein de cette association universelle des nations, liées en-
tre elles par le respect naturel de leur droit et de leur devoir.
.\us3i, quand un pouvoir malfaisant lui enlève l'air et l'es-
pace , vous pouvez lire dans ses regards attristés tout ce
qu'elle souffre, jusqu'à ce que son génie retrouve sa voie et
y déploie ses ailes avec plus d'élan et de vigueur. »
L'idéal de la France est donc dans la formule placée en
tête du projet de Con.stitulion connue le dogme fondamen-
tal de notre polilii|ue ; Lihcrir. Egniilr. Fraternité.
Le projet de (.lonslitution ne delinit [loint ces trois termes,
et c'est avec raison : les définitions ne valent qu'en niallié-
matiqiies.
Le rapport supplée à ce silence :
« L.'i liberté de chacun finit où commence la liberté d'au-
trui : ce t su première borne, et de là naît Yégalilé...
" L'égalité a établir dans les rapports sociaux, c'est celle
que la frulernilé commande et explique...
» La fraternité servant d'origine aux institutions, inspi-
rant les lois de son souffle, animant l'État tout entier de
son esprit, voila, selon nous, l'heureuse et féconde nou-
veauté de notre République et de notre Sge...
»Nous sommes convaincu et nous affirmons qu'une so-
ciété est mal ordonnée , lorsque des milliers d'hommes hon-
nêtes, valides, laborieux, n'ayant d'autre ropriété que
leurs bras, d'autres moyens d'existence que le salaire , se
voient condamnés sans ressources aux horreurs de la faim,
aux angoisses du désespoir ou à l'humiliation de l'aumône,
frappés par des circonstances supérieures à leur volonté qui
viennent les chasser du toit où le salaire les faisait vivre.
« Nous disons que lorsqu'un citoyen dont le travail est
la vie. oll're à travailler pour se nourrir, pour nourrir une
femiiir. ilis onl.iiit-; un \irii\ père, une famille, si la société
imp.i"ili|( drt.iiinu' le- \rii\ >i elle répond: « Je n'ai que
faire ilr Mitiv lra\ail; ciienlii'z ou mourez, mourez, vous
et les vôtres, ■> cette société est sans entrailles, sans vertu ,
sans moralité, sans sécurité ; elle outrage la justice, elle ré-
volte l'humanité, elle agit en heurtant tous les principes
que la République proclame ..
> La République ne doit pas borner son action à proté-
ger la liberté, la propriétié, la famille, ces premiers biens,
ces biens impérissables de l'humanité; elle ne doit pas se
borner à dire : « J'ai des lois contre les pervers, contre les
malfaiteurs j'ai des gendarmes, et contre les factieux j'ai
du canon. »
» Sa foi lui assigne une mission plus large et plus élevée
Elle est la tutrice active et bienfaisante de tous ses enfants;
elle ne Ic^ bis'ie pas croupir dans l'ignorance, S" privcrlir
ibiii-. I, -iTr ; elle ne demeure pasindillcu'iiir d \;iiit ces
cii^:'- lie I indnslrie qui jettent des années de siljni's sur
les pl.u r> publiques avec l'envie au cieur. le re.-seiitiment
et le blasphème à la bouche: implacable contres la révolte,
elle est compatissante, humaine, |irévoyaiite |iour le mal-
heur: elle recommande, elle honore le travail, elle l'aide
par ses lois, elle en garantit la liberté; mais, lorsqu'un
chômage forcé vient paralyser ce travail, elle ne ferme pas
son coeur, elle ne se contente pas de gémir en répétant
Fatalité! elle fait appel au contraire à toutes ses ressources
en s'écriant Fraternité ! «
Les citations qu'on vient de lire ne procèdent pas seule-
ment d'une inspiration généreuse: elles sont le point cul-
minant, et comme forme et connue fond, du travail de
il Marrast et de la Constitution même. En elles se résume,
a iiein. M'ii- ilu moins, l'esprit de la révolution.
"m, e r-i I I ;i\iMi- iiieeiiiinii les misièrcs et les besoins
de> li,i\,iilli-iii~ lie liinli> ilis.-^i's, c'est pour n'avoir pas
même leni.' il .mielinrer le hhi des masses, c'est pour s'être
endormie dm-, nue euntianee funeste et dans une impré-
voyance e^iii-ie -nr I .iiciller do Laisser faire, d\i Laisser
passcralwilii, c e>l-;i-diivdii Charun pour soi, chacunchez
soi. qu'a un jour dit. I.i iii.iii.ireliie, si prospère et si [luis-
sante, est tombée iiii-er:ihleiiieiit devant une minorité, la
veille encore imperceptible.
Quiconque voudrait reprendre aujoiinriiiii ces dnelrines
d'indu idii;di> pur, euurriil dnul'.in meine id.iine !,.i li-
berté, .suis dont,, iniiisnnn I ,ippi e>M(ili ri lil lieence' l'ilis-
qii a \iK yeii\ eomme ,iu\ miliv- il e>l iiidi>pi'iH,dilede faire
régner l'ordre dans la liberté politique, par (luelle exclusion,
paripielle anomalie l'ordre ne règnerait-il pas dans la li-
iierlé industrielle? Cette conciliation est la première tâche
d'un gouvernement éclairé, quels que soient son nom et sa
forme. Si ces deux éléments, frères et non rivaux, sont
compatibles dans le premier cas , ils le sont aussi dans le
second. I!ei:i est eeilain , cela est évident , comme dit le
plide-oplie l'iei M' l.einiiv; et voiUi Cependant cc qui est mé-
connu depuis iiii M ^i.ind nombre d années : d'où la situa-
tion cruelle ou ^eiiiil cette nation.
" La formule lirnil au travail ayant paru trop absolue,
ajoute à ce sujet l'auteur du rapport, nous l'avons rempla-
cée par l'obligation imposée à la société envers l'individu
soulfrant. La forme est changée, le fond reste le même. »
Cela est vrai : mais ce fond lui-même n'est rien si un en-
semble de dispositions n'en assure hi mise en ]iraliqoe. Le
I Itrnit nu trnrail iiiMTit d;in- l,i I '.nnsliliit ion ne décide
r.en el, j ,v- .mii,,'- nmi-N l,.|eiiis niedioi renient Kl toutes
le> le.l;l.~!,.tlnn^ du iii,,nde elle- ni,> ^,T,ii pin-smiles
s'il ne sy joint r.irlmn li;ilide hennele inf.iliL'jhle. ;ilten-
tive des gouvernants \ii^~i ie^ivd.i.l Mir^ de l,i Cm-hliition
qui l'ont coin|)ris in-tineti\eineiit ont -ils en mille lois r:nson
de ne pas s'arrêter a une question de forme. La l^lonstitution
pose le but , les lois organiques le rapprochent ; le génie
seul et la vertu l'atteindront.
La seconde question grave qu'aborde le rapport de M. Mar-
rast, est celle de l'unité ou de la dualité des chambres. Le
rapport conclut à une seule par ce dilemme qui nous paraît
décisif :
« Ou les chambres seront d'accord, et alors une double
discussion, un double vote, ne servent à rien et peuvent
nuire en retardant la loi ;
», Ou bien elles seront en désaccord, ce qui arrivera le plus
souvent, et alor§ c'est la lutte que vous établissez au sommet
de l'Etal Or, In liille on haut, c'est l'anarchie en bas; les
den\ eliiimlnes sent donc un principe de désordre. »
.\pres s itie ,iii:irlie a taire ressortir les inconvénients, les
pénis éventuels d une lutte entre les deux chambres, M.Ar-
mand Marrast combat les deux objections invoquées contre
l'existence d'un seul pouvoir législatif: la première, puisée
dans l'exemple de l'Angleterre et des Etats-Unis américains,
qui nous paraît, ainsi qu'à lui, peu concluante; la seconde,
qui est plus grave et réside dans la connaissance de notre
impétuosité nalurelle, et la crainte des entraînements dan-
gereux auxquels serait exposée une assemblée unique, sous
la pression d'un événement extérieur ou d'une émotion née
dans son propre sein.
.\ cette appréhension, M. Marrast oppose les différents
iIcL'n- ,111 (ici, lis imposés aux décisions de l'Assemblée, et
I ciidili-Miiicnl près d'elle et par elle d'un conseil d'Etat
cli.iiL'c d el.dieier les projets de décrets, de résoudre les dif-
lienltes li'^ishilives, sorte de tribunal qui remplirait assez
roltice d une seconde chambre, s'il était autre chose qu'une
émanation directe et une délégation de l'Assemblée.
Du pouvoir législatif le rapport passe à l'examen du
pouvoir exécutif.
Ici, autre question grave: Par qui sera nommé le prési-
dent? Sera-ce par l'Assemblée ou par la nation? La Con-
stitution pose ce dernier mode; le rapporteur le soutient en
ces termes :
« La majorité a été convaincue que l'une des conditions
vitales de la démocratie c'est la force du pouvoir. Elle a donc
voulu qu'il reçut cette force du peuple entier, qui seul la
donne, et qu'au lieu de lui arriver par transmission inter-
médiaire, elle lui fût donnée parune communication directe
et personnelle. Alors il résume sans doute la souveraineté
populaire, mais pour un ordre de fonctionsdéterminé : l'exé-
cution de la loi. La majorité n'a pas craint qu'il abusât de
son indé[iendance, car la Constitution l'enferme dansun cer-
cle dont il ne |ieiit pas sortir L'.\ssemblée .seule demeure
iiiaitie-seili' ton! -\>te petit ique; Ce que le président pro-
liose p.ir ses inini>lres, elle a le droit de le repousser : si la
direction de l'administration lui déplaît, elle renverse les
ministres; si le président persiste à violenter l'opinion, elle
le traduit devant la haute cour de justice, et l'accuse. •
Reste le pouvoir judiciaire. Le rapport annonce qu'aux
trilHiii,in\ e\i-tanls seront ajoutés un tribunal administratif
sujiei leur et une haute cour de justice composée de juges de
la Cour de c:i-s,ilion et de cnnseillers-L'énéraux de dé|iarle-
ments, on I \--eiiililei' ii,ili(iii;ile pnnii;i ieii\n\er ses pro-
pres menilnvs, !,■- mini-lies et le jin-idcnl de Ki liépnlilique
lui-même. Ce u e^t ni le temps m le lieu de chercher non
|ias il juger, mais à pressentir le mérite de ces institutions
nouvelles.
« Le [iremier projet de la commission de constilulion ,
ajoute .M .\rm:ind Marrast, était d'étendre I in-litiiimn du
jury au pi-'ement des atVaires correctionnelle- l'i j (|iiel((ues
procès civils; mais celle pensée a renconln' d,in> tous les
bureaux de l'Assemblée. une opposition si générale et si
rude que la commission a dû se résisner au silence et à la
défaite. «
Vue i.pposihoii pn-,pie c'j.ile s est iminil'istée contre l'in-
lerdielmn du iMiiplieement iinl]t;iire, N,-,inii,niiis la com-
inis-liin , ,qirr- ~elie erl.illee en eeoiit.int le président du
enii-ed el le immslii'de l;i ^■iiem', a Cm devoir maintenir sa
peii-ee |iieiiiiere, p;ir eeli e |ieiiM'P principale : « Vouloir que
1,1 p.Mivieie p:iNe I inipéit lin .■iniig et que la ricliesse s'en
atfninchisse par 1 argent lui a paru une iniquité monstrueu-
se. " Elle reconnaît toutefois que cette interdiction absolue
du remplacement est essentiellement liée à une bonne loi
de rernitenient et ;i l'aliréviiilion du temps de service. En
coii-eqiieii, I M -el ..lut II' pi iiiiipe, elle proposc d'en ajour-
ner 1.1 ili-en-s jn-qii ^m iniinient OÙ la loi d' Organisation
iiiilil;iiiv ^era » iniiii.-,e a l'.^sicmblée.
Tel est en substance le ra|iport excellent de .M. Marrast.
Encore une fois, nous regrettons les abréviations et les mu-
tilations qu'il nous a fallu inlliger a ce document remar-
quable. En terminant, lâchons du moinsde nous faire par-
donner cette anaU-" lKiti\eet imparfaile |i:ir une dernière
citation, celle des' Iilmu- elnqnentes on .\1 Marrast signale
les dangers de toute di'viation do |irincipe démocratique :
"Tenez pour certain qu'il n'y a pas aujourd'hui dans le
monde des intelligences un autre genre de gravitation : il
faut ou le suivre et s'y attacher, ou rétrograder dans l'es-
pace, aller à la dérive comme une comète déroutée. 11 faut
où organiser pacifiquement la démocratie dans cette voie
des améliorations, ou revenir, à travers les ruineset le sang,
à un état qui recommencerait pour tomber encore; il faut
ou marcher résolument dans la roule ouverte par la Repu
blique, ou se rejeter dans les révolutions; marquer sa dé-
cadence par ces oscillations maladives, et faire signe alors
à la barbarie qu'elle vienne régénérer un sang vieilli et
faire disparaître de la carte de l'Europe cette patrie qui en
fut pendant de longs siècles la lumière, l'orgueil et l'es-
poir. » "
Ecartons loin, bien loin de nous, ces appréhensions si-
nistres. Non, ce pays ne peut périr I non, cette France gé-
néreuse que dépeignait si bien M. Marrast dansles premières
pages de son rapport n'en est point réduite à ce degré de
gangrène et de démoralisation qui appelle le sang barbare.
La France qui à son insu, sans le vouloir presque, poussée
parune main providentielle, a fait la République, saura la
maintenir, et elle y trouvera avec le temps sa force, sa gué-
rison et son salut.
Félix Morn.xxd.
Esquisse d'une liisloire de la mode
DEPUIS UN SIÈCLE.
EMPIRE.
Neuvième article.
Le désir de briller par les ajustements de la toilette est
un instinct inné chez la femme. Il se développe chez elle
dès l'fige le plus tendre. Encore aux bras de sa bonne la
petite lille est heureuse de la belle robe neuve qu'on lui
met. Son enfance entière s'écoule à habiller et à déshabil-
ler sa poupée. Sa jeune intelligence se tourne naturelle-
ment dans ses jeux vers cet éternel changement de la pa-
rure qui fera plus tard l'enchantement de sa vie. Ce désir
inné de la parure est universel ; seulement il se manifeste
chez les diftérentes races humaines avec des caractères par-
ticuliers qui tiennent au génie propre de ces races. La né-
gresse, avec un sentiment juste de la loi du constraste des
couleurs, aime à faire trancher sur l'ébène de sa peau une
blanche cotonnade ou un collier de graines rouges. Les
femmes de l'Orient aiment les vêtements aux couleurs écla-
tantes, enrichis d'or et dé pierreries ; l'Espagnole de Sé-
ville ou l'Espagnole américaine de Lima voile plus ou moins
sa tête avec l'uniforme mantille de soie. Au milieu de ce
noir vêtement, dont la couleur se confond avec celle de sa
chevelure, elle fait en quelque sorte la nuit autour de son
pâle Visage pour laisser à son ardente et noire prunelle tout
l'éclat de son feu pénétrant Tantôt c'est l'ampleur simple
et majestueuse, tantôt c'est la richesse du costume qui sé-
duit la femme. Ici, elle recherche les couleurs vives ; là,
elle donne la préférence aux couleurs sombres et sévères.
Si au milieu de ces diverses manifestations du goût chez les
femmes des différentes contrées du globe, nous portons
notre attention sur celles qui sont à la tête de la civilisation
de la parure, sur les Françaises, sur les Parisiennes, qui,
de l'aveu de tous, tiennent ici-bas le sceptre de la toilette ;
il semble que nous devions trouver quelque grand principe
d'esthétique et de goût comme trait marqué de leur souve-
raineté reconnue. 11 n'en est rien cependant. Notre respect
pour lil vérité nous oblige en ce grave sujet à sacrifier
au dé-ir délie sincère celui de nous montrer galant envers
ne- lelie- i um |i,it ru iie>, .\\ iis-le donc : ce n'est pas la
béante peetiqne. piUoresqiie du costume, sa simplicité no-
ble, ou liien sa richesse ou sa dignité qu'aime la Parisienne ;
ce qu'elle aime, c'est le chiffon ! Elle s'y complaît, elle le
caresse, elle l'étudié, elle le travaille, elle en vit, elle en
rêve, elle l'aime ii la folie; elle aime leehitînn pour les au-
tres, peur elle-même, pour le clnllnn lin-nie niez le
cliill'onde ce monde et \ous aiieanl i-iv en p.iilie I inquiète
et ineevsanle aciivile de son esprit Ce n cl p;i>Mjii all'aire
à ellede se draper magniliipiementdans niu' pièce d'étotfe,
elle n \ enli'nd rien : elle n'est pas une vestale. D'ailleurs,
ya-t-ilrieii de plus bêlerpiun inorceaii d étoile uni? C'est
bien la peine d'avoir fait tant de eeiiqnete- iinluslrielles,
d'avoir opéré toutes les merveilles i lei nés de la civilisa-
tion pour rétrograder jusqu'au pr/)/»/» on a la rhlann/de (k>.
Pénélope! La Parisienne prend une étoffe pour la soumet-
tre aux mille exigences de son imagination capricieuse.
I our la froncer, la plisser, la tuyauter, la bouillonner, la
friser, la rucher, la taillader, la découper, l'effiler, la bro-
der, la festonner, la falhalasser, l'enjoliver, la chiffonner,
en un mot, de cent, dp mille, dp dix mille manières diffé-
rentes. C'est chose liieiveilleii-:' ipie de \oir ce qu'elle ( rée
d'adorables inutilité- :i Lnde de 1,, -:u > de 1:, I.Innde. de
la dentelle, du nilMii de- pli - et de- lleui- ' ll.idieuse
.•,„m,|„,,Hle re temlidleii N,ThLmie,,\ d- elntlunieiL'es. qui
di-l,,ir;n-elll ,■! -e lel \<'llenl - ■ ll- ee-r ,iii|,,iir d .■Ile, e|l,.
Kt
ipiia 1,1 l.ollllOinieilattellilledeM,!M.,l-r „! -e- i
comment ne croirait-elle pu- ;i 1 infullilHlili' de -nu ^om.
quand elle voit une si unixei- lie -nnnii— em .i -c- e:q,rices
devenus des lois? Non-senleinent ses inventions les plus
n
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
nilc suflini C('p<-nd.int pour les justifier ; A toutes les époques , la Parisienne
s'e^l ;iih lime li' uiiTite (lu bon goùl clans l'art de la toilelle ; que sa robe fui en
ou en fourreau d'cpée , qu'elle eût sur sa tête un pOuf au
peau à la Paméla ou un bibi. El le monde de continuer
scnliiiii'iil .
ciiidoror cl diniilor! Or
jiour citer un l'ail des |
la taille qu'elle s'est amii
innd.ciir ;i f:iiic V"Mil.'c
jusqn;, IrMivinllr -upr,
l«'i"'-l- -mnr.Mi
l.qu
1 oppnsi'cs, el
- \,Mi:iliiiii^ l'Niii'Mies de
lie cl llirii en ciiinl fort
' ilu Ijusc de sun corset
I .liitanl, il est peut-être
- le vrai, el que par con-
(IrlcsUdile. cl a ce sujet
N i-l-iT |i;i- une chose
p,i- il.' |ilii-i( nr> années
|i;iiais>enl Mir.innées, et
coiiiIm
(iucl(i
du iiiond
En présence d
liOUS, ll-IIH'IMMI
ré|iut;ilinn de >
illlicu de l'.ins u
|ue nous (iMinscineUrc
paradoxes sacrilégesl Une simple remarque gêné-
, formes des %'étcments les plus éléijanls au bout de
-enl ridicules ! Chacun trouve alors les meilleures raisons
j^^ .,,„„,. quiT ce qui lui plaisait alors, pour renier ce qu'il avait
adoré Les danics ont a cet égard un inéi)uisable talent , une imperturbable lo-
"i(iue pour trouver sur l'heure même le fort el le faible diîs choses el se mettre
îa conscience en repos avec les plus pauvres raisons du monde. Ainsi, pour em-
li.rM]n'eii ISHiMprc- |ilii>ienrs
Ic-ihi
nple
ni I I
iilh-(le
Irap,
Ico ;
ri le
,|i],iii |,:i, ili- lui iln-c ; " l.e temps est si m
-elle/ .1 |iied, \ olre robc esl il l'instant perdue, liimli- ipi ,i\ec
le ili.ip \eii,-. eiiurcz tout le jour, vous rentrez et apie- i|iiel(|iies
Ile. vous êtes aussi présentable qu'en partant. » L'avanlai^c .--au-
c mari était convaincu , le tailleur était appelé, et madame avait
L'année suivante , autre raisonnement ; » La redingote est un
«SIO
ClLipeau en bateau. — Habit cuuleur crotin.
— Culotte de peau.
bizarres sont adoptées, mais encore il suffit qu'elle
emprunte aux autres une mode, qu'elle la signe.
pour ainsi dire, pour qu'on l'accepte en lui en
faisant honneur.
c«\iprcm,itip,ci>niinenlnsnns-
,li.Ml„lenr, xeinr mlinner la
l-:i, Mllnl' col au
lSll>l^|-«
Coslnines de lîal.
élément lourd et assonuiKHil ; le drap se fane vile, se tache et se roussit.; per-
,11 plu
el diiilleni>
i:i
esl p;is ,
■ilile pour une
i-luiii
repudiiins le lendemain
se jiiinl une faille orii;in
Capote de percale écrue. — Fichu et brodequius
écossais. — Ombrelle de percale.
d'Aspasie , elle fera tendre sa chambre à cou-
cher en drap rouie ii bordures iioires copiée*
à Pompéi el du shie le plus sévère. Tantôt elle
n'estimera que les mcnlilcs anguleux et à maigre
prolil : lanlol li^- nicnlilo chantournés çt à rin-
cc;iii\ :iriiinili> ;iiii"iil -eiils du prix à SCS veux.
\i'i|,inririiiii le lircii/e iiislc et sombre, demain
les (lunùcs a jiroluîlon Chaque artisan s'ingénie
dans son genre a varier autour délie les sé<luc-
1.1 lormalmn
.liens le cor-
lolre piopre
■lie dct;oiil.
I.l Hicphcilé
Inv le- lem-
Ciicvi'liiio ,'i 1.1 Krani;oi< l"'. — Ch.ipeau en baripie
-(■.leuivaii de brelnnues.
sonne
femme
C'est celle lli\elile de
d'un costume naliumd
Uinie de nos pères, iicc- cm. ne ic
costume de la veille. \ celle lii\n
Noire goùl est tourné vers l.i rcclier
dimie et sévère: aussi ce sont iii>ie
mes de la terre s'étanl le plus .i-iiiiimciil ...viipce- .!.■ le 1, lie i|m -!• -..ni
moiilrées le moins aptes h iiiM-nlci de- ce-lmce- p rc-qiic- .i.m- le -eus
artistique du mot. Ces charmaiilcs poupées leiil I élerncl desosiiuir des pein-
tres, et jamais le ciseau du statuaire ne consentirait ii les admettre au fron-
ton d'un iiionumenl. Allez donc inscrire dans le marbre un pouf ou un bilii,
un caraco ou une robe ii volants! (Ju'imporle après tout à la Parisienne le
déd.lin des Phidias? Ses arlisles ii elle, les vrais artistes selon son cœur no
sont pus ceux qui manient réliauchoir cl la brosse, mais ceux qui se servent
i!c- . iseaii\ el de l'aiguille ; la couluriére et la marchande de modes, voilà
le- i;ciiie- (pielle aimo 11 consulter; ce sont lii ses démons faniiliore qui la
piiiis-eiaiciil a un changement perpétuel, si elle n'y était pas disposée d'elle-
inèiiie, i:Me quillera le beau pour le laid sans" scrupule, pour satisfaire
l'inconslance de ses dés rs; elle aura sur sa cheminée des porcelaines de Saxe,
des magots chiniiis ou des vases élrusipies; elle s'engouera tour a tour d'un
pelil nègre . (lun joekev ou d'un groom , d'une guenon ou d'un bichon . d'un
carlin ou duii ki'ng'scharles. Au Vommencemeiit do dix-hiiilièine siècle elle
se faligucra des tiipis.series liérédilaires ou des inde.-lriiclil.ies lenlures de
cuir gaulré et diuv . de la tapis-erie il petits points, du lanip:is el du ve-
lours brodé, el elle ne voudra plus voir dans ses appartenu'iils (]iie des
boiseries peintes en blanc et relaussées d'or, llienlol les lenlures el les
paravents chinois auront sa préférence ; puis, quand elle prendra la tiini.pie
f.hapcau de levantine. — Spencer ilc
— llolie de peicde.
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
25
courir au bois , \e coupe, \e phaéton , le bokei , le guigne, le drohska eX le
casse-cou , petite voiture élevée et roulante parfaitement digne de son nom.
Comment espérer qu'une femme si occupée de choisir tant d'étoffes et d objets
de caprice , de répondre à tant de fournisseurs et d'organiser jour à jour sps
triomphes avec l'aide de sa couturière et de sa femme de chambre , ait assez do
loisir pour s'inquiéter de savoir si la coupe de son corsage ou les plis de sa jupe
peuvent figurer bien ou mal dans la représentation d'une œuvre d'art ! Elle a
trop besoin des hommages de ses contemporains pour se mettre en peine de ceux
de la postérité. Qu'a-t-elle affaire d'être belle ? Il lui suffit d'être jolie.
Au milieu de ce perpétuel besoin d'innover, de renouveler les modes, inspiré
à la Parisienne par l'inconstance de ses goûts , il est digne de remarque que
le fond de sa toilelle reste toujours à peu près le même , et que les formes mê-
mes ne varient souvent (|ue d une manière imperceptible. Le changement ne
s'opère que dans les détails , les dessins , les couleurs , les accessoires. Et cepen-
dant ces changements , inappréciables pour un œil peu exercé, suffisent pour
donner au bout de quelques semaines un air de gothicité a la toilette qui n'y
est pas conforme. Quelquefois de très longues 'périodes sont d'une grande sté-
rilité , malgré leurs changements apparents et seulement superficiels. Les modes
du temps de l'Empire sont presque tout entières dans ce cas. 11 suffit de par-
courir un recueil de gravures de modes de ce temps pour être convaincu de ce
fait , reconnu par les contemporains eux-mêmes , comme on peut le voir dans le
passage suivant , que nous empruntons à un journal de 1812 « Depuiscinq ou
six ans , quelques falbalas de plus ou de moins , des fraises plus ou moins am-
ples , des collets ôtés ou remis, ont été les seules variations de la mode , qui , au
fond , est à peu près restée la même. Depuis cette époque aussi aucune couleur
n'a été exclusivement en vogue , excepté le bleu Marie-Louise ( plus éclatant
que le (apis , moins foncé que le barbeau , très peu éloigné du bleu turc ). Na-
guère le grand art consistait à se vêtir de couleurs disparates. Ainsi Ion voyait
une femme avec un chapeau rose, un cliSle rouge, une robe pistache et des
Chapeau à la RobinsoD. — Cheveux à l'enfant. — Pan-
talon de tricot. — Bottes à la hussarde.
lions , spéculant à coup sûr sur son antique fragi-
lité. Qui pourrait énumérer les mille petits meu-
bles à son usage ? Qui pourrait dire seulement les
noms des voilures variées dont elle se sert ? Vers
1812, outre la remise , outre la berline pour les
grandes cérémonies , la diligence pour les visites
sans façon, la ftasMri/eï/e pour les jours d hiver, la
calèche fermée par dcsrideaux ou couverte d'un
parasol pour l'été , elle a encore le carrich pour
Chapeau de p
Le Jeu de Diable.
souliers gris. Et ce costume, qui eût été autrefois le conilile du ridicule, cette
le couleurs , qui eût paru monstrueuse , n'étaient même |)as remarqués.
Aujourd'hui le chapeau, la douillette , les souliers sont autant que possible de
la inénie éloffe et de la môme couleur; lo châle seulement doit trancher sur le
• \\r~ rin|ili)yoes dans la toilette étaient , en 1812, bien moins variées
iir le nul aujourd'hui . mais elles le sont déjà beaucoup si on lescom-
' ipii .Mêlait auparavant. Le génie inventif dos f'abricanls cherche à
1 h- piiLTs liMwlus à la coquetterie féminine , et il se montre déjà fé-
i> I ,11 1 il ' (Iniiiii'r des noms nouveaux à des produits qui souvent ne le
,jii pnii«-c -i liiin de nn^ ](»\r< \i\ln'l'ni'i . ii prn|)os cicsoie , on n'en-
iii-l^.r ipi.'-lr l.ill. ■ '- .'•_■- .'.'Inn- 'l--,'lin Hi' \ rlnurs. En 1812
M'idlil - r.llllirli - 1- ' . 1 r :i. ,i r. il - , ,l Unir- , i\ deSsinS , etc.
iiiiiiiliiirs . i\r> Irnniliiica , ilrs iiiiiir lliiirs , ilc,~ rirginies , des 6ri(-
ili- hi'tnncs , des luUiites , étoiles ressemblant a un satin sur lequel
du tulle. Hais l'étoffe à la mode depuis un an , est le reps ;
une étoffe soit à la mode ii une époaueoù les dames por-
I iiiuii-. li'^riiilVcs ii:iiis il' iiiciiic ir'inps, velours, soie . ca-
■nnii- i-i iiMin-M'Iiii" i;ili' |.iii ti'iii des Heurs OU des plumes ,
ihi l'oriiil ipn e.-l cMc-^iMiiHiii rue; les rohes sont très
I leur |Mi\ , iiiiiis ils ne font
'' iil h\ |Hrri-rclice aux
.rl.iliiui (lu iiixc (le IDrieiit,
iu lldiLNulal et de 1 Empire.
;■(■ ji-inrc ii"iii:iilr \,i - ;i\;iiM'c'r M'i's les sidiludes glacées du Nord ,
Il ,|iir lin- -,i!,iiii- ii!:irhT> l/ur r,ip|"irlenl lie iiiagniliques four-
-iiiiiii~ ,1 ,1 iiMiilr en Iniit le vériUible luxe du jour. Entre ces
■ |i;iriirr- m dillirriites il y a toute la distance du glorieux com-
.■ncciiirnt (le I l-jnp ir ,i -'•<• ilrrlin.
L'emploi des l'ournin^ ii cïl [>j:^ une nouveauté; un moyen de parure aussi
,i|iii,|„
I très longues ; li'S caclicniires en
ur. Pendant l'hiver de 1812 les
s à capuchon. Lo cachemire , cel
Chapeau de velours. — Redingote de (h-ap
doublée d'astracan.
riche n'a pas dû manquer d'attirer l'attention du
monde parisien élégant. Ce n'est pas la première
fois que les aigles impériales ont pénétré dans le
nord de l'Europe. Ce n'est pas la première fois
que nos officiers en auront rapporté à nos dames
de rares pelleteries. S'il faut en croire la chroni-
que du temps , ces riches cadeaux passaient quel-
quefois aussi des dames aux guerriers. Un jour,
entre autres, la plus joUe femme de la cour, une
.de à oreill
— Cl
de lièvre , ha
ulotte de c-isim
26
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
grande princesse , une des sœurs du in.iilro , l;i [irincesse
Pauline, avait reçu dimsce genre un pn^si'nl \r;iiiiiPiili(i\;il
ou plutôt impérial. Car c'était remiii^riiir AIin^imIk' <|iii
l'avait donné il l'empereur Napoléon , cl I iiii|i(irur N,i|i(i-
léon à sa clicrc l'aiilrllr: l'icelle-ri ii un (li.niii.inl rdoiiel
de dragons , noiniiii'.liilo de ('.ariiiinilli- \.;i iii;ii;riilii|ue pe-
lisse doublée en i|iicMc de niarhc di'\;iil mander la L é-
tourdi et beau colunel s en lait r.iiic un dnlmari et une dou-
blure de chabra(|ue ; et le voila le Icndi^nain a une revue
de l'Empereur avec cette splcndide parure. Mais par mal-
heur son rliev.il s'cinpnite et \:\ pnricr le di'-inrdrc jiisipie
(l;,n^lcL'iniip,Miu-rlnin\,'\,ip(-lri,n i|ni,cnivr,,nn..l",inl
le don ,l-:.iinlir- nnprri.il.- r,_M , r jn-quc ..ni h- r, I,-
,1 |,.nlu
\\r \l
nnr. p.
Il nlih^
pas .-a sii'ur : mai>il envoya le beau cnlmirl ii
il niouruld'un boulet de canon. C'était p;i\ci
même une fourrure donnée par une belle pi im
fût tiré il meilleur marché s'il s'cUni >ini|ilciiii
un fourreur ! — Outre les bellc> il.inn - ri lc~
nels, les petits-matires de la IjiniiLriH.ic .111--1 -
1.M-IICI' ,111 unnl lie- pcli-e. cl Ile- \ilrl
lllIMT ll-e|i,|M-M.nl l.l llMce Inniire le-eiNre
a Icili- rurheis (r lll\e , ipil il.ile île j.Slil 1
di!.liiii;uer par la larcle cl la cIutIc. I.ii-lr.n
nuin et court les rues, le renard , la ma rire \ m
la zibeline, toutes lesfemmesen portent Mn- 1
l'indice de l'opulence el n'est permi-c ipr.nix le
vniliiii. II,. nii> I - ellee-lile\enili.> ni- lie
a picil l,e-ri,li,-pi.lnn.ii-e-. Ie-I"i|ni- , le- lu
• [inn-
-;i lille
l'exila
lenilanl
ii.ivant
-le a se
ni :i la
el-pi
tn
-ili.nle p,
Il ailnlilee
mile
elle pair
cl p;
ilevcliiiirs
cramoisi brodée eu or et la tn.piepaifille. l'uni mui- pendant
l'hiver ce nouveau luxe de fnnrriires dans Imit smi cil.it, ce
n'est ni aux Tuileries, nian\Cliaiiip:^ÈIysces. ni al.nblentz ,
ni il Bagatelle qu'il faut aller le chercher, mais sur les bords
du canal de l'Ourcq , ii La Villette. Cet endroit , déjii si
triste pendant l'été, devient le but de promenade des curieux
et le rendez-vous du beau monde . qui viennent y voir les
habiles patineurs et se livrer au plaisir de glisser sur la
glace Des marchands de comestibles, des loueurs de pa-
tin- et de i!:iine;in\ Mint él.ililis sur le bassiu. Au uiois de
j;iii\iir LSI! le- |,,ii- I iiiMM'iirs. et parmi eux le célèbre
peiiiiii i-.i|.e\ , ,ii[ejiieiii lin II oifomie composé d'une pe-
tiie \e-ie ee.ni.iii' Iquiiei' ilaslraciin Hu colIct et aux re-
.\ei- .i\ee Inii- ;j, III -e- CM usées sur la piliirmc. C'est lii qu'on
le- M ni 1,1 ne nulle |i:i— !■- , dessiner ni il le ligures , des oK-
vrlli's. iirnvuiif.i, d. >syjira(t's, desrff/tors, i\ei renommées,
s'élancer le cor|is en avant , se balancer sur une jambe en
tenant l'autre tendue en arrière et les bras arrondis au-
dcs^nsdela lèlc Daiw ce champ clos , on leschaiiipinn^dis-
piilenl le prix de l;ie|lileet lie la L-ràce , la hennleesl ii|ee
de eelli' e-peee de ili'rnieMelirniil iln ill\-lien\ lenie -iirle
l'ne clee.inie , eiiM'I.ippee de lonrnires el le- pinnies ilesnn
cli.ipcan an \eiii .i--isc dans un traîneau a cou de cygne,
auquel - .iiielleiii |,,iii(iis les patineurs avec des cordons de
piimpie, ^les' i.ipidi'inent au milieu d'un galant cortège
de |eniii'-;jen- i|iii hiccnnipagiienl | «nu la ni snii lr;i|et . pas-
s.iiil . see^el^,llll ile\nnl clic , cnninie |i(inr la iimcci- parle
spectacle de leur maille Chaque âge a ses plaisirs. Nos
jeune- ucn- .niinniil Inii ne sont ni patineurs . ni galants.
Il- Inniini ' I epenil.int , comme lo bassin de La Villette est
tiin|ein-,i iiinli'c lie,- promeneurs citadins . ces jeux d'un
aiiiie ngc peiiriinil leiniilrc quaiiil un Munira. Il n'en est
pa-ile inenieile- |,inlin^ qni . penil.inl I etc , conviaiei^t les
l'.in.-len- .1 lie- tele- eell I llinel le- Une -mil lii^veOUS FraS-
cali et Mirlnnl le p.ne ileli\nli "ce p.iiMili- lin-re^tre du
Parisdc l'Empire ' II- mil di-p:iiii la -peenLiiimi -mi est
emparée. Des cmi-ii neiimi- mii ieiii|il.icc le- miilii|ues
ombrages, et lus roues de» \uiliues lesmiiiciil. sur le pavé
où le pied délicat des jeunes femiiies foulait naguère de
frais gazons. Et Bagatelle ! et le Jardin-Turc ! (.'.oblentz , il
est vrai , nous est icslé , sons un iinirc nom , car a]irés le
p!.e-ir ■InniL-eile-eliM-e-, nelie pin- ,;, ,,nil pl.ii-ir est de
iliiiiL'e, le-iimii- n,i 1,1 innieni- ;iii|„in,| Iniicm alors,
ïciil;is-cr le smr peiiil.inl I de -nr celle pailie lin boule-
vard. On y est même nimn- l'iih' i|ir,iliir-, pni-i|ne les bar-
rières en bois placées lle\,inl le- ni:ii-mi> mil ele eille\ées.
Mais on y est toujours all^-l inconnnodi- par l.i 1 --une. et
de plus on y est aflecté désagréablement par l'odeur de
l'asphalte écliauffé, ce qui lient au progrès dii siècle, elpar
l'odeur des cigarçs , ce qui tient il sa grossièreté. Dans le
voisinage Torloni maintient plus que jan ais sa vogue. 11
commençait alors sa brillante réputation et succédait il
Velloni et ii (îarclii. On déjeunait aux cafés Riche et
Hardi. On allait maiig.'r do pi'lits-.ite.mx \eisden\ Ikmi-
res chez l-'clix , llmmca mi ('.arcini' Un ilin.iil elnv. Vcr\
Cet illustre niailrc de 1 art cnlinaiie, inilcpcnilaininenl de >a
maison du l'alais-Koyal , avait déjà , en ISdl , (ni\ert aux
Tuileries un second établissement a l'entrée de la terrasse
des Feuillants , du coté du château. C'est lii que d'ordi-
naire les généraux et les olliciers de l'Einiiire se réunis-
saient pour dîner dans les courts loisirs que leur laissait la
guerre, avant d'aller applaudir lalma ou Fleury au Théfi-
tre-Francais. La'is ii rO()éra , Klle\iou ii Feydeâu , ou ma-
dame liarilli il l'Opéra-Bulfa , ii moinsque ,cës artislesétant
malades ou fatigués , il n'y eût plus qu'il se rabattre sur
les ihéiMres du boulevard pour y voir la Chatte merreU-
Inise ou 1(1 Urine île Persepolis.
Le théâtre est liinjnurs, comme en tout temps, un grand
iiourvoyeiirde modes C'est lii que naissent les engouements
les plus singuliers. En IHIO. c'est it/. Duinoltetqn'i est le hé-
ros du jour, et toute la ville, ipii 11 est par. encore infatuée de
dilleltantisme . s'en va chantonnant du malin au soir l'air
banal? ftnnvni/ntje . monsieur Dnmnllel'. Le succès fou de
la l'ililr Cniilnllnn prnilnil nn ilélniie de nmu c.inlcs . de
liio.li-, -mien lilimi\ , -1 n elillleli- jeiile- le-pieeesde
llie.llle lin leilip- lilll oui leii--l liml- lelll liinnelll ,111 liesoin
le- ilenmnin.ilimi- le- pin- x,iriee, Tmilc, le- nouveautés
qui i'\eillcnl iinlc ni 11 nlinii loinhcnt dan- le ilmnaine
lie 1,1 nielle l.:i l,iliicll-e cmiieti^ de IHII donna hc.MlCOUp
pin- doeciip.ilion aux iiiarcli.indc!, de luiides qu aux a.stro-
nomes. En IHIi, un honnête Viennois, M. beijhen . spécu-
lant sur la cré liililé parisienne , s'élève dans les airs avec
nri ap|iiircil Innnidable simulant les ailes d'un oiseau de
iii.inere 1 liiie niminr de rire une autruclie OU un casoar.
> il i.iii II 1 le lijin,' an ciel , il prend sa revanche sur les
1 pimr-ile Ion- les marchands de nouvcauiés. Les dames
.se metteiila porter des bonnets et des eli.i|iiMii\ a la Oe-
glien , sans garder rancune de leur un -iiln .iiimi .\[ires'
avoir été chercher ses héros au ciel, la nimle di'secnd les
preiiilic jusque dans les priitondcin,- de la terre. Tout Paris
a\er-imies larmes au rei il du ni.illicnr et du courageux
ili'MHiiniienI du brave Cofjin Le ihcilre met en vaudeville
I In-lmie arrivée au mineur des linuilleres du département
lie l'i inrtlie , et la mode en fait des chiffons comme à son
I
Mais 1,1
plus la en
neurqii,,ieliui-e-e
préparant- ,,^,,nli-i|i,
en l!ii,s-ie i:c qui :p
donnnanleili leii
le,/;»/,/,,.' nmipii- le-
el lr,ili
llm-l-elllle-el ,
cnpalimi eu moment, ce n'est déjii
I 111 rnnijineqni lie vole pas, lemi-
npicnmi-, I e-t a peine le bruit des
- i|ii:' r,iil ri-'.ii pire pour aller ninnrir
m l,:nl,,-,e-el,o-e- , c-l l.i pmi-ee
1 u|,-,.-- le !,,n- li-e-pnt-, c,-,-l
1,1 li_nnv rjie , iiiix li.iil-
-Inilenl , ilmil 1 - a\i
e- ili
1 11,1- le ilnilile
Milh
.Micllel-
.\n,ue !,■ .Me;crlicer'in,ii- nnjonjon, une mmIciIc lonpii'
a deux léles , qu'il s'agit de faire tourner rapidement sur
elle-même en lui donnant l'élan au moyen d'une corde fixée
il doux baguettes, AuxTuileries, dans les jardins, dans les
salons , tonte- les iLiiiics, tous les enfants sont occupés ii
faire runflir le dmlilc La mode, toujours aux aguets de
toutes li> lulii-ei de tous les caprices, ne manque pas d'en-
l„i liiieiMiine , iii.iieli,ini ,111 ji;i- eonime Un régiment et
\ètne irniie -oiii' d nnilmnie e-l tiep stérile pour que la
mode songe a lui lairc le nimnilre cnipinnl Tout au plus
glane-t-elle par-ci par-la qncli|ne- ilenmiiiii, liions mytholo-
giques. Une psi/ehé n'e-t pin- I .une e|iii.-c et tourmentée
par l'amour, c'est 1111 inirmi de-line a remplacer les ancien-
nes toilettes où les lie, mil'- ne pouvaientsevoir qu'àmoitic.
Une élégante a une ligine de ."Saturne sur la pendule de sa
cheminée; une palrnuille d'Amours en lii<ciiit de chez Da-
goty dans son boudoir; les capunmx <\ ilmment le mot
d'ordre : aimer ! Le dieu Morpliee e-i li^mi'eii bronze doré
sur son litet sur son somno , mcublcqu anlrefoison cachait
i\ei -oin et dont on fait parade alors. Elle porte descas-
ipii- a la Minerve, des tuniques de Vénus, des fichus il
1 Ins. il n'est pas jusqu'à sou cordonnier qui ne décore les
pantoulles qu'il lui vend du nom pompeux de sandales à la
P.sycdié. Elle-même ne- ;i|ip:lle ni Clémence, ni Joséphine,
ni Marie; elle a quelque iimn mythologique ou romanes-
que : Euphrosine , Agiaé . Agiaure, Emma , Clara ,Evelina .
Ida, Nina, Lodo'iska, Palmire ou Zoé. Cependant elle a
moins de prétention que ses grand'mères n'en ont eu, et
moins aussi que n'en aurontses filles. Ellen estpas encore
versée dans toutes les littératures étrangères. En fait de
piano , elle joue du Boccherini ou tout au plusdu Sleibelt;
en fait de romances, elle chante : Variant jiour la Syrie, le
jeune et beau Dunois; en fait de danse . elle ne viseplusii
rivaliser avec les terpsichores de l'Opéra , elle se plaît ii la
monacn: et la gigue Qii, en 1811, la contredanse favorite
du jour.
A tout prendre , la Parisienne des dernières années de
l'Empire est une charinnnle eié.iline ,1 qui il ne manque le
plus smiveiit (pi'nne cmllnre de meiliein jmil et unecein-
tiiic placée a la ceinture ,m In n il ehe |,l,i, |,e sous le sein.
Elle a le pied pi'lil et la i.nnlie line : .,1 mlieemirle fait foi
de sa coqnellei-ie cl de -,i cmili.i iice ,1 ecl cLMliI ,\n-si
grâce a -e- pipon- cmirl- cl ,1 I eliide ,i|,pnirmnlie de l,i
danse qn elle 11 l,nle il \ ,1 i|neli|nes ,1111 -, \o\e/. a\ec
quelle eiaiv elle po-e-e- |Hei I- ,1 Ici le aMV i|iiclle -mnilesse.
quel clianniinl luLinecmenl ,,lle nenclie ,Snns ee ni port,
elle a lepnlalimi hiumi- ■!! ■ (.In e-i empie cela est
devenu-' C e-i ce qn mi ne -,iiii,iii iIcMner ,iii|miiirinii ipie
las femmes ijli-enl plnlnl quelle- ne niiielienl , qu'elles
traînent des lobes de \c-laleMir I ,ispli,i|ie de nos Imltoirs,
et qu'il est du bon ton de leur laisser balaver la poussière
des rues. Dans les avantages des dames il n'est pas plus
question do jambes aujourd'hui que si elles n'existaient
p.is Comblon les vieux amateurs de l'Empire doivent nous
piendre en pitié, nous leurs successeurs insouciants ou
dcsherités !
Nous chercherons il compléter plus tard les observations
que peuvent suggérer les modes de l'Empire, en les liant
aux goûts nouveaux que l'invasion des ciranjcrs en France
fera naître dans le costume. Nous vciioi- ,|ii;, le- excen-
tricités anglaises ou russes , après a\oir eie li,i|,inees par
nous , ont lini par se naturaliser. Les i,ii nature.- de lepo-
([110 nous aidiM'ont a mieux faire coniprmidre celle époque
de transitiiMi, Aujourdliui nous emprunlons au spirituel
crayon d'un habile dessinateur, a M. 11. Veriiet . quelques
reproduciions heiirausasdesi/iccui/Hi/cs et des merrciUeii-
«P.Ï de rEmpire, La juste mesure qui sv liouve entre la
vérité des ilélails et l'' esprit de charge de l'ensemble en fait
des documenls contemporains très inleres.sanlsii consulter
sur celle époipie de l'histoire de la mode
A J 0
Keoiioiiiie doiiieittiqiip.
Etuile sur te piissé et t'iii'eiiir de l'art culinaire en Fratice.
Lcsdiinix l'i les, ni-iniers si.nvontl L art culinaire, dont
la France hn.iil le -ee|iiie ilmit eHy avait réijigé le code,
dont elle ilmin iii de- lei ,,ii- ;, l'Europe et au monde, le
grandarld- \.iiel cl île- Ciiéine, est aujourd'hui, hélas!
en pleine d cadence. \ la cuisine du ion sens, créatrice de
tant de (hcfs-d œuvre, a succédé une cuisine de /'an<ai»ie,
qui a fausse systématiquement tous les principes du vrai
goût, méconnu les exemples el les traditions des maîtres,
el qui voit dans unporc aux choux le dernier effort du gé-
nie culinaire. Ou allons-nous par celle voie funeslc, el som-
mc,-noii- desiini-.i Imnberde chute en chute, jusqu'à celte
iinnicn.-e -; Ile ileiiioei,iii,pie cl Micialc. si |ir6née par HOS
bociali-lc- qui, en inlendinl dînent el déjeunent au Café de
Pans, I un de 1 e- dm un i--,incUiairesou se conservent en-
core quelque- cl ineel le- du leii .sacré?
( elèudmi il I lien loi -c 1,1 Hunier avec une ardeur nouvelle.
ou doii-il -cieirnlre sur ses réchauds déserts? Telle est la
qiie-iimi qiie-iion grave, quia vivement préoccupé tous les
gr.iiid- pi ii-eins, tousie* grands mangeurs de notre époque,
cl qn d-mii Ions rcso|\iej|. suis licureux de pouvoir le dire,
lin II- lin -en- qui 1 1ml 1,, — mer le- iiii,iLnnal ion- lespluscrain-
li^c- .\ ]iim qn,,i! nienl ilil île ni:m\,ii-cs langues et
qiiel,|iie- mii-inicis c\pul.-cs du p.ilai,- des rois, l'art culi-
iiiiie ne peina pas. S'il subit en ce monient une crise incvi-
I ilile -inicdenos révolutions, c'est qu'il doit, lui aussi, se
ii.iii-Imnicr pour atteindre il la hauteur des destinées d'un
peuple libre.
I In peut ne point goûter, il est vrai, on peut même railler
quclqiiclois. comme je l'ai osé faire tout à l'heure, quelques-
unes des idées, des hypothèses culinaires de nossocialisles.
.Mais il faut en même temps rendre justice ii leurs bonnes in-
tentions. Tous ont voué à la cuisine un culte fervent et cons-
tant; tous, depuis Saint-Simon jusqu'il .M, Louis Blanc, se
sont accordés à la considérer comme le principe, conuiie la
base de toute société bien constituée.
(Juand feu .M, le comte de.Sainl-Simon devint dieu parla
grfice du Père Enfantin, lorsque l'Église nouvelle s'installa
sur les hauteurs de Ménilmontant, on voyait tous Ivs jours
descendre de la montagne sainte des philosophes etdes pu-
blicistes, des apôLres el des demi-dieux, qui s'en allaient à
la Halle acheter des navels et des carottes, des carpes et
des lapins, -ymbole vivant ije parle des dieux el des apô-
tie- , -Miiliiiie vivant de la réhabilitation des cuisinières,
dmii il- ,i\,iienltoulefois remplacé le panier par une hotte,
liulle niy.-tique et qui indiquait aux générations nouvelles
que désormais l'anse du panier ne danserait plus. La plu-
part, cela est triste à dire, n'ont vu la qu'une mascarade
liorsilc saison, qu'une farce digne des tréteaux. On a luié.
ciins|iiie el |.re-ipie lapidé CCS glorieux apôtres, ces nou-
vciiix cin, hinnene- qui venaient confesser ainsi, à la face
de Ions, ee-nlilinie doimiede la réhabilitation de l'art culi-
naire, ipii c-i le pi en lier elle dernier mol de toutes lesgran-
desdoclrine--iim,ili-les.
Ouvre/ 1 7,(1 ,■,(' de .\1 Cabet, vous verrez s'il a négligé les
cuisiniers, et dans le phalanstère de .M. Fourier ils occupe-
ront la seconde place, ils viendront immédiatement après les
membres de la Cohorted'ctite, chargée dévider ccque rem-
plira si \i tel. 1 son q a iiositê des tables plialanslérieuncs. Quant
aux enfuit-, il- -eiont, des 1 âge le plus tendre, dresses aux
exercices enlnnnie- .M, Fourier a remarqué, et c'est lii mê-
me, Mll\ ,inl -e- ill-ei|il,'-, iilU'ile- lein.irques qui font le plus
iriionnein .1 -,i -;i-,icile il n leiiLiiqnequo. dese|il adixans,
Imi- le- mil, ml- -eemii|il,ii-;iiciilil,iiks les choses s;ilesclmal-
piopie- hmic, a-t-il cunciu, laisons-en des marmitons. ■
ll-e|.|iielieieni les lègunies, videroul les poulets, lavcrontla
v, Il—elle lie : cl il e.sl clair que cette occupation éclairera
leur- i-|iiil-, élèvera leurs âmes, bien plus i]ue ne le pour-
r,iii l,iire 1 iiinlilc étude delà l.iiigncdc Virgile et d'Horace,
de >e|iliiielecl d llomcrc C e>l ainsi ipiils pourronl concou-
111 el peni eiiereinporler le prix dans cc?gr,indcs batailles
enlin.iiie-iiii 1 miMiia, au milieu des danses cl di's concerts.
le- en 1-1 n ICI -el le- p.ii issiccsdetousles plialaiisicrcs du globc.
sedi-pnlci la p.ilinc de l'art despetitspàlcs, des pieiis a la
Sainte- .Menehould, des filets saules et du turbot a la sauce
aux câpres.
M. Louis Blanc, sans s'en douter peut-être, a continué de
marcher dans celte voie ; il y a même été plus loin que
Saint-Simon et Fourier. Tout en rendant , tout en essavant
de rendre le travail attrayant, Fourier n'a cessé de recon-
naître ses droits, comme il a ivciuinuceuxdu capital et du
talent. C'est ce qu'ont fait aussi les saint-siii.oniens lorsque,
il côté du principe de la rcliabililalioii de la cuisine , ils ont
inscrit leur célèbre axiome 1 .1 chacun suirant sa capacilé.
à chaque capacité suirant ses wuvres M. Louis Blanc .1
adopte . il est vrai . la première partie de celleforinule. mais
pour la modifier en ces termes : A chacun suivant Ja capa-
cité de son estomac , autrement dit , .1 chacun suirant ses
besoins, devise qui lui appartient et qu'il a proclamée liau-
temeiil et développée élnqueniment dans une de ces honii"-
lies doiil il cdiliait sesum/.fdn I.iixeiubouri;.
Cette dcvi.sc de .\l Louis Ul.inc el celle'deM. Proudlion :
Jouisse: pour Inirailler. traraillez pour jouir, prouvent
é\idciiimeiit ipie Ions les progrès de l,i science socialislecon-
\ergciil cl aboulis-seiit a la glordicalion de larl culinaire .
dont les lourneaux seront Icsaulelsdu nouveau culte. Dans
une sociele ou les droits de l'homme el du citoyen se inesu-
reronl sur les facultés de son ventre, il est clair que le cui-
sinier doit avoir la première place et devenir do toutes
façons le chef de l'Étiit. Je no sais si les pâtissiers et les
cuisiniers ont déjii pres.senli ce glorieux avenir qui les at-
tend dans la république démocratique cl sociale , mais on
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
l'aurait pu croire au mouvement qu'ils se sont donne après
la révolution de février. On ne pouvait alors faire un pas
dans la rue sans se lieurteur à quelque afiiclie où on lisait
bon gré : Les citoyens garçons pâtissiers , jaloux de faire
prévaloir leurs droits si longtemps méconnus , etc. , ou
encore : Messieurs les citoyens cuisiniers sont invités à se
réunir dans la salle de pour se rendre de là à l'Hôtel-
de-Ville , afin de protester, etc.
J'ignore si toutes ces manifestations, protestations et récla-
mations ont eu leur effet; mais il n'en demeure pas moins
constant qu'il importe de démocratifer la cuisine , comme
on a démocratisé ou comme on démocratisera le crédit ,
pour que l'art culinaire sorte enfin de l'état de crise où il
languit, et que les cuisiniers prennent le rang qui leur ap-
partient dans notre seciéié nouvelle. Il faut que la cuisine
démocratique soit désormais une vérité.
C'est pour concourir, autant qu'il est en moi , à la réali-
sation de cet état de choses que j'ai voulu vous parler au-
jourd'liui de deux ouvrages culinaires, l'un ancien , l'autre
nouveau ; le premier, pubWé par \a Société des bibliophiles;
le second, composé par de dignes élèves de Carême : le
Ménagier français et {a Néo physiologie du goût.
Si ces deux ouvrages se rapprochent par. l'identité des
matières dont ils traitent , ils diffèrent essentiellement par
la manière dont elles y sont traitées , autant que par les
époques qui les ont vus naître. L'un est d'hier et l'autre a
trois ou quatre cents ans de date Celui-ci est le manuel
d'un bon bourgeois qui n'y entendait pas malice et qui
nous a conté tout naïvement comment on gouvernail un
ménage au quatorzième et au quinzième siècle ; celni-lii est
l'œuvre de trois personnes dont voici les titres et qua-
lités tels que nous les trouvons déclinés dans son avant-
propos.
» Premièrement, une femme de bonne compagnie qui n'a
pas d'enfants , qui n'est plus jeune et qui n'a' pas grand'
chose à faire ; deuxièmement , son docteur, qui est un des
plus habiles médecins i^erniii niques, et qui voudrait faire
concorder le système liy^iéiii(|ue avec la cuisine française
par philantliniple ; troisièmement, son cuisinier, qui n'est
pas le moins li^iiiilc (1rs liois, iiiiiest tourment.' par le besoin
de dnv II veille sur la siirihc qu'il professe, eldontleder-
nier cerlilicai lui a ele ileliui' par un des gourmets les plus
illustres de Pans. M labbé-ducde iMontesquiou. »
Certes, voilà de grandes et puissantes autorités et dont
on doit beaucoup attendre, La Sociétés des bibliophiles me
pardonneradonc si j'insiste peu sur sa curieuse publication,
si je me borne à dire (|u'elle intéresse au plus haut degré
tous ceux qui s'occu|ieiit de I histoire des mœurs françaises,
et que, par la pureté du texte , par les notes piquantes et
instructives dont elle l'a orné et illustré , elle a fait de ce
Ménagier un livre qui prendra placedans les bibliothèques
de tous les savants ex professo et de tous les amateurs de
la science.
Cela dit , je me hâte d'arriver à l'examen de ce grand ou-
vrage , de ce merveilleux produit d'un cuisinier tourmenté,
d'un docteur germanique qui veut faire concorder, etd une
dame qui n'a pas grand'chose à faire.
C'est l'Encyclopédie culinaire la plus complète que je sa-
che; c'est une histoire de la cuisine depuis les temps les
plus reculés, histoire dont le besoin se faisait généralement
sentir. Jusqu'ici , comme les trois auteurs le remarquent
judicieusement dans leur |irèface, la cuisine n'avait pas en-
core renconiré d'historien ipii sût embrasser et retracer,
dans un style digne d'elle , toutes les phases qu'elle a subies
depuis la naissance du monde Les traités dogmatiques
laissaient même beaucoup à désirer. Depuis Louis XIV, on ne
peut citer en ce genre . mentionner honorablement que la
Cuisinière fcoui'scoi'sc, dont l'auteur est, comme chacun sait,
l'illuslre iiuidame Blanc, cuisinière de madame la [rrési-
dente d'driiiesson , " qui voulait faire bonne chère et qui
regardait de pies à la dépense.» — « Mais," ajoutent les trois
auteurs, « la plupart» des prescriptions de la Cuisinière
bourgeoise sont devenues surannées, et la naïveté de son
style a rebulé les personnes à prétentions. »
Cette fois-ci, les personnes à prétentions seront sans doute
satisfaites On a eu du moins la prétention de les satisfaire ,
et il est juste de reconnakre qu'on n'a rien négligé pour
cela . en même temps qu'on a demandé à toutes les cuisnes
de l'Europe leurs recettes particulières, poui' les rassembler
dans cet universel cumpendium .• cardiaque cuisine a son
caractère, comme chaque peuple a son génie. La cuisine
russe ou, pour parler avec les maîtres, la cuisine boréale
excelle dans la soupe à la bière et ii la glace, choses étran-
ges et inexécutables pour nous , hélas! L Angleterre tient le
sceptre des rôtis. .\ la Hollande l'avantage de briller à l'é-
gard d^.s poissons de toute espèce,, et surtout pour leurs sau-
ces variées avec une intelligence et des soins e.rquis. L'Espa-
gne est un pays si bien inspiré pour lu composition des
ragoûts que les trois plus belles çntrées de liiiHieiine cui-
sine , c'est-a-riire les (irmlnilvs d oniiniHr à l<i royale , les
perdrix à la Mrdiiui Cu-h rt li> nllus-ijndndas, nous sont
arrivéesen Eraiicr ,i l,i -mir .Ir l,i innr .\nni' .\uciiiie con-
trée n'est com|iaralile a I llalie |ii)ui' la roiilectioii des con-
serves et des eonlitures. L .Mleiiiagne est un pays illustre
par la distinction de ses potages et la perfection de ses en-
tremets au snciv; enlin les l'uloiiai» excellent dans l'assai-
sonnement qu'ils appliipient a tnule espèce de venaison;
c'est à la France qu il apparleiiailde rassembler etde réunir
en un seul et brillant laisceau tous ces rayons dispersés et
divergents sur l'horizon culinaire.
.4vant d'aller plus loin, qu'on me permette de remarquer
combien cet horizon CMlmntrc me sourit et me semble heu-
reusement trouvé. Horizon culinaire . rexpnsslt si iioii-
velle sans avoir rien de clio,]uant, rien qm ne im ir,-|iiiiii!r
aux locutions de ce genre déjà univeisrllniirni .ici ( |.i(i> .
carnous avons Y horizon polit'iqae, dont on lait honneur au
Constitutionnel , les grands horizons de M, de Lamartine,
les horizons rouges et h s horizons bleus do Si, lUigo , les
horizons changeants de M Dumas, sans compter une foule
d'autr.^s |)etits /inr/.-on,! d'un commun usage , horizon in-
duslricl. Iioriziiii fnaiirier. lidi'riiirc, elc, etc. L'horizon
culinaire ne prui ilniic manquer d'être le bienvenu sur l'iio-
rizuii don pavs ou Ton parle si bien. Certes, si la Néo-phy-
siologie était" toujours écrite dans ce goût, elle eût placé son
auteur ou ses auteurs parmi les premiers de nos écrivains
à la mode.
Le style n'est cependant pas ce qu'il y a de plus considé-
rable, de plus louable dans cet ouvrage. Le fond y vaut en-
core mieux que la forme. C.haque mets , chaque aliment ,
teniriil cl -:ii'iililh|ii:inciil .in;il\M- ikiii- Ml ii.iliiiv ri ibiis
ressemble pointa ces théoriciens naifs qui vousdiseiitsim-
plenient ; « Pour faire un civet do lièvre, prenez un lièvre. »
C'est là une façon de parler vulgaire qu il faut laisser à la
Cuisinière bourgeoise, .aujourd'hui , pour nous apprendre il
f.iire un civet, il importe de nous développer d abord ce
qu'Hippocrate et Galicn ont pensé de? lièvres de I anti-
i|iiilç. ili's h.iliiliidrs ri (1rs iiisliiirts lie rr iiiiadrupede, et
(■(illiliirlil il l,iii! Il' MM \ ir l'^iiv ^r CMiiliiri ■ ,i une cnulume
riMinuM'Icrilii >M/.h'ni ■ Mcrlr, (|ii "ii piMlKiii!' lirneraleiiient
(le nu.-> jduis sur Imilr- I -^ Lilili'S ansliicratiipies et dans
toutes les maisons di~iiii^iirr>, a l'exemple de la cour.
J'ai nommé la nuit- ri r .•-! ,iss!>zdire que la Néo-physio-
logie est d'un cuisimei' de I .uicien régime, qui n'a point
écrit pour le nouveau. Mais cela même rend ses observa-
tions plus piquantes' et plus (lesinlercssces Son livre est,
en quelque sorte, le tesliiiuciil niliimire d'une société dis-
parue, mais qui nous a l.n— !■ ilrv inrllrs qu il fini ^ppru-
prier aux besoins et au\ \;i-ir~ ;i|i|H'iiis di' l;i siir,cii' :ic-
tuelle. J'ose dire qu'en lisiinl ni i.n\r,ii;r (lans rrlle iiilcn-
tion on y profitera beaucoup. On y ajiprendra en même
temps à mieux apprécier certains faits et certains hommes
de notre histoire qu'on n'a pas encore bien connus, parce
qu'on ignorait tout ce que peut un rôt ou un souillé sur le
cœur et l'intelligence d'un homme d'État.
Le général La^ Fayette , par exemple , a été bien diverse-
ment jugé Puni 1(> nus . c'est un grand liomniè ; pour les
autres, un m, us imlilniiic . ciiinnu^ lappel.iit Napoléon. La
Fayette n Clml ni -i lijid ni si lias. Un miitserla locaractéri-
ser, et ce mot, les Inn- ,!iili'iu> de la Néo-physiologie l'ont
trouvé en traitani de I ihmi-'hi du navet dans le haricotde
mouton. Le géneial l.;i I ,i\rUe elait un navet. Tous les ac-
tes de sa vie politique ne peuvent mieux se innqiarer
qu'aux agressions révolutionnain -i l :i linxi-ioii ilr> n.i\els
dans le haricot. D'où il sutt (pie les muil- ^mil 1rs La
Fayette de la cuisine; car ils pnssedent les qualité» léni-
fiantes et soporatives qui caractérisaient le général. » Comme
on le voit ,
Les navels ne sont pas ce qu'un vain peuple pense.
Un autre fait non moins curieux se raîtache à l'invention
des ratafias, que des auteurs mal informés avaient attribué
à Fagon , le médecin ordinaire de Louis XIV. A les enten-
dre,"le roi devenu vieux, n'aurait dû la constance qu'il a
fait voir, dans les désastres de la fin de son règne , qu'à la
puissance récnnfortative de ces spiritueux produits de l'i-
niaginalion et des combinaisons de Fagon et de madame de
Maintenon. Uien n'est moins vrai. Ce n'est point pour exhi-
larer Louis XIV qu'on a inventé les ratafias . puisqu'on en
fabriquait dès le règne de Louis XII , et que les élixirs
étaient déjà connus du temps de Charles sixième du nom ,
Et voilà cependaitl comme on écrit riiistoirc ,
l'histoire des rois et des ratafias,
Non-seulement , selon les auteurs de la Néo-physiologie ,
Louis XIV 11 usait point de ces .spiritueux , mais encore,
quoi (ineii aient dit de iiiei hantes langues, comme le duc de
Sainl-Smi'ui Ir i:r;ind nii mangeait peu. Il semble qu'aux
M'iix ilr (Il Miiiri- ( riir silii irié devrait être un tort plutôt
qu lin iiirnl ■ ( iiriMlnil l,i .V.ii-/)/iî/sto!ojievajusqu'à traiter
Sainl-.'^i Il dr ZdileiiiHir imiis avoir ap|iris queLouisXIV
vidait tous les matins ciiiii ,i~-irlles de iioiaw et plusieurs
jattes de fruits crus. A cr Ir ;jii:i^:r injurieux on oppose
celui du marquis de Dan.re.iu , qui .itliinie qu à restriction
de ses grands couverts, le roy ne virait que de choses très
simples, mangeant toujours modérément , quoique de bon
appestit , 'et buvant plus sobrement encor.
yuantà Monsieur, frère du roi et duc d Orléans, père du
Régent, c'est une autre affaire. Nos auteurs conviennent qu'il
mangeait queliiuefois à son souper tout un jambon rôti, douze
bér.i'ssiurs. nrc leurs tartines iJe lèchefrite, une pleine cas-
srinlr (Ir liiiiiillle d'amande, et puis des salades avec du
biiinaL'r ri drs concombres , et puis des gâteaux feuilletés
et liimies de cnnfilures , et finalement des fruits de la sai-
son tant ipi il en Vdvail a Sun ((nuerl. Madame de Choisy,
ajoiileiit a ce |irii|ios nos hisliirieiis . lui re|iiorli,iit conti-
niirllrnienl de ne pus aimer 1rs |Hilares, rt madame de
(■„ixlu-,nl..rr\,ill ;i rr Mljrl (pill \ a\,lll (1:1 IK Idiiles les ha-
liil'ndc^ilr \liiii^i('iiri/»i'/'/i(f rhiisr qtii iiiliiiljias français.
Lu vente je regiellr dr nr |i(inMiir m ,i|i|irs;inlir plus
longtemps sur ces intérc-^nnUilrliiiU M:ii> |r nr Iji- |Miinl
ici de la philosophie de I In-hurr ,s,iii-( rl,i j | imi- iiin
un grand parti de tOus.c('> rriisriL-ncnn iils , qui rrp, indent
le jdiir le plus vif sur le caractère et l'esprit du dix-scptieme
sierlc Cdinliien nous devons remercier les auteurs de la
Néo-physioloyie d'avoir composé et publié un volume d'e
700 pages iii-i" pour nous apprendre tout cela , et nous
donner de plus, presque année par année , le menu de tous
les dîners, de tous les déjeuners et de tous les soupers qu'on
a SiTMS Hir 1,1 Mille (Irs'nii,-., de- |.riiircsrt drs princesses.
(Irxliirrlriir-, ilr- (Mii|irrri(r-, ri (1rs -rn.ilriir-. ilrpiiisl'a-
\riir:nrMt (In KM l.dui-lr r.h.ijlr jiim|u ,i l,i rliulr dr Charles
le liien-Aime '
Nous en' avions déjà lu quelque chose, il est vrai , dans
les ouvrages de M. Capeflgue, qui fait de l'histoire comme
M. Dumas fait du roman , avec autant d'imagination, de
fécondité et de facilité Mais ce qu'on remarque le plusdans
les innomln.ililr- rrriu de M. Capefigue , ce qui sans con-
tredity tient l,i plii>tirande place, c'est le détail, la descrip-
tion de ce qudiii iii,dii;r> les grands personnages dont il
nous raconte les fui- ri jr-ir. J'en veux citer un exemple
entre mille autre, l.dr-(|ii rii i;i:i le roi Louis XV revint de
celte campagne ou il x'iint si vaillamment battu pour la
France et les beaux yeux de madame de Châteauroux , les
bons bourgeois de sa bonne ville de Paris lui offrirent , à
l'Hôtel-de-Ville, un magnifique menu, menu qui inspire à
M, C.apeligne un tel enthousiasme que, dans son Histoire du
dix-huiticmr siècle , si romanesque d'ailleurs, il l'a repro-
duit ,iiisi|ii 1 Iniis fois : primo, dans le cours du récit; se-
cundc. ilin- Ir- iidtr- placées au bas des pages; tertio
eiilin , (Km- lo pirrr- |ii-tili(Mti\es, Drs critiiptes iiud-in-
leiilidiiiir- ,ii( 11,-riMirni prut-être M. C.aiieligiie de neveu-
loir par kl (pie gi'o»Mr des feuilles , et comme on dit, tirer
au volume. Pour moi , je n'y vois qu'une preuve du zèle de
riiistdrien qui veut être exact en tout, et écrire l'histoire
par le menu Cela soit d'it sans calembour, car je les ai
dans une sainte liorrrnr. et il n'en est pas un, même le plus
transparent. de\ant ipii je ne demeure aussi sot qu'un dne
derant un tourne-broche.
Cette comparaison culinaire est si ingénieuse , elle arrive
ici si à propos que je serais tenté de m'en attribuer l'hon-
heur. Mais rendons à César ce qui est à César, et ce que
d'ailleurs on tenterait en vain de lui dérober. Cet dne et ce
tourne-broche sont du père spirituel de l'auteur du Porc
aux choux. Il y a , dans toutes ces gracieusetés , un parfum
(pu décelé son fruit, et qui trahirait le plagiaire qui vou-
(irnit m usurper la gloire.
Mais, a propos de plagiaire, la cuisine a eu les siens,
comme la littérature. Croirait-on que les chefs bâtards de
la cuisine impériale ont pensé , dans leur fol orgueil , pou-
voir imiter, surpasser même ces descendants des Vatel ,
attachés traditionnellement à la bouche de nos rois légiti-
mes! Ce fait a eu lieu cependant, et les auteurs de la Néo-
physiologie le racontent avec une généreuse indignation. Ils
n'oublient pas non plus de nous dire quelle triste issue a eu
cette présduiptueuseet odieuse lenlaliv» Permettez-moi de
vous citer ers lignes caractéristiques qui llétriront jusqu'à
la dernière postérité les cuisiniers et les chambellans, et les
préfets du palais de Napoléon , et Napoléon lui-même, et
toute son auguste famille :
« Tout le monde a vu avec surprise , dans la première
édition des Mémoires de M, le comte deBausset, le tableau
d'un menu , d'où il résulte que ce fonctionnaire impérial
faisait servir, au château des Tuileries, pour le dîner de
son maître , un gigot d'agneau, au second service et comme
plat de rôt Voilà ce qu'un maîire-d'hôtel du troisième
ordre n'aurait eu garde de souffrir de l'autre côte de la
r'm'ière de Seine, ou dans le faubourg ^aint-Honoré . qui
n'est pas moins bien habité que le quartier Saint-Germain,
Il est à noter que le reste et l'ensemble de ce dîner bour-
geois, publié par M. de Bausset, rst tellement vulgaire et
si dépourvu d'aucun usage du be.ni iiidinle, que la réputa-
tion de cette famille impériale et rrlle dr ses principaux
officiers en ont lieaucoup souffert dans reslinie et la consi-
dération puliliipie, La di\idi;alidii Ires indiscrète ettoutà
fait iiinlile (I un pareil menu a\ail pniduit un étonneinent
si L-riv''r,d et lin rll'rt Irllr ni fàclieux, que M. le préfet du
p:il:iis inipi'iLil ,1 cru dr\ nir retrancher ce document dans
|;i (Iriiiirir rdiiidii (Ir >r- Mrmoires; Cl c'ost en vérité ce
ipi il ,i\ait a faire de mieux pour la bonne renommée de la
fiiinille Bonaparte, ainsi que pour l'honneur de ses employés
.\insi voila Napoléon atteint et convaincu de l'irréparable
crime d'n\dir nuiiL-r du lm-oI dr ninntiiii ; le vi.il.i desho-
noré, lui ri lr>-lrli-, p:ir rnniih rlllinrr rl rinilisrrrticui de
M. delian-rt' S;in> diintr il ne nrappartient |ias d'en
appeler d'un jugement porté par les auteurs de la Néo-
physiologie. Mais j'aurais souhaité qu'ils condamnassent
moins rigoureusement l'empereur Napoléon N'est-il pas le
parrain , sinon le père, des poulets à la Marengo! Il me
semble que , pour ces poulets-là , beaucoup de gigots de
mouton lui doivent être remis.
Mais je n'en finirais point, si je xenl.iis siii\ir nos au-
teurs dans toutes leurs narratnm- n riiii-rin.iii.in- J'ai
voulu seulement donnerune idrr dr .r hrini liMr, de cet
excellent manuel de cuisine histiirn|iie cl (Idgiu.ilique. de
ce iKiiiMMii Temple du goût on les noms et les cliels-d'œu-
vi-e de tiin> 1rs eiiisiiiiei- des temps passes sont inscrits et
décrits pour l'instruction et l'émulation des cuisiniers pré-
sents et à venir.
Dans un des mille et un vaudevilles de M. Scribe, le
héros, le célèbre Vatel, s'écrie, en faisant sur son art un
retour amer : « Les livres du poète transmettent son nom
et sa pensée jusqu'à la dernière po.stérité , les tableaux
du peintre, li^s stalnes du s-idpteur immortalisenl leur mé-
moire: miiis ilrs ( hrls diruvre du cuisinier, qu'on reste-
t-il? ■■ Tn-tr rrllrshin, nriisipii de nos jours n'eût point af-
llige l'àinr ilr \ ilr! l'„iril riit connu, il eût inspiré peut-être
rrlir Srii />////<'"''"/"•, ^^islr innnunirnt, ipii, semiillipliant
cl - ,rji .|i h,-, ml il ,1-,' rn ii^r, rinil iriidr.i tiiiitcs lr-;jluires.
tiiiile- I - siiiniiiiti's riiinlnr on (lit, loutes les (N'couvertes
de la s,-ience cl de l'art culinaire, .aujourd'hui, ainsi que
nous l'avons remarqué en commeni;ant , il traverse une
époque de crise et de transition, Jlais toutes les doctrines
avancées simt pour lui; toutes rrpii-rnl >iii ];i satisficlion
pleine et entière donnée au venticrl ,i Ir-lrin.ir Innisera
im-essanmienl remplacé pariin m nlrr qiinis cl ;i l,i morale
de l'Évan-ile. cette mordr qui -,irnlir tniit ;i Ir-pi il et au
cœur, succédera un petit coilr rnh rrdunt S.tinl-Smion,
Cabet. Fimrier, MM, Ldiii- lii.mrrl rrdinllidn dut dri.i posé
les principes, dont les cuisiniers sdci, (listes de l'aNeiiir réali-
seront les conséquences.
Alexaxdbe Dufaï.
28
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
ABUMil R BIS (DEMMTOiraiXMB^
PAROLES liT MUSIQUE
D'ARISTIDE DE LATODR.
Dors au bruit de la mer profonde
Qui porta tes premiers destins ,
Alors que pèlenn du monde
Tu voguais vers des bords lointains.
Dors sur le rocher solitaire
Où tu jouais naif enfant ;
Dors en paii ! l'humble croii de pierre
Abrite le front du croyant.
Tes pas ont foulé mainte plage ,
Tesyeui ont vu bien des douleurs,
Partout l'homme est né pour l'orage,
Pour la souffrance et pour les pleurs ;
Mais partout aussi la prière,
Et le protège et le défeud.
Dors en paii....
Descends dans la nuit solennelle ,
Toi qui ne crains rien de la mort.
Le temps est sombre... Dieu t'appelle
Chateaubriand , voici le port !
Sur ce rocher venait ta mère
Écouter la plainte du vent.
Dors en paii... '
Combien j'ai douce souvenance
Du joli lieu de ma naissance !
Ma sœur, qu'ils étaient beaux les jours
De France 1
0 mon pays , sois mes amours
Toujours !
DE Chateai'bria:u>.
, Andantino
THANT
PIANO.
de la mer pro - fon de Qui por - ta
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^ r » ti# F^
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ad Ub.
lors que pé-le-rin du mon - -r - de, Tu vo - cuais
vers des bords lointains.
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jr le ro-cher so-li - tai - - — - re. Où tu jou-ais, na- if
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L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL,
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tout l'homme est ne pour lo - - ra- - ge, Pour la souf- - (ran - - ce et pour les pleurs; Mais par-lout aus-si la pri -
è - - - - re Et le pro-tége et le dé - (end; Dors en paix! l'humble croii de pier - - re A - - bri - le le front du croy -
Des - cends dans la nuit so - lem - - nel - - le, Toi qui ne crains rien de la mort. Le temps est
Pnr? rn paix! l'humble croix de pier'-re A - - — bri- - te le Bre-ton croy- — ant.
;^o
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
Lettres il'un Flaiieii
LES CnlEUnS publics, la BOICHK D ACIF.n, LI- CITOÏIIN PnOL-
DHOS, MADAME DE CIIIABDIN, M. DE LAMAllIlSE.
MoNSIEUn LE DlBECTEUn,
En province et ii r(''tn\nspr, "n se fiiil. de singulières idées
s\ir l'éliit ;iclucl (Je l'Mris : on le eroil jiissi liéserl que les
siililes lirùliinlsdu S;iliiirii et non uiiiins dnnsjereux que les
ijnrges les plus redoul,ilile> îles A|irnniris ou de la Sierra-
Moi-ena. Partout où j'allai |iciMl,ini nii.ii \M\,ije, j'en enten-
dis parler avec liorreur. ('.ri"|uiiiiil,niic n rllr.ur |;as | lus les
petits enfants que les eitiiycn> Ciihi'l il rrniiillion n'épnu-
vantenl les femmes au delà d'un rayon de deux nnria-
niètres de la capitale. Au seul mot de socialisme jeté par
hasard dans une conversation, on voit toute une liiiniK''te
fjiiiille l'n>siinncr de la tiM.e aux pieds, 1).- Iioininrs Iumm-
,.| .rn>r>;.-.uii'inrnL mil peiu- de l'état de -ml'i' | ivMpir.iu
laiil (|ur lie l;i lerreur. Hien ipi'en iiiius.-Jiil lriiiilrM\,-
la llepiihliqneiléiiiocratique et sociale, un mauvais | laisani
mettrait en fuite des populations enlii-res.
Étrangers et provinciaux, venez à Paris; Paris n'est pas
désert. Paris n'est pas dangereux. L'état de siège n'a rien
ilellraNant. A dire vrai, il n'oiïre aucun inconvénient.
Si j'ai niainlenanl un reproche à faire à Paris, c'est
d'( lie trop calme. J'ai prolesté le premier ,— et je m'en
vante , —contre la résiirrei tion des crieiiis puljlics ; ils m'a-
pu.aienl tellement les nerfs cpie je me sentais parfois tenté,
pinir les forcer a se taire, de h> étrangler de mes propres
mains. Ils m'ont fait passer.— je ne l'ouiilie point,— de bien
mauvais (piarts d'heure, Kli liien! telle est l'inconséquence
dele-prit humain, maintenant qu'ils sont morts, \ii me
surprends a les rei^reller. Franchement ils avaient du bon.
L'n peu de liriut ilan> une ville est aussi nécessaire que
licaiiriiiip de mouvement. J'avais lini par m'habituer, sans
m Cn douter, il cet abominable concert, .S il en liait Innps
encore, je |irieraisM. Ducouxde ne pas remlir i l'Ilr ludnji-
naiiiiMpii leur a imposé silence, et que ja\,iis \,iineniejit
ilriiiaiiilée il son prédécesseur. Je suis naturellement bon ;
nim-M'iilemenl je | ardonne aisément le mal qu'on m'a fait,
111,11s |e n'aime pas a voir soull'rir mon semblable. Cespau-
\ie>L-riis, hommes, femmes et enfants, ont l'air si nial-
liciiiTiix de ne | lus pouvoir crier; ils me jettent, quand je
p,is?.c (levant eux, des regards si tristes, si éloquents en me
iiioulrant il ki dérobée le bout d'un journal sous leur habit,
sous leur cliiilo ou dans leur panier, que je n'ose | lus les
regarder. La vue de leur bouche niuelte m'afflige tout au-
tant que celle d'un a'il cre\é on d'un mejnlire coiipiv É\i-
(leimnent leur supplice n'est pas propm rniiiiic .\ Ini: luilc
il V a (le rini(i>rice a les | river de l'usage dr l,i , ,iinlr |,,,ivr
qiiils l'aligiiaienl un peu nos iiiville^ Ini.i drlic.ilcs.
(pie m
l'i '■■-'■'
.r f.ichi
de \.
,pcl,le-l.
.~ j'ai constaté
lorité qui les
i'ssa\("r leurs
.\ii>-i
.IcMlcIll .li'n/'llnr,
ln>l>-.ci'l du >ilcn.c,
\i\reet de jouir de l^'ii
plus de bruit, umi i|iii
d'autant mieux di~|iii-(
pa>p!,„ l,,nl,p, !,„.,-,
"'■"i.|iui,.|,l ;■„,,,,
d';rjic.,l,l,>li ■.■Iil>,
l.a lldiirhv (/'(«■(,/■
.Sniiliiree-tllaiiipirde
ipies ; Fuis ce que liais
ixili.lineiiuel (juesint s,
M ,\lricil de l!,i-.~i-ii,
simu-; ,\llrcil .Munlui,
IdVl l;i lln,irhe,liin(r>
rhedefe
pour exercer leur mémoire, ils récitent tout haut, mais
(l'une voix aimable, douce, caressante, craintive, les titres
(les journaux les plus nouveaux ou les plus recherchés du
piiliiic .\ii>>i ilr iiisinonarrivée,leurph\Moii"iiiirM'stcon-
sidriMlilciiiciii ,11'nrlinree, Co ne sont plus Ic^ -i,iiiic~ de la
(■ sont des êtres aiiniH>, liciiicux de
liiiis sens. Tant qu ils ne feront pas
lr> il.iisl.iis, je les adorerai. Je suis
en Inir faveur qu'ils m'ont révélé,
1,1 ji,ii— ,1111 (■ (le deux journaux qui
■iHiii ri ilniii l;i Irci me m'a procuré
I /;.>.«7ic diiner ri Ir Peuple.
inliliilr : lUfiniiliU'l (lémitrratigue.
csdruxrpi.::Mplir>p(.ucaiaclrrisli-
iiûririiiieiiue jMurra .' Haine audes-
«m,iv7/»,,'lla| 1 rrd.n.-leurenchef
■ ^r- il, us priini|i,iii\ articles sont
diji.il I I \i iiMiid Ciiiiiri .Ir soupçonnais
/(■cdrliv uiir ,Mi>ui' c.nl, -llr lie celle Bou-
p.irdo redacliiiisdel'rii Ir Liimpiiin, que
,M Ir lu.iciiii ne (Ir la 11 piihliipie a eu la Inii.ihlr pniilcnce
d'eiiipriiicr (le ^'iiiiM'ir, .Mais ces sniipi,'oiis il.iiriit injustes,
si je dois en croire .\1 Ariiiaiiil C ri l)a|.rrs la déclara-
tion solennelle dr cri rcru.iin : l.i llnurlie d acier, loin de
continuer la poliliipie des lédacleiiisde la llauche de fer, la
combattraitau contraire. 11 parait que la Houclte d'acier le^
gardait un passé qui n'est plus, tandis que la Bouche de
/'craies yeux dans l'avenir. «Nous, enfants du peuple, s'é-
crie M. .Armand Comet, nous n'éprouvons pour le comte
de Chainbord, principicule do l.ucques et autres lieux,
(pi'une pilié iirolonde, et nous disons : Si il quelques jours
d'ici Chambord veut être roi, nous lui présenterons une
epre, iKui par la poignée et agenouillés, mais bien par la
poiiile et debout! I ! » Ainsi Voilii Chambord bien averti.
iM, .\nnand (2oniet s'oppose il son rrlum m l'ianrr. .. il
moins (pi'il ne veuille être lionimr ri l'r.nn ,11 .,11 il.insce
cas .\l, .Armand ('.omet et ses aiiii,^ s riii|iii ■-.ii.uriii de lui
oiiNrir leurs ran.gs. et de lui tendre une main iioinie par la
poudre el durcie par le travail. Seulement M. Armand Co-
iiirl a oublié de nous aiiprendre avec quelle poudre ij s'était
noirci 1rs mains,
l-ai ll.iiranl la paliliquc rétrospective de M. Alfred Mon-
liruil, il m'a .seiiililé (pie celte poudre sentait diablement
celle de la republiipie deinocraliqiie el sociale, M. Alfred
M(uihrial. diuit la tête lourno a l,i Mir ilr- r\ rnements dou-
loureux qui se succèdent sans.Miiii . I m 1 ,iis,.n, demande
il M.M, l.amartine, Ledru-Kollin cl I ,iiii~ Kl, un uiis'est prc-
cipitcc leur façon de gouverner, et répondant il cette ques-
IJun il trouve bien triste la république qu'ils ont faite. Du
reste, il est plein de confiance dans l'avenir; il ne doute pas
(|uc rid(''e sociale n'avance, l'idée sociale qui .seule peut
?aii\rr Ir p,i\s, etc..
.\l.ii~rii lui dr socialisme, d'erreurs el de déclamations,
.M ,\llii'il .Mmilirial en est encore à l'A B C. La faible es-
ipii-M' d'un rlr\e peut-ellc s'étaler aux nigards du imlilic
a coté (I un tableau achevé du maître? giiel ^uccr,~ la llim-
che dacier. .MM, C.omul et Monbrial a\,iiriit-il.-> Ir du, il
d espérer le jour ou paraîtrait un nouveau cliel-du'u\re du
cito\eii l'roiidlion, le Manifeste du peuple dans le Peu/de !
].(! Peuple journal, n'exi~le encore (pi'a l'état de pro-
spectus-s|ieciinen II aura pour rédacteur en chefle citoyen
Proudlion ; iliislMLnr Ihirlinir,— un vrai Duchène. Il olfre
plusieurs points lU- n --imMuice matérielle avec feu le
Représentant du Peuple, lirmeusemeut tué par l'état de
siège. 11 a seulement changé d'imprimeur, de domicile et
de prix, et il ajoute cinq épigraphes ii son ancien titre.
Comme le Représentant du Peuple, le Peuple veut ([ue le
pi liiliictrur qui n'était rien soit tout. De plus, il exige que le
I :i|iii.ilisle qui était tout ne soit rien. Enfin il proclame les
jMiiiiipcs suivants : division des fonctions, indivisibilité du
pouvoir, plus d'impôts, plus d'usures. |)lns de misère, le
travail pour tous, la famille pour tous, la propiirle pour
tous. Le prospeclus-specimrii du Peuple a été lance, coiiiuie
on dit, dimanche matin. iM, Proudlion a voulu passer >a ii^-
vue. Tandis que 70,000 soldats de toutes armes et 300,(100
curieux se rendaient de tous côtés au Champ-de-Mars, des
bandes d'riiranls les escorlaient en criant, malgré les or-
(loiiii,iiiir> ilii pifici ilr piihrr ; Vollii lo premier Cl Ic der-
nier iiiiiiirin (lu iiMii II, il ilii ciiuyen Proudhon, un sou...
.Ir I ,11 .h hrir, jr I :ii In, rr journal, et je Ic déclare : si
j'a\,Ms la ,-,ilisl.iil inii il rirr ch.irgé de le juger, cn qualité
lir~ilri.ii> |i.i> ,1 Ircoiiuamner, quelle que dût cire
l'ri.iiilhon II 1-1 p,is seuleiiii-nt le plus extra-
lilll> 11,11, iiln\. il ilr^irn\,.in-., >l ni rsl ,ilissi le
la pi
lai
discutée en ce moment
constitution monarchiqii
en ces mots : Refus de t
q,irlcpr..|ii.'C^ld:l
■ I A-
ilnlll li.lllr
llr.lripirl,,
hlilrr liiilio
Il il r\cite-
1 p.is avoir
tre l'autre,
n'a-t-il pas
(institution
>l une
ail a ruucrier: .Maisil n'est
lieiirriisrmrnl pas licMiin de signaler a la justice cet odieux
empiii-iiiiiirin du p; iiple, qui n'a pas même le |ietit mérite
delir 1 1111.-.1 iriii iriiM'iiient passionné ; dédaignant donc le
mauvais citoyen, je ne m'occuperai un moment que de l'é-
crivain ridicule.
A cet égard, l'auriez-vous pu croire! le citoyen Prou-
dlion >'ç>l siiip,is,-é Itien déplus drolatique que son mani-
lr,-.ir r\:iiiiinr -nii~ i r point de vuc. Je uc parlerai pas du
^,llll.■ ili> |.rn ~ , ili> 1, unies des mères, des cris des or-
plirliii> ilniii il r~i .iiTosi', Saupoudré, entrelardé; vous
coiiii.ii-M/, -iil':,-,iiiiiiniil I r -l\ Ir, |irii \,ir]r li'adleurs, que
VAlelier :i un Jour cniiqiir ,i\ri Liiil l^r^|.|ll ru mettant en
rrij.ir.i il iiiir liiMilr ou loiilr,~lrs abominations de la déso-
l.ilioii ,-,■ iioii\,iiriii arri Irrs couiiiie a plaiâir, cette fa-
iiirii-,1' scriir du Miiliule iiiiiii/inaire dans laiiuelle Purgon
iiiriiace le lioiili ■ \r^,iii ilr toutes les maladies, poul' le
punir d'avoir reliiM' Ir-
bon vous dire aiis>i qm
patience en exciimi le
vous citer quelqur^ iinr
qu'il a seul le talnti ili
rien de bien nouxcm (
A quoi
M l'rollin pirrlir ,,li prllple la
|ilii- |.os-ilile MMi mip.iliriice, et
ili> |iai(iles de paix et de sacrifice
lilniquer! je ne vous apprendrais
lUs ne connaissez peut-être
pas encore, c'est la théorie du mariage que la république
démocratique et sociale se propose de mettre en prati(iue
" Nous Nouions la famille, s'écrie le citoyen Proudhon, et
nous l:i \oiiloiis/)ii«r/(i«(/(; mutide .. Nos wiixont cherché
le-- riiiiciiii~ dr 1,1 la mi Ile et nous ,i\oii- linii\e que ces en-
iiriiii~ilr 1,1 l.iiiiillrelairul |
(loin I aiiil.llioli r>l lie -;rjiH
A'ous,
feiimie et
Il Ir-rll-
le gros
11 la ne,
joisme
iv.u'o, par ses
irili> |,l
lilh|llr-el dis-
' |i,l — ri
driis |i|iiases
~Irlr, 1
|.nTi\o a la
r -,ili^
lommeutaue.
Hir illi
niable et sans
uur, (le..
âge de motifs
iieiiiiMlela faiiullr ■ l'oi|:v Ir lliiiilir.iii 1
capitaliste, le rentier, I liouime de ifour
le parasite, l'intrigant, l'oisif, pénétrez dans sa vie intime;
interrogez sa femme, sa bonne, son petit garçon, et vous
saurez quel est celui qui, par son
amoursdésordonnées, corrompt |r^
sont la famille... » Ici je suis forer
de paix qui manquent un peu dr r
conclusion que je vous m diinni
>■ Nous voulons le mari. 1^1 mn/o
(ac/ie, contracté en toute Illicite (1 ,1
sordides, résoluble seulement par la mort ou la ibaiiisos
Où donc trouvorez-vous cet idéal du mariage, si ce n'est
parmi vous, ouvriers et ouvrières? — Et coiiime cette ob-
servation termine bien une pareille tirade. — /es riches, non
plus que les rois, ne connaissent pas iinnour en mariage »
Le citoyen Proudlion vent la propriété coiuine la ranulle.,.
pour tout le monde. On a dit, avoue t-il. ipie la propriété
ainsi entendue, ainsi dépouillée de ce qui en lait le pri-
vili'ge et l'abus, n élait plus la propriété. Ne croyez pas
(pi il réponde il celle olijection. Homme de pratique encore
plus (lue de théorie — c'e.-t lui ipii s'adresse cet étrange
couipliment — il laisse cette discussion aux savants. En-
lin, monsieur, ii partir du 1" septembre KSIS, le citoyen
Proudlion nous promet la jouissance d'un Dieu. (Juiind
son système sera appliipié. la religion sera expliipiée, la
vraie religion. Mais pour la dèconxrir il nous deniando
encore un peu — moi. je dis beaucoup — de patience; car
il lui faut 1. recommencer notre exegcse. montrer philoso-
pliiipienienl, il l'aide des nouvelles données sociales, le snr-
iiaturalisme dans la nature, le ciel dans la société. Dieu
dans Ihonime, » Les calouiniatenrs du citoyen Proudlion.
attachés ii leurs mythes, ne sauront quel est sou Dieu,
quelle est .sa fui, que. « lorsque la civilisulion lui apparaî-
tra connue une perpétuelle Aporulypsa cl l'histoire coinnio
un miracle sans fin, el lorsque, par la réforme de la société,
le christianisme aura été élevé ii sa deuxième puissance. •
Patience encore une fois; patience, répétons-nous avec le
citoyen Proudhon.
Le citoyen .4niédéeLangIols, auteur d'un article inlilulé:
De ta flratuité du crédit, el qui suit immédialemenl le ma-
iidr-teaii peuple, uiérile aussi une mention. Lisez-Icsi vous
ilr-iic/- ^a\oii tout ce (|ui arrivera en France et en Euro[)0
liir-M|iielrr(i-ilit -era L'raljiit. Comparé- il re rêve sinpide. l'A-
poialxp.M'rl II -Coiiir- r,iiita.,ii,|i,r- .IHoHm.iiin m.in(|uenl
coiiipl'clriuriil il iiiMjimitiou M.ii> a propos de divagations
extraonliii.iiir-i .iiiiir mieux vous parler du dernier feuillo-
ton de madame Emile de fiirardin le vicomte (jharles de
Launay ) , car j'ai eu tort, je le reconnais mainlenanl, de
déclarer plus haut que l'état de siège n'olTrail aucun incon-
vénient 11 en a de fort sérieux. Je demande qu'il soit levé
puisqu'il nepermel plus à madame Emile de Girardin • d'es-
sayer d'avoir de l'esprit el du coura.ge. - Le dimanche 3
.se|ilenibre, la Presse a publié un courrier de Paris délai de
siège, selon l'expression de son auteur, un courrier vieilli,
mutilé, n'ayant plusnisens ni à-propns Y.n lelisanljeme
demandais avec anxiété s'il était po-sible (pie le vicomte
Charles de Launay eiil écrit de pareilles phrases. Je n'eus
le mot de lenigme qu'il la (In du dernier paragraphe Ar-
rixé la, lion sans peine, j'appris qu on en :i\ail elfacé tous
les traits un peu piquants, supprimé toutes les idées géné-
reuses. Cet os, je ne le connais pas : mais c'est à coup sûr
un homme de goiît, car il a bien rempli sa Iftehe ; il n'a rien
laissé de piquant ni de généreux... Quelques citations vont
vous le prouver.
0 Dts qu*on est (piaire personnes daiiâ un salon, on est plein
ires|iiil (C'est un aiilre on ) , elc, ilc. — Tout le monde est
(Ui même avis, loiit le momie ciiliipip, blâme, injurie, maudit
i'eial (ie choses ù Punaniniilé el îi l'envi, aver un en^eiiible el un
entrain qui font plaisir, etc. C'est lii de b rraleniilê dans la mé-
disance. Seuleiiient, pour causer diplomatie, on attend que les
jeunes persoimes soient allées >e coucher . i7 n'y a pnx moyen de
raconter devant elles les aiilècédenis
» La mode en politique c'est
j) A pro|)os, on nous assure que M
Etall-ce inconséquence, était-ce ironie, nul n'a pu pénétrer ce
llljslérp.
• Autre anomalie. Le jour delà fêle de la présidence, madame
Marrasl, femme du président de l'Asseinhléc républicaine, avait
les cheveux poudrés comme
On raconte même que
Que de Irails piquants cet on a efl'accs 1 que d idées gé-
néreuses il a supprimées ! Ne les devinez-vous ; as! El pour-
tant telle est la grandeur d'âme du vicomte Charles de
l.aiinav, qu'il a la modestie,- peut-être la mêchancelé — de
lllihrr Ce rrllillrlon \iriill, inillilr -;ili^ -rlis ni il-propOS.
Apir> loin , ri' i|iii I ,illliL'" Ir |ilii-- cv 11 r-i |i,i- de ne pouvoir
pliiscs>n\rr (l.noirdr IC-pril cl du coiir.ige, c'est d'être
seul , toujours seul , de ne pouvoir être d aucun parti: car,
dil-il :
« Il y a deux partis qui se disputent la France en ce moment
et aucun des deux ne nous attire. Il y a :
n Le parti de ceux qui veulent tout garder:
D Le parti de ceux ([ui \eulent tout prendre;
D Le parti des égoïstes:
n Le parti deseuvieux.
» Les uns ont un mol charmant qu'ils .nlTectionncnl, qui ré-
sume toute leur pensée ;
> Fusiller I fusiller!
a Les autres oui aussi leur mot f.ivori, également aa'(.'clueui,
qui dévoile loul leur sysU" nie ;
D Guillotiner! guillotiiierl
!» Et l'on veul, s'écrie L- vicomte Charles de Launay, que nous^
autres, nous les poêles, nous rêveurs d'héroïsme, professeurs de
niagnaiiiniilé, nous prenions fait et cause pour celle politique de
li;i|)|ie chair!... Que nous tendions notre niaiii généreuse à cfs
iiiiiiiis a\i(les et crochues!.. Que nous saisissions la lyre d'or
pnur répéter à l'univers l'un de ces beaux refrains, que nous
choisissions entre ces deux paroles d'amour :
a Fusiller! fusiller!
a Guillotiner! guillotiner!
a Jamais. >
Pour se consoler de toutes ses infortunes, madame de
Girardin donne, elleaussi, desconseilsau peuple; elles'ef-
force de le convaincre, dans son intértH. qu'il a le plus grand
tort d'eux ier le mobili(>rdu bour.L'eois, Elle lui en fait une
descriplion détaillé qu'on a respectée. .\ l'en croire, c'est
pour défendre son mobilier que le Ixnirgeois de Paris se fail
tuer si bravement. On peut lui demander sa \ ie, dil-il, mais
il ne faut pas lui demander » son alfreiise pendule d'albâtre.
Ilanquee de deux affreux vases d alliàtre. ornc^de fleurs en
papier et de deux affreux flambeaux en albàlre ornés de
bobèches en papier, qu'il appelle sa garn.lure de iliemi-
n e.., • Enlin l'orateur s'écrie :
Peuple, si tu savais combien c'est laid rc que lu cniîes, tu
pardonnerais au bourgeois son bonheur... Veu\-lu donc le liier
pour avoir sou nlTreuso coiumndeeii acajou si incommodtsdoiil te
liroir rebelle el faiinsque ne cède jamais que pour vous tomber sur
les pieds: veux-ln donc le tuer pour sou alTivu^e armoire d glace
dilTorme, pour son aiïreux ciel de lit en acajou, rocher de Si-
sxplie qui iiirnace toujours son sommeil: pour son alTreux 6011-
fîeur-du'jour, eu ac.ijnii, toujours boiteux : |K>ur sa rave ù li-
queurs eu acajou, i>o«r ses nlTreuses porci-laine^ aux couleurs
bosiilesqui vous fout jriiicrr les yeux : pour ses affreuses lilho-
gi;iphies de pacotille, pour loiilcs ces clio<.es si communes si
iiml choisies, si laides, vcux-lu doue le tuer? •
Si le iieuple est cap;ible de n-sisler ;i de p.ireils arpu-
ments. ce dont je doute fort, je suis pei-suadé que col autre
paragraphe aura pour résultat de (iél mire tout l'elTel du
iiKiuileste publié le même jour par le citoyen Pnnidlion.
• Quand un a été milHonuaire, quand on a ébloui Parlj de
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
31
son luxe , qu'on a eu les plus beaux chevaux , les plus beaux hô-
tels du monde éléj^ant , quand on a séduit dix duchesses , une
douzaine de mtii-q"ises et même quelques fièrcs ladien , veux-
tu savoir, peuple , ce qui plait , ce qui amuse ?,,.. C'est de sortir
il pied , un parapluie sous le bras , et de s'en aller voir à un citi-
quième élage une griselle bien rieuse qui se moque de vous gen-
timent, n
11 faudra que l'étal de siège et le général Cavaignac ren-
dent de bien grands services à la France pour que je me dé-
cide à leur pardonner la littérature qu'ils nous ont faite. ..
Réduire un poëte à cette prose , une femme d'esprit à ces
épigrammes , un rêveur d'héroïsme , un professeur de ma-
gnanimité à ces legons... J'en suis tellement indigné pour
ma part que, dans la crainte de ne pas pouvoir me conte
nir, je me bornerai à emprunter une dernière phrase à ma-
dame de Girardin.
0 Vrai , le général Cavaignac est bien généreux de ne pas nous
faire adorer son képi ou son caftan au bout d'une perche, comnu
le farouche Gessler lit Bftorer son chapeau ; il ne se trouverait pas
un Guillaume Tell fi'unçais pour le jeter par terre. »
Madame de Girardin trouve que c'est un singulier pays
que le nôtre , où l'on est à la fois , dit-elle , si spirituel et si
bête , si brave et si lâche, où tout le monde a le courago
de se faire casser la tèle et où personne n'a le courage de la
porter haut. Cela peut être vrai pour certaines gens , mais
il y a certainement en France un grand nombre d'hommes
ou de femmes d'esprit et de cœur cjui ne sont en même
temps ni bètes ni lâches. Je ne crois pas non plus que tout
le monde ait le courage de se faire casser la tête et que
personne n'ait le courage de la porter haut. Même dans la
littérature de l'état de siège , il ne devrait pas être permis
d'abuser ainsi du paradoxe , et on aurait bien du supprimer
avec les mots piquants et les idées généreuses de ce cour-
rier vieilli , mutilé , n'ayant plus ni sens ni à-propos , ces
antithèses qui ne signilient absolument rien. S'il était be-
soin de les réfuter, nous rappellerions à madame de Girar-
din le double et éclatant exemple que vient de donner
M. de Lamartine. Il avait eu le courage d'exposer sa vie
pour fonder et défendre la République , et sa Lettre aux
dix départements {\) prouvera à ses calomniateurs et à
ses ennemis qu'il a toujours le courage et le droit de por-
ter sa tête haut. Je ne ferai pas il M. de Lamartine l'injure
de dire qu'il s'est justilié , car je ne lui ai jamais fait l'in-
jure de croire qu'il pouvait être soupçonne; mais je le fé-
liciterai d'avoir rompu si hautement , si complètement , si
éloquemment avec la république rouge. Il s'était tu peut-
être trop longtemps. La France , qui l'aime et qui l'honore
coiume un de ses plus grands génies et de ses meilleurs ci-
toyens , éprouvait le besoin d'entendre sa voix. Il a enfin
parlé ! et son discours restera comme une des pages les plus
intéressantes, les plus instructives et les mieux écrites de
l'histoire des trois premiers mois de la Hépiihlii|ne de 18iS.
Ce n'est pas là de la lilleralure il rtal de siège, Dieu soit
loué et béni ! M. de l.jmarluic avait le premier engagé la
lutte contre la ie|inliliqiic\ mlente, épuratoire , dictatoriale,
terroriste, de p^m^i •, ilr i^cste, de couleur, en faveur de
la République moilnrr .pacilique, légale , unanime, consti-
tutionnelle. Cette lutte , il l'a soutenue pendant trois mois
avec une intrépidité et une persistance que nul danger n'a
pu effrayer, nul obstacle fatiguer, et pour aider Washing-
ton à triompher deBabœuf, de Robespierre et de Canton,
il est encore tout prêt à offrir sa vie. Tout ce qu'il de-
mande en récompense de pareils sacrifices , c'est de ne pas
être méconnu. « Les plus grands phénomènes des révolu-
tions, sécrie-t-il en terminant, ne sont pas leurs crimes,
ce sont leurs erreurs. Citoyens, voici la lumière , reconnais-
sez vos amis. Nommé dix fois par vous comme signification
et non comme homme, confondu désormais dans les rangs
des simples représentants, de.-cendu d'un pouvoir trop haut
pour mon ambition , et ne désirant point y remonter; ou-
bliez-moi, nem'accu,-ez pas !.... Peut-être ai-je mérité un
seul jour vos suffrages , c'est le jour où je les ai sacrifiés à
la concorde. Quant a moi , je me souviendrai de vous tous
les jours de ma vie piibliiiui-. ('.Iia(|iie fois que je jetterai
dans l'urne un vnle de lionne intenlion pour le peuple , de
fermeté contre les factions , de salut pour la patrie , pour la
famille , pour la projiriètè . |)Our la conscience , pour la so-
ciété , je me dirai que j'y jette avec ma pensée votre propre
pensée à tous. Je médirai que deux millions de citoyens vo-
tent avec moi pour cette Republique unanime qui n'esta vos
yeux comme aux miens que l'intérêt de tous, légitimé par
le droit de tous , et dèfrridu par la main de tous, dans le
plus libre et le plus foil ilc~ um reniements. »
Remerciez avec moi l;i l'inMilnicr, monsieur le directeur,
d'avoir fait les bons citii\riis-i >u|iriieursen tout aux mau-
vais, et recevez l'assurance de la con^dèration
DU VlF.LX Fl.4m;ie.
Bulletin Bibliograiiliiqiie.
Organisation du Iraïuiil. — Ile l'i dcmocrniie industrielle , par
Chaules Laudil.vte , ancien élève de l'École polytechnique ,
1 vol. iii-18. Paris , laid. — Mathias , 3 fr.
M. Ch. Laboulnye est l'auteur d'un tfict'Onnaire des arts et
maiiu/'Mf(uie,ï qu'il paru il y a quelques aimées. Le nouvel ou-
iragequ'il vient de publier était commenié depuis longtemps lors-
que la révolulion de février a éclaté. Ill'a continué sans l'achever
cependant, car ce n'esl , comme il le reconnaît lui-mènie , qu'une
ïéunion de noies dont il complaît faire un Iraiail plus élendu.
11 n'eut jamais songé à le publier tel qu'il est, si la question
(]] Publiée 'tons Trots mois au pouvoir, volume inlS qui ronlieiil en outre son
ulloiulioilsqu'il a proiioiicéa ile]iiiiâ le 2* février à la cliaiubie el k lllùlei-dc-
n'avait une telle gravité , une telle urgence qu'il y a presque tra-
hison , dit-il , à garder par devers soi ce qu'on croit être la vérité.
Aussi espére-t-il que son essai fournira quelques maléiiaux utiles
aux architectes chargés de construire l'édifice de l'avenir. Celte es-
péiance , nous la partageons. II y a sans doute dans lu Démocru-
iie industrielle un bon nombre d'idées déjà connues et jugées.
Mais la base fondamentale est un système qui offre dans de cer-
taines mesures l'intérêt et le mérite de la nouveauté.
En elTet M. Ch. Laboulaye, après avoir constaté qu'il existe
des relations intimes entre la constitution écononiiiine d'un pays
el sa constilution politique, arrive à celte conclusion en ce qui
concrme l'organisation industrielle delà France, c'est que pour
être en rapport avec sa constitution politique, elle doit être dé-
mocratique, a La division du sol , dit-il , a réellement i-ésolu
pour la classe agricole le problème de l'organisation du travail :
production considérable , répartition équitable. Aussi voyez le
pays, tu ; désire-t-il une révolution quelconque.^ Il la ledoute fort,
au contraire , parce (lu'il craint qu'elle ne lui envoie trop sou-
vent le percepteur. Il ne désire que la terre dont il espère bientôt
pouvoir acheter nu morceau , le plus souvent pour arrondir celui
qu'il possède déjà , el l'on peut se fier ù lui du soin de lui faire
produire tout ce qu'il peut rapporter. II n'y épargnera ni peines,
ni soins. Or pourquoi, tandis que la plus grande partie de la na-
tion s'avance dans les voies que nous venons d'iinliquer, quand
le but à atteindre est le même pour tous , pourquoi le champ de
I industrie tend-il à être exploité eu grande propriété?... De
même que l'exploitation des furets et des pâturages se prête mal
à l'exploitation morcelée, il peut, il est vrai , exister certaines
industries qui ne peuvent être exploitées que dans un grand éta-
blissement: mais n'est-il pas certain qu'avec les idées qui font
la nation française d'aujourd'hui , qui seules peuvent faire sa
force et sa grandeur, le but de lontes les institutions doit être
bien plus de favoriser la division de la propriété industrielle
que sa concentration ; que, par exenqtle , de deu\ industries qui ,
toutes choses égales d'ailleurs, réclameront du pays les sacri-
ficei qu'enlraine la protection des douanes pour être importées
en France , on devra préférer celle qui assurera l'aisance de
cent petits établissements à celle qui fera nuitie dix grandes fa-
briques ?
Cette idée , qu'il croit juste, M. Laboulaye essaie de la dé-
montrer par des faits. Jetant un coup d'œil rapide sur la consti-
tution économique des diverses branches de l'initustrie , il prou-
ve : 4" que les fabrications qui font la gloire de l'industrie fran-
çaise , qui luttent avec avantage coidre celles de l'étiangcr et
donnent lieu ii un commerce d'importation important , s'exploi-
tent sous forme démocratique, c'est-ù dire que la propriété in-
dustrielle y est divisée en un nombre très grand des possesseui-s
des instruments de travail, que l'exploitation s'y lait en peiits
ateliers: 2" que celles , au contraire, qui s'exploitent en grandes
mamifaclures , sous une forme évidemment eiiipi mitée ii l'An-
gleterre, s'accliinalenl dillicilement en l'rance , et que ce n'est
qu'il l'aide delà prolectiou des douanes qu'on est par\enu , grâce
aussi aux elforts d'habiles ingénieurs, de conr.igeux f.ibiicanls,
à donner quelque prospérité ù ces graniles factoreries , pros-
périiê qui n'a pu ce|iciidant, dans le plus grand nombre des
cas , permettre il leurs produits de dépasser les frontières de la
France , dont le mar.hé leur était réservé par la protection doua-
nière , el d'aller lutter avec l'industrie anglase sur les marchés
élrangers. 11 eu conclut nalurellcment que celte seconde forme
d'oiganis.ition industrielle n'est pas celle qui convient aux mœurs,
au caraclùre de notre nation , el que les encouragemenjs de l'É-
tal ne doivent pas être exclusivement réservés, comme ils l'ont
été jusqu'ici , à la coustilnlion de ces grandes propriétés indus-
trielles, de ces grands monopoles inabordables pour la presque
tolalité de la nation el dont les pro„'rès sont ratalenient accom-
pagnés de ceux de la misère des agglomérations nombreuses
d'ouvriers auxquels l'abord de la propriété est interdit, comme le
prouve l'expérience ù Reims, à Mulhouse, à Saint-Quentin , à
Lecds et à Manchester.
Amené ainsi il étudier ces monopoles dont la concentration ,
avant la révolution de février, tendait ù grandir et ii constituer au
profit d'un petit nombre ce qu'on appelait la féodalité financière ,
M. Laboulaye établit :
Que le monopole illimité, c'e-t pour la classe déshéritée le ser-
vage et la misère.
Que la concurrence illimitée est souvent une cause de misère ,
en permettant , par la lutte de tous , le monopole réel du plus
fort , du plus riche ; guerre où celui qui a le plus d'écus , détruit
celui qui en a le moins , où la victoire est encore du côlé des gros
baladions.
Que de même que les progrès delà centralisation, en créant les
armées modernes, ont produit une force infiniment supérieure à
celle des troupes des seigneurs féodaux , de même l'iiitervenlion
de l'Étal , de l'association de Ions dans la production industrielle,
pour concenlrer les elVorls communs au profit de tons, peut pro-
duire des résultats infiniment supérieurs il ceux de l'iiidusirieféo-
dale, et que l'apanage de tous ne peut être abandonné ii quel-
ques.uns sans un droit personnel de ceux-ci.
Qu'enfin la liberté de chacun élaiit un droit que la société ne
peut confisquer, le proJuit de cette liberté est une propriété , un
juste monopole inconlcslable; qu'une sociéiéist d'auiani plii^ p.n-
faile que l'on y respecte mieux l'axiome Cliacvn y est proprié-
taire rt responsable de ses ceuia'es, que le citoyen trouve p'iis de
liicilitès pour pouvoir développii son êlrc el créer des richesses
qui proiluiscnl le bien être et l'indépendance d'une famille en ac-
croissant les richesses sociales.
Ces principes posés, M. Ch. Laboulaye reclierche les moyens
les plus propres ù les meltre en pratique. La plupart étaient déjii
connus, d'autres ne nous semblenl pas acceptab.'es. (les moyens
sont d'ailleurs tilloaient noinureux , que leur simple eiiunie-
ralion leiiiplii.iii plus d'une colonne de ce journal , nous ren-
virroMS donc aux cli.ipilres 5, 13, 7, 8, 9, 10 et H de la IJrmo-
cratie industrielle , ceux de nos U-cteurs qui désireraient savoir_
rommeiit .M. Ch Laboulaye espère pouvoir atliindn- le but qu'il
s'est proposé, c'e.st-ii-diie démocraliser l'iniliislrie. II nous suf-
fira de conslaler que, dans son opinion , la ilesiriiction ne la mi-
sère , la ililTii^ion de liiisiince et de la noble iiidé|iiiid.iiiie qui en
résulte doiieiit s'ulileiiir par l'éiieigie du lr,n.iillei.r ( sans le
serours d'une piiiiacie universelle, d'une fiiriiiiie lriiinpeu?e et
subversive de lout re (|ui existe) , en seionihiiil l.i divisimi, la
léparlition entre les travailleurs illdu^lriels des moyens d" pro-
duction , en léalisani ponr ceux-ci tout ce i|n'a produit depuis
la révolulion de 1789 la division du sol ponr les pojocleiirs de
i'agricuttnie.
La questinn , dit M. Ch. Laboulaye dans son second chapitre,
nous parait se poser plus neltemeiit thatpie jour : « ou bien le
désir iiiiiitelHgeiit du mieux , nous pou-.ïera vers le cotnmuuisnie.
la négation de toute propriété, de toute supériorité , de l'iudé-
pindanccet de la libellé de l'homme devenu un rouage inintel-
ligent de la machine sociale , et nous conduira sûrement à une
alTreuse égalité dans la misère par l'avilissement de tout el du
tous , ou nous verrons une puissante démocratie industrielle il
large base, douée d'une ardeur immense pour le travail de la pro-
duction ; et l'aisance devenant la récompense assurée du talent
et du travail fera croître dans des proportions inconnues jusqu'il
ce jour la richesse de la nation. » Quant i> nous, nous espérons,
avec M. Cli. Laboulaye , que la question sera résolue selon nos
désirs et les siens; que les dépositaires du pouvoir, suivant ses
sages conseils, rassureront la propriété par leur énergie, leur
sagesse , leur dévouement, leur franche opposition à de fuiiesles
doctrines , el que son livre contribuera pour une certaine part à
cel heureux résultat.
L'appendice qui termine la Dcmocralie industrielle rewkrme un
arlicle sur l'administration, un projet de loi sur les brevets d'in-
vention rédigé par M. Jobard , les statuts des comptoirs el sous-
comptoirs fondés à Paris, les statuts de l'Union du crédit fondée
il Bruxelles avec les articles ii ajouter pour la convertir en banque
mutuelle d'échange; enfin, une note intitulée: Caisse de relraile
pour les Iravailleurs , Caisse des invalides de la marine.
Vicrcen irnvaiWiut , projets, voies et moijens de réformes socia-
les, par François Vidal, auteur de la Itépnrlition des richesses.
— Paris, 1848 ; un volume iu-18, 3 fr. 50 c. Capelle, rue des
Grès-Sorbonne, 10.
M. Laboulaye est un éclectique : « Placé , dit-il , entre les so-
cialistes qui veulent tout faire faire par l'Étal , personne mysté-
rieuse, infaillible, ayant toujours des trésors inépuisables il .sa
riisposilion , et les éconoraisles qui nient lout avantage ù celle
intervention , qui professeul la Ihéoiie du gouvernement éclairé,
ne réclamani que la lîberlé absolue, complète du travail , el re-
fusant de reconnaître qu'il puisse en résulter le moindre incon-
vénient , il a cherché dans l'ouvrage que nous venons d'analyser
rapidement à indiquer comment, dans quelles limites deva"ient
.se combiner, en vue de l'inlérêt général , la liberté et l'autorilé,
l'indépendance de l'individu et le pouvoir de la société. M. Vi-
dal, lui, est un somi/is(c pur sang. Digne émule du citoyen
Louis Blanc , dont il a élé le secrétaire au Luxembourg , el des
citoyens Cabet , Pierre Leroux. Proudhon el auires citoyens
delà même école, il peut avoir comme eux de bonnes intentions,
mais il a certainement aussi de fort mauvaises idées. Après tout
il n'en est , comme il le dit lui-même en ne réclamant avec jus-
tice ni brevet d'invention ni brevet de perfectionnement, que
le réceptacle et l'écho. Elles ne lui apparlienniul pas en propre,
il ne fail que les publier, car leur germe se trouve déjà dans des
livres qui ont été écrits il y a plus de deux mille ans , dans des
livres dont les auteurs sont restésinionnus. Quand je dis publier,
je me trompe, je devrais dire réimprimer, puisqu'il déclare
rranchement , • n'ayant pas la prétention île faire du nouveau ,
de rinconnu, » que tout ce qu'il développe dans ce volume il
l'a déjà exposé en grande parlie sous une autre forme el en d'au-
tres termes, il est vrai, dans des brochures, des articles de re-
vue el un livre. Du reste , si M. Vidal marche dans un .sentier
depuis longtemps frayé , dans un sentier qu'il a hattu lui-môme,
il prend aujourd'hui une autre allure. Les projets qu'il présen-
tait, sous la monarchie écroulée , comme des projets rationnels
dont il n'osait espérer la réalisation , il les donne inainleiiant
comme possibles, comme iinmédiatenient réalisables, comme né-
cessaires. Ce qui éiaii une utopie il y a six mois , peut , dans son
opinion, devenir une institution de la République. A sou avis,
les Ihéoriciens d'avant la révolution sont les .seuls hommes vrai-
ment pratiques, les seuls qui conipreunent le mouvement des
idées et des fa. ts , les seuls qui puissent le diriger, les seuls qui
aient le vrai sentiment des besoins de la société arluelle; aussi
n'hésite-t-ilpasàdire que le lenips approche où les idéis sxiales ,
les idées positives à'ordre , ù'associntion et A'or^anisulion , que
l'on traitait de chimères el de rêveries, seront les seules idées
raisonnables, deviendront pour la société actuelle Vunique moyeu
de salut. « Le temps est proche, s"écrie-t-il dans un accès d'en-
thousiasme , où l'inlervenlion del'Rlal, réclamée depuis vingt
ans par les socialistes , repoussée avec obstination par les écono-
mistes libéraux , repoussée par les propriétaires , par les agricul-
teurs , par les industriels , par les marchands , par les banquiers
et par les capil.ilistcs , sera invoquée à grands cris, implorée
comme une faveur, comme une grùce parla piopiiété, par l'agri-
culture, par l'industrie, par le commerce, parla banque cl par
les économistes libéraux eux-mêmes. »
A lire ces passages extraits de la préface, on devine sans peine
ce que doivent contenir les dix-sept chapitres de l'ouvrage ; ils
peuvent tous se résumer ainsi : absorption de l'individu par la so-
ciété. Le premier, intitulé le Droit au travail, ne sera pas, je
IVspére , sans iunuence sur la discussion qui vient de s'ouvrir à
l'As^eniblée nationale. M. Vidal a du moins le mérite de la fran-
chise ; il avoue que le droit au travail , qu'on le sache ou qu'on
l'ignore, implique nécessairement l'organisation du travail , et que
l'organisation du travail implique la transformation économique
de la société. Le principe posé , dit-il , les conséquences sont iné-
vitables. A l'en croire, les adorateurs du passé auiout beau se la-
menter comme des Jérémies, c'en est fait à lout jamais de l'an-
cien régime , cl , quoi qu'il arrive dans l'ordre politique , la régé-
nération sociale s'accomplira.
Révéler les moyens d'opérer cette révolulion indispensable , en
d'aulres termes , coiislituer l'ordre nouveau , tel est le bul (|ue
s'est proposé M. Vidal. Dans les cliajiilres 2. 3 et It, il expose
toutes les réformes qu'il considère comme immédiatement néces-
saires dans l'agricultu'e, riiniuslrie, le commerce ; les chapi-
tres i). G, 7, 8 et 10 sont consacrés aux institulions de crédit ;Ie
chapitre 11 a pour litre : Itachal possible du sol par l'État, ra-
chat de la dcllr publique , des ctiemins de fer, des can^nix et des
mines; les ilijpilres 12, f.'i et ili traitent des iiistilulinns de ga-
rantie , lies asMiiaiH-es , îles hôtels écoiiomi.jue^ ponr les f.imilles
d'ouvii.is, des armées indu^lrielles;dans le chapilicl5 .M. Vidal
répond ans ohjeclio.-is ; dans le IG'' il se résume , el dans le 17*^ et
dernier il conclut.
Cet ouvrage est encombré de phrases inutiles, \fais au milieu
de tout ( e fali as déi lainaloiio , dans ce luhubohu d'utopies exlra-
vagantcs, (jui , de l'avis de leur vulgarisateur, datent au moins
de 2,000 JUS, on découvre çà et là i|uelque idée raisonnable et
féconde ; on peut donc le lire avec fruit, même s( on coiniait suf-
nsainuR'ut messieurs les socialistes cl leurs sy-lèmes. Au lesle
c'r^t un guide digne d'êlre recoinniandé aux amateurs qui vou-
draient cs>ayer de pénéirer pour la l'.reinière fois dans ce monde
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
rt-ccmnii-nldiTonvirl , s'il jiV-l pas.romnR'le ricomieiil llli-mc'uiu
M. Vidal , renouvelé (les Grecs. Qu'il-, aient la précaution de s'en
munir avant de se mettre en route, et ils seront sûrs non-seulo-
nunt de se rendre par la voie la plus courte aux endroiLs les i)lus
curieux à visiler, UKiis de Irnuver en oiilrc, au chapitre qui les
conrrrue , liplllcs les i-xpliralicins dr-ii ;ilil|.s.
Bien (|n'il ne ii:iilc- piis cli'^ rmini's principes, M. Vidal arrive
à cerlaines réformes dont M. LalicmUije propose l'appljcaliun
dans sa Démocralic vnt'>\triet[c. Mais si M. Labnuiaye veut dé-
moraliser l'indusire à l'instar de l'agricutture, M. Vidal, au
contraire , a la prélenlinn de socialiser le sol comme l'innuslrie.
La propriété démocriiii((ui' lui scndile une mauvaise chose. Au-
tant il adore les nuMicis prniircrjnnt dils , surtout les travail-
leurs qui ne travaillml p;is pinrc ((u'ils aiment mieux ne rien
faire, autant il déti^lv les pajsans. Du rcsie on doit lui savoir
(çré de >a franchise. Il confesse tous les rêves de son imajfina-
tion avec une naïvele qui lui fait honneur. Il est impossible de
s'exprimer plus uettenu'Ul. Jl a même la bonhomie de nous dé-
voiler loules les petites supercheries qu'il entend pratiquer pour
nous façonner à son image. Le passage suivant est curieux â plus
d'un titre.
Il Si la ï'raucc, dit-il ( pages d6i et suivantes ) , (tait , couune
l'Angleterre, un pavs de propriété arislocialique , nous irions
droit au but , sans prendre un chemin de traverse , nous ne de-
manderions point la division préalable du sol pour arriver ensuile
à l'association. Mais , eu égard ix nos traditions, à nos préjugés,
eu égard aux obstacles qu'il faut ahsninntent tourner puisqu'on
ne peut les détruire , nous devons prendre la ligne courbe, parce
que c'est encore celle qui nous permettra d'arriver au but plus sti-
rcnu'ut et plus promptenn nt.
n Présentement donc , nous demandons l'accession du paysan
à la propriété , parce que c'est aujourd'hui le seul moyen de pré-
pai-er l'émancipation des travailleurs et^d'anioindrir la rente t\e la
lerre. Mais, pour nous, ce n'est point le but définitif, ce n'esl
qu'ui'e étape. La plus extrénu' division delà propriété n'est point
le terme de nos espérances, bien (lue ce soit peul-étre la Iransilitui
nécessaire du présent à l'avenir. Nous rêvons un tout autie mon-
de , nu monde diamétralement opposé...
n Léducalion générale devehqipera les intelligences el dissi-
pera les préjugés ; la force des choses, d'un antre C(j(é , démon-
trera l'iiisuflisance de la petite luliureet poussera les hommes â
l'as^ocialiou. Mais je reconnais (|u'aujonr(l'hui il n'y a rien à al-
leiulre de la géiiéralion présente di' nos paysans ; race ignorante,
égoïste, âpre au gain el impitoyable au malheur, obstinée dans
ses préjugés , rebelle a loules Us iiuiovalions, même t} telles qui
ont pour objet l'amélioration de son sort, elle n'a d'affection que
pour son champ et pour ses écus ; elle tn-nt à son bélail plus
qu'il sa famille ; elle porte plus sincèri ment el plus longtemps , au
fond du cœur, le deuil d'un bœuf mort que le deuil de ^on vieux
père, et elle trouve (|ue le bonheur de l'humaniié serai! payé
trop cher s'il devait lui coûter mumentanémenl quelques centimes
iddilii
els.
n (À-ux qui se font les plats courtisans du peuple des campa-
gnes, (|ni en exaltent les fausses vertus , ne connaissent pas le
paysan. Le paysan de la France centrale, le paysan qui ne sait
ni lire ni éciire, mai* qui s.iil compter; qui n'est jamais sorti de
son harnean , qui n'a poini éié décrassé par le service mililaire,
qui n'a de la créaliire humaine que la forme extérieure et le lan-
gage ; c'est généralement nu être stupide et grossier auquel on ne
peut s'intéresser que par amour de l'humanité, qui fera la résis-
tance la plusopiniaire , la plus féroce même, t toute idée géné-
reuse , s'il n'enirevoit pas pour lui un profit immédiat , qni tue-
rait au besoin ceux qui veulent l'affranchir, comme les prétoriens
liienl ceux qui veulent les délivrer du joug du despotisme. Le
plus grand ennemi dn peuple ignorani , ajoute M. Vidal avec rai-
sou , c'est lui-même.,,, n
fieorge SIephciisoi
l.r >,;iiieili 1 i iiiiùt (loiiiiiT, csL iiiofl , (liuis soii élahlis-
sciiM'iil ilii cimiiIj'' (lu Derl-iy , \e célèbre in2;énieui' anglais
(icrii L'e Sle|ilirnsnn , (|ui il (!U la gloire , sinon fl'iHrc l'inven-
teur lies clK^mins de fer proprement dits, du moins d'em-
pliiyiM- le premier avec suci-ès une machine a vapeur sur les
Villes ferrées.
(iciiri;i' Slepliens()n était né à Wylam , village situé sur
les hiinls lie l;i Tyne , à neuf milles de Newcastle , au mois
il iivril 17X1 . Sun père , simple ouvrier de la lioiiillère de
WMaiii , ne put lui faire donner auiuiie éilm iiliini Au lieu
dallera l'érole . il fut iililiL-é , des son h;i.. ,iiir ilr ii ;i\ iuller
pour Ljiigucr sa vie De In lioiiillere de W \ l,;iii , il p.i-.i , a
ili\-liuit ans . daiisiclle de Killiii;;\\orlli . ipii .ipp.iiieii.ilt a
Imil llaveiiswi.rlh , el s'él.inl liveiles lors a Killiiiijwi.rth . il
\ épousa plus tard sa première reiiiiiie , iliiiil il ei'il un seul
(Mil.iiil . le celelire ingénieur en ilierile la iiiiii|ia-nioile l.on-
dre^etdii Noril-Duest , M. Itolieil Sleplieuson , actuelle-
ineiitiiieiulueilela cliaiulire des roiiiiiiiiiies
t'.e lut pendant son séiiiur a Killiiigvvorlh iiue se niani-
Irsineiii, ses pretujères dispositions pour la mécanique. Sa
" lie s' étant cassée , il eiilreprit de la raccommoder et il
\ riMissil, A dater deee uioiiieul , il devinlThorloger du vil-
lage Toiiles ses heures de Im^ir élaient ( onsaeri'es il la ré-
par.ilioii desiiiiiiiln^ .In.Mrjres Un jour, une desniaeliiues
de la houillère dr-hiMc ,i mmUer l'eau reliisa de louetion-
uer. On essaya \aiiieiiieiil de la faire niaiclier. Aucun des
employés ne piil même eompremire pouri|uoi elles'élait ar-
rélce. Stepliensiiii vint levauiiiier. demanda et obtint la
permission de la remettre en bon état , el non-seulement il
la répara , mais il y ajnt.ta des perfectionnements impor-
tants. Ses supérieurs l'en récompensèrent en l'élevant de la
condition d'un simple ouvrier au rang d'ingénieur, et ils le
eliargereiit de conduire seul cette machine. Tout en remplis-
sant ses nouvelles fonctions, il fit travailler son esprit et il
eut la gloire de décoiu rir la lampe de sùreléen même temps
ipie sir lliiiiiplirev U.iw l.ejour ou sa preiniere expérience
eut lieu i\ ocliiiire LSI.';' . le re\ereml John llogdson re-
ee\ail de sir llumplirey Davy une letlie ipii lui annon(;ait
son iilil|. inveulion. Une soilscriplioii , ouverle en IS.lSen
siHi liiiiineiir et a son profit , produisit 1.(1(111 livresslerling .
ijui lui fiirenl oITerles avec une pièce dargeiilerie . il la lin
d'un grand diiier d'aiiparal il.iiis la ville de Neweasile
Descelle epoipie Sleplieuson s'oceiip.i presipie e\eliisive-
ment du proMeiiie ilnul la sohilion iuiiiiorlalisera son nom.
f.u ISIIi, la machine de Trevelluik et Vivian Irainait (les
voilures a MerlliM-lgdvil . ,ivee oiie vitesse de cini| uiilles
il l'heure . en US 11 et'lSl!i, lilenlvinsop et Chapiiianconslrui-
sireiil une niiiiv(;lle machine ipii ne put pas marcher. Dejii
en Uill. avant de découvrir la lampe de sûreté . Slephen-
soii lui-même en avail coiislriiit une pour la houillère de
Killiiigworlh . ipii l'onclioniia ipielipie temps sur le chemin
de Um- de la ( oiopaguie , et ipi il remplaça liienli'il par une
iiutre bien supérieure , d'après la demande de l'iinjenieur
en chef
Ce n'élaienl lit toutefois que des es-sais. Dix années de-
vaient eiicori' s'écouler avant qu'une véritable locoieolive.
se'iiblabic it celles dont on se sert aujourd'hui . quoique
moins parfaite , rouliit sur un chemin de fer. Cette grande
révolution dont les conséquences ont dèjii été si grandes, et
I imagination la plus hardie ne saurait deviner les résultats
bilurs , 1 Angleterre , que dis-je , le monde entier les doit a
Slcphenson En 1824, il avait fondé il Newcastle , avec
M.\l. l'ease , Longridge et son fils, un vaste établissement
pour la construction des machines à vapeur, qui e.\isle et
prospère encore aujourd'hui sous la raison sociale Robert
StephensoTi el C' ; ce fut de cet établissement que sortit la
première locomotive destinée a transporter des voyageurs
el des marchandises sur une voie ferrée. Stephenson en
était en même temps l'inventeur et le constructenr. En 1825
il eut le bonheur de la voir fonctionner avec un succès com-
plet entre Sloekton et Darlinglon.
Malgré son succès, Stephenson n'osait pas alors avouerles
espérances qu il avait conçues, il craignait de passer pour
liiii II disait qu'il comptait atteindre une vitesse de vingt
milles a 1 heure , mais il rêvait déjà une vitesse de soixante
el de cent milles II y a un an environ , il s'exprimait en ces
lermes a Newcastle , dans un diner public : e A Liverpool
je m engageai a obtenir une vitesse de dix milles il l'heure.
Je ne doute pas , ajoutai-je , que ma machine n'aille beau-
coup plus vite , mais il vaut mieux èlre prudent au début.
Je m exprimais ainsi devant une commission d'enquête nom-
mée par le parlement. Quelques-uns des commissaires de-
iiiaiiileient si j'étais un étranger, et un autre donna à en-
tendre il ses collègues que j avais perdu la raison. Je n'en
persislai pas moii s dans mes projets, et j'emportai mes
plans, ilelermiué à les mettre il exécution. » Tandis qu'il
cdiislrnisail sa première locomotive . il dit il ses amis qu'il
obtiendrait une vitesse illimitée , pourvu qu'elle ne se brisât
pas en morceaux.
La réputation de Stephenson ne date pourtant que de
1S*I. .\vaiil la création Au chemin de fer de Liverpool et de
Manchesler il n était connu comme constructeur de ma-
chines ipie de ses clients. Mais les directeurs de ce chemin
de fer ayant , en 1829, ouvert un concours pour la construc-
tion d'une machine ii vapeur destinée à leur servir de mo-
dèle, (îeorge Stephenson gagna le prix de .500 livres avec
s.i eeleliie iii;ichine le Rocket Dèslorssa fortune elsa gloire
liniiii .1— iiiccs il se vit chargé de la construction des prin-
cipile- liL'iic- de chemins de fer, non-seulement de la Gran-
de-lirelagne . mais du continent.
Sieplieiisiiii vivait , riche et honoré , dans son élablisse-
meiil du comté de Derby, où la mort est venue le frapper, le
12 aiMit dernier, dans s;i soixante-huitième antièe
o
RICHESSE
VTIOX DU DERMEIl ItKBl'S
Marche ilev;tiil toi, car tout chemin mène à Home: m.»
Iioulieui-, \K\i uu ne conduit eu ce moinle.
(Ml s abonne riircrfemftif aux buivaiix. rue de Hicholieu.
n" liO. par Tenvoi franco d un mandat sur la poste ordiv
l.echevalier et ('.', ou près des diivcleui-s de poste el de
messauiM'ies , des principaux libraiivs de la Krance el de
Ici ranger, el ilesiiirrespondaïuesileragenced abunnenienl
l'.'.Ui.lN
ruCH-S.vl.xt-C .HMV
L'ILLUSTRATION,
Ab. pour Paris. 3 mois , 8 fr. — 6 mois, 16 fr. — Un an, 30 fr.
Prix de cliaqueNo, 75 c. — La collection mensuelle, br., 2 fr.75.
N" 290, Vol. XII. — SAMEDI 16 SEPTEMBRE 1848.
Bureaux: rneRlclielleo, 60.
Ab. pourles dép. — 3 mois, 9 fr. — 6 mois, 17 fr.— Un an,32fr.
Ab. pour l'étranger, — 10 fr. — 20 fr. — 40 fr.
SOMMAIRE.
IllBloIre de la
poJiiaine . I« 3
M. Fra
de M. Ilédianl , qualre gravures. — La souscrfplton en librairie.
— Correspondance. — Une visite A la librairie plialansie-
Tienne, par M. Alexandre Dufai. — AlbuDi uioldo-valaque ( s*
srticle). U(i relais lie poste en Moldo-Vabcbie ; Uo eunsul général étranger
k BucliareM : La fêle des Ouvriers français dans une furet nioldo-valaqne :
'i. Dmissau
tleesins de M. H. Bouquet. — FOles de' Calais et Dunlierqoe. Ban-
quet de la garde nalioiiale sur la grande plaue ; Bénédielion du ehemi
fer; Lancement de la Bùhe ; La proccssiou du Reuse : Rue Arago ;
Dupouy : Bue de la Marine.
Histoire de la semaine.
Par une sorte de pressentiment sans doute de tout l'em-
barras, de tout le péîe-ni6le de ia discussion du préambule,
l'Assemblée ne s'était pas plutôt laissé entraîner par la
flatteuse éloijuence de M. de Lamartine , à décider que no-
tre constitution aurait un avant-propos, qu'elle a semblé
vouloir revenir sur sa décision. Parmi les préambules que
leurs auteurs présentaient pour être substitués à celui de
la commission , il en était un concis, net, simple, aussi peu
préambule que possible, et que son auteur, M. Boussi , avait
soutenu en quelques mots également clairs et précis. Celte
tentative nouvelle, mais déguisée, contre les phrases vagues
et dangereuses de la commission , a partagé l'Assemblée en
deux. Le bureau a cru à une majorité pour le rejet de la
proposition de M. Boussi.
Ce sort, injuste pour celle-ci , a été partagé également
par d'autres rédactions qui le méritaient bien. La plus fan-
tasque était celle du citoyen représentant Deville, que l'As-
semblée a écouté , dans ses développements sérieusement
burlesques , avec une patience désespérante pour l'orateur
dont le tliéme était que la tribune n'était pas libre sous
l'état de siège. Ce constituant a eu toute carrière , et l'As-
semblée , silencieuse pendant la harangue , a comprimé ses
rires jusqu'au moment où l'orateur est descendu de la tri-
bune.
Une fois la concurrence des préambules vidée , on est
entré dans la délibération des paragraphes de celui de la
commission. Dès l'article premier, où tant do choses sont
garanties aux citoyens , depuis l'éducation à l'enfance et le
travail à l'âge mûr jusqu'à l'assistance à la vieillesse , dès
ce premier article , s est produit un amendement de M. Bau-
chard , qui promet, après tout cela et malgré tout cela , non
pas seulement un meilleur emploi , une plus égale réparti-
tion , mais la réduction des charges qui pèsent sur les con-
tribuables. Il s'est trouvé une majorité pour ajouter cette
promesse à toutes les autres. Sans doute beaucoup d'ad-
versaires du préambule auront eu la perfidie de concourir a
l'adoption de cette gasconnade, dans l'espoir qu'au vote
d'ensemble elle le compromettrait et le ferait définitive-
ment rejeter.
Le paragraphe 2 , qui porte que la République française
est démocratique , une et indivisible , a été voté à l'unani-
mité par 777 votants , après quelque incertitude exprimée
par M. de La Rochejaquelein sur le sens du mot démocrati-
que , que M. Dupin aîné a essayé de lui faire comprendre ,
sans se llatter d'être plus heureux que nos pères ne l'avaient
été , en 1789. avec une partie de la noblesse , quand ils
avaient tenté également de lui en faire bien saisir le sens.
— Le vote des paragraphes 3, 4. S, 6 et 7 n'a amené au-
cune discussion importante. Un fort bon discours deM. Du-
cos a fait ajouter au paragraphe -4 que la République a pour
base la famille, \a propriété , Y ordre public.
Mais le paragraphe 8 semble être le terrain sur lequel se
sontdonné rendez-vous les champions de tous les partis. On
se rappelle que dans sa rédaction primitive la comiîfission
de constitution avait semblé reconnaître un droit illimité au
travail. Dans la rédaction revisée , elle engage seulementla
République à fournir du travail aux bras inoccupés dans ia
mesure de ses ressources. M Mathieu ( de la Drôme) a pré-
senté un amendement pour rétablir formellement l'enga-
gement primitif et ses conséquences. Ce représentant a dé-
Bombardement de Messine par la ûotte napolitaine, le 3 septembre 1848.
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
veloppésa proposition dans undiscoursliion loni; . I)ien lent,
bien lourd , où les Sauvages jouaient continuellement un
rôle pour la plus grande hilaritéde l'auditoire. Mais ce qui
a paru plus gai encore, c'est que le lendemain M. de Toc-
([ueville ayant, pendant une heure, tenu constammentl'As-
semblée attentive et l'ayant entraînée par une des plus élo-
quentes opinions (in'clïc eût encore entendues à sa tribune,
M. Mailnru i df l:i Drome) lui a succédé pour bien constater
que M. dcTiii i|iir\illc ne lui avait pas répondu. C'était vrai ,
et l'Assciiilili'c l'A iiiiinnu par un fou rire.
M. I.('diii-l;nliiii ;i liii'i, lié iK.indial Ire l'effet produit par
M. dcT(ii'i|iirMlli' , iii:m~I iii^inr.il hiu manquait ce jour-là à
l'orateur ili' ICxIn'iiii' L:,inrlii' Il iidus semble d'ailleurs
s'engaL'ci- dans un |m>U;-iiiiIii'u qui ne lui promet ni d'être
considéré comme homme pratique , ni de conserver long-
temps la popularité dont il peut jouir II y a trois semaines
il présrnli'it un proLTommo de socialisme bâtard qui cher-
chait a M'Iinc hniiliiHiuiH' .Mardi il réclamait l'insertion du
droit au ir,i\.iil d.iii- lii . mi^iiiiition , mais il reconnaissait
que de loii^lcinps ce droit ne pourrait être 8érieu^ement re-
vendiqué et demeurerait à l'état, sinon de lettre morte, du
moins de lettre non encore lisible. L'enthousiasme de la ma-
jorité de l'Assemblée qui venait d'applaudir M de Tocquc-
ville et qui, un instant après, applaudissait M. Duvergier
de Hanranne , a fait d'autant plus ressortir la froideur de
l'accueil fait à M Ledrii-Rollin par ses amis.
•lamais M. Duvergier de Hauranno n'avait été plus spiri-
tœl et plus incisif. Il était dilficiled'arracher plus vivement
le masque qui , sous le nom de droit au travail , sert à dé-
guiser le socialisme. Il a fait ressortir les fatales conséquen-
ces d'un premier pas (|ue l'on ferait dans cette voie ; il a
récusé comme auxiliaires, avec une malice qui n'a pas
échappé il M de Lamartine, les orateurs qui prennent
M. Proudhon pour bouc émissaire du socialisme , et qui ,
après lui avoir adressé quelquedureté , se croient en règle
avec la snrii'h''. Il a rérlanié pour le principe de la propriété
un dé\c)iiriiiriii |ihIi( ii'ii\ cl, sévère; il sait qu'elle a beau-
coup diiilnuiriiiv ,ijii;iiic'ii au banc de M. de Lamartine) ,
mais il .-ait ,ius>i qu un iiu respecte pas toujours ce qu'on
adore. L'Assemblée, pendant une lieure , a souri et applaudi
à ce discours, auquel il n'y avait rion à répondre.
Pourtant M. Crémieux a répondu. Son discours a été
étendu , mais accueilli , comme celui de M. Ledru-Rollin ,
avec peu de faveur, même sur la Montagne. N'oublions pas
qu'au début et à la fin de cette même séance de mardi ,
r.Asscmblée avait entendu deux opinions remarquebles,
lune de M. Gauthier de Humilly , l'autre d'un nouvel ora-
teur, homme de talent , M. Harlhc ( des Basses-Pyrénées).
La discussion a continué dans la séance de mercredi.
M. Thiers , après M. Arnaud (de l'Ariége ) , un orateur nou-
veau qui a trouvé la solution dans l'Evangile , — qui l'eût
cru '/ — • M. Thiers a traité la question en orateur éloquent ,
en homme d'Etatqui croit plus à l'expérience et à l'obser-
vation qu'il ces panacées sociales invenlées par des rêveurs
qui n'ont jamais pris la peine de descendre il la réalité et
de suivre ie jcudes élémenlssociaux. Ce qu'on est convenu
d'appeler l'événement de la séance a été le discours de
M. Tmers. C'est toujours le même esprit , net , lumineux .
pénétrant , incisif, sans rival dans l'analyse et dans la criti-
que. Sous celte parole mordante , la Montagne se révoltait
et se soulevait. Nous en sommes bien ffiché pour la Mon-
tagne ; mais il faut encore qu'ils se résignent il la supério-
rité de ceux qui ont appris ce que la Montagne a dédaigné
d'apprendre. Vous avez pu , ô citoyens, changer bien des
choses; mais vous n'avez pas pu changer la nature; vous avez
pu vous partager les ministères , comme ledis.ait na'ivement
M. Crémieux ; mais il y a quelque chose que vous nepou-
vez pas vous distribuer, parce que ce n'est pasii vous. In-
terrompez, criez, failesdu bruit, messieurs de la Montagne;
vous n'en serez pas plus, pour cela , des orateurs.
M. Thiers avait sommé les socialistes de divulguer leurs
secrets , s'ils en avaient. M. Considérant , avec beaucoup de
sang-froid et , nous en sommes convaincu , avec beaucoup
de bonne foi , a déclaré qu'il avait en sa possession le moyen
de remédier il toutes les misères humaines. "Mais il a de-
mandé il IWsseniblée quatre séances du soir pour l'initier ii
sa panacée. Nous rc;_'rrl|.Mi- i|iii'l.' nrlcuirnl n'iiit pas per-
mis d'accueillir rcllr |ini|Hi.ili(iii : h--. |ih.il,iii-lrrirns ilironl,
qu'on n'a pas \oiilii li'M-nniln', ri .pi'il nr,-l |i,isrloiinaiit
que la société suit tuujuuia nialade. lin atk-iidaiit , il y a en-
core trente-six orateurs inscrits pour parler sur le droit au
travail ; cela prendra plus do quatre séances et ne nous
guérira pas.
Pour ne pas intcrrpmpre notrccompte-rendu de la discus-
sion delaConslituiion , nous avons un peu interverti l'ordre
des délibérations de rAssemblée. Hausses séances des deux
derniers jours de la scncnnc iIcîîih'vc. dlci l.ni rclfu-he ii
son rôle de constituanic Niiniiciii . a luiun Mire de la
séance, M. le minislic des allaiics cliaiiccics est venu
annoncer que la niédiallon de la France et de l'Angleterre
élait acceptée par l'Autriche , comme elle l'avait été
déjii par la Sardaigne. Cette nouvelle a élé accueillie avec
une vivcsatislactiiin. Puisl Assemblée a repris la discussion
du (Iccict sur la limil.itiuii ik'slieures de travail , interrom-
pue dc|iiiis huit jours a la siiiledun renvoi au comiié. Par
siiile des nouvelles niodilications, il ne s'agissait plus de
I abrogation pure et simple du décret , mais do la substitu-
tion (l'un système de limitation plus large fixant un maxi-
mum do douze heures puni la ' ' '
dans les usinesetmannla. im; -
des jirincipes ; on a man hc ,i I
cerliludcs , des ruiihailirlhin~
CNlnclMcs Crlh' llN.dM.ll a d
lrav;iil a\.nl Mulnul p.airhni ,|
Immauics , lllal^cll \ irniilii..,..a
s'apercevoir que daiisuiic iiuilt
nombre infini (rin(lii>li ics un s
do ceux mûmes auxquels on a\ ait voulu venir en aide. Dans
industriel
l.ill ec.u h
.lulerram
le an iiu
iriiculle,-
un des in-
arsqiie in-
niresdo
hcr l'al.n
a durée (\n
des forces
eliH-aliiCf
Il a aggr
et |iour un
ver le son
beaucoup d'ateliers elfectivemenl , soit par suite d'usages
locaux ,soiten vertu de conventions librement stipulées, la
somme de temps exigée des ouvriers est loin d'atteindre le
maximum de durée fixé par le nouveau décret. Pour ces
nombreuses exceptions on a maintenu le statu quo. Enfin ,
après deux jours de confusion , le décret a été voté , et la
seconde séance , celle du samedi , a été complétée par le vote
du projet qui a extrait du budget de 1HI!I toutes les contri-
butions directes pour les soumettre il un vole immédiat. Le
chiil're total de ces impôts s'élève à tâO.nW.OLi francs Les
conseils généraux et les conseils d'arrondissement vont être
appelés à eu faire la répartition
A l'ouverture de la séance de lundi dernier, l'Assemblée
a repoussé une proposition de son comité de législation
tendant il investir les tribunaux , pendant la durée de l'étal
de siège , du droit de suspendre les journaux par jugement
rendu après citation il comparaître devant lejury dans les
quarante-huil heures. Un certain nombre de représentants
voyaient dans la défense publique une garantie pour la
presse , dans la citation il court délai une garantie pour la
sûreté publique, elenfin dans la régularisation d'une faculté
que ne confère pas la législation de l'état de siège , un allé-
gement pour la responsabilité du pouvoir exécutif. Celui-ci
s'est , par l'organe de M. le ministre da la justice , montré
peu désireux d'être dépossédé du droit qu'il s'est arrogé , et
l'Assemblée lui a laissé celle responsabilité qui ne semblait
pas lui paraître lourde. —Un vole de question préalable a
ensuite écarté définitivement la proposition de M. Crespel
de La Touche , qui avait été le point de départ de toute cette
discussion.
La diplomatie continue à faire des vides regrettables sur
les bancs de la Montagne et de l'extrême gauche. Il y a
deux mois , c'était M. Emmanuel Arago qui partait pour
Berlin , aujourd'hdi c'est M, Pascal Duprat qui part pour
l'Autriche, La lecture de la lettre par laquelle le nouvel am-
bassadeur demandait un congé ii la chambre , en lui an-
nonçant la mission dont il était chargé , a été suivie d'une
certaine agitation.
Pendant que les puissances médiatrices se disposent à
remplir leur mission d'humanité et do civilisation , le Pié-
mont rétablit son armée , ses équipages de guerre , ses
moyens de défense , et fournit ainsi une nouvelle force aux
arguments que l'Angleterre et la France auront il employer
pour amener l'Autriche ii une solution équitable. Mais si
l'on est autorisée espérer que le sang ne coulera plus de ce
côté de l'Italie , on a il déplorer la situation deLivourne et
de Messine.
A Livourne une insurrection nouvelle a éclaté dans des
proportions alarmantes il l'occasion de la fermeture des
clubs, ou plutôt il l'occasion des arrestations faites à Flo-
rence. Le gouvernement toscan avait fait arrêter les insti-
gateurs de" tous les troubles qui ont éclaté à Florence et il
Livourne. Le parti de ceux-ci , se voyant réduit ii l'impuis-
spuce par l'arrestation de ses chefs, a voulu tenter un der-
nier efi'ort décisif. Le 3 au matin a été engagée une fusillade
il Livourne qui a duré deux heures; les troupes ont perdu
G.T hommes, et lesinsurgésn ont eu que 8 hommes tués; ils
s'étaient embusqués dans les maisons et de lii tiraient sur
les soldats, qui étaient il découvert. Le colonel Cipriani , qui
dans toute cette affaire a déployé courage et énergie , s'est
vu forcé de se retirer avec ses soldats, au nombre de 1,200,
dans la forteresse, en abandonnant sur la place les canons
dont les chevaux avaient été tués. Le -4 au matin , 600 hom-
mes environ de la garde civique de Florence sont partis
pour Livourne ; le grand-duc les a passés en revue , et ils
se sont mis en route dans les meilleures dis,!Ositions. Mais
que pouvaient-ils faire dans cette guerre de rues , où les
meilleures troupes n'avaient pas pu tenir! Aussi les nou-
velles du 6 septembre annoncent-elles que Livourne , gou-
vernée par des autorités populaires et par un général nommé
par l'insurrection , n'était pas encore rentrée sous l'obéis-
sance du grand-duc de Toscane , qui réunissait des forces à
Pisc pour marcher contre Livourne. La garnison de cette
dernière ville avait évacué les forts, faute de vivres, et fra-
ternisait avec le peuple, par suite d'une convention Peuple
et soldais parcouraient la ville en criant Vive la Ri'publi-
que française! et en annonçant l'intention de se donner a
la France. Les chambres siègent en permanence à Florence
depuis le départ du grand-duc pour Pise. — Le colonel Ci-
priani avait trouvé moyen de se réfugier ii bord de la fré-
gate française il vapeur le Vauban , mouillée en rade.
Le roidoNaples a dirigé une expédition nouvelle contre
la Sicile ; et Messine est criblée de boulets, mais non réduite.
Malgré un bombardement acharné, l'avantage, suivant les
dernières nouvelles, serait aux Siciliens contre les Napo-
litains et les Suisses. Mais si l'Angleterre et la France, re-
présentées lii malheureusement par des forces navalesinsuf-
lisanles, n'interviennent pas en temps utile , quel que soit
le vainqueur en définitive , le ma.ssacrc sera alTreux.
Nous nous arrêtons ici pour aller ii notre mairie retirer
notre carte d'élccleur. (Hielesabonnés parisiens de Vllhis-
trution , qui ne lieiiuenl pas il ce quo MM. Caliel . liasp.id et
Kersausieailleiils'asMMiirar.\-> Méea cùledeM.M. l'ierrc
Leroux cl l'rundliun , prenneni le nicnie suin el .adupleiil une
mémeli>le. M.\l, /.'uvc; ,hi \onl c[ Arliillc riruld . anciens
députes, M hÀImmiil Ail.ui, . > vicl.uie l'eiiei al ,1e la l'ie-
fecturo delà Seine , re|ae-.enlanl han- iiu.inecMhlVeienlc.^
du parti de l'ordre , uni cle ,uIm|.Ii-. eiunnie ciiiduLil- |i.ir
un nombre considérable de garde» n.ilionaux. Nous ii irons
pas perdre notre voix sur d autres noms.
■ iifliieiiFea.
Quand un lioiiinie e>t parvenu, l'on ne sait comment ,
il >u donner une imporUmce , a exercer un ascendant dis-
proportionnés avec la médiucrile de son niérile uu de sa po-
sition connus, l'on dit iju il est in/7iii'ii( , qu il a de l'in-
fîuence. Les mois intrigant , intrigue seraient trop crus.
Comme bien des gens se résolvent par intérêt à certaines
platitudes, à la condition de garder les dehors de la dignité
el de laisser l'amour-propre en repos , ils avouent les ser-
vices dus il Vinftuence d'un personnage , mais ils recule-
raient devant I idée exprimée par le mot protection. Le
prolecteiir avait déjà remplace le bienfaiteur ; la faveur
était devenue un service maintenant on n'est même plus
l'obligé de la générosité d'aulrui ; l'on a des influences à sa
disposition.
Voiliidonc une expression commode pour tout le monde .
et fort propre ii déguiser le côté graveleux des menues in-
dustries d'antichambre.
Il est rare que les mois fassent défaut aux idées ou aux
faits: sous le dernier règne les influences gouvernaient
despotiquement toutes les branches de l'adminislralion :
faveurs, emplois, pensions, adjudications . commandes .
rémunérations , tout était il la merci des influences.
L'homme a induences est le courtier marron des faveurs
du pouvoir, assimilées à une marchandise. Une telle profes-
sion suppose trois genres de coquins , le vendeur, l'entre-
metteur et le consommateur.
Ce dernier est le plus innocent , car le plus souvent il
ignore que l'on a vendu ce qu'il n'a. pas payé.
L'abus des influences implique la corrupl.on et la ré.gu-
larise ; il a discrédité l'ancienne chambre des députés qui
a»ait fini par constituer le règne occulte des influences per-
sonnelles , par désorganiser les administrations el par pla-
cer les ministres et les représentants dans des conditions
de dépendance mutuelle.
Dès son avènement , la République a pris . contre le re-
tour des influences , des mesures insuffisantes encore , mais
qui procèdent d'une bonne intention. Il n'existe contre ce
principe dissolvant . d'autres garanties que le palrioiisme et
la moralité. Ces réformes de la conscience une fois réalisées,
l'intervention des représentantsdu pays dans la répartition
des emplois peut devenir salutaire. Us connaissent les can-
didats nés dans les départements dont ils seul les manda-
taires , et peuvent éclairer le choix des ministres exposés a
nommer des fonctionnairesqui leur sont inconnus.
L'intervention du représentant en faveur des candidats
absents, dignes d'être écoulés el liorsd'ètal de soutenir eux-
mêmes leur prétention , servirait aussi a neutraliser l'in-
fluence trop immédiate des concurrents qni résident au
centre du gouvernement , et il empêcher que l'administra-
tion provinciale ne devint l'objet de l'exclusive exploitation
des Parisiens. Centralisation injuste et qui ferait affluer
dans la capitale tous les intrigants, tous les solliciteurs de
la République française.
Pour que l'Etat soit éipiitablenient administre , il faut
que les absents n'aient jamais lorl , et que tous les droits
étant représentés, il n'y ait pas d'absente parmi les citoyens
dispersés sur le territoire de la patrie.
L'important estde commencer paranéantir l'influence des
influences, et par rogner les grifîesà l'inlérèt individuel. La
suppression du cens électoral, l'accroissement du nombre
des députés étaient les hases indispensables de cette ré-
forme ; il ne reste à effacer que de vieilles habitudes, et l'on
doit y parvenir maintenant que le sort d'un ministère ne '
saurait plusdépendrede laconcession d'un bureaude tabac.
Pau|iërisnie.
Le paupérisme, c'est l'étatde la classe indigente considéré
théoriquement, dans son ensemble Difficile a définir, ce
terme , jeune encore , a subi une foule d'inlcrprélations , au
milieu desquelles le sens véritable reste indécis. Poursurve-
nir avec opportunité, un motdoit être indispensable : quand
on dit : Le paupérisme est une des plaies d'un pays , il est
aisé de reconnaître qu'on aurait usé tout aussi bien dessub-
stanlifs misère , pauvreté. Ici , p:upérisme signifie donc la
pauvreté collective et désigne la classe des nécessiteux.
Néanmoins, bien que le mot paupérisme semble compor-
ter un sens plus général , toutefois , la nuance n'est pas
nettement tranchée . et . tout en essayant de définir, nous
nous sentons heurté il l'écueil des définitions.
Il paraît assez naturel que des économisl^'s plus ou moins
difl'us , plus ou moins creux dans la profondeur de leurs
systèmes , se soient dans la crainte de présenter leurs
doctrines sous le titre de pauvreté , propre a fournir, dans
une équivoque , un résumé critique assez brutal , se soienl ,
dis-je , avisés de forger le mot paupérisme , pour dénom
mer la théorie de la pauvrelo.
Quoi qu'il en soit , nous n'aurons pas il nous inquiéter
du paupérisme de ces melapliysiciens ; l'ulililc pratique de
leurs doctrines est siiflisaïunienl justifiée; le paupérisme fail
très bien vivre ceux (pii en parient.
Lorsque je considèro la nature et la portée de la plupsirt
de ces travaux dont le but officiel csl l'extinction de l'indi-
gence , il me souvient de mon ami le louvolier, qui proté-
geait les louves, afin de conserver la philanthropique in-
stitution de la louveterie.
En effet , les louveliers de la faim sont bien moins occu-
pés dus inslitutions propres il prévenir le paupérisme , que
(le> p.iuMcs tout faits, tout préparés à être alignés dans
les iuHiiiis.sinls calculs de la jitalistique. Ce sont ceux-ci
qu ils distribuent sur le vaste échiquier de leur imagina-
tion; leur efi'ort .se borne il lesempêcher de mourir d'épui-
sement sous la main de l'opérateur; leurs doctrines se
réduisent a diverses façons d organiser la répartition quo-
tidienne de l'aumône. Le problème serait-il donc do conser-
ver dos sujets pour sauver la luuvelerie?
Il n'esl aucun de ces messieurs qui n'ait cenl fois im-
prime celle proposition : — Le paupérisme est la plaie de
l'Anglelerre.
Quand la misère est le partage de pre^^que tout ce qui
consliluc le corps social , quand quelques individus privilé-
giés absorbent liiiile la ,seve de l'Elal . la plaie , si je ne me
trompe , c'e.-t l'oxuloire cpii ronge el non le corps débilité de
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
85
la nation. Du toute évidence, il faut chercher la plaie de
l'Angleterre dans la cause du paupérisme , non dans le
paupérisme même. La maladie de la Grande-Bretagne, c'est
une aristocratie dévorante qui monopolise la propriété et
absorbe le capital.
Le paupérisme n'est la plaie d'aucun Etat; mais l'orga-
nisation de toules les sociétés contient certains vices qui en-
gendrent la misère.
L'extinction complète de la pauvreté nécessiterait des
institutions d'une perfection absolue : il n'est pas donné à
l'homme d'en établir de semblables .Le seul but que des lé-
gislateurs puissent se proposer raisonnablement, c'est de
satisfaire aux intérêts du plus grand nombre, et d'opérer
une diminution progressive sur le chitl're des nécessiteux.
La principale source du paupérisme en France, c'est l'a-
bus de l'industrie, développée outre mesure aux dépens des
travaux agricoles La terre nourrit toujours ceux qui la tra-
vaillent; elle est un fonds qui reste entre leurs mains: l'in-
dustrie, exploitée au profit du capital, est sujetie à des
revirements de diverse nature qui laissent, du jour au len-
demain, des légions d'ouvriers sans pain.
Durant ces sortes de crises , le maître est assez riche pour
attendre ; la vie du manœuvre n'est nullement garantie.
Dans certaines manulactures établies en rase campagne ,
lelles que, par exemple, les usines d'exploitation de la
fonte de fer , l'ouvrier est logé : au pied de sa chaumière ,
il cultive un petit jardin qui l'aide à vivre : de sorte que ,
si le prix des fers vient à baisser au point de commander la
réduction des salaires ou la fériation de la forge, l'artisan
conserve un asile, avec la moitié de sa nourriture : avan-
tages qui l'ont auparavant mis à même d'économiser assez
d'argent pour se procurer l'autre moitié.
Telles sont les bonnes et saines industries , celles qui, ti-
rant de la nature même du sol leur chance de bénéfice,
permettent à leurs exploitants de concédera l'ouvrier un
modeste usufruit
De pareils avantages sont refusés à la fausse industrie,
qui spécule sur la concurrence, qui économise forcément
sur tout le matériel des dépenses, qui entasse dans les villes
une population famélique, et affame trois cents hommes
pour gorger d'or un spéculateur sans entrailles.
Toute industrie qui coûte à l'État sa sécurité, aux arti-
sans le bien-être, la moralité, la santé et le bojiheur revient
à un trop haut prix à la société.
Le système de la libre concurrence a créé beaucoup d'in-
digents. Quand une compagnie fait travailler , avec l'inten-
tion de livrer a perte, dans le but honnête de ruiner ses
rivaux , elle a bien soin de payer le moins possible, afin de
ménager ses ressources. Les employés de cette compagnie
pâtissent , ceux des entreprises rivales subissent la baisse
d'abord , puis la ruine. Enfin , quand le diflérend est vidé,
il est rare que l'objet de l'exploitation remonte à son pre-
mier taux.
Lors(|u une industrie utile de sa nature fait augmenter le
paupérisme, c'est un signe infaillible qu'elle est placée sur
un terrain qui no lui convient pas, et qu'il la faut remettre
dans des conditions normales de gestion ou de localité.
Cet écueil est celui de la plupart des fortes exploitations
industrielles situées dans les grands centres de populations.
Autant que faire se peut, les manufactures devraient être
établies aux lieux mêmes d'où elles tirent la matière pre-
mière que leurs travaux mettent en œuvre. Les villes , en
général , ne produisent rien , hormis des consommateurs.
Ce ne sont point les salles d'asile, ni les dépôts de men-
dicité, ni les sociétés philanthropiques qui réussiront à ré-
duire le paupérisme : le nourrir, ce n'est pas le diminuer ;
bien au contraire, ce genre de palliatif enfante de nouveaux
indigents. Que dans une année de disette la charité publi-
que se saigne à blanc pour faire vivre ceux qui n'ont rien,
un parti pris général d'économie servira forcément ensuite
à compenser ces impôts volontaires; chacun réduira ses dé-
penses et bornera son luxe : le commerce perdant ses cha-
lands, n'écoulant plus les produits de l'industrie, suspendra
les commandes; et les ateliers , contraints de diminuer le
nombre de leurs ouvriers, en mettront h moitié dans la rue.
Depuis cinquante ans, le paupérisme a diminué de pro-
portion dans les campagnes et même dans les villes. C'est
dans les contrés manufacturières qu'il est le plus abondam-
ment répandu. L'une des villes où l'on manie le plus d'or
et de richesse, Lyon, est la cité qui contient le plus de mal-
heureux. Paris voit la misère s'accroître avec l'industria-
lisme; sa famélique et remuante population faubourienne,
accrue par la stupide imprévoyance du gouvernement de
juillet , tient le crédit public en échec et rend la France in-
gouvernable.
La question du paupérisme est liée à la répartition, à la
distribution proportionnelle et intelligente des diverses in-
dustries à travers le territoire français. Tout reste a faire à
cet égard.
Les principaux moyens d'atteindre le paupérisme, sont :
l'éducation morale; car parmi les indigents, il en est qui re-
fusent de travailler ou qui gaspillent lesfruits du travail ; la
répression des excès du système de libre concurrence qui
organise contre les consommateurs la sophistication et la
fraude, contre la classe des producteurs , la banqueroute et
la ruine, et contre l'ouvrier , l'indigence.
On diminuera en outre le nombre des pauvres parla suf-
fisante élévation, par la fixité des salaires; et en rendant
plus stable la posilion de l'ouvrier que les industries em-
ploient au jour le jour. Mais ce genre de réforme est inap-
plicable sous le régime de la concurrence acharnée.
Les coalitions de capitaux , ou plutôt de riches capita-
listes , dans le but de monopoliser les exploitations, ce que
Fourier nomme la féodalité industrielle , sont encore une
cause de paupérisme. 11 est évident que si quatre hommes
mettent en commun deux millions dans l'espoir d'en gagner
dix, ils n'y réussiront qu'à la condition de dévorer l'exi-
stence de soixante personnes. Savoir se borner à une hon-
nête aisance est une vertu morale dont l'éducation doit en-
seigner la pratique.
Ne serail-il pas convenable aussi de rendre les apprentis-
sages gratuits? leur prix souvent onéreux en éloigne nom-
bre de pauvre diables qui demeurent sans ressources faute
de savoir un état ; ce sont les ouvriers inhabiles qui recru-
tent le paupérisme.
Pour ce qui e^t des gens infirmes , incapables de gagner
leur vie, des asiles leur seront ouverts; ils ne coûteraient
pas à l'Etat la moitié de ce que l'on dépense pour entrete-
nir les indigents propres au travail
Une simple observation prouve que la société possède les
moyens de diminuer le paupérisme : on a remarqué que
plus une localité est riche, plus elle contient de néces-
siteux.
Parnn les causes directes du paupérisme, signalons l'ac-
croissement rapidede la population : les colonisations agri-
coles offrent un moyen d'utiliser ces forces surabondantes,
et de maintenir l'équilibre entre les ressources du terri-
toire et le nombre de ses habitants.
L'épuisementdu crédit public est l'un dos agents les plus
funestes du paupérisme : aussi, sous les gouvernements fai-
bles et romnattus, cet élément dissolvant se renforce-t-il
d'une cohue d'indigents volontaires . plus alléchés de pil-
lage et d'anarchie, que de travail. La pression qu'ils exer-
cent sur la société exagère encore et prolonge le discrédit,
cause universelle de misère et de famine. Il arrive alors que
le paupérisme est l'œuvre des indigents, qui pratiquent,
sur une grande échelle, un genre de vol dont ils ne profite-
ront pas. Il paraît alors impossible de sortir de ce cercle
vicieux autour duquel les utopistes, les louvetiers du pau-
périsme se mettent à faire le manège, à califourchon sur la
phrase, avec beaucoup d'agrément.
Dans de telles conjonctures, qu'un gouvernement montre
de l'unité, de la force et qu'il soit bien appuyé, ce phéno-
mène antisocial disparait soudain ; le crédit comprimé cir-
cule tout à coup avec une activité brûlante , et entraîne
après lui, pour un temps, les misères de ce paupérisme qui
semblait pénétrer par d'inextricables raeinesjusqu'aux en-
ti-aillesde la société.
FoANcrs Wey.
C!ourrier de Paris.
Ne croyons plus aux augures, surtout lorsqu'ils voient
tout en noir. S'il vous souvient des prédictions de notre
printemps, il était bien loin d'annoncer l'été dont nous
jouissons. Dans les clubs, dans les salons , et même dans
ies Courriers de Paris, il se disait que l'été ne serait pas la
belle saison, et qu'il faudrait fuir Paris comme la ville d'ex-
piation. Paris ne devait pas sortir du cercle fatal tracé par
l'émeute, la famine et le choléra. Enfants d'une race mau-
dite. Parias de la civilisation, riches de la veille et pauvres
du lendemain, nous étions tous dévoués aux jjlus horribles
fléaux, et même l'horoscope était si lamentable que c'est à
peine s'il nous laissait notre tête sur nos épaules et nos deux
yeux pour pleurer tant de malheurs. Les alarmistes avaient
beau jeu , et pourtant ils auront perdu la partie ; jamais
belle saison ne fut si bien nommée et ne varia davantage
.sesdistractions. Pour ne parler que de la présente semaine,
la carte de ses aventures est passablement longue, elle a
même ajouté plusieurs hors-d'œuvre à son menu ; c'est un
peu l'été qui empiète sur les domaines de l'hiver, car enfin
voici des bals , ou tout au moins des réunions nocturnes
avec accompagnement de violons , de tables de whist et de
causeries politiques.
Dans tous les temps et sous tous les régimes, Parisa voulu
des fêtes, il en a voulu naturellement aux jours d'abon-
dance, et aux époques de crise pour en atténuer la rigueur.
Ses édiles l'ont compris et ils se sont engagés à verser ainsi
leur épargne dans la bourse du pauvre. Les riches et les
heureux de ce monde se préparent à les imiter C'est pour-
quoi nous avons un commencement d'hiver avant les ven-
danges. A quoi servent les fêtes, disaitMalthus, qui, parla
même occasion , demandait ; A quoi bon la population'
Mais cela sert, ô grand philosophe, à nourrir cette popula-
tion. D'ailleurs nous savons tousass^z d'histoire pour avoir
appris que les choses se sont passées ainsi dans les empires
et les républiques , à leurs moments précisément les plus
agités. Les anciens républicains de Rome avaient le cirque,
cette fête de la grasse matinée romaine , et le bain , cette
fête de toutes les nuits; les Arabes ont la liberlé du désert ,
cette fête de tous les instant; laissez donc au parisien la
fête des grandes foules, des réunions à grand orchestre, des
toilettes brillantes qui alimentent la circulation etviviiient
le commerce. Voilà pourquoi on s'est réuni cette semaine
chez le présidentde la Chambre, en attendant la soirée du
chef du pouvoir, et les démonstrations dansantes des au-
tres autorités. Rien de plus contagieux que l'exemple, et
la finance va se mettre de la partie. On parle d'un bal pro-
chain , avec intermède de loterie bienfaisante, dans la de-
meure du roi des banquiers, et Salomon va rouvrir son
temple.
Quant au temple ou hôtel de la Présidence, quelque vastes
que soient ses salons, construits dans des proportions mo-
narchiques, nousavonséprouvé qu'ils ne pouvaient contenir
tous les fidèles. « On trouve cette demeure trop petite di-
sait un assistant , mais plaise à Dieu qu'elle soit pleine des
vrais amis de la République. • Vainement des mécontents
ont-ils prétendu que les salons de la Présidence , alors que
sonne l'heure brillante des réceptions , ne sont pas autre
chose que la salle des Conférences illuminée aux bougies, et
qu'on y retrouve les politiques de couloir sous une autre
enveloppe. Qui donc s avisera jamais, au contraire, de re-
connaîlro les tribuns du iriatin au visage et aux principes au-
stères dans ces représentants d'unegalanterio si sémillante.
comme si nos papillons législatifs pouvaient d'ailleurs con-
tinuer les altercations de la tribune sous le feu croisé des
dramants, des beaux yeux et des cavatines? Cependant
nous devons dénoncer l'entêtement de trois de ces Lycur-
gues, MM. A, B, C. Insensibles au char-me de cotte hospita-
lité conciliatrice , ils discutaient à outrance le préambule
de la constitution. Enire autres objections mémorables :
« Pourquoi, proclamer disait l'un , ipre la Con.stitution est
faite en présence de Dieu , c'est une formule digne de La
Palisse. — Je proposerais, ajoutait un autre , de dire : avec
l'aide de Dieu — Dites plutôt, cria le troisième, qu'elle est
faite à la grûce de Dieu. »
Puisque rrous en sommes toujours au grand chapitre des
fêtes, dimanche a vu une réunion encore plus fréquentée
et à tel point que la solitude s'est faite tout à coup dans
la ville. La population émigrait à Saint-Cloud ; on s'est
réuni sur la route du bois de Boulogne, où l'on marchait
par caravanes, et aux embarcadères des chemins de fer,
qui secondent volontier's tous ces transports. Ou s'est réuni
enfin dans ces parcs jadis réservés et dans ce château ci-
devant royal, théâtre de tantd'évènementsctdont nos Pari-
siens ne connaissaient guère que la façade. En même temps,
M. Green exécutait sa trentième ascension en ballon ; l'in-
trépide aéronaute avait annoncé un voyage de long cours,
il allait visiter les astres ou tout au moins la Belgique; tou-
tes les lunettes étaient braquées, les yeux s'écarquillaient.
les esprits étaient en suspens; parlez-moi des aéronautes
pour mettre une foule en l'air, et puis au bout de sa course
aérienne, qu'aucun soulfie ennemi n'a troublée, M. Green
esir descendu à la barrière de Clichy. Ce n'est pas précisé-
iiient aller aux nues, el l'on a trouvé généralement que
c'était prendre un bien long chemin pour ne pas sortir de
l'enceinte continue.
Mais voici bien un autre ballon dégonilé , la planète Le-
verrier n'existe plus. C'est encore une étoile qui file, et un
astronome qui se laisse choir dans son puils. L imagination
n'égare pas seulement les poètes, darrs l'occasion elle joue
de bien mauvais tours aux savants. Ce fameux Neptune,
rival de Jupiter et de Vénus , que les calculs de l'algé-^
briste avaient arraché aux profondeurs du ciel, et qrr'un
télescope ami avait entrevu dans les espaces invisibles, le
voilà réduit à l'état de chimère et d'illusion. La roche
Tarpéienne était bien près du Opitole, et l'Observatoire
est un Olympe d'où les Titans de l'astronomie tombent
foudroyés. Quoi! tant de travaux et d'efforts, une armée
(le chiffres si formidable , tant de colonnes déployées pour
escalader le ciel, Pélion entassé sur Ossa, peine inutile,
autant en emporte le vent. L'architecte des rriondes. a dit
Horace, couvre ses secrets d'une profonde nuit , et voila
M. Leverrier sorti d'un beau rêve, il était parti pour les
astres comme M. Green, et il ne descend même pas à la
barrière de Clichy. C'est à dégoûter des voyages et des dé-
couvertes. Ceux qui ne voient pas facilement les étoiles en
plein midi, avaient fait (on s'en souvient) toutes sortesd'ob-
jections : Prenez garde, monsieur le calculateur, la science
parfois n'y voit goutte, et la base des mathématiques n'est
pas plus solide qu'une autre. — Ouais! vous niez donc Ga-
lilée et pr-étendez faire le pi-ocès à Newton , — passe pour
une étoile filante, mais un monde, allons, soyez raison-
nable on vous accorde une demi-lune; — et le savant de
répliquer comme Jodelet : C'est parbleu bien une lune tout
entièr'e!
Si l'Observatoire se dépeuple, la Ménagerie s'enrichit.
Voici une vignette qui vous l'atteste : elle vous représente
le chimpanzé ou jocko récemmentarrivéau Jardin-des-Plan-
tes. Cejocko s'appelle Jack en souvenir de Jacqueline, qu'il
remplace dans la mémoire des professeurs du Muséum et
dans leur collection. Jack est un enfant du Sénégal, son
âge, dix mois; sa taille, dix-huit pouces; il est visible dans
la rotonde de l'éléphant, un gardien spécial veille sur lui.
On le traite en grand per-sonnage, on le comble d'égards,
on l'environne de soins et on le nourrit de friandises. Ce
n'est pas que Jack appartienne à une grande race et qu'il
corrrpte des a'reux authentiques, contemporains de la Croi-
sade ou tués à la bataille de Nicopolis , Jack recueille tout
simplement les bénéfices de son humeur fâcheuse. Jack goûte
peu nosdogmessaci-amentrds : égalité, fraternité, tranchons
le mot, c'est un mauvais coucheur. On l'avait établi au pa-
lais des singes, et ceux-ci fêtaient sa venue par nrille gam-
bades, mais Jack ne répondit à ces démonstrations aflèc-
tueuses que par des grincements de dents et des regards
effarés. L'isolement lui a profité, et sa fureur n'est plus
maintenant que de la mélancolie. Il marque d'ailleurs quel-
que sympathie pour notre espèce, et il a pr-is son gardien
en véritable affection. A voir cette sombre tristesse, on
avait craint d'abord pour les jours de Jack, et que la
Ménagerie no fût affligée d'un suicide , les rêveurs de son
espèce étant fort enclins à se laisser mourir d'inanition ;
heureusement l'appétit de Jack a rassuré tout le monde, il
mange, il dévore même les aliments qui forrt les délices de
notre espèce , et si l'on pouvait dire d un singe qu'il est sur
sa bouche, nous le dirions volontiers. Jack n'aime pas seu-
lement les bonnes choses et les mets succulents, il est co-
quet et soigné dans sa personne ; des mains pudiques l'ont
affublé d'mie culotte rie matelot rayée de rose et de blanc
dont il paraît humilié II est évident qu'il rêve une autre
défroque. Cependant on lui a fait un bournous pour les
grandes occasions, attention délicate qui lui rappelle l'Afri-
que; mais le principal ornement de Jack, ce sont les ba-
gues qu'il a rapportées du pays natal, il ne s'en dessaisit
qu'avec répugnance, et il en est une qu'il ne lâche qu'à la
dernière extrémité. — C'est son anneau de fiançailles . nous
disait son gardien , et certainement il aura été marié dans
son pays. Buffon a fait de l'orang-outang ou jocko un por-
trait flatteur auquel nous vous renvoyons, vous y lirez cou-
ramment l'avenir de Jack et les talents qu'il ne saurait
manquer d'avoir lorsque son éducation sera terminée. Tout
ce que nous jiouvonsdire aujourd'hui de ce jeune singe.
oG
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
c'est qu'il donne les plus brillanles
espérances.
Un monde s'évapore enfumée, un
singe arrive, une élection académi-
que se prépare , ces grandes nou-
velles ne surprennent plus personne.
On dit MM. les académiciens fort
soucieux dans le temps de crise où
nous vivons, non pas sur l'article
(le leur immortalité , il n'y a pas
lieu de s'inquiéter de si peu de
chose; ce qui cause le souci de nos
trente-neuf, c'est la nécessité dose
compléter Quelques-uns ont ouvert
l'avis de remplacer leur Turenne
f)ar quatre marécliaux littéraires,
esquels ne .seraient admis réelle-
ment qu'au fur et mesure des ex-
tinctions; mais ce coup do canif
porté au règlement n'a pas eu l'as-
sentiment de la majorité : c'était
sans doute se ménager des allian-
ces et des protections individuelles
parmi les puissants du jour], mais
l'influence de l'Académie comme
corps s'en filt ressentie dans l'ave-
nir, M. de Chateaubriand n'aura
donc qu'un successeur , c'est bien
assez hardi comme cola
Mademoiselle Racliel est rentrée
au Théâtre-Français; et après l'o-
vation anticipée que nous lui décer-
nâmes samedi dans ces colonnes,
vous vous attendez ii de nouvelles
fanfares Cependant il ne faut dé-
guiser la vérité il personne, pas
même aux reines tragiques, et notre
complaisance de chroniqueur béné-
vole ne saurait aller jusqu'à applau-
dir la grande tragédienne alors que
ses forces la trahissent et que son
génie l'abandonne. Phèdre s est vue
couronnée, glorifiée , encensée, et
c'était justice si les admirateurs en-
tendaienlacquitter une vieille dette
et glorifier ce talent consommédont
l'avenir nous promet encore de si
rares jouissances. La vérité que nous
annoncions tout à l'heure, c'estqu'on
a applaudi Phèdre bien plus qu'on
ne l'a écoutée , et tout le monde
y a gagné ; la mourante Phèdre
ne fut jamais si mourante en effet;
le cri , le mot, l'intona-
tion , tout venait expirer
sur ses lèvres; son re-
gard semblait appesanti ,
la poitrine était halelante;
on ne reconnaissait la
déesse qu'il cette attitude
d'une suprême élégance ,
et à cet art inné et exquis
de la démarche et du
geste qui ne l'abandonne
jamais.
Comme nouveautés do
la semaine , viennent en-
suite l'Ambigu et Napo-
léon, la Taverne du Dia-
ble et la Gaitè. Cette ta-
verne est un bouge infer-
nal où s'accomplissent
toutes sortes d'événe-
ments diaboliques. Ri-
chard Murphy s'y grise
et s'y ruine. Pourtant lii-
Chard avait fait un ser-
ment, vrai serment d'i-
vrogne, celui de renon-
cer au vin et au jeu. Ces
deux péchés capitaux , Ri-
chard les rachète , aux
yeux des âmes sensibles,
par l'amour qu'il éprouve
pour Emma Walter , la
perle do Nevv-'Vork.
Emma n'est pas ingrate ,
mais Richard a un rival,
comme tous les amanis
trop heureux. Le mélo-
drame nous donne ce lord
Claypolo pour un scélérat
licllè , et ce n'est pas lii
précisément la plus gran-
de surprise de la pièce.
Son originalité consiste
dans les recottes em-
]il(iyérs par le crime pour
s.Ml,.|urras.^,M'il,. I;, vcrUi.
'l'aritut Cl;i\pnli. vend un
cheval l'uuiliu a liicliaril,
alin que l'étourdi se cassé
le cou sans rémission
tantôt il lui gagne son
argent au biribi , pdur
l'amener à so brûler la
cervelle; mais ces dif-
férents inovens d'pxler-
Jeune singe Chimpanzé mile envoyé i la Ménagerie nationale par M. Duchateau, gouverneur du Sénégal.
Thé
lire des Variétés. —Cmxdiie, V lableau. — Candide, M. Ch.Pérej; jeunes filles do l'Eldorado, mesdemoiselles .Mine,
Clémence, llorteuse, Foiic]ucl, Cénau.
mination n'atteignent pas leur but;
Claypole finit par poignarder son
rival, et il enlevé la belle fiancée,
en mettant le feu à la taverne du
Diable; bref, nous assistons à cette
éternelle bévue de la justice qui
s'appréle à frapper un innocent à
la place du vrai coupable, lorsque
les morts ressuscitent pour démas-
quer le fourbe et l'assassin. Le dé-
noùment est providentiel cl le suc-
cès a été diabolique.
Quant à lautre mélodrame, le
Divorce de A'apo/rôn, il est d'une
espèce assez bizarre. On y voit Na-
poléon divorçant avec Joséphine...
en vers. C'est une paraphrase lon-
guement rimce de celle résolution
impériale dont un beau jour Bru-
net Cadet-Roussel exprima le véri-
table motif devant le conquérant ,
en ces termes : « Il est douloureux
pour un homme tel que moi de
n'avoir personne à qui transmettre
l'héritage de ma gloire ; décidé-
ment , je vais divorcer avec ma-
dame Cadet-Roussel pour épouser
une femme dont j'aurai des en-
fants. »
Certes , montrez-nous encore et
toujours le grand homme, bien que
nous leconnaissionsde longue date :
montrez-le dans sa gloire, dans sa
grandeur , dans ses actions héroï-
ques; mais n'allez pas jouer avec
cette ombre illustre. 11 remplit le
trône, il est vainqueur, il com-
mande , il pacifie , ou bien encore 11
entraîne .ses soldats par loute lEu-
rope , c est alors qu'il fait bon de le
voir, de le suivre, d'applaudir à sa
gloire et à votre drame; de même
s'il est vaincu, exilé, persécuté par
la fortune et par ses ennemis, car
le tableau n'en sera que plus pa-
thétique et plus intéresant; mais
Napoléon irrésolu, troublé, impé-
rieux ou suppliant vis-à-vis d'une
femme. Napoléon qui tremble, qui
s'emporte et qui se débat dans une
altercation domestique, c'est une
pitié, un triste spectacle et des plus
lamentables.
Dans les environs de
ces deux théâtres, qui à
l'envi ont broyé du noir
tout le long de la belle
saison , il est une scèno
joyeuse qui a compté et
compte encore d'excel-
lents comédiens. Ces heu-
reuses soirées qu'ani-
maient jadis les Goyas
de la parade et les Bam-
boches du vaudeville .
Odry , Rébard , Bernard-
Léon , un autre comédien
vous les rend. Les Fo-
lies-Dramaliques prospé-
raient sans Lepeintre ,
mais il a mis le comble
à leur fortune en y por-
tant son répertoire des
yariêlés. Il faut enten-
dre , il faut voir comme
ce vieillard . toujours
vert et d'une verve comi-
que infatigable , sait tirer
parti do ces amusantes
malices de lespnt et du
vaudeville d'autrefois.
Au bout de cette men-
tion, nous retrouvons na-
turellement les Variétés.
A propos de Candide et
de son arrivée dans le
pays d'Eldorado : « 'V'ingl
belles filles, dit le roman,
vingt belles filles reçurent
Candide à la descente du
carrosse et le vôlirenl
d'un tissu de duvol de
colibri ; après quoi les
grandes offirièrfs de la
couronne le menèrent à
l'appartomont du prince
entre deux lilos , chacune
de mille musiciens, selon
l'usage ordinaire. • Mille
musiciens , pas un i de
moins , ainsi s'exprime la
roman . mais notre vi-
gnette qui copie fidèle-
ment la pièce devait se
montrer plus réservée .
aussi bien ce serait trop
de nuisique pour un sim-
ple vaudeville.
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
37
li'avenir des Cheniiiis île fer. — SYSTÈME ATMOSPHÉRIQUE de m. iiédiard.
Chemin de fer atmosphérique. — Système Hédiard.
La plus grande révolution opérée dans notre siècle révo-
lutionnaire n'a pas encore dit son dernier mot. Il en est
ainsi de tout ce qui vient dans ce monde ouvrir un nouveau
champ à l'activité de l'industrie humaine. 11 était naturel de
chercher dans l'analogie le premier mode d'emploi de la
machine à vapeur appliquée aux chemins de fer. La ma-
chine ordinaire, la voiture connue et les ornières de la roule
fournirent le modèle développé et combiné pour la nouvelle
application avec un art ingénieux; une fois le procédé in-
venté , on alla au plus pressé et tous les élablissements de
cheminsde fer furent réalisés selon l'échantillon. 'Voici main-
tenant le progrès : la puissance atmosphérique substituée à
la puissance de la vapeur.
L'expérience n'est pas nouvelle; mais l'expérience per-
fectionnée par le système dont nous allons rendre compte
attend encore une application
La traction sur les chemins de fer par la puissance at-
mosphérique a été appliquée depuis quelques années en An-
gleterre et en France.
En Angleterre, 1 ingénieur Brunel a construit un chemin
atmosphérique sur le 5o«/A-I>eron, d'une longueur de iO ki-
lomètres environ , et en France un parcours de 2,200 mè-
tres est établi sur le chemin de Saint-
Germain, d'après le système anglais
de Klegg et Samuda.
L'exploitation se fait régulièrement
sur ces deux chemins; on a reconnu
que ce nouveau mode présentait des
avantages incontestables de célérité
et de sécurité , mais que, d'un autre
colé , il en coûtait, pour l'établir, plus n
cher que pour le système ordinaire ; /YlT
qu'il fallait des machines fixes très
puissantes et une consommation de
charbon au moins égale à celle des
locomotives, pour vaincre les ren-
trées d'air considérables qui se font
par la soupape longitudinale.
Toutes les imaginations se sont
donc tournées , avec raison , vers la
soupape longitudinale , comme étant
la base du système. Beaucoup de pro-
jets se sont succédé; celui dont M. Hé-
diard est l'inventeur a parfaitement
réussi.
Son système a été expérimenté sur
un chemin d'essai de 1 800 mètres de
parcours à la gare Saint-Ouen ; il a
été pendant trois ans l'objet d'études
approfondies et d'expériences nom-
breuses de la part de diverses com-
missions scientifiques, qui toutes lui
ont donné leur approbation , et en
dernier lieu de la part de la com-
mission technique des chemins de
fer, dont le rapport au ministre ex-
prime , avec des éloges très honora-
bles pour l'inventeur, le désir d'une
application en grand.
il ne reste donc plus qu'à en faire
l'application sur une échelle assez
étendue pour résoudre les questions
pratiques relatives à l'installation des gares et à la distance
des relais des machines.
On s'abuserait en admettant que l'essai fait à Saint-Ger-
main peut donner des lumières sur ces divers points : car le
svstème anglais réalisé à Saint-Germain estd'une telle im-
perfection que l'on n'en peut rien conclure contre celui de
M Hédiard. Qu'il suffise de dire, par exemple, qu'à Saint-
Germain la soupape longitudinale, organe fondamental de
toute propulsion atmosphérique, est tellement vicieuse que,
sans parler de l'entretien coiitcux qu'elle exige, elle donne
dos rentrées d'air trente /'ois plus considérables que le sys-
tème de M. Hédiard.
Après la question de la soupape longitudinale, il a fallu
s'occuper de la question d'économie. Les adversaires du sys-
tèniealmosphérique faisaient des objections tiréesdes appli-
cations déjà faites, et les présentaient comme insurmontables.
C'étaient : 1° la dépense première de l'établissement d'un
chemin ;
2" Des machines fixes de 200 chevaux au moins par six
kilomètres , force nécessaire pour extraire, avec assez de
promptitude, l'air du tube propulseur, de manière à ne pas
ralentir la marche du piston:
Système Hédiard. — Coupe Ir;
aie du tube propulsi
Système Hédiard. — Plan du piston.
3° L'inconvénient de n'employer la force de ces ma-
chines que pendant cinq minutes par heure , au moment
seulement des convois, ce qui occasionnait une consomma-
tion considérable de charbon en pure perte, puisque les
machines doivent rester toujours allumées.
Ces objections étaient plausibles, et le système anglais de
MM. Klegg et Samuda n'y répondait rien ; il fallait donc tra-
vailler à résoudre ces difficultés, et voici les idées de M. Hé-
diard sur le nouveau mode d'exploitation :
Pour arriver à un bon résultat dans l'exploitation d'un
chemin de fer atmosphérique, il a pensé qu'il fallaitprcmié-
rement diviser les convois.
En prenant pour point de comparaison les chemins de
Versailles et de Saint-Germain , dont les trains partent
toutes les heures, on pourra établir des calculs exacts, car
il est bien évident qu'il n'existe pas en France d'autres loca-
lités plus parcourues.
Chaque convoi, sur l'un et sur l'autre de ces chemins, se
compose, en temps ordinaire, de ti à 8 voitures au plus par
heure.
Par le système atmosphérique, en faisant des convois de
2 voitures tous les quartsd'heure. on transportera également
huit voitures par heure , avec l'avan-
tage de ne pas faire attendre les voya-
geurs.
Dès lors , au lieu d'établir le che-
min avec des tubes propulseurs de
W) centimètres de diamètre , pesant
200 kilogrammes le mètre , il ne fau-
dra plus que des tubes d'une capa-
_^ ' cité quatre fois moins grande , c'est-
jRTTx à-dire de 20 centimètres de diamètre,
^^ V^ et ne pesant plus que bO kilogrammes,
I attendu que le poids des tubes dimi-
nue dans la proportion de la décrois-
sance de la capacité.
(Ir donc , si le tube de iO centi-
mètres donne une force assez grande
pour faire marcher un convoi de huit
voitures avec une vitesse de 80 ki-
lomètres à l'heure, un tube de 20 cen-
timètres fera marcher deux voilures
avec la même rapidité, ou bien quatre
voitures avec une vitesse moitié moins
grande; c'est-à-dire que , s'il se pré-
sentait au départ un grand nombre
de voyageurs, on composerait immé-
diatement le train avec quatre voi-
tures au heu de deux ; mais alors la
vitesse . au lieu d'être de 80 kilomè-
tres a l'heure , ne serait plus que de
.40 kilomètres.
En réduisant le tube propulseur à
20 centimètres de diamètre, et en éta-
blissant les départs de chaque con-
voi de quart d'heure en quart d'heure,
M. Hédiard n'entend pas adopter ces
proportions d'une manière invariable.
La grandeur des tubes pourra être,
au contraire , augmentée sur des
lignes qui auraient besoin d'employer
une force plus grande , de même que
N- 200.
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
les convois, si on 1p jh^p nri-r'^R.niir, pniirrniil iMro di-tancm
<lilTéromment, :\1 llrili,,r.l ,i \(iuIh -niliincnl |iM.ii\('r .iml
pouvail diviser Ic^ li.nn^ ;i I inlim , ri imili iplin' l('~ i|i-|.;ii U
s.-ins augmenter les 11 ji= du cuuiIjuïLiIjIi:. Sun iiul enfin ;i
été d'établir un cuntriisle frappant avee le système actuel,
dont l'intérêt est de ne faire que de grands convois partant
à de très lons;S intervalles, et remorqués par do lourdes
et puissantes locomotives, source par conséquent de graves
accidents,
La proportion de 20 centimètres de diamètre adoptée
pour les tubes , dans la démonstration que nous venons do
faire , présente un avantage important dans l'exploitation
d'un chemin.
On avait jusqu'il ce moment présenté le scrvire ilrs gMres
comme une diiliculté . a raison des crni^rnimu ilrsoie.
parce que le piston placésousie wagon du ciinii iu|iciuvait
pas passer par-dessus les rails, et parce (ju \\ lallait em-
ployer des moyens lents et pénibles pour faire les ddfé-
rentes manœuvres.
Il y a -iS centimètres de rails à l'essieu di's voilures ; or
donc, en plaçant des tubes de 20 cenlimrhv, , Mi|i|iiiri'-
par des pattes qui les élèveraient de i ;i .'. riniimrin-; .m-
dessus des rails , il resterait encore environ l.'i «■nliiucLi'-S
pour atteindre l'essieu, distance suflisante pour attacher le
piston au wagon directeur. Il s'ensuivrait donc que le pis-
ton pourrait passer sans obstacle par-dessus les railsi que
lo service actuel des aiguilles n aurait pas besoin d'être
changé, et que lo piston, su trouvant rapproché autantqiie
possible du wagon , y gagnerait en solidité. Le tirage s'y
ferait plus directement.
M. Ilédiard fait observer que s'il était nécessaire sur cer-
tains parcours d'employer un tube propulseur de 30 ou 40
centimètres do diamètre alin d'obtenir une force phisgrande,
on pourrait arriver au même résultat qu'avec les tubes de
20 centimètres en donnant aux roues du wagon directeur
qui supporte le piston un diamètre de quelques centimètres
de plus.
La pompe pneumatique qui servait à faire lo vide au che-
min d'essai de Saint-Ouen avait un diamètre de 2 mètres
sur une course de 75 cenlimètres.
Elle enlevait un mètre cube d'air par seconde , et elle
était mise en mouvement par une machine à vapeur de
la force de -40 chevaux.
En adoptant ces données pour une ligne atmosphérique
qui serait construite avec un tube propulseur de 20 centi-
mètres de diamètre, et dont les machines seraient espacées
de 10 en 10 kilomèlres , on y ferait le vide en sept minutes
puisqu'un lul)o de 20 centimètres de diamclre. sur un par-
cours de dix kilomètres, conlii'iil loi) nirlrr.i cubes d'air,
et que dans 7 minutes il y a lio ^n Minier ; i)
Maintenants! on établissait .uijiKr. de ( liaiiuo machine
lixe , placée de 10 en 10 kilomètres, un tube d'aspiration ,
formant réservoir, d'une capacité double d'un tube propul-
seur de 20 centimètres de diamètre, c'est-à-dire un réser-
voir contenant 800 mètres cubes d'air, il faudrait gualorie
minutes pour y faire le vide (2).
Au monieiildu départ du convoi , on mettrait en commu-
nication, au moyen d'un robinet, le tube propulseur avec le
réservoir ; l'équilibre s'établirait immédiatement, et le vide
serait fait aux deux tiers.
Le piston , poll^-^|l;l^ l;i pression atmosphérique, refou-
lerait alors ei iirliiiii Li portion d'air restant dans le
tube propulseiii . ;i|ii' - I |t;i<siige du piston , l'air du tube
propulseur aiir.iil p>is.-r ni luliihlç ilins le réservoir ; mais,
comme ce réservoir se Ihhim r.ni dir il uni' capacité deux
fois plus grande, Tair du liilie piii|iiil-riii ne 1 aurait rempli
qu'il moitié; par conséquent, après le pas.-age du convoi .
le baromètre indiquerait encore un vide de 35 ii -40 centi-
mètres, ou une demi-atmosphère, et, dans l'intervalle
de chaque convoi , la pompe n'aurait pas à faire le vide en
lotalile, m ii- -riilrmeiità le compléter.
Ain?i , ,1 II- piii-^.iiites machines (ixes qui ont été jus-
qu'ici cniisii iiilr.^ ]iiiur épuiser dans un temps très court
1 air coiuenu dans le tube propulseur, dont la force n'est
ulilisèe ((u'un douzième du temps pendant lequel la ma-
chine est en feu , et ipii dépensent presque en pure perte
onzedou/ieiiirMle leur iniuliiislllile, .M llnliiirda substitué
desmaeliini - mil ni iiinin^l'ii h-,, .pu ;iL:i^>ent saiisccssc.
ottoujuui> Il 1 lie ni, |HiiMpi elli^r i;ii;:iMneii t daus le ré
servoir additionnel le vide, au moyen duquel on obtient une
force incessamment prête à être mise en action.
Tel est le projet de M. Hédiard , dont nous terminons
l'exposition par le devis comparatif do la déjicnse dans le
système des locomotives et le système atmos[iliériquc ;
SYSTÈME LOCOMOTIVE. |SYSTÈME ATMOSPIlÉRIQUi:.
MÈMK ÏEnUAIN POUII LES DEUX STSTKHE.S.
lllls h tO kiloijr.,
100 kilogr. . liiur
lé> Oe lu
I SO kilopr, , ltf> !
h 30 fi. les 100 kUogr. . . .
Une locoiiiolivo et son lenilcr ]>D
kiluiiitilre, cuUlaut S0,000 Tr
tiiia> k so kilo
100 kilogr.
! cout-incls lie n kilogr. , 1rs s
k 30 fr. les 100 kil.KP. . .
Unlube<le 00 kiloi;r, ,Tc nièirc
k 10 fr. , les 100 kaogr. . . .
l'i, lulif ,rn,|„r..lif,ii (JO.OOO fr.
10 kiloiiièlrcs.
Dépendes inipiévi
(1) Tiiiilc's les niiichincs fixes sont couplées pour le cas où il yen
.Turail une en réparallun.
(2) Un lubc de deux niùhcs de dioniiHre sur une longueur de
200 int^lres, a ixaclcinent le double de la capacité d'un (ulie de 2U
ccnliniilrcs de diamètre qui aurait unelongucur de i/ix kitomclrcs.
Prix éïiil pnur l'élalilisseinent d'un chemin dans les deux
sv>lriiii- 111 II- il e\i-ie eu l.ive'ur de l'atmosphérique :
■ l'iii. ,., Diiiii riiiivii|ii,il)lr (l;ins les travaux do terrasse-
iiiciil , il;iii> leiiireiirii lie 11 Mile , des rails, des loconiBti-
ves, et dans la diminution des deux tiers, au moins , du
combustible. — Ajoutez à cela : vitesse et sécurité.
La 8ou8cri|ition de liibrairie.
La souscription avec primes autorisée au profit de la li-
brairie et des industries qui s'y rattachent a conquis la fa-
veur du public. On comprend que les scrupules de lé-
galité rigoureuse ont dû céder avec honneur en présence
d'un grand intérêt à sauver, de nombreuses infortunes à
soulager.
Les croque-morts do la librairie, ces industriels qui
spéeulfint sur la ruine des éditeurs et qui flairaient déjà une
proie 11 dévorer ii l'encan , sont les seuls à protester contre
uur opération dont l'efl'et est de rendre la vie il un corps
epiii-e. On assure que ces honnêtes gens ont ailressé ii
l'autorité, au nom de la morale publique, une réclama-
tion à laquelle se sont associés de braves détaillants poussés,
les uns par une basse envie, les autres par l'ignorance de
leurs véritables intérêts.
On peut rire des envieux; maison doit éclairer les aveu-
gles en leur montrant que l'activité rendue à la librairie
leur prolitera finalement autant qu'aux éditeurs eux-mê-
mes; qu'elle leur prolitora comme aux imprimeurs, aux
fabricants de papiers, aux relieurs, aux brocheurs et a
tous ceux qui concourent à la production et au débit des
livres. , .
Quant aux croque-morts, on ne voit guère que les épi-
ciers qui puissent être touchés de leur douleur et s'associer
raisonnablement il leurs regrets.
Il y a encore une autre plainte qui s'élève contre la Sous-
cription ; c'est la plaintn d'un éditeur de Paris, un grand
esprit, un noble cœur, que le sentiment de la confraternité
n'a cessé d'animer et qui a donné, en tout temps, l'exem-
ple du dévouement ii l'intérêt commun. C'est un homme
qui a été fort malheureux et qui s'en souvient. Moi qui
parle ici , j'ai eu le bonheur dans ma vie de lui rendre un
grand service, de lui donner un bon conseil qu'il a suivi ,
dont il s'est bien trouvé et qu'il a reconnu pendantsix se-
maines environ , juste le temps qu il fallait pour s'assurer
qu'il avait été fort heureux de me rencontrer.
Cet éditeur donc a commencé par applaudir il l'idée de la
Souscription ; il a fait des démarches pour y être associé,
puis tout à coup , il a cru faire un meilleur calcul en s'asso-
cianl à la réclamation peu intelligenleou peu bienveillante
des détaillants , et le Journal des Débats a enregistré une
déclaration de lui , portant que ses ouvrages — les ouvrages
de M. Charpentier I — ne feraient point partie dii Catalo-
gue. C est un très petit malheur assurément ; mais la cor-
poration des éditeurs veut être vengée de cetle retraite ridi-
cule. Elle le sera. Elle li-l déj i p.nr l'accueil iiue plusieurs
de ceux auxquels s'e,sl .hIh-m' M i li.irpentier, pour les en-
traîner, ont fait aux iii.iiil> expi une,, de sa révolte. Si le,<
éclats de rire qu'il a provoquer , si les sourires de pitié
qu'il a recueillis ne l'ont pas assez averti . nous mettrons
le public tout entier dans la confidence do ce pauvre
homme qui reproche ii l'opération d'être républicaine,
et qui déclare ne pouvoir y prendre part à cause de ses
opinions monarchiques. Tartufe était aussi ell'ronté , mais
il n'était pas si.... Comment dirai-je"' Le mot est court,
maisil estdur... Gazons, commedit Arnal , Tartufe n'était
pas si Charpentier.
M. le Préfet de la Seine vient d'adresser aux adminislra-
teursdela Souscription la lettre suivante :
Paris, le l/i septembre 18
Messieurs ,
" Je vous prie de me porter sur la li?te de vos souscrip-
teurs pour une somme de 250 fr.
« Je serais heureux que mon exemple pût rendre l'acti-
vité il la féconde industrie des éditeurs et des imprimeurs,
si utile à de nombreuses familles d'ouvrier.- el si importante
parmi les industries parisiennes.
' Sailli e( fraleriilK^ ,
" Le Itrprt-scitlanI du l'cuple. Préfet de la Seine .
» TllOCVli-CnAUVEL. •■
slic A la
l.lhralrli' IMi.ilauHli'r
Théorie du droit de propriété et du droit au travail , par
M. CoxsiDÉinM. — De l'Organisation du travail selon
Fourier, par M. llENSEyciN. — Le l'résrnt et l'Avenir.
par M. J.-I). Khantz — L'nc visite au l'Iiahuistère .
par Matuieu Bbiascoliii.
Au bout du quai VoUairc, entre la rue du Bac et la rue
de Beaune. n'avez-vous pas entrevu jiarfois une pctile bou-
tique pointe en vert, et dont la montre étale aux yeux dos
passants plusieurs rangées de livres elde brochures qu'on ne
trouve guère que la , et que pourtant on n'y va pas toujours
chercher ! Bien peu , en ell'et , franchissent le seuil de la li-
brairie phalanstérienne ; bien peu troublent ce silencieux
asile où s'accumulent toutes les productions qui ne peuvent
trouver place dans les colonnes de la Dimocralie pacifique,
car. comme on sait, cl ce Journal et celte Librairie sont
deux parties d'un même tout, deux enfants d'une même
famille qui n'épargne rien, disons-le à sa louange, pour
produire les siens et leur faire faire leur chemin dans le
inonde.
Librairie, journaux, revues, cours publics el gratuits à
Paris etdans les provinces, lesphalanstériens ont tout em-
ployé, depuis dix-huit ans. pour la pacifique propagation de
leurs paciliques doctrines. Ont-elles recru té ce pendant beau-
coup de prosélytes? sont-elles parvenues a préoccuper vi-
vement la masse des esprits? les hommes éminenls qui les
représentent exercent-ils une sérieuse influence, dans un
camp ou dans l'autre? Non; les partis modérés les rejet-
tent comme des utopistes, assez inollénsifs d'ailleurs; elles
partis extrêmes les dédaignent comme des auxiliaires inu-
tiles, parce qu'ils savent fort bien qu'on n'accomplit pas
pacifiquement une révolution radicale.
Ainsi, pour avoir voulu transiger avec tous les intérêts
et ménager tout le monde, lesphalanstériens n'ont contenlé
personne. Cola devait êlre ; car il n'y a de doctrine puis-
sante et populaire que celle qui accepte franchement tous
les moyens, quels qu'ils soient, qui mènent au but qu'elle
a marqué. Or. les phalanstériens ont fait tout le contraire ;
par une singulière inconséquence en se proposant pour fin
la transformalion totale de la société, ils se donnaient, ils
se donnent encore comme essenliellement conservateurs.
Us veulent, on un mol, détruire en conservant et conserver
en détruisani
Cette illusion s'explique en partie parla façon toute par-
ticulière dont les disciples do Fourier conçoivent la méla-
niorphoso sociale qu'a prêchée leur maître. A les entendre,
il suffira qu'un plialanstcro s'établisse sur deux ou trois
lieues carrées , pour qu'il la vue des miracles qu'il accom-
plira, de l'ordre qui y regnera,dubonheur dont on y jouira,
tous les peuples des quatre parties du monde soient saisis
d'une irrésistible envie de bâtir des phalanstères, et de
devenir Ilarmoniens. C'est ainsi que sans secousses . sans
trouble aucun, el d'un accord unanime, la face du globe
sera renouvelée. Croyez cela , et lisez Fourier ! Dans ce
nouvel état de choses' lous les anciens droits seront sauve-
gardés ; seulement ils s'exerceront dans toute leur étendue
et bien au delà des étroites limites que leur impose forcé-
ment cet étal bâtard qu'on nomme civilisation. Ainsi le ca-
pitaliste retirera cent pour cent d'un capital qui , aujour-
d'hui, lui rapporte au plus huit ou dix d'intérêt; et le
travailleur vivra comme s'il gagnait vingt-cinq francs par
jour. Certes la perspective est llalteuse. el lorsqu'il en coûte
si peu pour la réaliser, on se demande pourquoi cela n'est
pas déjà fait. On a essayé, il est vrai , el même deux ou trois
fois. Chose bizarre! tous ces essais ont été des plus mal-
heureux. Mais qu'est-ce que cela prouve ? une tentative
d'harmonie ou de réalisalion harmonienne peut-elle réussir
dans notre milieu civilisé, pour parler le langage des adep-
tes! il faut attendre une heure plus propice, chercher un
lieu plus favorable. On chercho; mais, chemin faisant, plu-
sieurs phalanstériens plus pressés, mettent un peu de côté
les idées du niaitre, et s'elTorccnl de les appliquer à ce qui
est, en attendant ce qui sera
De ce nombre est M Victor Considérant, l'homme le plus
distingué aujourd'hui de l'école sociétaire, et celui qui a le
plus habilement tenté de faire rentrer les doctrines fourié-
ristes dans les bornes du possible cl du réel Qui a lu , ou
entendu M. Considérant, sait qu'il apporte dans ses écrits
ou ses discours de l'esprit, de la verve, et une façon d'argu-
menter souvent pressante et saisissante. Sous la monarchie
il n'était point de ceux que redoutait le gouvcrnemenl. Au
phaUinslere près, qu'on lui passait volontiers , c'élail un
conservateur, un quasi-ministériel. Il voulait alors conser-
ver po^/d'i/ucmcnj pour révolutionner «ofifllcnient. Depuis la
République, M. Considérant s'est maintenu dans celte posi-
tion mixte, eherehantii concilier des thèses inconciliables,
défendant a la l'ois la propriété et le droit ou travail, la fa-
mille et le ph.ilanslére, se faisant lapotrede la communauté
el l'adversaire des communistes.
C'est , animé de ces intentions contradictoires , qu'il vient
de rééditer, après l'avoir augmenlé et corrigé, un petit traité
intitulé Théorie du droit de proprirté et du droit au tra-
vail, publié il y a quelipies années dans la l'halange.
Tandis que M. Proudhoii alTirme que la reconnaissance
du droit au travail entraîne la ruine du droit de propriété.
M. Considérant conclut, au contraire, que de la consécra-
tion du premier dépend le maintien de l'autre. Pour le prou-
ver, il débute par iléclaror que la vraie loi sociale est en-
core a trouver, et qu'aeluellemcnt tous tes Codes humains
sont fau.r par cela .icul q u' ils existent . Car, dit-il. si la société
était établie dans ses conditions normales, elle fonctionne-
rait d elle même et sans cet amas de prescriptions el de
restiietions législatives. C'est pourquoi à ces Codes humains,
rédigés au hasard, adoptés par convention el maintenus par
la force, il faut se liàlerde siib-liliier /c rrat dioif. If droif
naturel, le droit immualile . le droit émané de Dieu, et qui
est l'expression des rapports résultant de la nature nicmr
des êtres ou des choses.
Pour moi. je ne demande pas mieux que d'accepter ot de
suivre ce droit-lii? Mais qui viendra nous le révéler? .\
quel? signes le reconnaîtrons nous? Ce droilémanr de Dieu
neserail-il, a dire vrai , qu'une émanation de M. Victor
Considérant; cl si cela éiait . n'y aurait-il paslicudesigna-
ler l'outrecuidance d'un homme qui condamne en masse et
sans examen tous les législateurs de tous les temps el de
tous les siècles , el tous les peuples qui se sont confor-
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
39
mes il leurs lois? A» fond c'est toujours Ui qu'il en faut re-
venir. Lorsqu'on nous parle du droit naturel, du droit do
Dieu , on n en parle jamais qu'en son nom et de sa propre
autorité; c'est pourquoi , en pareil cas, l'autorité , l'expé-
rience des siècles méritent d'être pesés dans la balance.
Non : tous les Codes humains ne sont pas faux, par cela
seuls qu'ils existent. C'est le contraire qu'il fallait dire, pour
être vrai; car les lois nes'établissent qu'à la condition d'éire
conformes aux principes fondamentaux de la nature liu-
niaine , au caractère particulier des peuples, aux nécessités
spéciales de la situation où ils se trouvent. Un Code qui
n'aurait pour lui que des geôliers et des gendarmes ne se
maintiendrait pas longtemps. Toutes lo.^ pages de l'histoire
l'attestent. Mais qu'importe l'histoire aux phalanstériens !
S'il faut les en croire, l'humanité lait fausse route depuis
la naissance du monde. Quelques-uns d'entre eux , il est
vrai , d'un esprit moins exclusif, nous accordent que de-
puis six mille ans toutes les révolutions qui se sont succédé
ont bien eu quelque résultat. Elles ont préparé l'/iarinoiiic,
comme dit M. Hennequin , dans son courssur VOrganisa-
tion du travail. L'humanité , en d'autres termes , a lait et
continue à faire son apprentissage phalanstérien en passant
par les phases suivantes :
1° Édcnisme. ou bonheur primitif, paradis terre^tre.
2° État sauvage , ou chute de l'humanité.
3» Patriarcat, nouvelle déchéance.
■4° Barbarie, déchéance pivotale.
5° Civilisation , phase de progrés.
(i" Garanlisme . nouveau progrés non réalisé.
7° Séries ébauchées, phase essentiellement transitoire
introduisant l'espèce humaiue en Harmonie.
Nous ne sommes encore aujourd'hui qu'à la cinquième
phase , l'état de civilisation , d'où il nous faut passer au ga-
ranlisme , qui nous mène droit aux séries ébauchées . d'où
nous atteindrons enfin au ncc plus ultra de notre destinée,
aux merveilles de la papillone , de la cabalistc et de la
composite.
Pour passer de la cicilisation au garantisme, le droit au
travail est nécessaire , et c'est pourquoi M. Conîidérant le
défend avec tant de zèle? mais avec un zèle plus fervent
qu'éclaire. Car à bien lire son petit traité, il en résulte tout
s.mplement qu'il veut bouleverser tout le monde pour nous
replacer dans une situation absolument semblable à celle
où nous sommes aujourd'hui.
M. Considérant commence par remonter à l'origine des
choses; procédé dont il est toujours prudent de se défier.
Quand on veut embrouiller une question, c'est un e\cellent
moyen que de se reporter au lendemain du déluge : car per-
sonne ne pouvant dire au juste commeiilles choses se sont
passées à l'origine des choses, on le suppose tout à l'aise ,
el l'on en déduit ensuite tout co qui vous plaît d'en dédu re.
Accordons toutefois à M. Considérant qu'à cette époque
quelques hommes se sont emparés indûment d'un bien
usurfié sur le bien de tous, et qu'ils ont ainsi donné l'exem-
ple d'une usurpation que la conquête et les envahissements
de toutes sortes ont perpétuée sous diverses formes jusqu'à
nous. Accordons-lui ce point, mais à la condilion qu'il re-
connaîtra aussi que, depuis l'affranchissement des Commu-
nes . depuis linunense développement de l'industrie et du
i-ommerce, de|iuis la révolution de 1789, la propriété n'a
elé le plus souvent que le fruit du travail et d'une sage éco-
nomie. M. Considérant l'a reconnu plus d'une fois .et ce-
pendant, attendu que tout homme né sur la terre a droit à
une portion de cette terre , il demande que , par une révo-
lution radicale, les choses soient constituées dans la société
de telle sorte :
1° Que le droit au capital primitif, c'est-à-dire à l'usu-
fruit du sol dans son étal brut soit conservé , ou qu'un droit
équi\ aient soit reconnu à chaque individu qui naît sur la
terre à une époque quelconque ;
i' Que le capital créé soit réparti continuellement entre
les hommes, à mesure qu'il se produit, en proportion du
concours de chacun à la production de ce capital.
De plus il admet que ce capital ainsi réparti sera-trans
missible de famille en famille . et constituera de nouveaux
patrimoines. Eh bien, soit! bouleversons, ruinons la société
actuelle pour réaliser, s il est possible, cette égale réparti-
tion entre tous de la terre commune. Avant un demi-siècle,
grâce à l'inégalité des travaux el des capacités , et par le
seul fait de l'héritage, l'équilibre sera de nouveau renversé;
alors il deviendra aussi impossible qu'il l'est aujouidliui , de
garantir le droit au travail , sans faire violence aux person-
nes et aux choses; l'ordre social sera à chaque instant re-
mis en question . et au lieu de propriétaires, il n'y aura que
des détenteurs illégitimes. Car tout ce qu'on ajoutera à son
bien , on le prendra nécessairement sur le bien d'autrui , et,
à ce compte, l'on sera toujours tenu à restitution.
A M. Considérant, à tous ces socialistes mitigés et à l'eau
de rose, je préfère de beaucoup M. Proudhon : avec lui on
sait de suile à quoi s'en tenir. M. Proudhon a dit une chose
parfailemenlvraie, il a été loyal et conséquent lorqu'il s'est
écrié , devant la commission à qui fut soumis son fameux
projet : " Accordez-moi le droit au travail, el je fais bon
marché de la propriété. » Qu'est-ce en ell'et que le droit au
travail , sinon la ruine de tous les principes politiques et
économiques proclamés par la révolution de 1789 ? Tous
tendent à assurer à l'individu l'entier développement de
toutes ses facultés , le libre essor du commerce et de l'indus-
trie , sous la surveillance et la garantie de l'État , et avec les
conditions qu'il impose pour prix de cette garantie et de
celle surveillance. Le droit au travail, au contraire, fait
rentrer le commerce et l'industrie entre les mains de l'État ,
c]ui en devient ainsi le maître absolu : car il dispose de
toutes les forces qui le font agir. On répond , il est vrai,
qu'il y a, dans l'industrie, des époques de chômage, de gêne
et de souffrance où le travailleur ne peut trouver à em-
phner ses bras, à gagner le pain de sa famille, et qu'alors
lÉtat doit lui en fournir les moyens. L'argument est sé-
rieux sans doute; mais il ne résout pas la question; mais si
Ion ne demande le droit au travail que parce motif,
on comprend peu la portée d'un pareil droit; on ne se fait
pas môme une idée juste de ce que c'est qu'un droit.
Si limité qu'il soit dans son action , un droit est inatta-
quable dans son principe , et ce principe entraine les plus
graves conséquences. Étendu à tous les citoyens il peut tou-
jours être invoqué par tous, et entraver à chaque instant
la marche des affaires. Comprenez ainsi le droit au travail ,
ou ne l'inscrivez pas dans votre Constitution , si par là vous
voulez simplement engager l'État à venir à l'aide dos in-
dustries et des travailleurs en souffrance. L'État n'a pas
besoin d'y être obligé pour le faire ; car il l'a toujours fait ,
et, quel qu'il soit, despotique, républicain ou constitu-
tionnel , il le fera toujours; car il y va non-seulement de sa
justice, mais du premier, du plus pressant de ses intérêts,
de soutenirson commerce ébranlé, de rétablir, dès qu'il le
peut , le cours de ces canaux industriels qui sont les sour-
ces de ses richesses.
Ainsi , il n'est pas nécessaire do proclamer dans ce but le
droit au travail qui , en aucun cas, ne peut être considéré
comme un palliatif, car c'est tout un principe, tout un or-
dre de choses nouveau , qui a pour base la concentration
de toutes les forces de l'industrie, de tous les instruments
du travail et de la production entre les mains de l'État , de-
venu par là le seul capitaliste, le seul propriétaire, le seul
manufacturier. M. Proudhon a donc parfaitement raison
quand du droit au travail il déduit la ruine du droit de pro-
priété; et M. Considérant n'échappe à celte inévitable con-
séquence que par des distinctions puériles , ou en se per-
dant dans les fantastiques régions du phalanstère.
Ces régions viennent d'être tout particulièrement étudiées
et décrites, d'après Fourier, par M. 'Viclor Hennequin, dans
le cours de science sociale qu'il a professé l'an dernier à
Besançon , et qu'il vient de publier à Paris. Nous avons eu
quelquefois le plaisird'entendre M. Victor Hennequin, lors-
qu'il enseignait ici les doctrines du maître , et nous préfé-
rons de beaucoup ses improvisations à ses écrits. Ce M. Hen-
nequin parle avec une clarté, une facilité singulière; il
trouve , sans le chercher, plus d'un trait piquant, qui relève
à propos l'attention de ses auditeurs, et qui ne nuit pas à
l'exposition de la doctrine phalanstérienne, d'ailleurs assez
divertissante en soi. Bien moins heureux en tenant la
plume, M. Hennequin écrit comme tout le monde, comme
tout le monde qui n'écrit pas ; sa prose est une de ces
honnêtes proses dont on ne peut dire ni bien ni mal. Tou-
tes ses pages ne se distinguent les unes des autres que par
la variété des matières dont elles trailent. Je n'essaierai
point d'y suivre pied à pied le savant professeur , ni de
faire par conséquent une réfutation en forme du système
si complexe de Charles Fourier. Qu'il me soit permis seu-
lement d'opposer à ses adeptes deux objections que je crois
aï^sez sérieuses.
Le principe dont partent les phalanstériens, c'est que
l'homme et la société sont deux sujets d'observation et d'é-
tude dont on peut connaître les phénomènes, découvrir et
déterminer les lois aussi nettement , aussi rigoureusement
qu'on a observé et décrit les lois de la nature extérieure.
Newton a découvert les lois de l'attraction de la matière;
Fourier, celles de l'attraction entre les hommes et de l'har-
monie qui doit exister entre eux, entre toutes les parties
de notre globe, comme elle existe entre les sphères célestes.
A cet égard la philosophie de Fourier se rapproche du py-
thagorisnie, et, comme lui, elle a dû séduire ces esprits
géométriques qui aiment à transporter, dans l'élude des
choses morales, la rigueur des déductions el des solutions
mathématiques. Malheureusement rien n'est plus faux que
ce rapprochement entre l'esprit el la matière, que cette
assimilation de l'un et de l'autre. Les grands philosophes
de notre époque auront beau faire. En dépit de Fourier,
en dépit de M. Auguste Comte, on ne fera pas de ce qu'on
appelle la scietice sociale une science précise et positive
comme la physique , la chimie ou l'astronomie. Dans le
monde moral les causes varient éternellement, et, avec
elles, les effets qui en émanent. 11 n'y a pas deux hommes
ni deux sociétés semblables, et qui puissent se trouver
dans des situations absolument identiques. C'est pourquoi
tous les systèmes de la philosophie de l'histoire seront tou-
jours des baromètres rétrospectifs, qui nous prédisent au-
jourd'hui letemps qu'il faisait hier. 11 en est de môme de
la psychologie. Lorsqu'elle se renferme dans l'élude des
[ihénomènes de l'âme, elle est puérile et insignifiante : car
que peul-on savoir sur l'âme, si l'on ignore les mobiles
qui la font agir? Or, dès qu'elle passe de l'étude deseflels
à celle des causes, la psychologie cesse, par cela même, d'ê-
tre une science positive, et la spéculation y prend la place
de l'observation.
Comme les psychologues de l'école écossaise , et vers le
même temps à peu près, Fourier voulut élever la psycholo-
gie au rang de science positive. Mais tandis que Reid et ses
disciples tentaient timidement quelques pas dans cette voie
nouvelle, Fourier s'y aventura hardiment, et prenant toutes
ses inductions pour des faits, tous ses rêves pour des vé-
rités, il refit mathématiquement l'homme à son image, et à
l'image de cet homme, l'état social qui devait lui convenir,
étal dont le principe d'organision est l'attraction ; et la fin ,
le bonheur : bonheur qui s'accroîtra indéfiniment , grâce
aux progrès indéfinis des séries et des groupes qui doivent
changer cette terre en un nouveau paradis terrestre, fort
supérieur au premier. Sans cela , ou serait le progrès?
Ce progrès, selon Fourier, doit s'accomplir sans effort,
mais non sans travail. Tout le monde travaillera dans le
phalanstère; mais loul le monde s'amusera en travaillant,
et travaillera en s'amusant. Écoutez à ce propos un nou-
veau disciple de l'école sociétaire, M. J.-B. Krantz, ingé-
nieur des ponts et chaussées, qui, sous se titre ; Le Présent
et l'Avenir, vient de publier quelques considérations sur la
théorie du maître :
« Le travail devenu un plaisir, dit M. Krantz, ceci sent
le paradoxe , et voilà deux mots qui hurlent de se trouver
ensemble. Oui en apparence, mais non en réalité. Car je
vous le demande, le bal n'est-il pas sans contredit un plai-
sir et des plusvifs?Cependant, lorsqu'on y rénéchil, quoi
de plus maussade el de plus fatigant que de marcher, cou-
rir, sauter toute une nuit dans une chambre? On me paye-
rait cher, je vous pire, pour faire cet exercice, s'il n avait
avec lui quelque chose qui le rend plaisir. Ce quelque chose
c est la compagnie * belles jeunes llllcs, dont chacune se
dispute les doux regards , c'est la présence de nos amis , ce
sont les douces causeries, c'est la musique encore Eh bien i
ne remarquez-vous pas que tous ces accessoires qui font de
la danse, triste travail par lui-même, une chose si pleine
d attraits, nous pouvons les introduire dans nos ateliers?
Itien ne nous empêche d'avoir prés de nous, au milieu de
nos groupes de travailleurs, nos mères, nos amis nos
amantes; rien ne nous empêche encore , dans les moments
de fatigue, de nous aider de la musique , de stimuler l'é-
mulalion de chacun ; nous pouvons aussi avoir des ateliers
propres, convenables, bien aérés, et dès lors, je vous le
demande, travailler dans de pareilles conditions, ne sera-
ce pas un plaisir? Quand elles seront réalisées, le travail sera
de bon ton , l'oisiveté méprisée , et s'il existe encore des
malfaiteurs, soyez sûrs qu'on les condamnera non au tra-
vail, mais au repos forcé. »
Ici se place ma seconde objection.
Quand bien même on pourrait rendre le travail attrayant,
j'en serais très fâché , el pour deux raisons.
La première, c'est que, tel qu'il est. le travail contribue
essentiellement à la dignité, à la moralité de l'homme. C'est
une salutaire épreuve qui tous les jours nous fortifie et nous
retrempe; le corps en devient plus robuste, l'esprit plus sûr.
les habitudes plus régulières , l'homme meilleur J'ajoute
qu il est impossible que le travail , quelle que soit sa nature,
puisse s'accomplir sans attention , c'est-à-dire sans effort ',
sans fatigue Le propre de la distraction , de la récréation ,
c'est de permettre à nos esprits de se dissiper, au cor|is et
à l'âme de flâner tout à leur aise. Le propre du travail , c'est
de les contenir, de les fixer, de les appliquer à un môme ob-
jet. Vous ne changerez point cela. Variez donc, tant qu'il
vous plaira , vos exercices; iirenes tour à tour, comme le
conseille Fourier, la plume , la bêche ou le rabot; travaillez
à côté de vos femmes , de vos génitrices ou de vos page.ises ;
cuisez le pain eu cadence, ou faites des bottes au son de la
llûte ou du llageolet; il arrivera toujours de deux choses
l'une : ou les travailleurs auront les doigts et l'esprit à la
besogne, et, dans ce cas, les concerts et les conversations
dont lisseront entourés ne seront peureux qu'une fatigue
de plus , par l'effort qu'il leur faudra faire pour se soustraire
à cette distraction ; ou bien ils prêteront l'oreille aux con-
versations et aux concerts, et, dans ce cas, ils ne feront
rien qui vaille.
En second lieu , en supprimant la peine qui accompagne
le travail, les phalanstériens supprimeraienlen môme temps
la douceurdu repos aui|uel il nous prépare. Leplaisiret la
peine ne nous sont agréable et pénible que par la ■compa-
raison que nous faisons de l'un à l'autre. Rien ne serait
plus fastidieux que de s'amuser toujours. On demanderait
alors comme une grâce de s'ennuyer un peu, de lire une ode
ou une ballade , de faire enfin quelque chose qui ne fût pas
attrayant. Rien de plus facile à amuser que I homme labo-
rieux. Rien de jilus difficilement amusable que l'oisif qui ,
tout le long du jour, promène de distraction en distraction
son inévitable ennui, et qui ne s'intéresse à rien, parce que
son attention est incapable de s'attacher à quelque chose.
L'excès en tout est un dëraul,
a dit un sage dont j'ai oublié le nom; les phalanstériens
observent trop peu cette maxime. Selon M. Krantz, on s'a-
musera du soir au matin et du malin au soir dans le pha-
lanstère, et, selon M. Mathieu Briancourt, c'est alors que
seront réalisées ces parole.s du prophète Isaie ; Si votis vou-
lez m'écouter, dit te Seigneur , vous serez rassasiés des
biens de la terre.
Le fait est qu'on ne sera que trop heureux en Harmonie
si nous en croyons la description anticipée que vient d'en
tracer M. Mathieu Briancourt dans sa Visite au Phalanstère.
C'est un petit roman dans l'intrigue duquel l'auteur a en-
cadré les dissertations romanesques de Fourier. En somme .
cette Visite de M. Briancourt n'est point désagréable, mai.-
elle est un peu longue. En fait de choses inutiles , il ne faut
que le nécessaire.
Je n'en ai point fini avec les phalanstériens; mais l'es-
pace me manque pour vous parler de quelques autres de
leurs derniers ouvrages , et particulièrement de ceux qui
traitent de l'émancipation de la femme et de l'organisation
du mariage.
Ce sujct-tà vaut bien un article sans doute,
et cet article , nous le ferons dans peu , mais en nous re-
commandant à toute l'indulgence de nos lecteurs, et surtout
de nos aimables lectrices. Car malgré les vives sympathies
i|ue nous inspire le beau sexe en général et en particulier,
nous nous apprêtons à combattre cette émancipation de la
femme , que nous trouvons , à Paris et en province, très
suffisamment émancipée. Uonni soit qui mail y pense.
Alexandre Dufai'.
Alhiiiii JUoltio-Valafiiie.
(5« Article. )
CN RELAIS DE POSTE.
Au sein des pays nioldo-valaques, d'anciennes traditions,
chez les hospodars , les avaient longtemps constitués, sous
peine de mort , informateurs-nés des Sultans de Conslan-
tinople.
a;
L'ILLUSTRATION, JOUFîNAL UMVERSEL.
Li iddi» (loposle Li Muldu-\ I cl c, dapie» H Lou;, jult
Princes chrétiens , vassaux d'cmpe
reurs turcs , et , la [ilnpart du tenij b
issus cux-mômes d'un sang imperul
ils avaient contracté, tics le moment
do leurinveslituro. l'obligation de tenir
en toute circonstance et au risque de
leur vie les Sultans au courant des
moindres actes des princes de la chré-
tienté.
Ce sentiment d'obéissance passive
enfanté au sein d'une société intelli
gente et souple par une terreui qui
n'était que trop fondée, avait, depuis
des siècles, donné naissance à des lia
iJitudes toutes particulières d'investi
gation à l'égard de la conduite politi
que et privée de chacun des nionaïques
chrétiens.
Ces traditions se retrouvent encore
là de nos jours , et à chaque pas qu on
fait sur le terrain des principautLs du
Danube. Certes on peut admettre
qu'avec la marche du temps le cnrac
tere en a changé, mais il est clair qu
les moyens comme les résultats sont
resiés parfaitement les mômes Le pio
cédé habituel dont usent les hospodirs
est au surplus fort simple. Prince^ très
riches, et, en général , dit-on, fort go
néreux. ils versent l'or à pleines mains
partout et en faveur de tous ceux qui
des principaux points de l'Europe, con-
sentent à leur livrer en échange les no-
tions les plus confidentielles, les pins
secrètes.
Dix-sept princes phanariotes , ré-
gnant en Valachie ou en Moldavie,
surpris par la Porte Ottomane en fla-
rant délit d'ignorance à l'égard de la
j olitique chrétienne, avaient payé de
leurs léles cette ignorance.
L'information à tout prix était ainsi
devenue une telle condition de leur
existence politiipie . de leur existence
mitérielle, qu'après avoir acquis à
erind frais leurs sources de nouvelles
dans les cours étrangères , leur pre-
mier soin dans le gouvernement inté-
rieur du pays avait porté sur le plus
grand perfectionnement de l'adminis-
trition des postes; leur premier mi-
nistre était toujours le grand postier,
ou postelnik el mare. Celte circon-
stance explique l'admiration que font
éprouver a tout étranger l'extrême ra-
p dite, la facilité , l'économie des com-
munications dans ces provinces , en
dtpit même des difficultés accumulées
que ces communications rencontrent.
Le paysan moldo-valaquc, par exem-
I le , l'être le plus endormi , le plus
désespéré, le plus apathique, devient ,
l 1 Con ul „e cnl lIi ^er i Bucl i e^t
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
41
Les Mockans (pâtres t
une fois qu'il est à cheval , le plus intrépide comme le plus
adroit postillon du monde entier.
La plupart du temps mal vêtu, monté sans élriers comme
sans selle, au milieu d'un
attelage qui ne se com-
pose guère que de h.nil- — —
Ions et de vieilles ficel-
lejs, ayant à franchir, à
travers les steppes et les
montagnes , des routes
longues, non frayées, sou-
vent impraticables , au
bout desquelles , moins
heureux que ses chevaux,
il est. lui , sans gîte, sans
nourriture et sans abri ,
l'infortuné voyage comme
le vent, et il arrive. C'est
qu'il emporte avec lui de-
puis des siècles le bulletin
des opérations de la chré-
tienté contre le Turc , et
que de son relard dépend
souvent la vie de son
prince , qui est le vassal
du sidtan ; aussi il arrive.
11 arrive frais et dis-
fios , comme il est parti ;
B plus modeste salaire le
trouve toujours recon-
naissant.
J'ai fait dans ma vie
plus de 40 000 lieues de
poste en courrier. Des
postdlons comme les su-
rudgis moldo-valaques ,
on peut en croire mon
témoignage , ne se ren-
contrent nulle part, l,e
voyageur le plus indiffé-
rent, le plus soucieux, le
plus morose ne pourrait
pas manquer d'être ragaillardi à la vue de ce que son pos-
tillon moldo-valaque déploie d'adresse, de verve, d'entrain,
de philosophie, de ra|)idité, de gaieté' A l'imitation des
sagals
Moins
pasda
espaî
poéti
nsles
;r.ols, il ne cesse d'animer ses chevaux de la voix.
que toulefoisque lesarrieros andaloux, ce n'est
ronin?ccerosde l'endroitqu'il passe pouraller re-
cruter les encouragements
prodigués à ses montures.
/( jure , lui , à faire
trembler tous les échos
d'alentour.
Un jour que quelques
postillons valaques avaient
l'honneur de mener mon-
seigneur l'archevêque mé-
tropolitain actuel , une
mare survient , dans la-
quelle le carrosse reste
complètement embourbé.
Les surudgis , devenus
muets sur leurs chevaux
où leur respect pour le
prélat enchaînait leurtio-
cabulaire d'usage, décla-
rèrent tout d'un coup aux
gens de monseigneur
qu'ils se reconnaissaient
impuissants à le tirer de
là. On songeait déjà à
aller requérir à quelques
lieues de distance des che-
vaux de renfort, quand,
d'un commun accord, tous
les postillons se présen-
tent à la portière du saint
prêtre, avouent leur em-
barras . leurs scrupules .
et ne dissimulent pas que
si monseigneur les auto-
risait à jurer il serait im-
médiatement hors d'af-
faire. «Qu'à cela netienne,
mes enfants , dit le pieux
archevêque , je me bou-
cherai les oreilles. »
Moulin et fontaine près du canal de Kustendgé , d'après M. Doussault.
Ruines du fort Saiii'-r.corses k Giuifwu , d'.ipris M. .M. Counuct.
Le poit d'Ibrada en Vilachla , d'après M. M. Bouquet.
h -2
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
Aussitôt, sous des avalanches de cataclirèscs et d'onoma-
topées, dont il serait vraiment fort emliarrassanld' offrir ici
la traduction libre, — les chevaux s'enfuient comme devant
une grêle do tonnerres, et, de la mare où il était engagé,
sort V équipage archiépiscopal triomphant comme le char du
soleil.
LES CONSULS ÉTRANGERS A BUCBABEST.
Si l'on devait juger de l'importance des fonctionnai-
res publics par l'étendue , par la multiplicité de leurs
attributions , il ne faudrait point hésiter à dire (lu'il n'y a
nulle part do fonctioi;naires plus occupés, et, par consé-
quent, plus importants, que les agents et consuls généraux
(les puissances européennes dans les principaulés du Da-
nube.
i'I.iir^ 1,1 ^nr un terrain entiériMiicnt inexploité, chargés
il .illiiM- |nilii)ii"esde la plus haute LTavilé,de la nature la
nlii- ,1, lu , il , ils ont d'abord , toutes les lois iju'ils ne sont
|i,i~ I iihiMiir- ilansie torrent ou dans les ra»,r(/«i(ccs des in-
Irii I- (lu prnii'cloratrusselcequisiiiipliliealijrs leurs fonc-
ti,,,|. ;; i.nic |irciivesurce Ihéatrede tiint le tiilent des plus
hdliili s uiiiliiia.-adcurs: de plus, ledriiit inlerualional, connu
sou- le nom de capitulations , existant en Valachie et en
Moldavie tout conmie aux exlrénutés asiatitpjcs ou afri-
caines do l'empire ottoman , tant (|ue ces riches provinces
continuent à relever do la suzeraineté du Sultan , MM. les
consuls étrangers, par le fait de ces traités qui ont arraché
aux Turcs, pour la leur conférer à l'égard de leurs natio-
naux, toute juridiction directe, sonten possession d'une au-
torité qui règle chacune des phases municipales , sociales,
judiciaires, politiques , de la vie publique de leurs compa-
triotes.
L'agent politique et consul-général de la France, par
exemple, outre les devoirs que lui imposent ses fonctions di-
plomatiques, se trouve être selon l'occurrence, maire, no-
taire, huissier, juge-de-paix, coroner, présidentdecourd'as-
si^cs,' geôlier, procureur du roi, oflicier de gendarmerie, juge
dins'iruction, président de tribunal de preiniero iiislanceet
(le commerce, procureur-général , tout ci' ipiil i >l iirrmis
d'èlreennn pour représenter dans(hai|uc;ill. un' il ;i rliaiiue
heure du jour et de la nuit la qualité de nia,^i=tral repies-
seur ou protecteur. Ainsi que ses collègues, il doit, sous le
même visage, retrouver au besoin les traits rembrunis
d'un grand-prevôt ou l'air de fête permanent du diplo-
mate , il doit sous le môme toit réunir ses salons, sa chan-
cellerie, son tribunal, sa prison!:..
Les attributions de ses collègues d'Autriche et do Russie
se compliquent en outre de la distribution, il leurs domiciles,
il une (juantité incalculable de coups de knout ou de coups
lie bâton.
Aussi quel n'est pus réUinnemcnt des Français d'aujour-
d'hui quand, apie- di\ imii- .i peino qu'ils ont quitté Pans,
la France, tout bnll.inl- d indépendance, de liberté, et ne
soupçonnant pas d ailleurs le moins du monde l'existence
des capitulations, ils so trouvent tout.ii coup, et par leseul
fait d'avoir mis le pied, depuis quelques heures, dans les
fctats du grand-seigneur, régis par la même juridiction
exceptionnelle qui existait au temps de François 1" ou
d Henri IV.
Il est donc absolument nécessaire de dire ici en peu de
mots en quoi consistent ces capitulations de la France avec
la Porte Ottomane.
Elles rrglent trois intérêts principaux : ]aprotcctorat re-
liyiciij- du pavillon , les droits des commerçants, les attri-
Initiuiis judir taires de nos afjents àl' égard de nosnalionaux .
Par les capitulations les consuls et ambassadeurs de l,i
France au Levant sont investis de tels pouvoirs que , sous
leiirseuhi responsabilité, arbitres de la convenance politique
(|u'il peut ^ avoir « ce que tels ou tels Français résident ou
non dans leurs échelles , ils peuvent même encore aujour-
d'hui, aux termes des ordonnances consulaires de I7T8 et
I7>y, e.ipUralices des traités entre chrétiens et Turcs, les
l'aire cnln rr /»ii/.( cl puings liés, et les réinterner par les
vaisseau.v de I l'.lnl Dans les dernières années, quelques
grands Cl iiiiincls rntL-idérantii tort la terre moldo-valaque,
a raison de son éloiguemenl, comme un Eldorado d'impu-
nité, ont mis souvent nos agents dans le cas d'appliquer à
leur égard ces lois sévères.
Ces attributions, toujours si [lénibles, expliquent l'usage
où sont encore nos consuls-généraux dans les principautés
d'avoir auprès d'eux une garde albanaise. Les agents de
I .\utriche a liucli,uvj.l ri ii bi-s\ , qui cunipliMil un nombre
con.-idérablo de Inii- ii,iliiin,iii\ il, m- . r- pinvinces. ont
c-hacuu une garde dr.l,,ii/.rMMi:.ulli,in.Mip|..iilenant il l'in-
fanterie do leur armée, DrieMlaiix ou Liu.ipn iis , ces gar-
des, comme on peut l'imaginer, appotlml dan- rl]ai|uc
lèrénionio, il la promenade ou en voyirjr un rnl un ap-
parat il la marche, â la préscnca^ des aulni iir- mn-ul mes
La Uussie est, depuis ipiclqius aiinrr-, ,l:iii- I n-.i-nli
former de ses consuls p™/, <■((■»/« m .MnliluV .il. i In.' I.i [w
pinieredrsrs anilu-sniliaiis a l'.i.iislanl innjili. ! Picalablc-
iiiciit liin h.iir-l il l,iss\ ni' rr--riil il riiv |iiiiir ces agents
les piisl.'- Ir- pin- inipiiilanis, Ir- pins ;i\ ,i nl.igeux.
Permis jans di.nilc ,i rlianin ilr inai- .In ivilouter ou de
combattre la iiolitique in--r. in.ii-, li.iiuhnmenl , il serait
impossible de ne pas remliv liinnini;!' a l'esprit d'équité qui
guido toujours l'empereur ciiMi- i imix qui le servent bien.
Sur les grands champs de batailli' de sa politi(|ue, ses en-
couragcmentsetses recompenses se mulliplient comniedans
un jour de guerre ; c'est un sperlaile lui icux , par ma foi ,
quedovoircomiiiriil n ('.nii-l.inlniiipln, ,1 Pin li.nr-l, ,i la.ssy,
il Belgrade, à ('.r.ir.i\ m -imi irr.iin|irn-rs -ns .nji ail - .111 len-
demain des marrlir- liurrr, un ilr- Miiiiirr- .Se- l.iveurs
s'étendent même , l.ml il r-l lil.nnlri ni.nainliipui , jus-
qu'il couvrir de -r- ilr. lil.lllnn- II'., .rrlil- ri IMUgOrS COUl-
|)laisants admiralnn- lii -i - -mir- .^Sr, irviteurs, qui
sont presuue tmijiuu.- di-lingues ou li.ibdu^, s'émeuvent
du spectacle digne do pitié que présentent les agents fran-
çais leurs adversaires; ils s'étonnent parfois que dans
notre armée, officiers et soldats soient si mal récompensés,
citaussés, chauffés cl nourris. L'action des diplomates rus-
ses, toujours délétère sur ce terrain, les conduit à la faveur,
a la fortune Les agents el consuls-généraux de la Franco,
(|u'on a placés lii , "depuis 18ai , pour obéir au désir de ce
boyard ipii voulait qu'on tirât do temps à autre le rideau
dciiiere leipiel la Russie les protège, pourvoir si par hasard
elle ne les aurait pas mangés, doivent bien se garder de
dire ce qui se passe, sous peine de se voir abandonnés ,
desavoués ou rappelés par le gouvernement de la France, ce
pays de la loyauté el de la grandeur. Bien heureux mémo
sont les agents du ministère des affaires ri inui i. s |r,inrai=
quand, engagés dans des luttes avec ces lim ii- lii' i > - , ces
faux monnayeurs, ces assassins, ces 1
bigames pour lesquels le gniivcrnement
d'entrailles, ils nrilr\ icnnrnl p.isli
criminels, qu'un sçntiinciil riirigii|
de vergogne, les porte, eu Uiulr
chasser sans pitié de la terre molilu-Milaqur,
Une seule fois depuis 183i , sons ||. nnni-incde .M. Mole,
le cabinet de Paris comprenant leNirêinn importance du
poste politique des principautés du Danube, y a placé un
des employés supérieurs de la carrière dos ambassades.
Antérieurement , puis plus tard , les divers cabinets ont
trouvé plus conforme à leur politique de n'y mettre que des
agents pris dans le corps consulaire proprement dit.
iii.iiili.iittjnl
cliiiic-de ces grands
t priiloiid de devoir,
iin-l.iiii'e , a vouloir
FÊTE DES OUVRIERS FRANÇAIS DANS UN
VAI.ACHIE.
FOUET DE LA
Il importe plus que jamais de le dire et de le répéter ;
Aux termes les [ilus stricts des capitulations de la France
avec la Porte ottomane, nos travailleurs, de toute indus-
trie, de toutes conditions, de tout métier, peuvent, dans un
très court espace de temps, faire en Sloldo-Valachie une
véritable fortune.
Le pays est si vaste , si riche , il renferme en forêts , en
terres , en grains , en prairies , en vignobles tant de tré-
sors, el il possède si peu de bras, qu'il y a là place pour
un nombre illimité de Français , ouvriers honnêtes, éclai-
rés . laborieux
Un voyagequi , pendant sept mois de l'année, depuis mars
jusqu'en novembre , se fait à très bas prix de Paris à Giur-
gewo, à quinze lieues de Bucharest , toujours en chemin de
for ou en bateau à vapeur... La langue facile ii apprendre
en raison de ses nombreuses affinités avec la nôtre.... l'e.x-
trême abondance el l'extrême bon marché des matières pre-
mières,. . la livrede viande de boucherie à 6 centimes , ..
le vin à moins de i centime la bouteille ,... le plus beau
poisson , la plus belle volaille à ,30 ou -iO centimes,... le
lait, le beurre , les œufs pour rien ;.. chez les habitants
une aménité el une bienveillance exquises , qui les portent
a offrir maisons à habiter, terres aussi à cultiver à des fa-
milles françaises entières si elles se recommandent par
leur travail , par leur éducation , par leur conduite,... ne
sont-ce pas vraiment là des avantages marqués parie temps
qui court ! ne sont-ce pas lii autant d'attraits pour aller
bien vite offrir à des populations entières qui vous les de-
mandent , le concours , l'appui , l'exemple , les bonsollices
de travailleurs probes , habiles , énergiques comme le sont
les ouvriers français.
La langue que lui-même parle est déjà , en cas de non-
snccès dans les travaux de sa main-d'œuvre , un précieux
capital , et combien n'en ai-je pas vu qui , sous la seule
protectiim <lc l'idiome français, accueillis, choyés, reçus
partout à bras ouverts , finissaient par devenir les amis
de familles riches , après y avoir été les maîtres , souvent
les professeurs des enfants. Tel est, en effet , ce lien his-
torique de parenté que les Roumouns se sentent avec
nous, qu'un corps d'armée des soldats de Napoléon . qui
serait venu dés 180,^, au lendemain do la bataille d'.4us-
lerlitz , dans les principaulés (lu Danube, aurait donné â
leurs habitants , à raison des affinités , des sympathies in-
nées entre Français et Moldo- Valaques , plus d'impulsion ,
de progrès , de mouvement en avant , de prospérité en dix-
huit mois, que ne l'a fait , depuis bientôt cent ans, le protec-
torat des Russes. Et quand on voit ce qu'en moins de vingt
ans nous avons fait de l'Algérie . on peut supposer ce
qu'avec nos conseils, nosdirections, nos exemples, seraient
devenues doux des plus admirables contrées de l'Europe.
Un exemple tout matériel au surplus , s'est offert dans les
diTiiicics années, qui prouve la vérité de cequonousavaii-
çiiii- ICI . cl ipii a démontré ce que pourraient devenir les
clni-'s \.ilai|iics mises entre des mains françaises.
t n^i.iiiil iniiiibre d'ouvriers bûcherons, charpentiers
venus eu Valaclu
1 C.li.irnlais
■ Hcnv , o
is la
.Maçonnais, do la Franche-
duite d'un honorable né-
le la hu de 1812 a KSHi;
lacs tuusquatre, cinq et
- 1 lièncs furent conci'dés
t un seul arbre a
l'r.i
I un dans l'autre au prix de
fourni 2,700 de cosciouvosqui , aux marchés de Cette et
de Bordeaux . se vendent , année commune, entre 28 el
33 fr. le cent.
M. Condemino, c'est le nom de l'honorable chef de celte
vasto ontrcpriso , el ses associés, au nombre de cinq ou .six .
quitteront en France des situations avantageuses pour venfr
s'établir dans un village valaque à proximité de la forêt.
Là les plus nobles exemples de travail no cessèrent d'être
donnés pendant trois ans. Tous les ouvriers, vivant avec
leurs femmes el leurs enfants au milieu de la forêl , même
pendant l'hiver, gagnaient les uns jusqu'à dix , d'autres
lusipia soizo francs par jour !...
LES «oc K ANS OU PATRES TRANSYLVAINS,
Les plus anciennes traditions do la vio agricole et pasto-
rale des lîermnins , traditions retrouvant souvent leur ap-
plication cl leur \ il' par les viclnires des .Mlemands sur le.-
Turcs, amènent, chaque année, au tcin des principaulés
.Moldo-Valaques , d'immenses troupeaux venant du sud de
l'Allemagne, et, à l'instar de la jne«(o espagnole, exerçant,
au milieu des terres incultes, le droit de vaine pâture! Les
bergers qui mènent ces innombrables troupeaux sont con-
nus au pays moldo-valaque sous le nom de Mockans, et,
avec les cliasseurs de Tamadeo , ils sont à peu près les seuls
Ilôtus humains des grands steppes dont nous avons parlé !..
Leurs ma'urs, leurs coutumes, leurs instincts leur créent
ries affinités sans nombre avec les Cosaques du Don el de
l'Ukraine!..
La plupart d'entre eux appartiennent à celle race que
nous avons plus d'une lois mentionnée dans le cours de ces
récils... la race ticule . qui forme, au milieu des races hon-
groises, saxonnes et valaques, un enclave important de la
'Iransylvanie ! Un des plus grands dislricls de la Valacliic
( si habité aussi , en partie , par celte race : c'est celui de
Sekouieni , qui prend son nom de Sckoui , Sicule ! . . Les Si-
cules sont connus en .Allemagne sous le nom de Tzecklert.
L'armée autrichienne recrute parmi eux d'excellents sol-
dats de cavalerie légère. L'histoire révolutionnaire parle
d'eux à lune de ses pages les plus sanglantes. C'élaicnldes
hussards tzecklers qui conimirenl contre les plénipolcn-
tiairesde la République française à Rasiadt l'atlenlal le plus
inou'i dont il soil fait mention dans les fastes universels du
droit des gens. Me trouvant , dans le courant de l'été 1845,
le voisin à table, chez l'agent d'Autriche à Bucharest, de
.M le comte N**', l'un des plus grands seigneurs de la
Transylvanie , la conversation vint à tomber sur cette page
douloureuse de l'hiotoire des Tzecklers, el quel ne fut pas
I intérêt vif et profond qu'il excita en moi quand je l'en-
lendis me raconter qu'à quelques jours de la , étant dans ses
propriétés sur ses terres sicules , on vint le soir, fort tard,
lui dire qu'un de ses plus vieux paysans, se trouvant au lit
de mort, témoignait un vif désir de lui parler! Quelque
.ivaucée que lut l'heure l'insistance du messager annonçait
de la part du moribond un vœu si ardent de voir son seigneur
que le bon cœur du coniie N*** ne put se refuser d'y satis-
faire, eldeux heures effectivement ne se passaient pas sans
qu'au fond d'une pauvre cabane on ne vil le noble 'Fransyl-
xdin recueillant avec un soin religieux les dernières paroles
(lu hussard agonisant! Or, quelle élail cette confessiou ex-
traordinaire qui avait porté l'ancien cavalier à vouloir ab-
solument, à un moment si solennel, verser dans le cœur
de son maître toute l'affreuse amerlume du sien?
On l'a déjà deviné sans doute '
Au milieu d un déluge de larmes amères, arrêté de temps
il autre par des sanglots, le vieux hussard tzcckler ne ca-
chait plus qu'avant de paraître devant Dieu il avait voulu
décharger son âme du poids horrible qu'y avait toujours
laissé la mort de Roberjol , dont lui , quittant le monde, de-
vait malheureusement, hélas! près de cinquante années
après , se déclarer l'assassin !
Les Mockans tzecklers passent eux-mêmes pour avoir les
habitudes les plus farouches Leur vie, qui les conduit par-
fois, comme bergers de leurs innombrables troupeaux, jus-
qu'au fond de l'Asie, n'a rien que de tristement sauvage.
(Certains d'entre eux, déjà mêlés comme enfants à la con-
duite des troupeaux , n'ont jamais connu d'autre toit que la
voûte des cieux , d'autre horloge que le soleil ou les étoiles,
d'autre vêtement que leurs peaux de mouton , d autre lit
que le sol de la terre ! N'ayant participé à aucun deschan-
gements amenés par le temps , par la civilisation, par l'in-
ilustrie. ils seraient retrouves par des Romains du temps de
■Prajan exactement tels ijuils ont été vus par eux il y a
2000 ans!.. Ne connaissant aucun tissu , ne soupçonnant
pas même l'usage du linge , ils ont la détestable habitude
d'oindre leur corps avec le suif qu'ils extraient des brebis!
Un jour que, dans une de nos haltes de chasse aux steppes,
quelques-uns d'entre eux prenaient, par la pluie, refuge
près de nos feux , ils me surprirent cherchant à m'exalter
sur les délices de la vie pastorale par la lecture du joli ro-
man d'Estelle. Leur voisinage ne tarda pas à me faire passer
brusquement des scènes des bergers de Florian aux rudes
réalités do leur vie ûprect nomade... Je laissai bientôt mon
livre... défiant, parbleu, l'imagination du chantre de Né-
morin de trouver sur mes nouveaux hôtes une place con-
venable pour y attacher , sans une affreuse disparate , le
moindre petit nœud couleur de rose!..
(1 1 u n G E « o.
Celle petite ville vahupie , le siège de l'une des trois for-
lcre,s,-cs luniiics si longtemps lais.-ccs debout par les traités
cuire niusulinanset \ahnpies, prend son nom d'un fort au-
trefois bâti par les navigateurs génois en 1 honneur de saint
Georges, siinfo Giorgio... nom dont les Turcs on (l'abord
fait Giurgio, puis Oiurgewo.
On retrouve ainsi les vestiges des navigateurs génois
dans toutes les mors et jusqu aux centres des plus grands
lieuves du Levant ; des rivages du Danube , ils ont qiicl-
(piefois, les plus illustres, passé au livre dor de la noblesse
moldo-valaque ! tu possession des plus précieuses tradi-
tions maritimes, ils savaient, entre autres, affronter les
périls do la mer Noire avec un sang-froid, un couraaequi
ne se retrouvent pas chez tous les capitaines marchands
d'aujourd'hui. C'est que dès le douzième el le treizième
siècles , des intérêts mercantiles, assis sur des bases largos,
honnêtes, courageuses, éclairées, avaient su ouvrir au
prolit des plus basses classes du peuple au moyen Age des
relations cpie la politique occidentale d'aujourd liui ne rou-
git pas d'avoir entieromeiit perdues .
Ces temps, que nous n hc-iloiis p.is a appeler (es temps de
ta barbarie, savaient donc e\ploilcr, au profit de riiiimanile
souIVrauleet pauvre, les tivsoi>dc Mibsistances que la main
(le DuMi .avait accumulées si près de iuHiS(l<ifi,trc( riches gre-
nin-s d'iibiindanre! . ri cependant alors on était barliare,...
bai baiv, .-oit : mais monte sur de frêles uav ires, la foi au cœur,
loffr.Mule posée aux pieds de la Madone, on allait à travers
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
hô
les mille périls des mers cherchoi-, pour des frères, le pain
qui manquait! Marin de Gènes ou de Veniso, on porlail
jusque dans la mer d'Azof ou jusqu'au centre des plus
'^'rands neuves asiatiques ou européens les grands noms de
républiques florissantes!
Oui. sans doute... on était barbare , mais en échange des
mille dons de la Providence, là. d'oùon rapportait illustra-
tion militaire, science maritime, industrie abondante et
profitable à tous, on trouvait encore moyen de laisser après
soi ces impérissables citadelles bâties sous l'invocation des
saints qu'on avait plus d'une fois invoqués pendant la tem-
pête, et qui, debout sur chaque promontoire des mers du
Levant |iour y protéger là de grandes choses, semblent
aujourd'hui, du haut'de leurs demeures altières regarder,
moqueuses, les créations éphémères, mesquines ou égo'istes
de notre siècle qui passe!...
Cette idée a inspiré a l'auteur de l'histoire de la Roma-
nie la page la plus éloquente qu'il ait écrite... Je ne puis
résister au plaisir de la citer ici!...
«Oui, s'écria-t-il en parlant des Moldo-'V'alaques, oui,
certes, ce peuple a été brave! .. et c'est à sa bravoure qu'il
doit d'être resté lui quandia Hongrie et la Pologne agitèrent
trois fois la question du partage de son territoire. S'il eût
été moins brave, il se serait faitmahométan pour mettre fin
à des luttes qu'il se serait senti incapable de soutenir, mais
il est resté orthodoxel... Il a donc été brave, et l'on verra
que ce n'est pas lui qui a lâché pied ni à Nicopoiis m à
Varna. Je dirai plus, et l'on en sera moins étonné quand on
saura que le sang /'rartc et gaulois se mêle dans ses veines
au sang romain : il l'est encore ! Mais il a perdu presque
tous ses droits politiques , mais il est désarmé , mais il est
en proie à des influences qui redoutent sa bravoure, se pré-
parent la conquête de son sol par la corruption ; mais il est
corrompu par cent ans et plus d'un régime essentiellement
démoralisateur sous lequel, semblable à ce supplicié obligé
de se tenir debout entre quatre ha'ionnettes, il s'est affaissé,
comme lui, sous son propre poids ; mais il est démoralisé,
sans confiance entre les membres , sans union des membres
au corps, et me rappelle ce paralytique de l'Evangile qui
depuis trente ans attendait qu'une main charitable voulût
bien le mettre dans la piscine!... Quelle sera cette main
charitable? car il n'y a pas à dire, la Romaine (Moldo-Va-
lachie) attend tout du dehors , son développement politique
comme celui de son commerce. . . Celle de la France ! oui ,
sans doute, les Valaques se rappellent ces preux de Char-
les \l, avec lesquels leurs pères fraternisèrent et combat-
tirent à Nicopoiis, les Coucy , les La Trémouille , les Jean-
Sans-Peur !... Mais qu'importe aujourd'hui la Romanieà la
France? Quel intérêt la France peut-elle avoir à l'extrémité
orientale de l'Europe, à six cents lieues de sa frontière, à
l'embouchure du Danube, au bord de la mer Noire, là ou il
y a six cents ans, sans boussole, sans vapeur, sans rails ,
sansargent. sans centralisation , sans autre unité enfin que
la longue échelle féodale, maîtresse deConstanlinople, elle
combattit pendant cinquante ans pour l'empire du monde,
mais où, aujourd hui savante, industrieuse, active, riche,
unie, féconde en honneur et en courage, et, pour vingt peu-
ples chrétiens, étoile de salut qu'ils suivraient religieuse-
ment comme des mages; non-seulement elle n'ose plus jeter
dans la balance quelqu'une de ces lourdes épées de Bien-
nus, deCharlemagne, de Montmorency, de Godefroi , de
Raymond, de Beaudouin. de Napoléon, mais parle bas, bas
en baissant la tête, et craint de développer l'orgueil de son
pavillon sur des eaux oii Gênes, Venise, le pape lui-môme
j;nvoyaienl promener leurs galères ; c'est qu'alors il y avait
un Dieu, que tout Français disait ; Dieu et France. C'est
qu'aujourd'hui il n'est plus d'autre Dieu que l'or, et que
pour chacun la France est moi; c'est que le titre de roi trè.-^
chrétien tombe et meurt comme celui de roi de Navarre ;
titre glorieux, cependant , le plus glorieux des titres, résu-
manl'en lui-môme l'orthodoxie et le catholicisme, Luther et
Calvin, talisman puissant, magique, divin, auquel obéiront
un jour volontiers tous les peuples de l'Évangile, quand.
République très chrétienne, U Franceen saura faire usage. »
Giurgewo est un des points les plus intéressants de la
principauté de Valachie. Le mouvement des bateaux à va-
peur de la Méditerranée et du Danube en a fait depuis
quinze ans l'échelle valaque la plus visitée des voyageurs.
Bucharest qui , avant l'établissement des bateaux à vapeur
du Danube et de la Méditerranée . se trouvait aussi sur le
chemin de tous ceux qui se rendaient à Constantinople, ne
laisse pas que d'. nvier parfois le sort de Giurgewo , Bu-
charest fait en cela preuve d'une haute raison politiijue :
en effet, les progrès faits en tout genre par les Moldo- Va-
laques ne se seraient-ils pas centuiilés si leurs deux capi-
tales ne s'étaient tout-à coup et à leur grand regret vues
reléguées, par l'invention de la vapeur, dans des situations
trop méditerranées?
Bucharest et Jassy étaient encore il y a vingt années les
deux villes ou les ambassadeurs des grandes puissances
européennes se rendant à Constantinople arrivaient et sé-
journaient avec le plus de plaisir; l'habitude où les princes
étaient, par ordre de la Porte, de les placer sous la conduite
depersonnages importants, qui , revètusdu titre de mih-
mandars . les faisaient voyager avec apparat et vitesse,
avaient l'avantage de mêler les diplomates importants de
tout pays au mouvement de leurs idées, de leurs usages,
de leiir'histoire ; il en résultait toujours, de part et d'autre,
les plus intéressants comme les plus agréables souvenirs
Les Hongrois eux-mêmes auraient-ils une importance pa-
reille à celle qu'ils acquièrent chaque jour si leurs deux ca-
fiitales , Presbourg et Pesth, n'étaient pas aujourd'hui sur
a grande route de lOccident à l'Orient... le Danube?...
Les Moldo- Valaques devront donc, dans un terme très
prochain, suivre cet exemple, et puisque les voyageurs eu-
ropéens se sont éloignés d'eux, c'est à eux à se rapprocher
des voyageurs européens. Ce jour-là , la capitale moldave
sera à Galacz, et celle des Valaques à Giurgewo.
Fêtes lie Calais et Dunkeriiiie .
L'administration du chemin de fer du Nord vient do com-
pléter son réseau -ouest par l'ouverture solennelle des ein-
tirancliements maritimes de Calais et Dunkerque. Pans est
désormais port de mer ; il se relie par les voies ferrées aux
cinq principaux ports de Flandre, de Picardie, de Norman-
die: Dunkerque, Calais, Boulogne. Dieppe, et le Havre.
L'inauguration de ces nouvelles lignes a été célébrée au
commencement de septembre. Le premier départ a eu lieu
de Paris le vendredi 1", à six heures du soir; il portait,
avec le ministre des travaux publics , M. Recurt, et son
collègue de la justice, M. Marie, bon nombre de représen-
tants, de hauts fonctionnaires , d'employés supérieurs des
ministères etd'écrivains, conduits par les principaux admi-
nistrateurs du chemin , MM. James de Rothschild , Dalon ,
Delebecque et Pereyre, dont la parfaite courloisie, les em-
pressements, les bons soins ont été appréciés du moindre
de leurs invités durant tout le cours de ce rapide et long
voyage de plaisance.
Sept heures suffisent pour transporter ce train de grande
vitesse à Lille, où l'on arrive vers une heure du aiatin. Les
voyageurs se logent , comme ils peuvent , au hasard de
l'hospitalité ou de la belle étoile, et le lendemain, dés sept
heures, on est en route pour Calais.
On traverse successivement Perenchies, Armantières,
Steenweck, Bailleul. Hazebrouck , où on trouve une impo-
sante garde nationale sous les armes , Eblinghem , Saint-
Oiiier,'près duquel l'œil s'arrête sur une église gothique en
ruines qui fut admirable à en juger par ses débris, Walter,
Audruick et Ardros, dont le nom se lie inséparablemeni
au souvenir de cette royale débauche de plumes, de ve-
lours , de joyaux , de passementerie et de riches armures
que les contemporains et la postérité, après eux, ont nom-
mée le Camp du drap d'or De la station d'Ardres, on n'a-
perçoit pas malheureusement la vaste plaine située entre
cette ville et Giiînes où, le l" juin 1320 , Henri VllI et
F-rançois I" se rencontrèrent pour faire assaut, un mois
durant , de courtoisie chevaleresque et de magnificence
ruineuse; mais, par compensation, voici une merveille plus
actuelle : c'est le fameux pont sans pareil, assis précisé-
ment au point d'intersection de deux rivières qui se cou-
pent, à telles enseignes que ce pont n'est pas un pont ,
mais une croix. A onze heures du matin, le train s'arrête ,
après un parcours de 104 kilomètres , non point à Calais
même, mais à Saint-Pierre-lez-Calais, un faubourg limitro-
phe, sinon plus important, au moins plus populeux que la
ville môme. C'est là qu'est située la gare provisoire de l'em-
branchement qui sera bienlôttrapslérée à titre définitif dans
l'intérieur de la ville et à proximité du port.
li était temps , à notre sens , et grand temps qu'un tel
auxiliaire, qu'un tel deus ex machina (à vapeur) vînt en
aide a l'antique ville d'Eustache de Saint-Pierre et de
M. Dessein. Depuis longtemps Calais était malheureuse-
ment tombé en voie de décadence, et j'en gémissais à part
moi pour cette historique cité.
C'est entre Boulogne et Calais, et à quelques lieues en
deçà de cette dernière ville, que disparaissent tout-à-coup
les falaises remplacées par les tristes dunes, et que com-
mence la grande plaine des Pays-Bas, qui va abaissant son
niveau jusqu'en Hollande pour, au delà, s'abîmer sous la
mer du Nord. Do par la circonscription géographique, on
est encore en Picardie, mais déjà paraissent les Flandres ,
Fia ndres légèrement pouilleuses, il est vrai, ternes et crayeu-
ses, surtout dans le voisinage de la mer.
— Que l'on m'ouvre le cœur après ma mort, disait en
soupirant Marie Tudor, on y trouvera gravé le nom de Ca-
lais.—Certes, le voyageur aurait quelque peine à s'associer
à cette passion romanesque. En sa qualité de place forte.
Calais ne peut avoir l'ambition de compter parmi les sé-
jours de plaisance. Une grande place centrale d'où diver-
gent comme les rais d'un astre héraldique toutes Içs mes
aboutissant uniformément au rempart, tel est le plan fort
simple de cette ville sans air, sans mouvement, sans per-
spective. Cerclée et comprimée dans son étau mural, elle a
depuis des siècles ce.ssé de respirer et la vie s'est échappée
djelle, ou, pour mieux dire, c'est la ville même qui , lasse
do son oppression, a peu à peu rompu ses chaînes et a dé-
serté son cachot. Comme les demoiselles que ni barbons de
tuteurs , ni grilles, ni verrous ne sauraient retenir, elle a
enjambé les remparts et s'est égrenée dans la plaine, autour
du hameau de Saint-Pierre, qui de village devenait ville
et grande ville, tandis que de cité florissante et peuplée
Calais paraissait graduellement à l'état de véritable solitude.
Tout dernièrement, il est vrai, on s'est avisé que le régime
claustral et stratégique un peu trop prolongé pouvait bien of-
fusquerles poumons déjicalsde la prisonnière et lui insuffler
cet ardenldésir d'émigration. Vite alors on s'est empressé
de démolir un pan de muraille du côté de terre pour intro-
duire un peu de lumière et d'oxygène dans la geôle Mais il
était trop tard : la ville fugitive"sélait envolée, et dans un
avenir prochain , si le chemin de fer n'y met ordre. Calais
menace d'être complètement absorbée par l'ex-village de
Saint-Pierre, lequel , du reste , n'est rien moins qu'un lieu
de délices et a besoin de toute la puissance de l'antithèse
pour justifier une telle vogue.
11 restait à Calais son port et ses bassins; mais un mal-
heur amène l'autre. Voyant que la ville même abandonnait
la ville, le commerce et la marine n'ont eu garde de ne pas
suivre cet exemple : ils ont appareillé et cinglé , vent ar-
rière, qui à Boulogne, qui à Dunkerque. Aujourd'hui, bien
que touchant, pourainsidire , à l'Angieterre, dontlasépare
un unique pas , assez raisonnable il est vrai , c'est à peine
si elle se survit à elle-même comme point de transit, et re-
tient à son profit une petite portion de l'immense mouve-
mentquichaquejours'opéreentrele continentet la Grande-
Bretagne. Boulogne, Dieppe, Dunkerque déshéritent ou du
moins déshéritaient naguère son port , de même que Saint-
Pierre dépeuple ses maisons et confisque ses habitants.
La bénédiction du chemin a lieu sur un autel dressé dans
la gare provisoire de Saint-Pierre; elle est donnée par mon-
seigneur de La Tour d'.^uvergne, cardinal et évoque d'Ar-
ras. Puis les invités, au milieu d'un concours imposant de
gardes nationales, prennent le chemin de Calais, où ils sont
introduits par la magnifique porte de Richelieu.
En temps ordinaire, de longues rues où l'herbe menace
de pousser, quelques passants silencieux, de vieux logis in-
animés qui ne conservent même plus la physionomie gothi-
que , une unique promenade, plantée d'arbres sur les rem-
parts, où les habitants vont parfois respirer l'air, comme
les prisonniers des époques féodales sur la plate-forme d'une
tour, nul commerce, nulle activité dans le port, et peu ou
point de monuments, voilà Calais.
Mais aujourd'hui rien ne ressemble moins que Calais
même à ce portrait Ses rues jonchées de fleurs regorgent
d'une population en armes et en habits de fête; les vivat,
les fanfares, un tumulte joyeux animent la ville naguère
encore muette et morne : c'est une transfiguration véritable.
On arrive à la grande place où sont dressés les tables
d'un banquet gigantesque dédié à la garde nationale. Voici
le beffroi dont la tournure sarrasine annonce les Flandres
espagnoles . et la maison de ville d'un style renaissance
original et élégant, au-devantde laquelle un portique fleuri
et délicatement ouvré supporte les bustes de plusieurs hom-
mes illustres et chers à la mémoire de la ville. C'est d'abord
ce noble citoyen dont s'enorgueillit la potence, Eustache de
Saint-Pierre, portant en guise de cordon de Saint-Michel
cette corde fameuse dont il ceignit son cou avant de s'ofl'rir
en victime propitiatoire à Edouard III ; puis le grand car-
dinal fondateur de la citadelle de Calais, et enfin Henri-le-
Balafré qu'une inscription surnomme le libérateur de lavUle
et qui en fit lever le siège en 1338.
Pour en finir avec les banquets, disons vite que la muni-
cipalité en avait fait préparer trois: l'un sur la grande place,
destiné à la garde nationale; l'autre, sous les beaux arbres
de la promenade des remparts, autour duquel se sont assis
douze cents ouvriers du port et du chemin ; le troisième
enfin, dans un local couvert, pour les invités de Paris.
Ceux de nos lecteurs qui ont pris part à l'inauguration de
la grande ligne du Nord voilà bientôt deux ans et demi, ont
sans doute présenteencore à la mémoire rancuneusede l'es-
tomac, cette cruelledéceplion subie chemin faisantà Amiens
où sur le renom des pâtés de ladite ville , chaque touriste
s'attendait à une collation splendide, annoncée au reste pom-
peusement dans le programme de la fêle, et où quelques
miettes , à peine dignes de Lazare, quelques os à demi ron-
gés, composèrent pour la plupart le menu du festin [iromis.
Hélas! tel fut à Calais le sort d'un grand nombre de voya-
geurs qui se pressèrent vainement devant la salle du festin .
L'édilité. qui n'avait pu inviter tout le monde, efi'rayée de
ce prodigieux concours, eut l'idée, prudente à coup sur,
maisassez peu chevaleresque, défaire procédera l'appel no-
minal de ses conviés. H^las! ily eut peu d'appelés. Le croi-
rait-on? il se trouva , parmi les convives à jeun, parmi les
estomacs en peine, bon nombre de personnes haut placées,
des chefs de cabinet, des représentants même et jusqu'à
un vice-président de l'.Vssemblée nationale, M. Corbon. le-
quel était prêt à quitter, non-seulement la place, mais la
ville, dans un accès d'indignation gastrique que le procédé
jéjunatoire justifiait trop, lorsque l'autorité lacale prévenue
s'empressa de réparer envers M. Corbon et ses collègues
l'omission peu parlementaire dont à son insu évidemment
elle s'était rendue coupable.
Au reste, je ne sais pourquoi il était écrit que la ville
de l'aimable M. Dessein serait, bien malgré elle sans doute,
inhospitalière ce jour-là. Un second train, arrivé dans la
nuit, dépose dans Calais, vers une heure du matin, M. Du-
piiialné, M. Charles Dupin, M. Pagnerre, M. Bixio, le
digne et héroïque blessé de juin , et quelques autres per-
sonnages non moins consulaires. Cei messieurs, à cette
heure avancée de la nuit, se mettent en quête d'un sou-
per et d'un gîte.... soin superflu, vaine entreprise! D'un
bout de la cité à l'autre et de la cave au grenier, tout est
[ilein. Nos représentants, après avoir frappé inutilement à
la porte de tous les hôtels de quelque apparence, se rabat-
tent sur les auberges, puis sur les cabarets, et toujours avec
au.ssi peu de succès. Perdant patience à la fin. ils élèvent
la voix, frappent à coups redoublés à une dernière porte
rebelle dont ils prétendent obtenir l'entrée, malgré l'auber-
giste effaré , et font tant et si bien que l'hôte picard envoii?
quérir la garde qui arrête ces me.-^sieurs pour tapage noc-
turne. Décidément, les vice-présidents de l'Assemblée n'é-
taient pas en veine ce jour-là. Voyez-vous M. Dupin ut
M. Pagnerre au violon ? Cette aventure , digne de Chapelle
et Bachaumont, se conclut naturellement par une recon-
naissance et un coup de théâtre qui prosternent la garde et
le cabaretier aux pieds de nos représentants. J'aime à croire
qu'en excipant de leur titre et à la faveur de leur neuf-
centième de souveraineté, ils ont pu obtenir en fin de
compte le dédommagement d'un morceau de pain et d'un
matelas. Toutefois ïa chronique ne s'explique môme pas
catégoriquement sur ce point.
Revenons au banquet officiel. Il a été, comme bien on
pense, orné de toasts de tout genre. M. Recurt a bu à la
ville de Calais; le général commamlant la division a porté
avec grand succès'la santé du général Cavaignac; M. De-
gouve-Denuncques , préfet du Pas de-Calais. a porté un
toast à la République. On a trouvé généralement que ce
magistrat n'avait pas été bien inspiré, non certes dans le
choi\ de son toast, mais dans les développements dont il
l'a l'ait suivre et en flétrissant avec trop d'amertume ce
qu'il a Domméles turpitudes monarchiques. La fête n'avait
rien de politique, d'une part; du l'autre, le banquet comp-
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UMVERSEI
Fêtes de Calais. — Banquet de la Garde Nationale sur la grande place.
tait parmi ses conviés bon nombre d An-
glais (levant lesquels il pouvait n être
Sas du meilleur goût de fulminer contre
une forme de gouvernement qui est la
leur ; enfin, cette sortie ne pouvait plaire
non plus, dans sa forme un peu trop
acerbe, à la ville de Calais qui n'est pas
républicaine de la veille , qui , la pre-
mière saluait . en 1814 , la renaissance
des lis et la rentrée en France de
Louis XVIII, et poussait l'enthousiasme
envers le restaurateur bourbonien jus-
qu'à faire graver sur le bronze I em-
preinte de son pied royal. Le maire de
Douvres a recueilli en revanche de très
nombreux applaudissements en récitant
un petit speech en langue anglaise où il
propose de boire à l'union de plus en
Iilus élroile de la France et de l'Angle-
terre et au développement de la haute
prospérité commerciale à laquelle elles
peuvent atteindre conjointement, à l'aide
des nouvelles voies ouvertes comme in-
termédiaires naturels entre les États
d'Amérique et les nations allemandes.
Après le festin, une partie des invités
sont allés faire une promenade en mer
sur le joli bateau à vapeur leiîa(m,misà
leur disposition pour cette journée ma-
gnifique; les autres , M. Recurt en tête ,
sont allés visiter la ville et ses monu-
ments dont le principal est , après le
beffroi et la maison commune , Tt^list
Notre-Dame qui remonte aux premiers
temps de l'art gothique, l'époque de la
force et de l'austérité , où les maisons
divines, criblées de meurtrières, flan-
quées de tours et de donjons sans cesse
retentissants sons le pas des archers et
des hommes d'armes, semblaient autant
de forteresses. Elle ne renferme à l'in-
térieur aucun objet d'art qui mérite
d'être cité , si ce n'est toutefois un bel
autel de marbre blanc volé il y a quel-
que cent ans à un chapitre de Namur
qui s'en plaint encore amèrement. Voici
comment j'ai oui conter par les Namu-
rois eux-mêmes le larcin commis à leur
préjudice. L'autel, commandé à un mar-
brier de Gênes, avait été chargé sur un
navire qui devait le rendre a sa desti-
nation par la Meuse, mais qui , passant
devant Calais , eut le malheur de faire
naufrage. Le droit d'aubaine , si bien
stigmatisé par Sterne, était alors dans
toute sa force. Le dépôt sacré du navire
belge fut considéré comme épave par le
chapitre de Notre-Dame qui se l'attri-
bua . malgré les instantes réclamations
des jésuites de Namur . lesquels en fu-
rent réduits à faire confectionner, sur le
modèle du naufragé , un joli autel de
Fêtes de Calais. —Bénédiction du Cheiuin de fer.
•i;ii.i.l:stration, journal universel.
/ir>
Fi-les de Dunkerquc— L.i l'rocessiou du lie
ilb
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
mer admirables , dans les Ilots jaunes que soulève la
lame en s'imprégnant de sable sur cette plage habituelle-
ment solitaire , et nous avons trouvé fort peu d'imitateurs.
Il est vrai qu'il faut aller chercher le Ilot ii une grande dis-
limcc , car on dirait que la mer trempe dans la conjuration
ourdie contre les Calaisiens et que, elleaussi .prendà plaisir
d'en abandonner les parages. La côte , pourtant, mérileune
meillenrc fortune : lagrcve est douce, trésétendueetd'uTH!
pente presque insensible, bien qu'un peu trop accidentée :
il y régne malheureusement un assez fort courant vers
l'oiiesl ; mais c'est la chose si ordinairesur toute cette cote
que les mariniers de la plage ne songent même pas â vous
en prévenir.
L'établissement des bains situé sur la dune même , en
avant des bassins de la ville , paraît assez considérable , et
lie manque pas d'élégance. Les habitués seuls lui font dé-
finit malgré les séduisantes provocations de l'autorité mu-
nicipale. Néanmoins il s'y donne chaquemercredi un grand
liai , tant que dure la saison des bains. Quelque restreint
(|ue soit le nombre d'étrangers qui réjionde ii l'appel de
l'imprésario , ils sont toujours les bienvenus , et ces occa-
sions trop rares de plaisir tirent la ville de sa torpeur.
Nou< avons admiré ensuite , parmi les nombreux ouvra-
ges du port , un très beau phare de près de cent pieds de
hauteur, construction toute récente que nous avions vu fon-
der il y a moins de deu.x ans , et que nous retrouvons au-
jourd'hui entièrement achevée et vraimenl remarquable ;
la jetée , les bassins à flot , et enfin l'écluse de chasse, très
beau travail dont ceux de nos lecteurs peu experts dans les
usages maritimes nous sauront gré de leur apprendre en
peu de mots l'utilité et l'emploi.
Une écluse de chasse , et particulièrement celle de Calais ,
est un vaste bassin communiquant avec la mer par quatre
portes. A marée haute . le bassin se remplit par ces quatre
is>ues, qu'on a soin de laisser ouvertes. Mais aus.sitôt (|ue la
mer commence à rrfluer, les portes sont hermétiquement
fermées et le bassin demeure plein , tandis que le port, se
vidant , laisse les bâtiments à sec , en équilibre sur leur
quille Puis au plus bas de la marée , les portes sont tout a
coup rouvertes, et le contenu du bassin , se précipitant
brusi|uemcnt dans l'atterrissage du port avec une puissance
de jet (|ue les ingénieurs évalueut a une force de quinze
viille chevaux , repousse violemment les sables et les galets
qu'amène la marée montante, et qui sans ce procédé aussi
ingénieux que simple dedésobstruction , ne tarderaient pas
il envahir et a détériorer gravement, sinon môme à combler
le port
Ce lutsurtout la nuitvenuoque le jeu de cette écluse gi-
gantesque et le bouillonnement des eaux éclairées par un
l'eu d'artifice splendideet une pluie multicolore d'étincelles
vertes, rouges, bleues , blanches, offrirent un coup d'œil
admirable. Un poète de l'école impériale, a l'aspect de ce
tableau vraiment magique , n'eût pas manqué de dépen-
ser une pluie d'allégories , un feu roulant de métaphores ,
pour célébrer dignement cette union prestigieuse , mais
adultère , de la marinière Amphitrite et du citoyen 'Vulcain.
S'ous regrettons de n'avoir pas une si riche palette à notre
disposition , et nous dirons tout simplement que ce specta-
cle grandiose valait seul le voyage etétaitbien au-dessusdes
prétendues merveilles aquatiques et pyrotechniques et de
toutes ces brillantes confusions d'éléments qui faisaient
sous le grand roi (vieux style) l'orgueil des fêtes de Ver-
sailles , et dont Molière s'est évertué à nous retracer les
splendeurs
Ce superbe effet de lumière et d'hydraulique, combiné en
mode hurmnnien , comme dirait un disciple de Fourier, et
une tentative non suivie d'effet pour lancer un ballon , ont
clos les divertissements de cette journée , et chacun dans le
gîte exigu dont il avait été assez heureux pour se munir, est
allô aussitôt réparer ses fatigues et reprendre des forces
pour les jouissances du lendemain , car il fallait partira
iiuit heures pour Dunkerque , où toute une série d'enchan-
tements , do surprises , de liesses , d'attentions délicates
el gracieuses attendait l'heureuse colonie parisienne.
DE CALAIS A nUNKEHOUE.
De Calais à Uunkerque , il faut rétrograder jusqu'à Haze-
lirouck , où se bifurque la voie , et refaire par conséquent
la moitié du chemin parcouru lorsqu'on vient de Lille a
('..dais. Maison ne se plaint pas de ce supplément de roule.
.Malgré ces lignes un peu droites, un peu calmes, tranchons
le mot , un peu monotones peut-être , le paysage flamand ,
avec ses magnifiques cultures, ses beaux villages , ses
maisons peintes, son air de propreté , d'aisance, de com-
lort , ses clochers aigus dont l'azur du ciel découpe l,i si-
lhouette à chaque coin de l'horizon , ses plantiueiiï-cs allées
d'arbres, a je ne sais quel charme et une IkmuIo seii'ine
qui , pour ma part, je l'avouerai , m'est loiijouis allée droit
au cœur. On sent que ce fertile et tranquille pays est ha-
bité par dos liommes [irobes , modérés , laborieux , sensés ,
heureux et très dignes de l'être , car ils sont bienveillants
et bons.
La premiers station , au sortir d'IIazebrouck, est au pied
de ce Jlont-C.assel , le Caucase dos Pays-Bas , d'où l'on
aperçoit trois royaumes, y compris une république, el trois
cents villes ou villages. 11 nous paraît offrir une grande
analogie avec la butte Montmartre; car, ainsi qu'elle ,
il est couronné de moulins à vent d'un aspacl des plus
agréables.
Viennent ensuite Arnèko, Esquolbecq ( des noms à faire
frissonner l'ombre de l)i<spréau\ ), liermies, la ville jumelle
de Dunkenpie. doni iMuisadiniroMS Icï, plaiil.itions lu\urian-
les. etcnliii la noble eue inaritiiiic , en ïiwnrins ICijlise des
Dîmes, que les Flamands iiommeiil Vuiilierqiie
— Messieurs , j'ai bien l'honneur d'être votre très hum-
ble. Vos passe-ports , s'il vousplalt'^
— Les voici.
— A merveille. Où descendez-vous , messieurs'? On vous
les remettra chez vous.
— Du tout, nous voulons les attendre.
— Messieurs , cela sera fort long.
— Nous ne sommes point du tout pressés.
— Huit passe-ports à enregistrer, à viser, a légaliser, ce
n'est pas une [letite besogne !
— Mettez-y le temps nécessaire.
— J'en ai bien^our une heure au moins.
— Eh bien ! nous attendrons une heure.
— Il fait nuit ; je n'ai que ma lanterne pour m'éclairer,
et encore ne suis-je pas bien sûr d'avoir mes lunettes sur
moi.
— Allez les chercher.
— Ah ! si fait , pourtant les voici.... Huit passe- ports I...
Il fait grand froid... Messieurs, vous vous enrhumerez.
— N'ayez pas peur, digne portier ; et, puisque vous nous
voulez tant de bien , tâchez de faire diligence.
Ce petit dialogue signifie quenoussommesà Dunkerque ,
ville frontière où le visa des passe-ports n'est point une vaine
cérémonie ,00 nul voyageur n'est admis s'il n'a en poche son
portrait d'après nature fait par l'adjoint de sa commune.
Appelés municipal , à deux francs la i-éance ; que le portier-
consigne tire un fort joli produitde l'enregistrement desdites
portraitures sur le gros livre à cet effet remis en ses mains
vigilantes, à cause de la complaisance qu'a ensuitecet homme
obligeant de rapporter à qui de droit ses papiers ii domi-
cile , marque de dévouement et de bon naturel qu'il est trop
juste de reconnaître par un raisonnable pourboire ; que,
nonobstant, la compagnie dontje fais partie, c'est-à-dire les
voyageurs de la voiture de Calais , a le mauvais cœur de se
refuser à un impôt si légitime et se résigne volontiers à at-
tendre aux portes , non pas une heure , formidable hyper-
bole dont elle n'est pas dupe , mais quelques minutes au
plus , ce qui est tout juste le temps nécessaire au digne con-
cierge pour se débarrasser de sa facile besogne , laquelle ii
prend le parti d'expédier au plus vite une lois bien con-
vaincu à regret que toutes les lenteurs du monde ne par-
viendront à faire entrer ni un verre devin dans son gosier,
ni un centime dans sa bourse.
Voilà comment naguère les choses se passaient à Dun-
kerçiue , ville frontière , el nous supplions le lecteur de
croire que nous en parlons de visu et de audilu. Mais au-
jourd'hui , arrêtez donc avec un portier-consigne un train
lancé à toute vapenr, qui prend d'assaut la place et jettecinq
cents voyageurs aux portes mêmes de la cité ! Dunkerque a
sur Calais ce fort grand avantage 'que le débarcadère de sa
ligne de fer est situé dans son enceinte même. Nous assis-
tons dans cette gare somptueusement décorée à l'imposante
cérémonie de la bénédiction du chemin par deux des trois
prélats-cardinaux qui représentent le clergé français au
conclave , Mgr de La Tour d'Auvergne , venu de Calais
avec nous, et MgrGiraud, archevêque de Cambrai , digne
successeur de Fénelon . sinon par les talents littéraires, du
moins par les vertus évangéliques.
Nous voici dans la ville , et dès les premiers pas , ceci
n'est point une hyperbole , nous sommes ravis en extase.
C'estuncoupd'œil vraiment féerique que celui que présente
à nous la ville disparaissant tout entière, non pas sur un
point isolé , mais d'une extrémité à l'autre, dans son en-
semble comme dans ses plus modestes quartiers , sous les
bannières , lesdrapeaux, les oriflammes, lesbanderolles, les
tentures oinnicolores, ou pour mieux dire , ce n'est pas une
ville , c'est une vaste et magnifique décoration d'opéra, c'est
une kermesse telle que jamais n'en ont peinte ni rêvée même
les Téniers ou les Ostade. Comme il serait fort difficile de
juger Dunkerque sous tous ces miracles de mise en scène ,
dépouillons-la d'abord de cette splendide enveloppe , quitte
à la lui rendre bientôt , afin de ménager nos c//"e(s , comme
iloit faire tout bon machiniste et tout passable cicérone.
ASPECT GENÉnAL DE DUNKERQUE.
Selon moi , le nom seul de cette ville éveille des idées de
manoirs gothiques, detoitsaigiis, de (lignons, do ruellesen-
chevêtiées , de hautes tours a clochetons et de timbres ar-
genlinf qui périodiquement ébranlent l'air et charment
l'oreille de leurs sonneries cadencées. Ces imaginations ne
servent qu'à préparer au voyageur littéraire et enthou-
siaste une véritable déception, Dunkerque est une cité ré-
gulièrement neuve ; >(■> laïucs nirs liiirdci> d'éililices mo-
dernes se coupent a aii^li , (liniN cniiiiiH' les .iM'iiues d'une
forêt royale, et les I.mi> j.iniic. , hlanr dcl.iit ou \ert-olive ,
sicliersà la prnprlclc Ihiniaiidi' , iciiiplarriit iiiiiformément
ces tciiilcs liniiH-s , email M'iiér.ilile des sin les dont on la
supposail ciiipri'iiite. lluiilvcrqur n ,i pUisipiun beffroi sans
carillon ; pour Icnile euhsc un Iniiple dcdie a Sainl-liloi ,
lecpiel est enliriciueiil di |iuui\u d'iiitciél auili'ilaiis,eldont
lo|iortailrap|H'lle .dassivlniii li rst vrai ,1a laçadiMle Saiiit-
Sulpice. Sur la grande iilaieselcvc la statue de Jeaii-Uart,
par M- David (d'Angers) , car Dunkerque n'èlail pas ville
il rester en arrière de Dieppe , qui a inaugure lu hrunze de
Du()uesno , ni de Saint-Malo , qui a fondu sesvieuxcanons
pour en tiior l'effigie de son Duguay-Trouin. Le Jean-Uarl
do M David est passionné et expressif comme toutes les
œuvres de cet llabilea^li^te. La pose du héros, qui , la tète
haute . le front superbe et le corps fièrement cambré , jette
un défi à l'ennemi , est pleine de fougue et denoblesse. Peut-
être l'exécution laissc-l-elle à désirer sous certains aspects :
il y a dans ce mouvement une certaine roideur. dans cet
élan ,je ne sais quoi de guindé . de pétrifié . si j'ose le dire.
Il semble que le bouillant statuaire n'ait pas pris le temps
d'exprimer toute l'énergie de sa pensée. Il l'a déversée li-
quéliante dans le creuset . avant d'élaborer le moule. Néan-
moins , le Jean-Bart jouità Dunkerque d'une juste popula-
rité , et le premier anniversaire de l'érection de la statue
( .j septembre 18i3 ) fut fêté , nous dit-on , par une ovation
imposante , qui s'adressait non-seulement au grand marin ,
mais au sculpteur. Les femmes et filles de malelolsy étaient
en majorité , et elles récitèrent à la statue un compliment
naif qui dut aller au cœur de l'illustre défunt , malgré Vas
(ripiez; symbolique qui aujourd'hui revêt sa vaillante poi-
trine de soldat el de navigateur.
Dunkerque se divise en deux villes distinctes : celle qu'on
voit , neuve, symétrique , soigneusemcnlbadigconnée; l'au-
tre , invisible et souterraine, dont les toits sont à la hauteur
du pavé el dont les persiennes s'ouvrent au niveau du trot-
toir. Sous chaque maison s'élage une profonde cave (ce sont
les anciens greniers à sel ) , et ces caves renferment . non des
bouteilles ni des fûts , mais une population nombreuse. J'i-
magine que l'habitude des bombardements de l'Anglais
donna aux Dunkerquois l'idée de s'inhumer ainsi vivants
dans ces façons de casemates, et que cet usage prudent ,
une fois passé dans les mœurs . est devenu pour eux une
seconde nature On descend dans ces grottes , non par l'in-
térieur de la maison , mais par des trous carrés percésdans
le dallage du trottoir, auxquels aboulil une rampe et que
recouvre , pendant la nuit , ou en l'absence des habitants ,
une sorte de trappe ou de plancher mobile. C'est par la
même voie unique qu'un peu d'air el de lumière pénètre
dans ces terriers. Je n'ai pas été peu surpris de voir de tou-
tes parts , dans les rues tie Dunkerque , ces étranges portes-
fenêtres s'ouvrir comme des écailles d'hullres aux premiers
rayonsdu soleil ; puis apparaître tout doucement, un peu au-
dessus de la dalle , des têtes humaines dont les corps res-
taient plongés dans les entrailles de la terre , dételle façon
qu'elles présentaient à distance l'image saisissante de ces
supplicies de la Chine , qu'un souverain barbare fai.sait en-
terrer vifs jusqu'au menton. Je n'ai pas à discuter le mérite
de ce mode d'habitation renouvelé des anciens Guanches :
il peut se faire qu'il offre de ténébreuses jouissances . de
mystérieuses compensations aux citadins qui s'y confinent ;
je n'en parlerai qu'au point de vue du promeneur et du pas-
sant qui courent à chaque pas le risiiue de s'abimer dans
un insondable dessous comme un diable d'opéra , ou démet-
tre le pied sur un de leurs semblables, en croyant foulerun
pavé. Je ne puis songer sans effroi à ce que deviendrait un
aveugle errant dans les rues de Dunkerque. Je ne suis que
myope , et dès mes premiers pas dans celte ville semi-sou-
terraine, j'ai failli heurter du pied un couple amoureux qui
prenait le frais à la hauteur de la chaussée et devisait , en
respirant la brise matinale du ruisseau. Il ne paraît pas au
surplus que ces singuliers logements soient exclusivement
la demeure de la population indigente delà ville, comme on
pourrait le supposer. L'ameublement de plusieurs de ces
caves révèle une certaine aisance chez les particuliers qui
s'y blottissent On y trouve non-seulement la propreté fla-
mande , mais des prétentions , parfois justifiées, à I élégance
et au comforl. Des pots de fuchsias, de reines-marguerites,
de géraniums et d'hortensias , pâles fleurs plus souvent
éclairées par la lampe que par les rayons du soleil , garnis-
sent fréquemment les marches de l'escalier conduisant à la
tabatière ou écoutille extérieure , qui sert ainsi tout à la fois
de balcon , de jardin, de porte et de fenêtre. Beaucoup de
propriétaires font la spéculation de meubler eux-mêmes ces
caves el de les louer a tant par mois ; c est ce qu'indiquent
quantité d'écrileaux appendus aux murs etofl'ranl invaria-
blement un dessous de maison garni à louer, fraîchement
décoré, soit pour le prochain terme , soit pour une immé-
diate entrée en jouissance. Cette dernière formule me pa-
raît un remarquable abus de langue. Je n'aime pas non plus
le dessous de maison. Je ne vois pas pourquoi on n'oserait
écrire : Un souterrain garni à louer
Le port et les bas-ins de Dunkerque , que l'.Xnglais a
voulu combler, témoignant ainsi par cette rage de l'impor-
tance q'uil altachail a ce débouché maritime, reviennent
peu à peu à l'animation el à la prospérité qui leur avaient
valu celte étrange marque d'estime cel édit de proscription
digne d'un Genséric et non d'une nation civilisée. Ce crime
de lèse-humanité , cel outrage sanglant jeté à la détresse
d'un grand roi , n'ont pasélé, grâce à Dieu , poussésà leurs
dernières limites , et Dunkerque pourra voir renaître sa
S[ilcndeur des anciens jours , si la mer, sa féconde et riche
fiancée , ne l'abandonne pas dans celte humeur fantasque
commune aux divinités-femmes. C est là le sort qui attend
peut-être dans l'avenir le pori et la ville de Dunkerque La
mer s éloigne lentement et les deux immenses jetées qui
.semblent la poursuivre ont peine à atteindre . malgré leur
hypcilii>li(]ui' longueur, le flot capricieux chaque jour moins
afiondant et plus rclielle. S'il venait à tarir dans le large
chenal qui iiiriie les navires au port , ce serait fail de Ta
ville qui drvr.iil des ce moment se résigner au sorl funèbre
d'Aiguos-Miirtes el de Harfleur. autrefois des ports floris-
saiils , .injnuid liiii pei-dus dans les terres Mais il faut se
lliM - iii~ il iiii !ii\ puissantes ressources el aux progresin-
d(liîn> Ar l.i -CI' lice moderne du soin do prévenir une telle
calaiiiiU' n.ih.iiLile.
La même circonstance, jointe sans doule à la position
excentrique de Uunkerque, reléguée au sommet de l'angle
le pliisseplenlrional de France, a parujusqu'ici un obstacle
invincible au développement de son elablissemenl thermal.
Uieii lepriidaut u'esl epap,;iie poin y .illln-r les longueurs
L'clalili.s>ciiieiit esl élégant, oommodo. suflisamnient spa-
cieux. Un \ sent l'iufluenced'une bonticdircclion. Si la ville
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
lil
n'est pas des plus gaies , elle vaut bien tout au moins le
séjour d'Ostende. On trouve de l'affabilité et de la bonho-
mie parmi ses habitants, et . qui plus est, de la conscience.
La vie y est facile, large, peu dispendieuse, et faite pour
contenter au moins de frais possible, les exigences gastro-
nomiques. Les prix de l'établissement sont aussi des plus
modérés. Les voitures-baignoires sont les plus agréables ,
les mieux pourvues et les moins chères que j'aie encore
trouvées en France. Néanmoins la plage do Dunkerque
n'attire dans la belle saison que d'assez rares visiteurs. Il
faut aller chercher la mer à des distances olympiques, pour
ne rencontrer le plus souvent qu'un Ilot grêle, sans pro-
fondeur J'en ai fait 1 épreuve et je puis dire que j'ai quel-
quefois à peine trouvé de l'eau dans l'Océan.
L'établissement situé, comme celui de Calais, au haut
de la dune, renierme une longue galerie , une salle de bal.
un salon attribué aux dames, un cabinet de lecture, une
salle de billard et un café-restaurant dont le service et le
tarif méritent les plus grands éloges. Tout cela est fort
convenablement décoré et meublé , quoique sans aucun
luxe. L'édifice présente sa façade principale à la mer; de
l'autre côté le chef de l'établissement s'est efforcé de plan-
ter quelques buis et quelques arbustes dont la réunion est
ambitieusement qualifiée de jardin anglais. Il était difficile
de mieux faire au surplus sous le feu dévorani d'un en-
nemi mortel a toute végétation comme l'àpre brise de la
Manche . et ce peu de verdure dont il faut remercier le di-
recteur, anime encore et réjouit cette grève morne et sa-
blonneuse.
DÙNKEBQOE LES 3 ET i SEPTEMBRE.
Dunkerque est une ville agréable on tout temps; mais
la munificence de ses habitants, leur émulation à fêter di-
gnement l'inauguration de leur ligne de fer et leurs hôtes
parisiens en ont fait un séjour de fées. Nous avo:.s dit que
tout Dunkerque , port et cité , maisons et navires, ville et
faubourgs, était fleuri et pavoisé. Mais le plus étonnant ,
c'est que la décoration des rues , places ou avenues était
variée ii l'iniini : pas une ne ressemblait aux autres; mais
partout avait présidé une imagination , un goût véritable-
ment merveilleux. Pour n'en citer que quelques-unes (bien
que pour être juste il fallût tout décrire), on remarquait la
rue Arago toute tendue de pavillons et garnie de rosen-
huls (littéralement chapeaux de roses), édifices aériens ap-
pendus sur la voie publique à peu près en forme de lustres
et composés d'une couronne de dentelles noires très fines
retenant des fils innombrables qui supportent eux-mêmes
à leurs extrémités des rondelles de drap de couleur écarlate,
des disques de métal léger, des œufs et dos verroteries qui
s'entrechoquent et résonnent plus ou moins harmonieuse-
ment au moindre souffle de la brise; la rue Dupouy, trans-
formée en une avenue verdoyante ornée d'innombrables
bannières et de lanternes de couleur , oii s élevait un arc-
de-triomphe en feuillage portant à son fronton l'esquisse
tracée à grands traits d'un chemin do fer. et au-dessus cette
inscription : A lamémoiredu citoyen Dupouy (ancien dé-
puté et ancien maire de Dunkerque, fort considéré et fort
aimé à juste titre), lequel , par parenthèse, est tout plein de
santé, bien que cette inscription comménioralive ne tende
à rien moins qu'à le ranger parmi les vivants de la veille ■■
enfin la rue de la Marine où régnent, avec une profusion de
bannières et de rosenhuts, deux longues liles de poteaux
de verdure rattachés entre eux par des écliarpes aux cou-
leurs de la ville, c'est-à-dire mi-parties bleues et blanches,
et où sur les tentures des maisons, de chaque coté, une
suite d'élégantes couronnes circonscrivent le nom de toutes
les villes auxquelles Dunkerque se relie par le nouveau
chemin de fer.
Sur ces quelques échantillons, vous jugez si les Dunker-
quoi's sont passes maîtres en l'art des fêtes et liesses ; mais
vous en verrez bien d'autres. L'autorité n'intervient pas dans
ces solennités publiques, elle n'a que faire de s'en mêler.
L'imagination, le zèle, le bon goiitdes habitants lui viennent
puissamment en aide, ou même, pour mieux dire, suppléent
entièrement son action. Est-il question d'organiser une
grande fête, le maire en avise simplement ses administrés
quelques semaines à l'avance. Un bureau de renseignements
est ouvert à fhôtel-de-ville pour recevoir les plans, devis
et conceptions de chacun. Uncomitésupérieur fait un choix
entre ces diverses propositions artistiques, arrête le pro-
gramme et nomme pour chaque quartier des commissaires
chargés de son exécution. Ces derniers surveillent et diri-
gent les apprêts, passent les marchés, et ne font jamais un
seul achat sans une vente immédiatement correspondante ,
c'est-à-dire que ce qu'ils payent 1 franc par exemple , est
déjà revendu au même marchand ou à tout autre pour 7j
centimes avant d'être mis en œuvre. C'est là, à vrai dire,
une véritable location passée dans les usages du pays, et
qui a le double avantage de ménager les deniers des sou-
scripteurs en obtenant pour peu d'argent des effets bien
supérieurs à ce qu'ailleurs on produirait pour des sommes
beaucoup plus fortes. Quant aux frais, ils sont supportés
par voie de coti>alion volontaire ; riche ou pauvre, cha-
cun porte son offrande, sauf quel(]ues récalcitrants aux-
quels n'est infligée d'autre punition que de voir leurs
maisons , privées de tout ornement , faire tache par cette
nudité dans les splendeurs universelles. A l'issue de la
fête, des médailles d'honneur sont décernées par un jury
spécial aux décorateurs qui se sont le mieux acquittés de
leur tâche.
Nous avons cru devoir rapporter ces détails peu connus
parce qu'ils jettent du jour sur les mœurs de cette excellente,
cordiale et trop heureuse population flamande, en qui l'a-
mour des fêtes est une passion sérieuse, innée, nationale, à
l'épreuve des soucis et des graves orages politiques, qui,
partout ailleurs, chassent les plaisirs devant eux en môme
temps qu'ils jettent au front des citoyens la maussaderie et
l'amertume.
Le comité supérieur qui a organisé la dernière fête de
Dunkerque mérite de passera la postérité do ['Illustration.
Nous avons recueilli les noms de ses membres dans un élan
d'enthousiaste gratitude; ce sont: MM. Lefèvre , Desgra-
viers, Forcade, Dutoit, Delfosse et Malo, tous gens de goût
assurément, ils nous en ont fourni la preuve.
Entamons la série des fêtes.
Uu banquet magnifique fut, en premier lieu , offert aux
invités de Paris, où la gastronomie dunkerqiioise, qui jouit
d'uneréputation méritée, brilla de toute sa splendeur. Nom-
bre de toasts et de discours furent portés et prononces ; l'un
par M. Marie, ministre de la justice, l'autre par M. Durand
Saint-Amand, préfet du Nord, qui fut beaucoup mieux in-
spiré et plus heureux oratoirement que ne favait été la
veille son collègue du Pas-de-Calais; un troisième enfin
par M. Du|)in aine, qui trouva le chemin du cœur des Dun-
kerquois en buvant à leur Jean Bart, et eut, au dire de
chacun, tous les honneurs de la séance. Enfin il n'y eut
pas jusqu'à M. James Rothschild qui ne voulut aussi se
lancer bravement dans les hasard d'un petit speech , et ne
s'en tira pas trop mal pour un financier allemand dont le
métier n'est pas d'avoir de l'éloquence et qui pos.sé(ledans
sa caisse une collection d'arguments qui le dispensent de
tous autres.
Pendant le même temps, un autre banquet était offert
aux nombreuses gardes nationales accourues de vingt
points différents pour prendre part et contribuer elles-mê-
mes, par leur belle tenue et leurs musiques admirables, à
l'éclat de cette grande fête.
Au sortir de table, on alla dansl'arrière-port tout couvert
de bâtiments pavoises, assister au lancement de- la Biche ,
beau navire à vapeur de l'Etat, tout entier en fer et a hé-
lice, L'opération dirigée par M. Mimerel , ingénieur mariti-
me s'effectua sans aucun encombre, et tandis que la Biche
prenait majestueusement possession du flot amer, le Lé-
vrier, un joli cotre de la marine nationale, fêtait , par une
salve de neuf coups de canon, cette intronisation nautique.
Pendant ce temps le capitaine d'un beau trois-mâts amé-
ricain avait eu la galanterie de mettre toute sa toile de-
hors, misaine, grand'voile, artimon, brigantine, focs,
huniers, bonnettes, afin de donner une idée de ce qu'est
un grand navire sous voiles à nos touristes parisiens dont
la plupart n'avaient jamais assisté à pareil spectacle.
D'autres embarcations furent mises ensuite à la disposi-
tion des voyageurs pour des promenades en mer que favo-
risait un ciel magnifique; aussi la plupart s'empressèrent-ils
de répondre à ce courtois appel , y compris MM. les minis-
tres qui , toutefois, à peine sortis du port, se virent con-
traints d'y rentrer ; car ils étaient montés sur un navire à
voiles et. à la nature de la brise qui s'élevait en co moment .
il aurait fort bien pu se faire qu'ils allassent, bon gré. mal
gré, visiter les côtes britanniques avant de rentrer à Dun-
kerque, voyage de plaisance forcé qui ne cadrait apparem-
ment ni avec leur goût personnel, ni avec les exigences du
portefeuille. En conséquence, le bâtiment qui portait MM.Rc-
curt, Marie et leur fortune, ne tarda point à virer de bord
et à cingler vers le rivage , tandis que les autres navires
tiraient au large, à la grande joie de leurs passagers moins
illustres et moins pressés de gagner la terre-ferme.
Le soir il y eut grand concert de 150 musiiiens sur Tune
des principales places de la ville, et ensuite feu d'artifice.
Tels furent les plaisirsde celte première journée , laquelle
n'était au surplus, pour ainsi dire, que le prélude de la fête
du lendemain. La grande difficulté fut de trouver un gîte;
car l'affluence était énorme , et c'est ici que le côté émi-
nemment hospitalier et bienveillant du caractère dunker-
quois se montra sous son meilleur jour. Non-seulement les
habitants s'empressaient de céder aux étrangers tout ou
partie de leur logement , et parfois même jusqu'à leur lit
de la meilleure grâce du monde; mais la municipalité avait
poussé l'attention et la prévoyance jusqu'à faire installer
dans les édifices dont elle dispose , des dortoirs publics ,
sorte de salles d'asile, à l'usage de ceux qui n'auraient pu
trouver une place où reposer leur tête. L'expérience prouva
que la précaution n'avait pas été inutile; elle ne fut pas
môme suffisante, car l'affluence était énorme, et il était en-
tré dans la ville deux fois plus de citoyens qu'elle n'en pou-
vait raisonnablement contenir. Plus heureux que bien d'au-
tres, nous avions réussi, par grâce spéciale du sort, à nous
glisser subrepticement dans l'excellent hôtel du Chapeau-
Rouge situé dans la ci-devant rue d'Orléans, devenue la rue
Arago, et là, bien que nous ne fussions pas commis-voya-
geur, on avait consenti par humanité à ne pas nous mettre
dehors. Introduit à l'heure du dîner, parmi les hôtes habi-
tuels , pour ne pas dire les maîtres absolus de cette très
confortable hôtellerie, nous crûmes tout d'abord voir dans
ces messieurs une réunion de gens de lettres. On s'y serait
trompé à moins. Le mot professionnel d'article pétillait in-
cessamment dans leur discours. — Excellent article ! disait
l'un.— Voilà un article que j'aime i— Je viens de faire mon
article, et ainsi ab ovo usque ad mala. — Et quel est votre
article? me hasardai-je à demander à mon voisin , conce-
vant je ne sais quelle espérance stupide de trouver en lui
un confrère. — Monsieur, ce sont les chicorées, joli article !
— Me voilà pris avec ma sotte curiosité. (,)uelle branche de
littératurel Toutefois je glisse encore une timide question.
— A quoi bon, monsieur, cet... or(ic(e.'— Comment I mon-
sieur, s'écrie mon interlocuteur du ton de la majesté offen-
sée, et, sans mon article, avec quoi ferait-on le café, s'il vous
plaît? — Mais avec... — Du café , n'est-ce pas?Toujours le
même refrain. Ils ne savent dire que cela ! Le café, drogue
malsaine , irritante, dont, grâce à nous, l'usage est à peu
près abandonné. — En vérité? — Monsieur, il n'y a plus de
cafél Ces dernières paroles furent dites avec l'accent irré-
sistible de conviction et de triomphe dont jadis un roman-
tique barbu , après avoir vu Hernani , s'écriait : « Enfctncé
Racine ! » J'avoue que je n'aurais pas cru à l'existence d'un
tel article .- il me semblait y voir une vieille calomnie ré-
trospective du temps du blocus continental. Il n'en est
rien, les mauvaises herbes ne s'extirpent point si aisément,
et celle-là a survécu au cèdre impérial qui l'avait fait ger-
mer. Le département du Nord continue de produire, outre
le sucre de betteraves, une prodigieuse quantité de ce
moka trop indigène.
Pardon, lecteur, de ce hors-d'œuvre et revenons à notre
fête. Le lendemain de notre arrivée , 4 septembre . la jour-
née fut inaugurée par une solennelle distribution de mé-
dailles , soit aux musiciens , soit aux corps de musique qui
s'étaient le plusfait remarquer la veille, ou parla perfection
de leur exécution, ou par leur ensemble harmonique. Les
Flandres sont la terre classique des médailles et des con-
cours. — Mais en voici bien d'une autre! Quel monstre,
quel Titan , quel Cyclope se dresse là-bas sur la grande
place? — C'est le Reuse (géant) de Dunkerque. Il est vêtu
de son armure ; il sort de la grande tour où il est enfermé
comme dans une caisse d'horloge, du gothique beffroi, veuf,
je ne sais pourquoi, de son proverbial carillon, le seul lo-
gis qui soit à la taille du Reuse, et encore n'en peut-il sortir
que tenant sa tête à la main, comme feu le grand saint
Denis. Voilà maintenant qu'on la lui ajuste; on l'équipe de
pied en cap ; un valet de ville passe délicatement l'étrille
dans les longs crins qui lui servent de chevelure, avec une
gravité imperturbable qui n'a d'égal que le sérieux de la
population attentive à ces préparatifs coi|uets. Cette toi-
lette et son armement terminés, le Reuse (corruption de
l'allemand Reise) prend position sur la grands place, au
pied d'un orchestre formidable, devant la maison AUiaume.
Puis voici deux autres colosses apparaître à l'extrémité
de la place et s'avancer majestueusement vers le Reuse ?
c'est ici un congrès de géants. Les deux nouveaux venus
sont Gayant et sa femme, de Douai, suivis de leurs fils in-
téressants, Jacot, Bambin et quelques autres. Ils viennent
rendre hommage au Reuse , et c'est justice, car le Reuse les
dépasse de toute la tête. Un train spécial de chemin de for
les a amenés cette nuit de Douai, leur patrie ou leur berce,
suivant l'expression douaisienne, et leurs grands corps, im-
menses mannequins d'osier, couvraient, sous une pluie
battante qui ne les a point heureusement trop déformés ,
l'impériale de plusieurs wagons.
Il n'est pas inutile de dire ici, je pense, que Gayant est
un chevalier dont la bravoure traditionnelle , la grande
âme et la grande lance paraissent avoir sauvé pendant
plusieurs siècles la ville de Douai d'un imminent péril
Quant au Reuse, c'était un grand seigneur du pays de
Flandre qui était. éminemment bienfaisant et qui creusa le
port de Dunkerque. Tous deux étaient assez beaux hom-
mes, à en juger par les effigies que conservent d'eux leurs
nationaux reconnaissants. On les promène officiellement
dans les grandes .'Solennités ; il n'y a pas de bonne fête à
Douai sans Gayant et sa femme, ni à Dunkerque sans le
Reuse. Ce sont là . au reste , des coutumes évidemment lé-
guées aux Flandres par les conquérants espagnols. De
même que Reuse vient de Reise. de même Gayant est sim-
plement un dérivé légèrement altéré, quant à l'orthogra-
phe , de l'espagnol Jayan qui signifie géant On retrouve
aujourd'hui aux îles Baléares, dans la Péninsule mémo, et
particulièrement dans les provinces formant l'ancien royau-
me d'Aragon, ces exliibitionsde géants libérateurs. Il paraît
que grande taille obligeait autrefois, à moins que ce ne soit
la gratitude des peuples qui ait grandi à celle de leur vé-
nération les citoyens ou les illustres chevaliers dont ilsont
reçu quoique bien. Quoi qu'il en soit, Gayant et sa femme
font au Reuse une fort aimable révérence; celui-ci, en
hôte bien appris, la leur rend aussitôt ; puis tous trois, en
vertu d'une motilité des plus simples dont nous n'aurons
garde de vous révéler le secret peu poétique, exécutent un
menuet aux applaudissements enthousiastes d'un peuple
immense. Ils se rangent ensuite côte à côte, lo Reuse entre
Gayant et sa femme , les enfants devant, pour voir le dé-
filé de la grande procession , qui déjà s'avance en bon
ordre.
Il ne faudrait rien moins qu'un poète épique pour faire le
dénombrement homérique de toutes les merveilles de ce
cortège, et le célèbre défilé de la Juive nous a paru singu-
lièrement distancé.
Un corps imposant de musique de la garde nationale ou-
vre la marche.
Apparaît ensuite un grand char, ayant la forme d'une
dunette de navire, et portant Jean-Bart , chef d'escadre, et
lion chef de câpres , comme lo répètent à l'envi cinquante
journaux sur la foi d'une bévue typographique; Jean-Bart,
dis-je, entouré de sa famille et de son équipage valeureux,
historiquement revêtus des costumes du temps de LouisXlV.
époque demeurée particulièrement chère à la population
de Dunkerque.
Ce char est suivi des pêcheuses de crevettes grises vul-
gairement nommées dans le pays grenades Leur bande
joyeuse, parée de ses plus beaux atours, est facilement re-
connaissable aux divers attributs ou instruments de pêche
que chacune tient à la main.
Sur un autre char, voici une tabagie flamande au grand
complet [panne kuke huys , maison de crêpes), avec son
hôtelier en bonnet de coton , ses brocs, ses chopes et ses
buveurs intrépides entre lesquels brille de tout l'éclat d'un
tricorne imposant dont la vue seule doit glacer d'épouvante
les maraudeurs, le garde champêtre ou garde-chasse de la
commune , — nous ne saurions dire précisément lequel.
Pendant qu'on boit dans la taverne, qu on fume, rit et fait
des crêpes magnifiques, la poule caquetant au haut du toit
de chaume, le dindon qui glousse, le pigeon qui roucoule
complètent l'illusion de ce tableau animé de Vun-Ostade
ou de Brawer.
Voici venir maintenant les bazennes, matelotes , c'est-à-
dire femmes do matelots, avec la jupe retroussée du temps
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL
(11- Louis XV, cl
Iciiitlejolipi-titcos-
liiinn i'Oco(0 (li> \;\
l'irmUs'wn de di.i-
Uii aulro ch^ir
s'avance portaiil
une embareatiiui
moderne nionti'c
|)ar des malelol;-
ijayonnaisencosl li-
mes et bérets bas-
(lUCS.
Puis c est uno
noce normande, la
mariée et le mari('
grimpés sur le nié-
meclieval.ettoutli'
corté};e en culoUcs
courtes. colsdcclic-
mise démesurés, ha-
bils vert-pomme ci
diapeaux - troni-
lilons fabuleux for-
mant à leur suite
la plus brillante
cavalcade a
ânes.
Voici maintenant
uno compagnie de
grenadiers consu-
laires dans une te-
nue irréprochable.
Plus loin, remor-
ipiéparune locomo-
tive, le char de la
Itépublique et de la
ville de Dunkerque
réunissant leurs attributs et leurs emblè-
mes. Ce char est en forme de conque 11
est immense et conlientungrand nombre
de personnages, entre autres des groupes
d Amours et deux allégories vivantes
qu'on nousdit être \' UnitéellaFraternile
commerciales.., Accipio omen... Je n'en
veux point médire ; mais convenez que
ce sont là des divinités nées d'hier.
Un autre char plus petit contenait trois
statues grotesques, trois tableaux plasti-
ipies affectant les poses les plus ridicules,
le tout dédié au musée par une inscrip-
tion votive qui provoquait l'hilarité uni-
verselle. Pour bien saisir le sel attique
de cette épigramme flamande, il faut
savoir que le musée de Dunkerque ne
brille pas précisément par ses richesses
artistiques.
N'oublions pas de mentionner lesarmes
marf/ianïfs de Dunkerque portées der-
rière lechar de JeanBartpar un chevalier
a queue de sirène et en pantalon qua-
drillé, formant tout à la fois le support
et le cimier de l'écu. Dunkerque porte,
si je ne me trompe, parti , d'une mer-
d'argent à un poissoti nageant de cou-
leur naturelle , chef de gueules au lion
d'or passant.
Devant le char du même , on voyait
sa bannière portée par un capitaine de
pèche du dix-septième siècle et celles des
quatorze amiraux
qui ont vu le jour
a Dunkerque. En-
lin, tout le cortège,
entrecoupé de di\
corps de musique ,
tous excellents ,
tous très noir-
lireux . apparte-
nant à la garde na-
tionale , était pré-
cédé d'un héiaul
en costume splcn-
dide qui tenait il la
main la bannière
bleue et blanche
ou , pour parler
la langue héraldi-
que, mi-partie d'ar-
gent et d'azur de la
bonne ville do Dun-
kerque.
têtes de buukerque — Décoration de la rue Arago et mascarade delà noce normande
Fêtes de Dunkerque — Décoiat'uu de la rue Dupouy
On s'abonne rft'rec-
temetit unx bureaux,
rue de IVicliclicu, 60,
l);ir l'envoi franco
d'un mandat sur la
jiosU' ordre Lcrlieva-
litTL'l (■,",011 près des
dirccleurs de |i0bteel
de Mi'ssaReries, des
piincipaiix libraires
di' lu France el de
l'èlranKcr, el descor-
respondanrt'S de l'a-
geucc d'abount aient.
Celte procession
mémorable et tous
les épisodes bur-
lesques ou bachi-
ques qui en furent
l'accompagnement
obligé. rempli rente
peu près le second
jour de la fêle. Le
lendemain, il y eut
de fort belles réga-
tes: mais elles n of-
frirent aucun ca-
ractère particulier
et d'ailleurs nous
ne pouvons songer
â les décrire faute
d'espace. Puis , le
soir, un grand bal
donné à l'établis-
sement des bains
termina les ré-
jouissances. Celle
réunion fut bril-
lante et les danseu-
ses n'y parurent
pointinférieuresau
grand renom de
beauté dont jouis-
sent les dames de
Dunkerque ; mais
un intermède non
prévu el une illu-
mination naturelle
eurent pour effet
d'en effacer, à nos
yeux du moins ,
les splendeurs. Du
cote de la grève, une lueur rougeStre.
une sorte d'aurore boréale se reflé-
taient à l'horizon. Aussi, à cctaspect im-
prévu, nous courûmes au bord de l'Es-
planade, d'où l'œil embrasse le rivage.
Nous vîmes alors, non point une mer,
mais une lave. Une immense traînée
de feu léchait la plage el , Çà et là .
des lames impétueuses moutonnaient en
soulevant des gerbes enflammées qui se
détachaient sur le fond noir de ce ma-
gnifique tableau. Maintes fois , dans une
autre mer, nous avions vu la quille
d'un navire tracer un sillage lumineux
sur le flot et des milliers d'étincelles
jaillir le long de ses bordages, mais
rien qui put se comparer à ce débor-
dement igné, à cette éruption liquide.
On apercevait distinctement la blan-
châtre fumée du phosphore se dégager
au-dessus de la lame brillante , comme la
vapeur du soufre et du salpêtre autour
d'une pièce d'artifice. Combien pauvres
sont les étoupes et la limaille des Rug-
gieri auprès de cette nappe ruisselante
d'or et d'argent qu'allume à la cime des
flots, eu certaines nuits mystérieuses ,
la nature, ce grandiose et poétique arti-
ficier !
Mais, hélas ! l'heure du départ a sonné
enfin Plaignez- nous Il faut, il
faut quitter Dunkerque ! Adieu , bonne
ville I nous empor-
tons de ta cordia-
lité, de tes splen-
deurs naïves , un
souvenir cher qui
jamais ne s'efface-
ra de notre cœur
el nous le remer-
cious surtout de
nous avoir fait ou-
blier , par les ré-
jouissances qui ont
le rare mérite de
ne pas mentir à
leur titre, le pesant
fardeau de soucis,
de luîtes el d'agita-
tions quolidennes
qu'à regret nous al-
lons reprendre loin
de toi !
FM.
PAULIN.
Paris.
imprimerie
de
COSSIN,
rue
du Kour-Sanl-
Germaîu ,
l lïlos do Duiikeiqui — DiScontioa de la ruo de la Manui
L'ILLUSTRATION,
Ab. pour Paris. 3 mois, 8 fr. — 6 mois, 16 fr. — Un an, 30 fr.
Prii de chaque N», 75 c. — La collection mensuelle, br., 2 fr. 75.
N» 291. Vol. XII. — SAMEDI Î3 SEPTEMBRE 1848.
Bureaux : rue RIcbelleu, 60.
Ab pourlesdép. — 3 mois, 9 fr. — 6 mois, 17 fr.— Un an, 32 fr.
Ab. pour l'étranger, — 10 fr. — 30 fr. — 40 fr.
SOMMAinE.
HiBioIre de la semaine, le parlement de FranefoTt. — Chronique
musicale. — Courrier de ParlN. signaux des insurges irlandais;
Uépauillemenl des votes salle Saint-Jean ; Distribution des bulletins d'élections
dans tes ruts ; Courses d'ànes sur la plage de Boulogne-sur- Mer. — Revue
liiléraire , par AleiaiiJie Uiifai. — Les vliles capitales, lar
Fi-jmcis W*y. — Service des postes, rue extérieure du bureau ambu-
lant ; Jnltfrieur du bureau ambulant ; Portefeuille des lettres recomman-
dées: Collier pour la fermeture du sac aux dépêches ; Sac aux dépêches ;
Pesage de lu correspondance anglaise ; Nouvel omnibus pour ta dislribtttion
< des leltris dans Paris. — études morales , tiaduite> de l'anglais. —
Lettres d'un flâneur . \. ~ Les camps. Costttme des élèves de
l'Ecole de Mars en 1783 ; Fêle militaire exécutée le 30 frimaire par les élèves
de l'Ecole de Mars. — Ktudes de moeurs , par Val -niifi. — Let voya-
geurri nouveaux , pai-X. Marmier. —Bulletin lilllUograpIlique.
— Correspondance. — Ascension du Peter-Botte. — Rébus.
Hiatoire de la Semaine.
Quand un fait considérable a terminé la série d'événe-
ments dont il a à rendre compte , un historien de la se-
maine se sent une furieuse démangeaison de l'enregistrer
tout de suite , et il lui faut vraiment de la vertu pourse ré-
signer à commencer par le commencement, .aujourd'hui
toutefois notre mérite est moinsgrand, car ce dont nous
avons à entretenir d'abord nos lecteurs , c'est un discours
de M.Dufaure ,qui , lui aussi , a été un événement véritable.
C'était toujours sur ce fameux droit au travail. L'Assem-
blée avait entendu un orateur de la montagne , M. Martin
Bernard , qui lui avait appris que ses amis et lui étaient les
hommes de l'idval, assez pauvre qualité pour des législa-
teurs. M. Billault lui avait succédé , moins pour défendre le ■
droit au travail que pour attaquer M. Thiers et le discours
qui , la veille , lui avait valu un si grand et si légitime sue-
Le Parlement allemand de Francfort — Séance du 16 se,itemlre 1848
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
1 ri. L'auditoire dcmpiii-iil finiil cm l'idnliint l'opinion fort
peu nette do l'ami. 'ii >"ii- ^rrrv:iirr d i;i;ii du l" mars.
(Miand tout à coup di.n un ;i . ir ulJur .|i Im ni nnnallre un
morilp. cpIuI d':uuir ; ii.' M Uni r ,< \a lidiuneet de
Im ;iMiir \nln un (Ir- pin- r, InInnI- MIC n- i|ni nient étéde-
piii- Inirjlrnip.^ Mlili-ini> J.ini i;- I nr.ilcni ii .iNnil allié une
t,.||,. ,.|r\:ili"n dr pcii-iv-,. dr Mn- .1 d.' l,in,M.-e à la vi-
Lçueuf cl a rcncliaineniunt de h Hinl,viM|nr .{m ili~liiii;ue
ioujourssa parole. Il a traité la ipii-lmn » ,, hjid iii nr, en
éciinoniiste, en philosophe, en lioiiiiiird t.!,:! ni v,ni-lous
ces raiiporlsil a rir rnniplcl, Saus viser il réloqnencc! , iU'a
eonslaiiinient reinmniVn I n l.'t et l'énergique expression
de la l'oruic n'oiil |niiiji> Iml défaut à une pensée toujours
ample, nniAciiM' ri lundc,
L'eflél dr in m. ijndiiiiie discours avait été tel que M. de
Laniarlimi .nppnli' n In tribune par un ordre d'inseriplion ,
fnlal pour hu , y est demeuré près d'une demi - heun,'
les bras croisés , attendant que l'Assemblée se remit de
son émotion , do son enthousiasme , et consentît ii lui
|ijiHer attention. 11 a moins cherché il coinlialli-e M Dii-
IniiiT qu'a ralliei' la iiKiiorilé n un ili-n|innn (|iii nn lïd pn-
ccliii delà comiiiission. ■|'oulrfiiis, M dn l.nin.uiinr un ,',..1
p.i. rli.ii-L'é de l'nire .■nniniilrn I nuinndninrnl nniuniiidnnl
!;:,„ dl-..n,r-nlnil r.Ap.i-ndn,! if- ( r,l M lil.n- lil/nin
Irinn-idinil d.-ln nninnn, dn l'.d.ii- \,)h.ninl , .|ni r-1 vriin
d,.|i,.ji,d.T.|ir.nir(niMl d.in- hi Cni-lihi In i m,imvi-,
ilu(;™,Vi//rM'.W.nMV |urln lln\nil lin.iin o,i|, d n-p, il - ninl
inllsontvu Li iinn pm lldir , Ir dn-,l dr l^lnrnr In- .uImt-,,,,,-
du droit nu lrn\nil d.in-. In Minninni npp.n i iiln dn L':ni> qui
entendaient refuseï InM-lninv ,i Imi-n ■•i<'\ n- .Mnllmu-
reusement , le ton cl In l,iin;,i^i' iln M lil.n- l'n/nin n nnt pas
suffisamment détriiil reim Mippii-iiinn pmi hinineidnidn Du
reste , le calcul sou|)Çonnc n'aurait pas produit I elletd in-
timidation qu'on en attendait , car 1 amendement a été re-
poussé par 596 voix contre 187. — Les autres ont eu le
même sort , et l'arlirln du piniel de la commission a été
adopté il une iminnn-n iiinj'iiiln
Le préambule se hnn\nd nnisi adopté par le vote de ses
para^raphes successifs quand I Assemblée a été appelée il
délibérer sur une disposition nddiliiHinnlIn jiorlant que le
pacte fondamental n'aurait force d'exeniliuii iju'après avoir
été soumis à la sanction du peuple. Les partisans les plus
déclarés du suffrage universel direct ont été les plus ardents
il repousser cette proposition, qui a été écartée par la ques-
tion préalable.
Au sortir du préambule , on est entré sur le terrain de la
constitution même dont l'article premier formule le principL-
de la souveraineté. M. Pierre Leroux . au nom de la science
politique à laquelle il dérlmnil dninninirinnl nepas croire,
a attaqué lesdefinilionsqiir In i Miiniii--hin n\nii empruntées
au texte de la ]ilupart dr- prni ndrnlr- innslitiitions. Cette
fois, du moins, il im - n-i pi- borné au rôle decrititjue: il
a produit des foriindn- puni In- substituer il celles qu il dé-
clarait mauvaises 1. .Vs-cmlilne , ii l'unanimité, a reconnu
les siennes détestables.
Conformément au vœu exprimé par M. Isambert , l'As-
semblée a consacré l'inviolabilité du domicile par des ter-
mes plus explicites.
L'article S du projet de constitution proclamait l'aboli-
tion de la peine de mort en matière politiipie. A cet é^ard
nulle dissidence n'était possible, la cmi-i minn |Mililiqiie
a , dès le premier jour, ratifié par d'iim i - . m, Lima-
lions le décret du gouvernement provismin . qn d s n^nt de
consacrer consliliiiiininnllniient. Mais l'Assemblée s'est
trouvée inopinéim ni pLnnn nu présence d'un amende-
ment dont le but iiini dn pi n\iii|uer d'une manière absolue
l'abolition de In peine dniiHHl .\1 Cnipinml . l'un dn- nii-
inirsdecelnuieiidriiiniil ,n -urninrlninrnl nNpn-r In-nni-i-
.lél-ationsplllliwiplnqnn- inmnln- ni rnliL;lnn-r> ,,ni iinlHnnl
eu faveur de celln mlm n,n .\1\1 \ n 1,., dn f i ,,nv l,;dMniln..
Victor Hugo et Virn-I I nlnmnuid pnlrdmi- In innllin-ni-
.Maisdeux'magistml- MM \^lln-nl fin-lmi , ,,nl iiunqiiin
pour le mailllinll d imn pnndlln ICI rd.ln l.l Inind' ni inip"-
santecOllMiInmli h- mvr-ll,- -n, mln- l.rl,in_,l-n,pi il,
Ontfaitellinndirninll p;ii -1 -n\nllln liniin- pinjnn.i nni.iu-
viiir que celui de leurs adveisaiien , mais il > adri>sait a la
raison froide et sévère de leurs collègues , et il a été en-
tendu. L'amendement n'a obtenu que 216 voix sur 71 i
votants.
L'article 6, ponant que l'esclavage ne peut exister sur
aucune terre française , a été voté sansdiscussion.
L'article 7 cnnsaire pnur chaque niloyen le droit do pro-
fesser librninnnl -n inliijinii , ni :j;irniil II il tous pour l'exer-
cice de leur niilln iiiic n;_Mln pnilnri nui M. Pierre Leroux a
lu n ([■-ii|i I un Ininj di-niiiirs,diiiil les conclusions so résu-
ni.nnid dnii- li ■.uppin-~ion de tout salaire pour les cuMes.
.Mm- mile liii.- niniiin les conclu^ions de M. Pierre Leroux
L'article 8 proclame le droit qui appartient aux citoyens
de s'associer, de s'assembler paisiblement et sans armes ,
de |iétiiionner et de manifester leur pensée par la voie de
la presse ou autrement. M. de Mimlaleuibnil a demandé
(pi'oii ajoiitilt il cette oiiimiérnliiui le tlrnit il rnseijiiier. La
Luaude question de la liberté dn l'eiwni^'ueiiieut a été ainsi
porlée a la tribune par l'un de sns dnlnii-nm- les plus ac-
iieililes. Mais l'orateur, qui , iiiin pivnnmv lins , dans la
question du rachat des chemins de Im. a\.iit su , par la
disliiiclion delà forme de sa discussion et par la solidité
du tond , captiver conslammeiil son aiidiluire et gagner
beaucoup d'indécis ii son opinion , moins heureux en cette
occasion nouvelle , moins bien préparé , moins bien inspiré .
a vu si'S arguments accueillis par l'incréilulilé et son appel
doniourer sans réponse. SI. de Monlalembert a surtout
soulevé des interruptions qui étaiiuit de concluantes réfuta-
tions, ipianil , dépIdiMut ipie la notion , le respect du prin-
cipe d'autorité soient aussi alTaililis chez nous , il a pré-
tendu que le sniil remeilr était une éiluialion e.-senliellc-
ment religieuse. (In lui a crié de Iniilns pari-; £« l'Italie!
et I liljlilf/lir ' l'nr dn- n\iLnninn.d nidrn dn |nur, ce disCOUrS
a nin CMUpr m dnn\ . ni 1,1 -r, .indr p.illlr 11 ,| iHé prOHOn-
cénqunilllnrniil.. Iilill hnlin- np, n- In p, nnilnre.
Deux séances, celle de samedi de la semaine dernière et
celle de mardi , ont interrompu la discussion de la Consti-
tution. L'ordre du jour de la séance de samedi était très
chargé de lois important s et urgentes , et cependant l'on
ne s'est occupé que d'une question imprévue.
Le matin même le National , qu'on s'est habitué ii consi-
dérer comme un journal semi-ofticicl , avait publié la note
suivante :
. Les luttes elVroyable^ de juin , l'nioissinn de certaines
:iln
II. ll.l
ni dn
l'i
11
•llnl.ln- ,\r I \ - -r
Inpin-idnlil,
n-li-dn|
n! nlln
M lii
1 . ii.n- .1 mil dn\ini pimidln niin lun-ure
In- drpjilmiinnl- -nr In- iiilmitnnis vé-
'!'''■ 'l'In I \"ii liii-iiimiin , pi npre en
In. (i| - n-nni'- : Un Certain nom-
- nni.nmil r\r niiii\ iiqués co matin chez
-ml , .|ni In- .inind priés d'acce[iter une
1,11 1 mil! ni- Celte mission serait toute de
niiinii ,in--i pour objet de faire connal-
ni In \mihible état de l'opinion et de
1- Ins départements. »
I' 1 la tribune pour demander des ex-
plin.iliciiis n cn-ii|nl .\1. le ministre de l'intérieur, dont le
langage Ir.dii— .ni I mnliarras , a essaye de les donner. Il a
dit. si iiini- n— iiMiii- de résumer sa réponse prolixe : Le
temps e-l pinmnii\ ; In-nirconstances sont difficiles ; le pou-
\iiii e\ni iilil n-l décide avant tout à fonder le gouverne-
iiinid II indilii ,1111 , il faire aimer et respecter le drapeau de
In llnpiililnpin , il lient d'une main mal assurée les rênes de
I ,idiniiii-ii,il iiiii ili'pni lementale , parce que , dansées pre-
uiim- I mnl-iln II involution, il a du procéder à la lé-
gninni ,1 nn n-d inn\l tables erreurs, dans ses choix nou-
\ eaux Cl III II lin il.in- In iiiniulinii de quelques choix anciens;
il veut , pni niin -,,i Ir d in-pnnlnni Linii''i'ale . se renseigner
sur l'étal nnl dn |i.i\- iM piiiir nnl,i il lui faut d'autrcs
UKivens d iid iinm .pin ,nii\ ipi d piii-e dans les corres-
pinnl,iii.n-ri d,iii-ln- .1 . I,i iMi mil- ,n m I r,ii iinl i .ires des mcui-
l.iv- d.-.lillminiln-d.'piil,ilnni- Il Iniil .pin I.' payssoitin-
leirugn eu luussniispai un regard doulles explorations ne
rencontrent aucun obstacle.
Il n'a pas été difficile à .M. Bazede démontrer dans sa ré-
plique , que des représentants seraient beaiicoup plus in-
cnnln-i.iM. 'III. util leurplace , en demeurant occupes àvoter
c.'lln I ini-lilnli.in pour laquelle ils ont été nommés, qu'en
allant Ijiic le métier que leur assignait le programme filan-
dreux et peu adroit de M. le ministre de l'intérieur. Il a
rappelé que si , dans d'autres temps, des proconsuls furent
envoyés dans les provinces et aux armées , ils tenaient du
moins leurs pouvoirs de f Assmiibli'e elle-même, .\ujour-
d'hui , au contraire, c'est un | Mnr.lidéguéqui choisit ar-
bitrairement des représnnliid- |i.nii leur confier une mis-
sion , dont le cir.ininrn iii.lnim nnni' -.'nierait dans le pavs
l'étonnement , riin|ni.iii.|n ni l.iili\i-inn; c'est le pouvoir
exécutif qui intcrpnsn dns r.'prn-.iiijuls de son choix entre
les populations et les représentants iju'elles ont élus.
L'Assemblée eût repris son ordre du jour, et le cabinet
eût eu il réHérhir il son aise sur la mesure et à lensevolir
Iranqiiilli'iiiniil ihiii- l'inibli . si un de ses imprudents amis .
M .''<ni mil- . In jnuiin , 11 ,i\,iii inuimis l'enfantillage de venir
glmilinr .nlln pnii-nn .li' iiii-sious. Ses arguments n'exi-
u.'.ii.iil pas dn rnpdii-n , nuiis .M. de l-'alloux y a trouvé un
pininxin pinii M'iin [inrler de nouveaux et de plus rudes
!■ inp- ,1 II m dliminii-n conception ministérielle. Le repré-
-mil,inl il' M.i lin' -.'1-1 -.lire a obtenu un lirillanl succès ora-
l.inn Sun l,iiij,i^.' pl.'iii dn nin-nr.'nl nu iiiéiiie temps de
.l.'ni-nni ,1 . '1,11.1111. 1 \-niiil,lnn 1. .ipiiiiini .1.' .-un luiiiiense
111, i|. Mil.' Il .'1,111 p,i- .1 ii-n. 111,11- l'.'ll.'i'Mdi'iinesnni-ait ,
.'I In pi.'-idnld n.'lnll .'.' pilir-lnM l',njli.'m' nll.nl .li'.'hl-
ini I m, id.'iil M.l.'.'l ivpinii.li.'r..r.lri'.liij.iii,'. .pnindM le
luiiii-lri' dn la juslinn nsl, monte .i la tribune pour due qu'a-
près ce débat , le pouvoir exécutif voulait être éclairé par
l'expression d'un vote formol , étant, quant ii lui , déterminé
il persister dans la mesure.
Alors éclata un orage qu'on ne saurait peindre. Pondant
plus d'une demi-heure on se pressa autour du banc minis-
tériel pour essayer do faire comprendre au cabinet la gra-
vité d'une position qu'il prenait tout gratuitement. Le (Con-
seil se retira dans un bureau pour en délibérer. 11 revinten
séance au bout d'un quart d'heure , ell'on fut infurméque
n'ayant pa> liiniM'>,in> dniile In iiinyen de faire une re-
traite Iioii.iimM . il .'l.iil .l.'lmininn ;i \aincre ou il mourir
pour ses c.iiiiuii--,iin'- lii'j.i I.' i^mnial Cavaignac se diri-
geait vers la tribune, quand .\1. Marrast y monta pour v
lire l'ordre du jour motivé que venait de lui remetlre nii
représentant de la droite : " L'Assemblée, après les expli-
c.it'inis .'iitnii.liin- . I, lissant il la responsabilité du pouvoir
n\.'. nid riiiipri'riaiinii de la mcsure projeti'c , pa.sse ii l'or-
dii' .In |.iiii C.'i .11. lie du jour a été voté il l'unanimité.
II s.iiunil les .iiiiiiurs-proprcs et laissait au pouvoir sa
liberté, sauf îi n'en pas user. Ainsi finirent les coinmis-
s.iiros.
Dans l'antro séance , enlevi''e égah'inent ii la discussion
de la Constitution , on a v.ii.' .In- . r.'.lii- n.nn.'iiux puiir.se-
cours et des crédits consul, i.dil.'- .'iil indlnni- puiir entre-
prendre la colonisation de 1 Al.unne. Le geiu'i.il de l.aniori-
cièro a soutenu son projet avec talent et en lionimc nui
connaît le terrain et a expérimenté la matière. La nécessité
d'employer une partie des bras inoccupés en Franco a fait
voter en une seule séance un projet qui . l'an dernier, cill
occupé la Chambre des Députes pendant ipiinze jours.
Le grand événement , qu'il nous a lalhi ne mentionner
qu'a sii date dans lor.lredes f.iits, c'est l'élection de Pans.
.Malgré une ineonlcslable majorité, les opinions modérées
ont, par leurs divisions, ouvert la porte ausocialismc. D'un
autre côté, rinfluenccdessouvenirsafaitsortiren première
ligne de l'urne un nom que plusieurs autre^s départements
ont également inscrit sur la liste de leur représentation.
Les trois élus sont: Louis Bonaparte , Achille Fould et Ras-
pail. Grilce ii leur vigilance, à leurspirituelle entente, les
électeurs auraient pu avoir avec Raspail , .M.M. Cabet et
Thoré, Ils n'ont qu'une partie de leur bonheur.
.Messineen cendres, occupée parles troupes napolitaines,
qui ne paraissent pas néanmoins devoir poursuivre plus
loin la revanche de leur roi ; — les dispositions militaires
de Charles-Albert , qui font croire qu'il a moins besoin que
I' \nli inhe de la prolongation de l'armistice ; — l'accepta-
h 11 l'.u le parlement de Francfort de l'armistice conclu à
.Mdni.n. parla Prusse , entre l'Allemagne et le Danemark;
~ In dn\nloiipmni'nl du inoiivement qui tend à séparer plus
i]uejaniai- I i llnuii.' .1 I . inpire d'Autriche, et la conti-
nuation (I - -II...- mM.'iiii- pur les Croates; — l'émotion
populaire iini 1. jii.' pi'ilninli iniTil a Vienne :— l'agitation
qui s'est 111,1 11 il. -1." dm- 1,1 j ii.ln I un --il 'Une. a l'.ilsil.iiu ; —
le départ il.- .'..m.. .1;' \ . ni-i' .I.' 1,. ll.ill.' - irde , aux ordres de
l'amiral Allniii .l.nil In pr.'.-.-in n ,-] -igu.'ileeii Ancone; —
riir\"-iiiiiin dn - lUM'iin'iuniil il.' rK-\ple , solennellement
m.id.'i.' ' n lln,iliiiii-Pacli,i par le siill.in : — et , enfin , la
ri'Mjinl 11.11 iln.^uleiiuan-Panha . ra]ipnléile la Valacliic, pour
avoir, dit-on , suivi une politique Irop vivement déclarée
contre la Russie , voilà , celte semaine , avec les progrès du
choléra vers l'Occident , le bulletin de l'extérieur.
Clironiqiie niu^ticale.
Pendant que l'été prolon.L'e avec une rare complaisance
ses radieuses joiiiii.n- I,- iln'àires Ivriques se disposent
avec la plus loualil ' .'innliinn a nous faire pas-ser délicieu-
sement les longue- -.nm.- .Iliiver. L'Opéra annonce pour
le mois d'octobre un omrage oouveau , Jeanne la Folle;
puis un nouveau ballet di^ Perrot , dans lequel nous rever-
rinis la célèbre l>rrito !... Viendronlensuite, en novembre ,
lesdébulsdemnrlame ViardnletdeRogerdansles //«juenob.
Lu iiimn.' Ii'ni|i-. pi. ■.■nsili'liul-iiiiporlants auront lieu . com-
iiinii.' T. ml ln-niudi's.lu l'ntjiliHc , dont la première repré •
s'iiLili.iii M'1,1 d.iiiiiee dans le courant de la prochaine
caiiip.i^'iie Iheàtrale, Celte dernière nouvelle , nous pouvons
c'tte fuis laflirmer ; ce que nous n'avions pas fait encore ,
ciiutrair.'uient il la plupart de nos confrères : mais aujour-
d liui ce n'est plus douteux. Meyerbcer est de retour parmi
nous depuis une semaine , et dès le lendemain de son arri-
vée deux actes de sa nouvelle partition ont été livrés à la
copie. Jeanne la Folle, laCerrito , madame Viardot, Roger,
le Prophète , Jleyerbeer. voilà certes qui nous promet une
ample moisson de jouissances musicales et une longue
sén.' .1.' splniiilides magnificences.
I. ( ip.'i ni.. inique, de son côté, prépare une nouvelle par-
liinni .In I illii-liB auteur de V Eclair e\, des ifousquetaires
(le la Heine Le Val d' Andorre , c'est le titre de l'ouvrasje
nouveau de M.M. Halévy et de Saint-Georges , sera repré-
senté . assiire-t-on , du 20 au 23 octobre. La première re-
]irésentationdesJ/on(c'nP5rms,deM. Limnander, ne tardera
pas à suivre celle du Yal d'Andorre. La reprise du Cheval
de bronze précédera peut-être ces deux nouveautés , et l'hi-
ver ne s'achèvera pas sans qu'une partition nouvelle de
M. A.lnin. ni une autre de M. .-Vuber. toutes deux compo-
sé:'--iir d.'- pnemes de M. Scribe, ne paraissent également
au lli.'.ilK' delà rue Favart. En attendant, d'autres pièces
nouvelles moins importantes , d'autres reprises d'anciens
ouvrages, et desdébuts de nouveaux chanteurs, se succè-
dent sur celte .scène avec une prodigieuse rapidité. \ peine
viuiions-nniis d'assister à la premièrereprésentationd'/I si-
f/)wr l'asrarelio , dont nous avons rendu compte dans notre
pri'i'eili'iile rhninique . que nous assistions à la première
repiesnui II .I.' In r.'prisedu Muletier, une des plus cliar-
mniili's p.ii iiinni- .1 ll.'rold Cet ouvrase fut donné pour la
preiuiern l.n- nii ili.'ilre Feydeau en 182:! Hérold récrivit
après triii- nnn.' .-.In -il.n..'' p.iiir ainsi dire forcé. Us'élait
vu tout n.. i.inp- nu .pi.l |ii.' sorte repoussé du tliéAlre,
malgré le L^niiin iiiu<i. al ili Miuiiiiquc le plus clairement dé-
cidé qui se puisse voir, coiiime sa carrière l'a prouvé par
la suite , et bien qu'il eûtdéjà produit six autres ouvrages
à ce même théiitre Feydeau , seulement de 1810 à 1820.
Il y rentra par le Muletier. Eh bien I le croirait-on ? ce ne
fui pas sans de nouvelles peines et de grands obstacles.
La pièce , écrite par M. Paul de Kock , de ce style re-
trous.sé tant soit peu sans façon , qui caractérise les romans
de cet écrivain devenu si populaire , ne fut rien moins
que courtoisement reçue par le public . à ipii ce soir là ,
par extraordinaire . il prit d'étranges velléités de pudeur.
Opendant la musique du Mutelirr était un chef-<r(Puvrc.
ni plus ni moins , d'un bout à l'autre , depuis la première
note do l'ouverture jusqu'à la dernière du chieur des ban-
quettes , pour nous servir d'un mot du Muabulaire des cou-
lisses. Aussi , taudis que le parterre s'obstinait à .siffler.
les .ii'leurs par un sentiment des plus honorables cl des
III. 1111- 1.']., 111. lus dans le monde oes arts, s'obslinèrcnl
il |..ii.'i I ..iiM,i-n. si bien qu'il atleignit la centième i-epré-
.•^eiiidh.n II . lui sait, s'il en eiU été autrement . ce qu'il se-
rait advenu d llérold et do son admirable talent ? Il est pro-
bable que nous n'aurionsjamaiscu ni Marie, ni Zampa , ni
le /'n' (ii/r-r/ofs. Pourtant le même génie qui rayon neavec
tiiiil de splendeur dans ces partitions . est tout entier révélé
daiiseelle du Miilrlifr. bienqiieilansiincadre plus restreint.
Mais c'est l.l même élégance de meludies , la même fraîcheur
demiitil's. la même richesse il'iustriiineutation ,1a même origi-
nalilede.lélailsspiriluels. piquants. gracieux. peignant mu-
sicalement l.i situalion avec une iniinit.ible line.sse de coloris
On doit donc sinoirgrc il l'administra lion actuel letleropéra-
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
51
Comique d'avoir remis au lépcrtoire un pareil ouvrage , qui
est à vrai dire tout-à-fait neuf pour le plus grand nombre
des amateurs et même des artistes de nos jours.
Quelques jours avant la reprise du Muletier , on avait
remis en scène le Déserteur , cet ancien chef-d'œuvre du
genre, vrai modèle d'exquise sensibilité etde franche bouf-
fonnerie tout à la fois. C'est M. Bussine qui remplit main-
tenant le rôle d'Alexis ; il le chante avec beaucoup de goût
et d'élégance. Dans les rôles de Monlauciel et du grand
Cousin , MM. Mocker et Sainte-Foy font toujours le plus
grand plaisir à voir et à entendre ; il n'est pas de front sou-
cieux qu'ils ne parvinssent a dérider sur l'heure. C'est dans
Je Déserteur que se trouve le fameux air de basse : Le roi
passait et le tambour battait aux champs. Sous la pre-
mière IU'publi(|ue, on ne voulu! pas, pour un mot , sacri-
fier tout un bel ouvrage. On eut alors 1 ingénieuse idée
de faire chanter ; La loi passait, etc. De nos Jours ,
c'est bien différent, on use d'un moyen plus simple et plus
expéditif ; on ne chante rien ; on supprime l'air tout bonne-
ment. Sans doute on a trouvé qu'il était ini|)Ossibie , il
cause du rliytlime musical et do la mesure du vers, de faire
dire au chanteur : Le chef du pouvoir exécutif passait et le
tambour battait aux champs. En vérité , c'est par troj) de
susceptibilité pour un air de basse. Plutôt que d'en priver
le public, pourquoi ne pas laisser intact le texte de ce bon
Sedaine , qui n'a certes jamais eu la prétention de révolu-
tionner le monde avec ses poèmes d'opéra-comique ? Le
mot roi n'eût probablement pas effrayé le public aujour-
d'hui, plus que celui de république ne l'effarouchait il y a
un an. Et l'on ne se faisait pas faute de l'employer alors,
ni auparavant, sous toutes les dynasties. Bref, ma'intenant.
dans l'air du Ùéserteur, il ne passe plus ni roi , ni loi , ni
personne : il n'y a que l'air que l'on passe; et c'est grand
dommage , car il est fort beau.
Après la reprise du Déserteur et du Muletier, est venue la
reprise de l'ilmiasiadricc, pour la continuation des débuts
de madame Ugalde-Beaucé. Le succès obtenu par cette jeune
et déjà excellente cantatrice, dès la première soirée, n'a fait
que s'accroître depuis et grandit chaque jour davantage, à
mesure qu'elle se familiarise avec le théâtre et le public. Le
rôle d'Henriette lui a valu un nouveau trionqilie ; elle le
chante à la perfection , et bientôt, nous l'espérons ,elle le
jouera de môme. Mademoiselle Darcier, à cette reprise de
\ Ambassadrice, s'est chargée du rôle de Charlotte Aucune
actrice ne l'a si bien joué depuis la perte si regrettable de
Jenny Colon. Elle dit on ne peut plus spirituellement les
couplets du premier acte, et on ne rit pas mieux qu'elle ne
fait à la scène du second acte, où elle rencontre la baronne
Varnek.
La semaine dernière, on a donné un petit ouvrage nou-
veau , mais si petit que c'est à peine si nousenavonsà dire
quelque chose. M. Sauvage, auteur de l'^au merveilleuse ol
de Gille ravisseur, a été moins heureux en écrivant la Sour-
noise. Celle sournoise a pourtant un certain reflet de bonne
vieille comédie qui n'est ni sans charme ni sans mérite. Ce
qui manque à la nouvelle pièce, c'estrélément musical ; ou le
musicien n'a pas su l'y trouver. M. Tins a écrit en effet bon
nombre de morceaux pour cette partition ; mais, à l'excep-
tion d'un trio, fait avec es|irit et vivacité, et la seconde
partied'un air chanté par mademoiselle Lemercier, nousnv
trouvons rien qui puisse ajouter à la réputation d'agréable
compositeur de romance, que M. Thjs s'est depuis long-
temps acquise dans les salons d'un monde honnête et très
modeste dans ses prétentions au sublime de l'art.
Nous avons encore deux débuts à signaler à l'Opéra-fo-
niique, qui ont également eu lieu la semaine dernière, tous
deux dans la reprise d'Ha!,dé?c. M. Boulo est un des ténors
aspirants à l'héritage de Roger. Il aurait quelques chances
de le recueillir, s'il peut parvenir à se donner la distinction
qui lui manque dans le débit , le geste, la tenue et la dé-
marche , toutes choses indispensaCles pour un bon premier
ténor d'opéra-comique II a d'ailleurs des cordes sympathi-
ques dans la voix, principalement les sons mixtes du registre
aigu, et il s'en sert avec intelligence; mais les notes de
transition du médium à la voix de tête sont défectueuses ,
et le registre grave manque de sonorité. En somme pour-
tant , vu la disette de ténors qui afflige les théâtres lyri-
ques, M. Boulo peut devenir une bonne acquisition pour
rOpéra-Coniique. Il ne faut pas oublier, au reste, que le
rôle deLoredano dans lequel il a d buté est le dernier où
Roger s'est montré avec tant de sujiénorité , tant par la dis-
tinction de son jeu que par le charme flatteur de sa voix. La
comparaison étaitdonc danger, use. Mademoiselle Decroix a
fait son premier début par le rôle do Rapliaela. C'est une
jeune et jolie personne qui sort du Conservatoire, où elle
s' était fait favorablement remarquer aux deux derniers con-
cours. Le succès qu'elle a obtenu à la seène de la rue
Favart n'est donc en quelque sorte que la sanction de ses
succès déjà obtenus sur la scènede l'école. Le personnagede
Raphaela n'offre pas assez de développement pour établir un
jugement en forme sur le talent de mademoiselle Decroix ;
toutefois nous pensons qu'elle remplacera très convenable-
ment mademoiselle Grinim dans ses autres rôles, comme elle
a fait dans celui-ci. Grâce à ces débuts enfin , la belle par-
tition de M. Auber a été rendue au public , qui ne se lasse
pas plus d'entendre la musique d'Haydéeque celle dotant
d'autres chefs-d'œuvre de l'illustre directeur de notre Con-
servatoire. Mademoiselle Lavoye, MM. Audran , Hermann-
Léon et Uicquier sont toujours'fort applaudis. Nous devons
rendre justice à M. Hermann-Léon , et reconnaître qu'il
saisit mieux et traduit par son jeu d'une manière plus com-
plète qu'il ne fit aux premières représentations û'Haydéi-,
les nuances difficiles du rôle du capitaine Malipieri. Il \r
chante aussi avec un sentiment plus juste et plus de fini. Il
dit surtout avec un goijt parfait sa romance du premier
acte.
Les jardins publics se hâtent de donner leurs dernièrrs
êtes d'été , pendant que la saison leur est encore propice
Le Parisien est vraiment un être privilégié dans ses plaisirs ;
il peut, sans sortir de l'enceinte continue, assister à toutes
les fêtes de l'univers. Tandis que le Jardin-d'Hiver lui sert
une fête orientale , le Châleau-des-Fleurs lui offre une fête
napolitaine , et le Château-Rouge une fête vénitienne. Au
fond, cette nomenclature dejeu'etde ris cosmopolites n'est
qu'un spécieux prétexte dont la musique se sert, pour con-
server et assurer son empire, en ces temps où les empires
sont si peu sûrs et d'une conservation si difficile. A la vé-
rité, ce n'est pas sans quelques pénibles sacrifices de son
fier orgueil que la musique atteint son but. Ne pouvant plus
régner'mouicnl.uiénieut d'un |:OUVoir absolu . Vart musical
se voit contraint de s'unir à la pyrotechnie, afin de pouvoir
continuer a captiver le public. Ce n'est pas la première fois
que le monde parisien est témoin d'une semblable mésal-
liance. Il y a précisément cent ans ou environ que pareille
chose arriva à la Comédie-ltalienn*. Les acteurs de l'Hôtel
de Bourgogne voyaient tous les jours le public déserter leur
salle, dédaignant leurs pastiches pour les joyeux spectacles
de la fiiire', Alws nrriva ri'lt;ilie le premier Ruggieri qui
vint en I-'humv Ijuv -nnivc de rriciires artificiers. Les co-
médiens iI.iIhmi^ - riii|iir~M'rriii ilf m' l'associer, et ils don-
nèrent sur leur» Ihealie des duertiîsements mêlés de feux
d'artifice; ils réchauffèrent ainsi le zèle des amateurs de
musique , qui avait été bien près de s'éteindre. Mais on en
revint bientôt à estimer convenablement les véritables
beautés de l'art, et a les distinguer de ce qui n'était que fu-
mée. Chaque chose fut remise à son lieu. La Comédie-Ita-
lienne en fut quitte pour la peur et pour avoir dérogé un
moment.
A propos de Comédie-Italienne, cela nous fait penser que
le Théâtre-Italien doit faire sa réouverture sous ; eu de jours,
et l'on dit que le nouveau directeur de ce théâtre n'a pas
encore d'orchestre ; sans compter qu'il n'a plus au nombre
de ses pensionnaires ni la Grisi, ni l'Alboni, ni Mario, ni
Gardoni... Est-ce que par hasard il va nous arriver d'Italie
un nouveau Rueaieri ? .
G. B.
C/'oiirrier de Paris.
■Vous aurez beau faire et beau dire , vous devez vous ré-
signer. C'est une nécessité qu'il faut subir, la semaine est
politique et rien que politique. Un seul mot s'échappait de
toutes les lèvres et sonnait délicieusement à toutes les
oreilles : Élection. Les nouvelles de Francfort, la destruc-
tion de Messine, les terribles vengeances de l'Irlande n'ont
trouvé que des lecteurs distraits et indifférents, et c'est pour
en conserver la date que V Illustration leur consacre un
dessin. Pendant cette étourdissante semaine, vous n'étiez
plus, comme dit la Colombine du Tableau parlant, ce que
vous êtes , i.imabics Parisiens .' ni rentiers, ni commerçants,
ni artisans, ni artistes, ni flâneurs, vous étiez des électeurs.
Le devoir politique absorbait tous les autres , vous ne vous
apparteniez plus, vous étiez et vous êtes encore les escla-
ves de la chose publique. Point de trêve, point de répit, le
scrutin est ouvert, que le nom de vos représentants sorte
de l'urne, il en est jusqu'à trois que vous devez nommer.
Sérieusement parlant, jamais fièvre électorale ne s'annonça
par de plus violents symptômes. Etes-vons casanier ou
tout simplement paralytique, ne vous dérangez pas, la po-
litique saura bien arriverjusqu'à votre fauteuil ; la voici en
chair et en os, sous prétexte de visite amicale, ou bien elle
vous est venue sous bande et dans le simple appareil d'une
candidature qui s'humilie, ou bien encore avec la har-
diesse d'un pamphlet à domicile. Cependant l'heure des
affaires a sonné . ou le moment est venu du loisir et des
nonchalances pédestres. Si bien que vous voilà dehors, en
pleine liberté , en pleine rue ; c'est là que notre politique
vous attendait. Quelle fête, quelles clameurs, quel specta-
cle ! Les murailles sont bariolées de rouge et de blanc en
manière d'affiches où M. Pouff a fait merveille. C'est un feu
croisé d'annonces admiratives, de paragraphes louangeurs,
de recommandations hyberboliques. « Citoyens, nommons
Cabochard, nommons Mercadet pour le salut de la patrie! »
Non-seulement la politique vous saute aux yeux, mais elle
vous saisit au collet, elle vous secoue, vous pourchasse et
finit par s'insinuer jusque dans vos poches. Cherchez votre
mouchoir, il est remplacé par une poignée de circulaires ,
un nuage de çetits papiers a crevé sur l'asphalte , et plus
d'un crieur officieux que le progrès social a démuselé vient
vous hurler sa liste à bout portant, en y joignant ce com-
mentaire pour votre instruction : « Raspail est le candidat
des patriotes, et l'humanité souffrante lui doit l'invention
du camphre et des cigarettes. Quel orateur ! il vous éthérise.
je veux dire : il vous électrise. Ainsi de Cabet, le père du
communisme, etde Thoré, le fondateur de la Vraie Répu-
blique , ce sont trois représentants premier numéro!. . »
Que si le passant regimbe aux félicités de l'Icarie, l'offi-
cieux change de gamme et vous traite d'actionnaire et même
de réactionnaire ; que si encore vous avez le malheur, qui
est le mien, de rejeter la circulaire Thoré, notre homme,
plein de son Tartufe , vous lancera celte flèche du Parlhc :
Malgré tout, vous serez, pardieu, tkorifié.'
Ce n'est là qu'un épisode, il y en a eu cent autres non
moins mémorables, autant que de candidats, cent candi-
dats de toutes les conditions, de tous les âges et de tous les
sl\l.'s, '1 1 il,'( Icui n'avait que l'embarras du choix. Mais
a i|iini Imii iii.niiiiiLiiil allonger le chapitre des faits accom-
pli-. liMlr|.ijiMllrii,(iil des bullefins a eu lieu (voir notre
vignette), le vote populaire a marqué_au front trois nou-
veaux élus et l'urne du scrutin ne co'ntient plus que des
cendres qu'il devient inutile de remuer, l'ne observation
seulement : Cette grande fêle des élections , qui va passer
à l'état chronique, tout le monde en reconnaît les avanta-
ges; mais jusqu'à ce que les mœurs s'y soient faites, le
commerce qui nourrit l'Etat n'en épronvera-t-il pas quel-
que dommage : les élections, qui raniment dans les âmes
le feu sacré du patriotisme, rouvrent la porte du club et font
partir son feu d'artifice. Ce n'est pas autour de ce mot-là
que la République s'organisera sans orage, et il ne faut pas
oublier que la liberté sans l'ordre est la plus insupportalile
des servitudes.
Du reste, le sérieux des occupations n'a pas brisé tout-à-
fait la chaîne des soins frivoles et des distractions du grand
air. Le Parisien est toujours cet, homme des champs célébré
par Delille , et beaucoup de votes ont été perdus dans les
bois. Plusieurs de ces réfractaires ont pu recevoir à Saint-
Cloud une leçon de civisme qu'ils méritent bien. C'était au
sein de l'établissement du sieur Cabassol, premier physicien
de la République. Une foule idolâtre venait d'applaudir aux
exercices de la femme géante ; cette foule avait admiré les
soubresauts du serpent de mer et la majestueuse attitude
du grand pélican blanc, il ne manquait plus que la parade
pour mettre le comble à son bonheur ; mais point de parade ;
où est Jocrisse ; qu'est devenu ce bon M. Duval auquel Jo-
crisse raconte son odyssée et ses jocrisiades ; la foule ré-
clame des explications, et madame Cabassol les lui donne
en ces termes: «Messieurs et dames, nos hommes sont
restés à Paris jusqu'à tantôt pour l'exercice de leurs droits
électoraux »
Il faut bien signaler aussi cette ardeur de fraternisation
qui s'est emparée de notre garde nationale. Elle fait gémir les
rails et soupirer les locomotives à la plusgrandejoiedeMM.les
directeurs de chemins de fer. On part pour Dunkerquo, on
revient d'Orléans; hier c'était Bourges, aujourd'hui il s'agit
de Boulogne-sur-Mer. Allons, braves Athéniens, on fait gril-
ler le poisson, les volailles sont à la broche, les gâteaux
sont pétris, la couronne du festin vous attend , le vin est
tiré, et soixante lieues après tout cen'estpasla rierà boire.
Ainsi arrivent nos camarades de la 6' légion dans le port
qui s'est paré pour les recevoir ; les navires sont pavoises ,
les vivat retentissent, et, au moment où nous parlons , les
verres s'emplissent et se vident sur la plage, et l'on échange
bruyamment le baiser de paix. Une autre fois nous sau-
rons vous donner de plus amples détails sur cette fête, dont
la vignette ci-jointe reproduit le plus réjouissant épisode.
Les paroles ont des ailes et la plume a beau voler, le crayon
cette fois aura été plus vite qu'elle. Il s'agit, à ce qu'il paraît,
d'une course de quadrupèdes à longues oreilles, montés par
des jockeys de bonne volonté, et la joute a lieu en face des
splendeurs de l'Océan. N'allez pas croire néanmoins à une
épigramme , et il est certain que les Boulonnais n'ont pas
voulus montrer à nos Parisiens comment ils s'y prennent
pour faire courir des ânes à leur fêtes.
Des ânes de Boulogne nous passons à des savants de
Paris, mais le bon sens du lecteur corrigera ce que la tran-
sition peut avoir de trop brusque. Dans le dernier pro-
gramme de l'Institut (Académie des sciences) , la planète Le-
verrier a fait place à la question de la domestication des
animaux. On avait déjà réhabilité l'oie dans notre estime, le
tour du phoque est à la fin venu. Ce n'est pas que cet
animal aquatique ait de grandes dispositions pour les arts
d'agrément et qu'on en puisse faire un pianiste ou un joueur
de dominos, la société attend de lui des services plus utiles.
La vocation de ce gros poisson est d'attraper les petits. La
pêche est une chasse où il jouera le rôle du lévrier Tous
les traités d'histoire naturelle ont|déjà rendu hommage à la
sagacité de cet animal , qui le porte a courir sus aux poisr-
sons nécessaires à sa nourriture, et la difficulté ne consiste
qu'à lui faire entendre que désormais il ne chassera plus
pour son propre compte, et qu'il est tem|is que notre espèce
humaine recueille le fruit de la peine qu'il s'est donnée. On
va le raisonner , c'est-à-dire l'élever conformément à ces
principes. Jusqu'à présent les phoques soumis à cette ex-
périence l'ont peu goûtée , elle pénètre difficilement dans
leur entendement, et sous ce rapport bon nombre d'hommes
seraient phoques ; mais , à quoi servirait la science sinon à
trouver les moyens nécessaires pour triompher de tous les
obstacles L'animal une fois dompté, le phoque suivra le
pêcheur, ou plutôt c'est le pêcheur qui suit son phoque en
le roulant dans un tonneau; l'attirail est peu commode, mai-;
saurait-on payer trop cher le bonheur d'aller à la chasse
avec un phoque!
Un jour ou l'autre le rêve de Swift ne saurait manque:
d'être réalisé, et l'exemple du phoque doit civiliser le cro-
codile. Il ne S'agit plus que de persuader à ce dernier am-
phibie, que ses Ijents ne lui ont pas été données pour son
usage. Viendront ensuite, dans un autre ordre de bêtes, les
rhinocéros qui sernnl iiltclé'; n dc^i nninilms, et l'orang-ou-
tang que l'on pimir:ii[ iliv--ri .1 1 rsnri.'.M'l placer en Sen-
tinelle, ce qui é|i, m :-'iirMii lin -nvir |iiMiihli> à la garde
nationale. Quant au li^ie ou a la pjiillaie, c'est à tort que
vous leur attribuez un caractère peu sociable et même fé-
roce, il ne s'agit, vous dira le même savant, que de savoir
les prendre.
A propos de science, aux deux professeurs de mathéma-
tiques qui ont bien voulu prendre au sérieux nos dernières
observations, au sujet de la planète Leverrier , nous répon-
drons ceci : Notre bévue n est pas aussi grande que vous
la faites, puisque vous convenez que cotte planète reste
invisible , même aux yeux de la science ; en d'autres ter-
mes, elle n'existe pas encore sçientiliiiuemenl. Nous n'a-
vons pas dit autre chose; et puisqu'on nous fait honte de
notre ignorance en invoquant .\ristote et l'excellence des
iiialhiinaliqiir-. im- itiiix professeurs auront lu s.iii> doute.
(|;mi> 1 ■ ninir \ii-liilr, que " les petits i'iiliiil> iIcMiiinenl
ai-niicnl ni,illiriii,iliiirns. vu qu'il y l'aul |ilii> ili' ii rnioire
,|„:.,!,.|irj,inriii, - Mil' ipini Piisral ajimlr, ipi' . I.i proba-
illllli' JMV >,> ilrLTi'- llilliu- r-l 1.1 IrlTi' llir.illlllH' (lu ma-
il,,.;,,;, 1 1.1, .,1 , 1.1 |i,-,.iMr. ,|iii'. ,,-i 1.1 -11,11, V ili> baga-
telles, • et d Ali'iubrrt, cnlin , ipie ■ lL^ niallicuutiqucs
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
sonevoises.
Cet
hoiioiiible financier . dont les plus beaux jours dataient
de la Restauration el du syndicat , était connu et sera re-
gretté pour la libéralité de son humeur, la magnificence de
ses goûts el l'emploi éclairé qu'il fit de son immense for-
Insurrection eu Irlande. — Signaui de feu dans les montagnes.
tune. M. Baudon est l'un des créateurs des Caisses d'épar-
gne et le fondateur de la Caisse d'escompte qui porte son
nom. Il a patroné, en outre, plus d'une institution chari-
table, ce qui parfois ne l'empêchait pas de semer l'or d'une
manière
moins
fructueuse
et moins
édifiante.
C'est ainsi
qu'un jour,
la jeune
comtesse
de M.
exprimant
devant lui
le regret
de ne point
avoir
clé invitée
au
brillant bal
que donnait
le lendemain
son voisin
le
grand James,
M. Baudon
réparer l'oubli
d'une
manière
éclatante
Pendant
Id nuit,
illitconstruin'
une
salle de bal
dans
.~e>jardins
de Ihôlel
Théluason ,
et y donna
une fête
qui éclipsa
l'iiutre
en lui enlevant
l'élite
et la fleur
de ses invité*
C'est
licut être
au bruit
qui se fil
de celle
magnificence ,
que
M. Baudon dut cette parole d'un roi chasseur : « Monsieur
Baudon , j'irai chasser la grosse bêle chez vous! • Mais
le financier, qui savait compter, et qui se rappelait sans
doute la fameuse pêche de son prédécesseur Bouret, répon-
|ii-l..Miilloiii.Mil ,lcs \.iUs, 1.- il si-ploiulire IS
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
(lil au roi en souriant : • .Siiv, je n'y suis jamais: » Char-
les X comprit et en resta là de ses jeux de prince. Cette
destinée fatale de Bouret, lélernel épouvantail des finan-
ciers trop prodigues, la torluneen réservait pourtant les ri-
Sueurs à notre prudent
linancier, et Ion se sou-
vient encore des circon-
stances qui causèrent
une ruine que tout le
inonde déplora.
Qui croirait que dans
notre monde si agité il se
passe encore des aven-
tures qui rappellent les
fantaisies les plus folles
de l'ancien régime ! L'hé-
ro'ine est une républi
c<iine de la veille , deve-
nue a peu près princesse
du lendemain. Il paraît
que cette dame , ayant
lu la Précaution inutile
de Scarron, voulut s'as-
surer si son époux con-
naissait ces récits du bon
vieux temps. La dame
s'ennuie dans son donjon
fie banlieue, un cavalier
passe, il a bon air, elle
le reconnaît , l'appelle
par un petit nom , et
voilà le couple riant et
chuchotant à plaisir, en
tout bien tout honneur;
mais une voix bien con-
nue se fait entendre, et,
dans le trouble insépa-
rable d'une surprise, le
galant s'esquive dans un
cabinet voisin dont ma-
dame tire la clef. L'ogre-
mari a l'air rie sentir la
chair fraîche, et, pour
le distraire, « Gageons,
lui dit-on , que vous ne
nommerez pas touslesin-
grédients d'une porte, •
ot ainsi de suite jusqu'à
la fin de la Gageure im-
prévue ( voir la pièce de
Sedaine). Si bien que
quand madame présente
la clef, monsieur la re-
fuse, et c'estainsi, ajoute
la chronique d'hier, que
madame a gagné sans
que monsieur ait perdu
autre chose que son pari.
La Comédie-Française reprenait l'autre jour cetle pièce,
d'une touche si franche et si comique et d'un dénoûment si
invraisemblable ; elle a repris aussi Hernani e\, Marion De-
lorme, tandis que le Théâtre-Historique s'en prenait a Ma-
rie Tudor avec mademoiselle Georges , et à Charles VII
avec madame Dorval , tant il est vrai que nos théâtres let-
trés aiment à travailler en vieux. On dit pourtant que ce ne
sont pas les nouveautés qui leur manquent; mais ils esti-
ment que le moment n'est pas encore venu de les mettre en
scène et d'en tirer parti.
Marion Delorme, Marie Tudor, ces chefs-d'œuvre d'au-
trefois et d'un temps oii le beau, c'était le laid, on s'expli-
que peu le motif de leur reprise, et le silence du feuilleton
est une preuve nouvelle et surabondanlc que le besoin de
cette littérature rétrospective se faisait généralement peu
sentir. Cependant, pour être équitablejusqu'au bout, il faut
constaterque la reprise d'AngUe, ce drame d'une puissance
brutale, œuvre des beaux temps de M. Alexandre Dumas ,
a obtenu un assez grand succès de terreur et de larmes.
C est ainsi que nous avons eu partout le drame et ses
émotions; il s'est montré même au Gymnase avec la Com-
tesse de Senneeet). C'est une grande dame, jeune, belle ,
dont l'existence s'embellit de tous les prestiges et à laquelle
il ne manque rien absolument que l'amour de son mari.
Passionnée comme une jeune fille, et jalouse à la façon des
épouses vertueuses, la comtesse pleure et gémit de cet
abandon immérité, jusqu'au moment où elle découvre le
prétexte de tous ses malheurs. M. le comte lui a donné une
rivale, à ses côtés et sous le même toit. D'abord l'épouse
outragée a recours aux moyens anodins pour ramener son
.Mberldaiis la voie du devoir; elle tonte de marier ipli,.
Georgina , qui est sa cousine , a un M Berlel , estimable
apothicaire et amoureux parfaitement ridicule; mais U
mèche est facilement éventée, et la discorde éclate de plus
belle entre la femme ci
le mari. La colère contn-
celui qu'on aime . a dit
le moraliste , est une
véritable démence. L'a-
mour de la comtes!>e
tourne en véritable fu-
reur ; elle réclame im-
périeusement le renvoi
de cette lille , et Albert,
cœur de bronze et vo-
lonté de fer, veut abso-
lument qu'elle reste au
château pour surveiller
l'éducation de son lils
En outre , M. le comte ,
déplus en plus exigeant
n'entend pas que Bartel
persiste dans ses projets
de mariage; la situation
est terrible, et nous n'en
sortirons que par quel-
que chose de plus ef-
frayant encore. C'est
l'enfant qui s'est laissé
choir dans le grand bas-
sin et qu'on apporte
quasi-noyé et presque
mort. Vous , comprenez
que devant un si grand
malheur il n'y a plus de
place pour la jalousie
dans l'âme de l'épou.sp,
et que la colère de l'e-
poux s'est éteinte dans
le cœur du père. On
mêle ses larmes , on st^
réconcilie ; cependant.
Georgina ne s'éloigne et
ne s'éloignera pas. Lu
plus grand sacrifice
qu'une femme peut fai-
re , le voilà donc ac-
compli , mais c'est peu
de cette soumission de
l'épouse; la concubine
veut aussi frapper la
mère , et l'enfant sera
remis à sa tutelle et à
sa garde C'est une lior-
^=EL^-^ rible action que ce vol
fait à une mère , et par
bonheur c'est une scène
très habilement con-
duite et que les auteurs ont sauvée de l'odieux par le pa-
thétique.
Si je vous dis qu'après tous ces bienfaits et tous ces for-
faits, la comtesse trouve au milieu de la nuit cette Geor-
gina en tête-à-tête avec Albert, et qu'à la suite d'une scène
d'éclat, la malheureuse femme se voit réduite à écrire une
lettre d'excuses à sa rivale ; si j'ajoute que le comte met le
comble à ces humiliations par une dernière , une déclara-
tion de divorce, vous allez vous récrier. Ainsi pourtant l'ont
voulu les auteurs qui , cette fois, à vrai dire, ont frappé
trop fort pour frapper bien juste, de sorte que vous com-
prenez que, devant tant de souffrances, d'outrages et de du-
reté, la malheureuse femme n'a plus qu'un refuge, elle veut
Kètes de lioulogoe. — Courses d'iiiies sur la plai;*, i Boulogne.
■y!x
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
mourir et elle s'empoisonne. Avec cette agonie commence
pour le coupable époux l'heure des remords et des regrets ;
il maudit ses folles amours, il maudit sa maîtresse et la
maîtresse senfuit , cl quand Georgina a disparu , lorsque
Albert a pleuré ses fautes et détesté sa conduite, lépouse,
échappant ii la mort, vient donner a l'époux le baiser de
réconciliation et d'oubli.
Sansd(iiilc,lc'sp(Mt;iclede tant de douleurs,'cette torture
conjugale, ces l.iiiictitalions, ce désespoir, ces fautes, ces
haines cl <(■ iii I"iil i-('l;i est un |ieu violentet un peu
Ini-'iilirc I "111 l:i -ii'iir ilii (iMiiii:i-r, s.ins compter que celle
iicliiiii ili'|;i M II i^ii' i,i|i|,cl,iii ;i iiiii- les souvenirs, une au-
tre action d une cLilr iriciilc ri il nue horreur trop vérita-
blement lamentable ; mais on était ému, on se sentait in-
téressé, et l'on a oublié volontiers l'inconvenance du sujet
en faveur de la pièce qui est très convenable et qui a élé
parfaitement jouéi', cl notaiiunenl par ninilanie Knsc Chéri ,
l'épouse la plus cliasti: et la plus |i.issiiinTicc, l.i plusM'nsible
(les mères et riiclncc la plus intelli^'eiitc et la plus spiri-
tuelle de l'aiis.
Keviie littéraire.
.le viens de lire le niiuvel ouvrage de M lùlgard ()uinel,
et si je sais bien qu'en penser , je ne sais vraiment qu'en
dire.
Si je loue, mémo un peu, ma conscience en gémira; si je
l)làme, je crains qu'on ne me reproche d'oublier ce que je
dois à l'érudition, au patriolisnie si courageux, si doulou-
reusement éprouvé du r(''lébre, de l'illustre professeur.
M. Quiiicl, c'o-t uncjiisliro ;i lui rendre, a toujours écrit
sous reni|ilrc lllll-|ill :iil"li- ^^ll^H■ll,l■^ , il n'.-i j,iiii.iis|>risla
plume qui' il^in^ h'^ illi'inrx inh^iiiiiins (lu ninnilc. Aussi
beaucnii|i Hc ;_'cn-, nnii iiKnn- lucii iiilrnl ii.nnrs, l'oiil estimé
et vanir -ui I cIiiIihIIc ilr mui -:ii' , -;iii~ iMip icg;inier au
fond, l'nnr v i Lui «« .i.linil. iiuii, ii ,i\ (,n> jiiiiiais été
de ses ailmir.ilrin^ l),iii> les plus bcau\ jours de la gloire
de M. Edii.u- (Juincl, L'Idiie a jamais évanouie peut-être,
nous n'avons pi iis lairi' a son étrange façon de com-
prendre et d'cxpliipii'r hi littérature et l'histoire. Nous ai-
mons les esprits nels.qui conçoivent clairement et expriment
de même ce qu'ils ont conçu Or, tel n'est pas malheureuse-
ment l'esprit de M. Edgar Quinet : il y a presque toujours
eu quelipie clinse de nuageux dans ses idées, comme il y
a généraleinent ihins ses expressions quelque chose de
vague el de ilrrl.iiii;iloire. A cet égard , son nouveau livre
ressemlilr ,i m-, .iiiks C'est une suite d'images et de for-
mules, d :-r- ijiii brillent aux yeux sans éclairer l'esprit,
de formulr> rciriiii>>:inles, mais qui font beaucoup de bruit
pour rien.
Sous ce titre ambitieux, Ui'voluUons de l'Italie, M. Edgar
Quinet s'est proposé, comme il nous ledit dans sa préface,
d'écrire r/Z/sfo/rc de l'dtiie du peuple italien. Écrire l'his-
toire de I il II H' di! Il 111 II' 111 il' iidl 11 III, irrles le projet est vaste
et d'une cxéiulion ililliiile roiii en -, enirà bout, s'il se peut,
ne faut-il pas interroger successivement et profondément
toutes les phases de l'histoire, tous les monuments de la
littérature et des arts, la langue, le commerce, la religion,
les mœurs de ce peuple dont on vcul pénélrer et manifester
l'essence? Mais ,\1, (Jiiinel s'est liini g.inlé d'interroger tout
cela. 11 lui eût f.illii di'Soiuirrsrl lies Miliuiics : ce qui n'eût
fait ni son affaire ni celle de son libraire. 11 a trouvé plus
simple de découvrir un beau matin la grande vérité qu il a
résumée dans cet axiome :
» L'ilalie romaine avait le génie pratique, l'Italie mo-
derne a le géide idéal. »
Sur cette fiinnulc, le célèbre professeur a écritdeux cents
liages de ce st\ le brillant et brillante qui éblouit les faibles
yeux, et qui fait dire ii des juges indulgents que si M Qui-
iiet n'est ni un historien, ni un philosophe, ni un critique,
c'est du moins un poète. Glorieux pis aller, et dont les plus
ambitieux se contenteraient asMiiriiimi ;\l,iis M (juinet
n'est qu'un poète en prose, un |n rir i tw M.iriiiiuitel et
Thomas, el autres faiseurs de pni.-r pniiii|iir ilmii liiuu sait
le prix.
D'ailleurs, même en poésie, le premier mérite, la condi-
tion sine qua non, c'est d'avoir le sens commun, c'est de ne
rien avancer qui nesnil vnii, c'est j dire, rien (]iii ne tou-
che le cœur ou irinslnil^r rr-pnl Tnlllr- 11'., lirliiins du
poète, tous les arlilins ilmii il n^r iir i|(M\riil iniilre qu'à
mettre en relief, qu'a l.iur linllcr d nu pliks \if cclat cette
vérité que riiisloiic et l.i iiliilosophie expriment avec l'élo-
quente siniplii'ilc 1)111 lui rst propre.
M. Quiiicl iii^l p.is siiiipir |iam' quil ii i-st pas vrai : faule
d'idées, il a rn-iini's ;iii hixr ilrsiimiv ;i lViii|ili;Hr ilrs gran-
des et pdllipi'lls.'S |Hinih-~, srsijuijinlatiil rnini nuls peSeZ
dans la balance. r\;iiiiini'/.ili' pii> li,iilr> rr- siilmiiçlles for-
mules, et vous verrez le peu qui vous en restera.
Sommes-nous bien avancés, par exem|de, quand nous
vivons appris do M. Quinet que - l'Italie antique avait le
génie pratique, el que l'Italie moderne a le génie idéal? ■
(Juoi I l'antique Italie, la patrie de Virgile, "d'Horace, de
Lucrèce, de tant de grands poètes vivant dans tous les .sou-
venirs et de gr;iiiils :iiii^li> dnnt les noms seuls ont péri,
n'avait pas le gnnr ilr l ulril' c't d'autre part l'ilalie mo-
derne, le berci'iiii il.^i.i, -.nic VII et (Wf^ Innocent III, îles
Médicis et des linrgia, ilrs .M.irlnavel el des Guiciiardin. se-
rait dénuée dr sens pialii|iir-,' l'Aiileiniiienl lin pi'iil lenxer-
serlapriip"siliiiiideM,(Jiiiiii'l,el rllcirni reslcra m moins
vraie, m inniii^ l'.ius-r, Ccsl la iiiir de ces riirniiilcs v.igues
qui ne diseiil rien a t'urce d'eu \ouloir liop dire
Ailleurs M l'ilgiir (Juinrl s'm i-e de ilccouvrir a la féo-
dalité une origine Imite niunellr, el a ce propos, il t.iiiie
vortoment les pulilicislcs qui cherclient eiicinr l.i -mirlr
féodale dans les loiélsde la Germanie l.e pnirrssriir ni. \:,
pas si loin pour la Iroiuer, .Selon lui, la féodalité politique
-est formée tout simplement sur le patron de la feodaliie
n'iliiieiisr iii-lituée par le christianisme, ou du moins par
rivjll-r 1 Inrlirnue.
I.i pniuiir acte moral de l'homme, au moyen i\ge, dit
M, (,)iiiiiel , e.-l de tomber à genoux aux pieds liu iirèlrc, de
lui "faire hommage lige de smi iiilrlli.i:eiiie, de sa con-
science , de tout son èln^ nuirai .\ppli(|oe/. au inoiide civil
ce .sentiment inlerieiir derenoiicemeiil, vous eu voyez naître
la société Icodaln, Chaque iiiiie, s étant Joiiuée il un prèlre
coiiiine a son seigneur spirituel , n'a presque rien plus il
faire pour .-.e ildiiiiei' a un M'igneur tem|ion^l. L'humanité,
sans dniii , ile-iiinee il elle-ineme après avoir abdiqué entre
les mains du iiei,^e, ne se sentant pas la force de s'appuyer
sur sa pi'iipre i nnseieiiee, se mit à chercher partout en de-
hors de SOI un aide, un patron ; le serf d'esprit devint serf
de corps. »
Si ce passage datait de 1748, ou même de 1829, du régne
de la CiinijieLMliiin et des inbes noires du Petil-Montrouge,
il ne iiiiiis siii |iienilr,iii imint Nous n'y verrions qu'une
preuve nom elle île i el 1 sj.i 11 lie parti qui, dans l'ardeurd'une
poléniiipie, lansse siiu\eiit les enseignements de l'histoire
|)ours'en faire une arme eunire les inlliieiH es qu'il combat.
.Mais a quoi bnu aujourd liui lei imiiuenrei K.i\ liai. Boulan-
ger ou Dula lire?. \ quoi bon nier tous les pingiesde la science
pour faire pièce a un parti qui n'est plus? .\l Ouinet se
croit toujours en face de ces mallieureus ji'suites, dont l'i-
mage I obsédait daes sa , baire du colli'ge de Kr.inee ; et il
s'en prend an e.illiiilirisiue, ,iii élu isli.inisiiie nieiue , des
épigraiiiiiies de I l'iiirns iduiicux .le ne !eliilei:ii pas en
forme son étrange npiniun siu I uiigine de la leudalré. 11 me
suffira de reiivnver les lerleurs à ious les grands historiens
de notre é|)i)ipie', qui nous ont fait assister à la naissance et
aux développements de la société nouvelle durant les siè-
cles d'épreuve du uiuMii ,ige 1 nus s'accordent à signaler
l'inlluence toute hlieule que 1 l.^lise ne cessa alors d'exer-
cer, du cinquième an di.ii/ieiue sieele particulièrement. 11
est môme remarquable qu'au iiuheu île icuis ces Etals fon-
dés sur le principe de la conipieie ri ilr 1 hérédité, l'Eglise
seule olirait limage d'une sociele repiiliiu ,iine. sans cesse
vivifiée et régnant par l'esprit, et se perpétuant, s'organi-
sant par les libres vocations et par l'élection .
Il serait long, il serait fastidieux d'aller chicaner M. Qui-
net sur toutes les pages de son livre qui , presque toutes ,
renferment des propositions plus ou moins aventureuses. Ce
qu'il dit de Dante, de l'.^rioste et de Boccace prêterait sin-
gulièrement à la controverse Sans doute il faut qu'il ail bien
peu lu fauteur du Décaméron, pour oser dire cpie ce n'est
qu'un railleur superficiel. Qu'il relise le conte de la Conver-
sion du Juif, et tant d'autres charmants récits où l'ironie
n'est le plus souvent que l'arme dune raison supérieure et
line, et M. Quinet, je l'espère, pensera un peu mieux de Boc-
cace et de son chef-d'œuvre.
C'est bien il contrecœur, comme on le croira sans peine,
el contraint par les devoirs d'une rigoureuse équité, que je
juge ainsi un homme distingué, un professeur populaire, el
qui est de plus, depuis quelques mois, représentant du peu-
ple et colonel d'une légion de Paris
Ces deux derniers tilres, M. Edgar Quinet les doit ii la
Révolnliiui lie l'eviier; et de là on serait tenté de croire
qu'il \ ;i LMLjne .M.iis le fait est qu'il y a perdu , sensible-
inentperilu, l't je u hésite pas à le ranger au nombre de ses
victimes.
Que sont en effet des litres, même les plus considérables,
auprès de ce crédit, de cette popularité dontjouissait M. Qui-
net, quand, du haut de sa chaire du collège de France,
il lançais sa parole ii tout un peuple de jeunes gens et de
belles dames, qui lui répondaient par d unanimes et fré-
nétiques applaudissements? Ces beaux jours marqueront
l'apogée de la gloire de M. Quinet, ii qui la tribune, du
moins je le crains, ne rendra pas les triomphes qu'il a con-
quis dans la chaire. La chaire elle-même, s'il y remontait,
ne les lui rendrait pas. Car, où serait alors cet esprit d'op-
position ipii passionnait autrefois son auditoire, qui le ren-
dait si sympathique avec les paroles du maître, et qui n'est
pas entré pour peu dans le bruyant succès de ses leçons et
de ses livres?
Chaque peuple a son siècle, et clianuc liommc u son jour.
Comme M, Edcar Quinet, M Alexis Dumesnil a été autre-
fois un pampldél'.uie e,,. nié el rediinte Les liuiunies île qoa-
raiile a ciiiqn.iiile ,iii,-e i,i|i|.ell(uil eueure le tiiie de quel-
ques-unes de ses liMielilue», que ril.uenl el \, ml. lient a ipii
mieux mieux le ('uiisliluliiniinl et le Counin-l-'iuin-ais.
Les plus instruits, ceux qui n oublient rien, vous parleront
même de son Histoire de l'Iiilippe II. ou pour mieux dire
de son Histoire rnnire l'IiiUppe II. conçue dans l'esprit et
écrite dans le st\le de ll;i\iiiil, et où l'Inquisition, comme
bien vous pense/, teiuut une large place. Eh bien, depuis
celte époque, M. ,\le\is IKunesnil n'a pas fait un pas. Son
espiil pelritie en lS-27. en est encore aux rancunes, aux
eiileies du liliéraliMiie de ce temps contre la camarilla, le
ininisleie Villeleet l;i congregiilion .le parlais lont a l'heure
de .M. Quinet. (]iii voit des jcsuiles un peu piirliuit; mais
M, Alexis Dumesnil est bien aulreiiient possède de cette
maladie passée chez lui a l'état cliioni(|ue. Homme d'oppo-
sition par lempéranient. il n'a ces.sé de l'aire la guerre il tous
les gouvernements, a Ious les systèmes qui se soni succédé
depuis IHli'.l jiisqu a le jour. Dieu sait s'il ménage les répu-
blicains de la veille ou du lendemain, els'il nous révèle sur
ce chapitre des vérités précieuses auxquelles on nes'alten-
dail pas du tout! Qui aurait cru, par exemple, que les
jésuites, comme dit .M. Dumesnil, •> sont iuijourd'liui tout
puissanls parmi nous; ■ ipie le géncnil Caxiiigiiac n'esl
qu'un jésuite déguise, M, Aruiand Marrast un autre jésuite,
qui , au .\ali(i)i<d . délèndait siuunoisement les intérêts de
. rh\pocnte société de .Icsus. «
Toute la brochure de .\L Alexis Dumesnil est pleine de
CCS vérités, entrenièlees d'injures contre vous, contre luni,
coiilre liiiil le iiimide l'ruphete de sinistre augure, il va
même jusqu'à nous annoncer le retour prochain de la Ter-
reur, d'une Terreur plus terrible encore que celle qu'ont
vue nos pères, et Ion sera forcé d'aller à confesse , el de
lire toutes les brochures vieilles et nouvelles de M. Alexis
Dumesnil. Seigneur! Seigneur mon Dieu! détournez-nous
ce calice.
Je préférerais encore, s'il fallait choisir, relire une bro-
chure rouge intitulée pompeusement : Lamartine devantie
tribunal du peuple, par un républicain de la veille.
Cette bniehure n'est pas seulement une apologie ; c'est un
liosanna. un cantique, un nouveau Cantique des Cantiques.
ou notre républicain de la veille répand à profusion les
allégoriis et les métaphores orientales. L'œil de l'aigle, les
rugissements du lion, les roucoulements du pigeon, le flux
et le reflux, les valléps el les montagnes, les poissons et les
reptiles, toute l'histoire naturelleenfin figure dans ces pages
dithyrambiques, et aussi pleines d'images un peu usées que
vides de raison el de sens commun. Heureusement M. de
Lamartine n'avait pas besoin qu'on le défendît d'office; il a
trouvé dans son talent, dans son âme. et, ce qui vaut
mieux encore, dans la vérité , un avocat qui vient de gagner
sa cause, ou qui du moins a fait admettre en sa faveur bien
des circonstances atténuantes. Sa Lettre aux dix départe-
ments restera comme le monumel d'un beau talent et d'un
beau caractère. Ce n'est point à dire que M. de Lamartine
n'ait pas commis de fautes, el même de graves parfois; mais
ces fautes, il ne les a commises que parce que son esprit a
été la dupe des plus nobles instincts de son cœur. Combien
d'hommes d'étal pourraient invoquer de pareilles excuses?
Du dithyrambe du républicain de la veille, puisque veille
il y a, passons, je vous prie, au traité d'un nomme prati-
que, VEgalité, par M. Victor Uesal. avocat et cultivateur
à Epinal, (Junique avocat. M, llesal n'est pas cependant un
decesciilli\,ilenrs inpartibus, qui n'ont étudié l'agriculture
que dans les manuels Iloret et les pots à fleurs de leurs ter-
rasses. M. Resal a des terres et les cultive : il vit au milieu
des paysans ; il sait leurs mœurs, leurs habitudes et les be-
soins de nos campagnes. On lira avec fruit . je n'en doute
pas, les exeelleiits eonseils économiques qu'il nous donne
pour le siiiili-ement de la classe pauvre , et particulière-
ment les luiiyiLs qu il indique pour rendre à l'agriculture ce
surcroit de population industrielle qui ne sérail pas moins
utile aux campagnes qu'il est funeste au repos el à la pros-
périté des villes.
C'est avec le même bon sens, la même sagesse pratique que
M Amédée Hennequin vient d'examiner une question non
moins importante : le piacement des oufriVr*. Dans ces trente
dernières années, ce placement, comme on sait, était de-
venu la matière d'un négoce pour de petits agents d'affaires,
souvent improbes, toujours cupides, et qui ne voyaient dans
les ouvriers qu'une genl laillable el corvéable à merci. Le
gouvernement provisoire s'est empressé d'instituer, en fa-
veur des ouvriers de tout état, des bureaux de placement
gratuits, et fonctionnant sous la surveillance de la police,
Mais cette mesure partielle eslfort insuffisante. On n'ignore
pas, en effet, que souvent les ouvriers surabondent sur un
[loinl du territoire, tandis qu'ailleurs les bras manquent ;
de sorte que les uns chôment pendant que les autres i-cgor-
gent. H importe donc d'établir dans chaque ville des bu-
reaux de placement et de renseignement, qui, correspondant
tous les uns a\ee les.iutres, indiqueraient ainsi, à tout in-
stant donné, les he-mn- de I haque place industrielle. On a
déjà fait plusieuis lenliiines. plusieurs essais de ce genre,
mais qui n'ont éié ni assez complets ni assez suivis pour pro-
duire tous les bons résultats qu'on pouvait en attendre. Le
premier, Tnrgot, tomme ledit M. Amédée Hennequin, avait
reconiiii ([ue les administrateurs d'un grand État , si cnli-
chés qn ils bissent de la superstition du laissez-faire , ne
piHu aient se passer de connaître le nombre et la profession
des ouvriers. Ainsi dans le préambule du premier édil de
1776 , on lit ces lignes remarquables : ■ En assurant au
commerce et à l'industrie l'entière liberté et la pleine con-
currence dont ilsdoivent jouir, nous [irendrons les mesures
que lii emisi lA.itinn de l'ordre public exige pour que ceux
qui pi,iiii|iieiil les ilitl'erents négoces, ariset métiers, soient
connus cl cuuslilucs en même temps sous la protection et
la discipline de la police. »
Vn registre s'ouvrit donc à cet effet, cl l'on eut bientôt
toutes les b.ises d'une slalislique industrielle. Un membre
de r,\s-eiiililee emisiiiuante . Malouel , dans la séance du
:i iioùi \',S'.t |.i"|Hi>,i lie développer ces germes précieux, et
d'élablu p.ii tmitc l.i fiance un vaste système d'information
el de repiirtilion des travailleurs. Mais dans son horreur
piiiir linil ce qui, de prèsou de loin, louchait à la rcglemen-
tiitionile lindustrie. l'Assemblée rejeta le projet de Malouel.
Quelques années après, quand la loi du iî germinal an XI
eut décrété que tout ouvrier serait porteur d'un livret, rien
n'était plus facile, avec les livrets d'un colé et les patentes
de l'autre, que de connaître exactement le nombre et la ré-
partition des commerçants, des chefs d'alelers el des ou-
vriers. Par malheur, on ne donna pas suite à celle idée.
Seulement quelques bureaux de placement pour tous les
corps de travailleurs furent placés alors à Paris . mais ils
passèrent bientôt des mains des agents de l'Etal aux mains
do ces spéculateurs à qui la révolution do février n'a pu les
arracli r complclemcnl.
Opendanl, dans une grande ville, à Strasbourg, l'admi-
nistialioii niiiiliciiiale a, depuis quarante ans, oi^nisc
des bureaux de placement . non moins utiles aux mattres
cpiaiix ouvriers M. Amédée Hennequin. dans une analyse
claire cl précise, nous dévi'loppe l'oi^anisjilion de ces bu-
reaux, les perl'eetiiiiineinents dont ils ont élé l'objet, les
garanties d'ordre cl de seeiuitc qu'ils pré.sonlenl. Cette bro-
cliiire de .M. ,\nieilee llcnnccpiin merile donc d'être re-
niarqiice. tant peur les reiiseigiienienls qu'elle renferme que
pour lii manière dont l'iiutciir les cxpos-v En ouliT, les ré-
flexions qu'il \ a eiitivniolccs partent d'un bon esprit, ilun
esprit qui recliciche le vrai sans préoccupation svslémati-
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
55
que , et qui tient coniplo de tous les résultats de l'expé-
rience.
Quant aux Républicains modèles de M. Fédix, c'est un
bon petit livre, illustré d'images jaunes, et très capable d'in-
struire ceux qui voudront bien l'acheter. Qui sait même si,
en lisant les beaux traits de la vie de Régulus, d'Aristide et
de Washington, etc., ils ne deviendront pas, eux aussi, les
modèles des républicains futurs? M. Fédix, le nouveau Plu-
larquedeces nouvelles vies d'hommes illustres, n'a pas du
reste de prétentions littéraires, et il a bien raison. À quoi
lui serviraient-elles?
QuantàM. Bonnal, c'est une autre afl'aire Avez-vouslu la
force et Vidée ? Si vous ne l'avez point lue, ce que je vous
souhaite , vous pouvez vous dispenser de la lire, car ce n'est
guère qu'une centième édition des premiers-Paris de la
Presse, depuis le 24 juin. La Force, c'est le général Cavai-
gnac ; YIdée. c'est M. Emile de Girardin, cela va s'en dire?
Maintenant placez sous le premier chef toutes sortes d'im-
précations, de malétlictions et de jubilations; placez sous
le second tout autant de félicitations et de points d'admi-
ration qu'en peuvent exiger, dans un récit candide, toutes
les vertus théologales et cardinales de M. de Girardin, et ses
grandes idées , et ses petites idées . ses idées de premier-
Paris, et ses idées d' entre-filet, et vous aurez ainsi, à deux
ou trois alinéa près, la brochure de M. Bonnal.
Au surplus, lisez dans la Presse la profession de foi du
citoyen AlexandreWeill. C'est encore du Bonnal, du Bonnal
germanisé par le génie et le savoir de M Weill , cet écrivain
franco-germain, qui entend l'allemand comme un Français,
et qui écrit le français comme un Allemand. M. Weill est,
du reste , très amusant dans sa profession de foi, dont on
nous permettra de parler même après les élections ; carc'est
un document historique et littéraire plutôt qu'une lettre
de circonstance. Entre autres phrases mémorables, on y
lit celle-ci: « Comme prêtre sacré de la vérité, je dois vous
dire... » Quoi ! il. Weill, un prêtre sacré de la vérité.^ et
moi, quibonnementavaiscru jusqu'ici que M Weill n'avait
été que le grand-prèlre des lorettes . dont il racontait lon-
guement, dans le Corsaire, les dits, les faits et les gestes.
Il est vrai que ces dames empruntent souvent le mytholo-
gique costume de la Vérité , et c'est lii sans doute ce qui a
fait croire à cet heureux petit fripon de M. Weill qu'en ser-
\ant les unes, il s'était dévoué au service de l'autre, erreur
d'une âme candide et dont la bonhomie nous désarme I
Aleï.4ndrf, Dufa'i
Capitale (ville).
Conséquence et agent de la centralisation , la capitale
d'un empire est d'autant plus florissante, que l'unité admi-
nistrative et politique est mieux constituée. Une capitale
joue réellement alors le rôle de la tête, par rapport à des
membres, qui sont les diverses portions du territoire. Ils
répartissent des forces à ce chef dont ils reçoivent l'impul-
sion et le mouvement.
D'ordinaire, le caractère, le génie, les habitudes d'une
nation se dépeignent dans la physionomie de sa capitale.
Sanctuaire d'un empire tout spirituel , Rome est artiste et
religieuse ; Madrid , monacale naguère et sans industrie
comme l'Espagne, est sans physionomie, maintenant que la
Péninsule llotte indécise à la merci des essais de constitu-
tion. L'Allemagne est sans unité; les sciences, les arts sont
concentrés vers le Nord ; le peuple de l'empire est encore
exclu de l'initiative politique : Vienne n'est qu'une ville de
divertissements.
Foyerd'une administration militaire puissante, Berlin est
une ville essentiellement politique. Au milieu de la Belgique
industrielle et quasi-française, Bruxelles poursuit l'imitation
des allures parisiennes ; c'est Paris en miniature. Par des
raisons différentes , mais sous le bénéfice de corrélations
analogues, Amsterdam est un comptoir, Munich un atelier
de peinture et d'archéologie, Saint-Pétersbourg un grand
palais peuplé de courtisans. Les pays qui n'ont pas de ca-
ractère propre ni d'action politique, prétendent en vain
animer des capitales; Carlsruhe n'est que la statue d'une
\ille, et le véritable chef-lieu du grand-duché, Bade, est
une hôtellerie.
Antique et vaste cité d'un peuple livré à l'industrie,
d'un peuple qui règne sur les mers et doit le sceptre est un
caducée, Londres est une immense usine devant laquelle un
commerce cosmopolite amarre incessamment ses navires.
liien ne retrace limage de la guerre dans Londres , type
achevé d'une capitale industrielle. La politique y campe une
fo,s l'an, mais n'y réside pas.
Paris est la ville qui réalise le plus complètement l'idée
iiuel'on conçoit d'une capitale, parce que la France est le
pays où la centralisation a reçu sa plus entière application.
Chef-lieu d'un pays essentiellement guerrier, Paris a un
aspect très militaire; c'est la plus grande place forte du
continent.
Le principal élément de la fortune publique en France ,
c'est I exploitation du sol Un peuple agriculteur attache un
grand prix à la propriété et ne s éloigne guère de 1 objet de
ses plus chers intérêts: le Français est peu voyageur, peu
vagabond de sa nature ; le Parisien est casanier, il échange
volontiers son capital contre des immeubles qu'il adminis-
tre lui-même; aussi la propriété, objet d un mouvement con-
sidérable à Paris, y est-elle la base du crédit public. Paris
règle le taux de la propriété pour toute la France.
De ce fait l'on déduit sur-le-champ cette conséquence :
Paris ne peut , sans danger pour le pays, devenir une capi-
tale industrielle. Nous développerons cette proposition plus
loin.
Enfin, symbole animé d'un Etat où les arts, les sciences,
les professions libérales de tout genre sont en honneur,
d'un Etat livré aux raffinements du goût, aux délicatesses
de la civilisation, Paris est le centre unique du mouvement
intellectuel ; il règne par la pensée comme par les lois , il
est l'arbitre du goiït, le loyer des lumières, l'œil qui voit et
qui juge, le cerveau qui conçoit, l'oreille où tout arrive, la
bouche qui fait retentir toutes les idées nouvelles : il est bien
réellement la léte de la société française.
Une centralisation si merveilleuse a pour écueil et pour
agent de destruction son excès même ; elle conduit a la con-
centration qui absorbe, isole et ne rend plus rien, bien
(lu'elle reçoive toujours.
La centralisation est pour un pays un trésor ouvert; la
concentration est un gouffre.
Les gouvernements de l'ancien régime o.it eu de bien
bonne heure le sentiment des périls auxquels risque d'être
en butte un pouvoir centralisé dans une grande capitale.
C'est sous l'impression de la révolte des Maillotins, de la
tyrannie populaire exercée sur le dauphin, lils du roi Jean,
ainsi que de la longue anarchie fomentée dans Paris par
les querelles des Bourguignons et des Armagnacs, désordres
qui finirent par livrer aux Anglais les clefs du royaume,
c'est, édifié par ces souvenirs, que Louis XI évita d'asseoir
le siège de l'autorité e\écutive à Paris. Il se plaignait formel-
lemenl des accroissemen ts excessifs de cette cité, assez forte
pour balancer la prépondérance royale, et il se retranchait
aux rives de la Loire.
t'ette ligne de conduite fut imitée par les Valois, jusqu'au
règne de Henri IV, qui, contraint de s'appuyer sur l'élément
populaire et d'opposer l'unité à la fédération aristocratique
de la noblesse provinciale, symbolisée par le protestantisme,
résida au Louvre et donna à Paris une suprême importance.
Il y fut néanmoins immolé par un fanatisme intolérant et
aveugle, qui sacrifia en sa personne l'adversaire politique
le plus efficace du calvinisme.
Richelieu continua l'œuvre de ce grand homme et ci-
menta l'unité française en opposant Paris à l'influence féo-
dale de la noblesse. Mais, des qu'il eut les yeux ferniés, les
partis comprimés se relevèrent à la faveur fluiie iniiinrilé.
source de division et de faiblesse; ils exiihiiu-riMil l.i bour-
geoisie parisienne, ils organisèrent la Fronde, et la ruyauté,
livrée à la merci de l'insurrection, en subit les outrages, les
menaces et la violence.
Ces leçons du jeune âge ne furent point perdues pour
Louis XIV; elles eurent pour résultat la création de Ver-
sailles. Plus d'un siècle après, quand Paris, devenu l'arse-
nal des idées d'émancipation, eut mis la royauté en échec,
il ne put l'abattre qu à la condition de s'en emparer et de
l'emprisonner dans son enceinte. Les journées d'octobre
décidèrent du sort de la monarchie.
.4 dater de cette époque commence la concentration po-
lilique exercée par la capitale, qui, non contente de gou-
verner, a prétendu régner sans contre-poids sur la France,
où elle tend à se constituer en royauté absolue au milieu
de la république.
Entraîné par les séductions déclamatoires d'une superbe
périojle, M. de Cormenin. chantant les louanges de Paris
dans une énumération plantureuse et sonore, s'écriait sous
le dernier règne : « Paris écrase de son souffle tout ce qui
lui résiste, il fait et défait les rois; il commence les révolu-
tions et il les finit... »
Ces observations sont d'une incontestable justesse ; seu-
lement il est fâcheux que Paris fasse des rois pour les dé-
faire, et qu'ayant défait ceux qu'il avait eu la fantaisie de
faire, il puisse à son gré en refaire de nouveaux. « 11 com-
mence les révolutions et il les finit, •> ajoute M. de Corme-
nin : la première partie de la proposition n'est que trop
vraie ; quant à la seconde
Paris a commencé une révolution il y a soixante arts
bientôt, et depuis lors, loin de la finir, il en entretient les
germes, il en réchauft'e les éléments, il en prolonge la péri-
pétie, il en suspend les conséquences en faisant des rois ,
puis il les exagère en abattant ces monarchies il bail : sa
mobilité impérieuse, passionnée, le rend peu propre à com-
biner ledénoilnientdu drame des révolutions.
Investi de cette initiative souveniiiic, isolé de l'opinion
française, Paris deviendra semblahlr ;i un (Irspote fantas-
que. Ne l'avons-nous pas vu iniiiiiilci ms laxnns et faire
justice de tous ses flatteurs? Louis XVI, la Montagne répu-
blicaine. Napoléon, Louis-Philippe furent les idoles et les
victimes de ce Paris qui les fit et les défit de sa seule auto-
rité, mais qui semble, moins que jamais, disposé à en finir
avec les révolutions.
L'autocratie de Paris, c'est le ri^ime permanent de l'é-
meute.
De même qu'une capitale reproduit le caractère, la phy-
sionomie d'un État, de même elle doit en représenter les
opinions et les mœurs. Nos opinions ne sont point portées
au changement perpétuel, aux bouleversements sansfin ; nos
mœurs guidées par nos véritables intérêts nous rendent peu
favorables au développement démesuré de l'industrialisme.
L'abus des exploitations industrielles ruine la France au
profit de Paris où il entasse une population nécessiteuse et
remuante. Chez nous le gouvernement ne saurait devenir un
contre-maître, et la capitale delà France, qui n'est pas un
pavs de [irotestants ni de banquiers, ne peut être assimilée
à line ville anglaise, sans être mise en dissidence avec l'es-
prit national.
Napoléon comprenait fort bien ces vérités lorsqu'il s'atta-
chait il éloigner de sa capitale les grandes exploitations
iii;iiiiiriH hiiHii'.s, multipliées par le dernier gouvernement
(|iii ,1 |iir|i:iir ,.i cliute ct rcudu la France ingouvernable.
Il, III, lin rniiiire aussi intimement centralisé, et où l'in-
dustnuliMiii^ Il est qu'une tendance passagère et factice, un
gouvernement réglé pour et par une coalition d'ouvriers est
un non-sens et une absurdité.
La prolongation de cette situation anormale séparerait les
intérêts de Paris de ceux des provinces, engendrerait le fé-
déralisme et aboutirait à poser l'att'reux dilemme de la ruine
de Paris ou de la perte de l'Etat
Il s'agit de sauver l'un et l'autre; car la force et le salut
de la France sont liés il la centralisation; la séparation de
la tête d'avec le tronc ferait périr le corps et la tête. Ces
idées sont évidentes jusqu'à la naïveté.
Paris , tel que la dernière monarchie l'a organisé dan?
un but égoïste et maladroit , avec ses besoins de luxe, sa
prépondérance commerciale et ses industries d'apparat .
Paris devenu atelier et bazar de frivolités coûteuses. Paris
est tombé dans la condition des capitales essenliellemen;
monarchiques. L'émigration de la cour , sous l'ancien ré-
gime, l'avait livré auxinstinctsde l'indépendance et du li-
béralisme. L'empire et la royauté de juillet ont soumis se.s
besoins ;i la monarchie, sans agir sur ses opinions, et le
pouvoir s'est efforce d'accroître cette discordance.
Il ne faut pas s'y méprendre : la République tuera le Pa-
ris de la monarchie. Blessé par elle, et mortellement, ce
ténia du luxe secoue, désespéré, ses tronçons endoloris: il
le faut tirer hors de l'organe qu'il déchire ; il faut rendre a
l'équilibre de la santé la capitale de la France.
Régulateur d'un empire qui prospère à l'abri des loi.-
par l'unité, par l'agriculture, par le commerce, par l'indus-
trie du sol, par le sentiment de la propriété, par les scien-
ces, par les beaux-arts et les travaux intellectuels; d'un
État qui tire sa puissance de la force de ses armes et du
respect des droits de tous, Paris est une ville intelligente,
militaire, artiste. Résidence du gouvernement, elle doit de-
venir le séjour de la paix : symbole de la France, foyer de
la civilisation, elle doit être ce qu'était Rome avant le tem|)s
où les Césars l'ont perdue. Recevoir le tribut et réaliser
l'entrepôt de toutes les industries nationales, éclairer de ses
lumières et vivifier par ses idées toutes les portions du ter-
ritoire, telle est sa mission providentielle.
La tache du gouvernement ou même des gouvernement»
qu'il plaira désormais il Paris d'établir, doit donc consister
à désindusirialiser fans . incapable de nourrir a la fois la
consommation et la production. Sa destinée jusque-là esl
de briser tous les jiouvoirs qu il aura élevés.
Que cette ville magnifique cesse d'être le foyer des bar-
bares de la civilisation, qui la menacent incessamment du
destin que les barbares du dehors ont jadis fait peser sur
Rome.
Si l'argent et l'industrie continuent à régner à Paris, Pa-
ris restera tumultueux, affamé, et , comme il l'a déjà fait
deux fois, il rappellera à son aide l'or des monarchies et le
luxe des cours: las enfin de contracter des baux à courte
échéance , il croira peut-être les garantir en invoquant la
perpétuité d'un principe.
Nous ne saurions le redire assez, il n'est pas l'heure do
d'guiser les vérités les plus solennelles : — Si, consolidanl
l'élément des factions parisiennes . la République éternise
les tempêtes, la légitimité dynastique sera un port.
Fr.*scis Weï.
Service des Posleas sur les Cheiuiiis de fer.
URE.VUX AMBULANTS.
Les tureauœ de poste ambulants sont une des inventions
les plus utiles du dix-neuvième siècle. Etablis d'abord en An-
gleterre et en Belgique, ils ont été importés en France avec
les chemins de fer dont ils étaient une conséquence natu-
relle. Mais nous les avons singulièrement perfectionnés. En
général ils ne sont pas aussi connus qu'ils méritent de
l'être. Les faire voir, en décrire les diverses opérations, en
montrer les avantages, tel est le but de cet article.
Ce service a pour résultat de rendre la distribution de.-
lettres plus facile, plus prompte, plus sûre. En effet il se
fait pendant le trajet des dépêches que transportent les
chemins de fer, et n'employant qu'un nombre beaucoup
plus restreint d'agents éprou% es, il diminue considérable-
ment les chances de soustraction. Enfin comme il utilise
tout le temps du parcours au profit des travaux de mani-
pulation, il rend sinon impossibles, du moins plus difficiles,
une foule d'erreurs causées autrefois par un trop grand
encombrement au moment du départ.
Mais nous voulons surtout faire comprendre à nos abon-
nés la disposition extérieure et intérieure d'un des wagons
spéciaux affectés a ce service :
Dispositions e.rtérieures Nous ne nous étendrons pas
longuement sur cette description ; le lecteur a sous les yeux
notre dessin qui est d une exactitude pafaite. 11 suffit de co-
lorer ce dessin . Le corps du wagon est peint en laque brune
carminée rehaussée de minces filets rouges qui détachent
légèrement les panneaux de la partie inférieure. De chaque
côte , dans la partie supérieure, se trouvent deux fenêtres
à jour que séparent de fausses fenêtres pour la symétrie
du coup d'œil. Ces fausses fenêtres sont encadrées , aussi
bien que les fenêtres a jour , par une étroite baguette de
cuivre poli et brillant qui dessine une courbe gracieuse.
Le milieu des fausses fenêtres figure un jalousie baissée.
Les ornements saillants des angles de la voiture sont en
fonte de fer d'une simplicité sévère et d'une solidité à l'é-
preuve du temps.
Comme notre dessin ne peut pas représenter le pavillon
ou partie supérieure du wagon-poste, ajoutons pour la com-
plète intelhgence de la disposition du local , que ce pa-
villon est percé de cinq fenêtres à l'italienne, garnies de
glaces dépolies et de stores. Au moyen de ces cinq ouver-
tures supérieures et des quatre fenêtres de côté, le wagon-
poste est parfaitement aéré et reçoit un degré suffisant de
lumière quand la disposition du service oblige à faire effec-
tuer de jour tout ou partie des voyages , comme le bureau
ambulant qui revient, par exemple, de Boulogne-sur-Mer
entre quatre et onze heures du matin.
De même que tout a été prévu à l'égard des différentes
heures auxquelles le bureau ambulant peut voyager, tout a
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
été prévu aussi a
l'égard des dilîé-
l'ptites saisons de
l'année. De joui
comme de nuit ,
sous le soleil ( oni-
nie sous la pluie.
qu'il neige, (|u'M
gèle, qu'il vente on
qu'il tonne, aucun
obstacle ne doit ar-
rêter ni même ra-
lentir sa course
impétueuse. Cette
course se règle ce-
pendant suivant
qu'il est néces-
saire , au moyen
d'une cloche pla-
cée sur le pavillon
et que l'on met en
mouvement par un
ressort dont l'ex-
Iréniité aboutit
dans l'intérieur du
bureau. Cet inté-
rieur , avons-nous
dit, est aéré à vo-
lonté en toute sai-
son; ajoutonsqu'on
l'échauffé égale-
ment à volonté
pendant la saison
rigoureuse. Un ca-
lorifère, en forme _
de cloche ronver-
M'e et qui peut
donner pendant
huit heures une
forte chaleur sans
que le combustible ail besoin d'être renouvelé, se trouve à
cet effet placé sous le truc qui supporte le bureu anibulannt.
I,a plupart des trucs affectés aux bureaux ambulants sont
montés sur six roues au lieu de quatre roues , auxquelles
sont bornés les trucs des wagons ordinaires. Nous avons
remarqué (lue l'emploi de six roues rend le mouvement de
va-et-vient, appelé lacet, beaucoup moins sensible. Au
moyen de certaines précautions dans la disposition des res-
sorts on est arrivé a ne plus éprouver pendant la locomo-
lion la plus rapide qu'une légère trépidation presque insen-
>\\i\v Même dans les plus fortes secousses on peut écrire et
Seivice (les postes. — Vue extérieure du bureau ambulant.
chiffrer avec toute la promptitude et la fai;ilité que récla-
ment les besoins du service des postes. Nous avons eu sous
les yeux de cette écriture et de ces chiffres tracés ainsi pen-
dant une marche rapide de douze lieues à l'heure. Nous
avons voulusavoircomment les employéss'y prenaient pour
obtenir de tels résultats; voici ce que nous avons appris :
c'est, de préférence, étant debout qu'il faut écrire ; les cou-
des pressés contre le corps, la main gauche tenant la plan-
chette qui supporte le papier et sur laquelle vient s'appuyer
la main droite de manière que le papier, les deux mains et
le corps obéissent ensemble au même mouvement.
Le soin attentif
qui a présidé aux
dispositions exté-
rieures . nous l'al-
lons retrouver et
a un plus haut de-
gré encore dans
tout ce qui se rat-
tache aux disposi-
tions intérieures>
Rien qui n'ait son
utilité , son but
toujours tendant au
bien du service
La longueur to-
tale du wagon-
poste varie de cinq
mètres et demi à
sept mètres ; elle
est partagée a l'in-
térieur en deux
parties inégales.
Le bureau propre-
ment dit occupe
les deux tiei-s; l'au-
tre tiers . consacré
aussi au service ,
forme lavant-bu-
reau. Ces deux
parties peuvent
être séparées par
une portière que
l'on abaisse ou re-
lève à volonté
Cette disposition a
élc adoptée , afin
qu'en hiver, pen-
dant rechange des
dépêches aux sta-
tions , on puisse .
au moyen de la iiortière baissée, conserver à la majeure
partie du bureau sa chaleur. Le plus souvent cette portière
demeure donc relevée.
.\ hauteur d'appui , règne autour du bureau une suite
d'armoires garnies de rayons, de coffres et de tiroirs. Le
dessus de ces armoires sert de tables de travail. .Au-dessus,
s'élèvent, dressés contre les parois du bureau . les casiers en
forme d'étagères C'est dans ces casiers garnis d'étiquettes .
portant le nom des différentes villes, que tous les objets de
correspendance viennent successivement se ranger suivant
leur destination. Dans les coffres et dans les armoires en
Service des poslo.*. — Intérieur du liurciu .inibul.inl.
L'ILLISTIUTION, JOURNAL UMVKRSEL.
57
place les sacs en peau , de toute di-
mension , au moyen desquels sont
expédiées les dépèches. Dans les ti-
roirs sont les divers objets servant a
l'exploitation du service et au Iravad
d'ordre et de comptabilité , tels que
écritoires , papiers imprimés , ca-
chets, tampons des encres rouge ou
noire à timbrer, timbres, cachets,
bougies, serfiettes, cire à cacheter,
ficelle de diverses grosseur», etc. ,
etc. Les registres ont des rayons a
part. Dans une armoire spécialement
consacrée à cet usage , place est ré-
servée aux effets personnels de cha-
cun des eniployé's. Deux autres ar-
moires, pratiquées à l'extrémité du
bureau opposé a l'avant-buroau ,
sont destinées a contenir les pièces
comptables qui , en assezgrand nom-
bre , accompagnent les dépêches que
reçoivent chaque jour les bureaux
ambulants. Entre ces deux armoires
est ménagé un espace libre , au mi-
lieu duquel s'élève et vient s'ouvrir
le tuyau conducteur du calorifère.
Toutes les précautions voulues par
la prudence ont été pri-
ses : aucun accident n'est a
craindre.
Du même côté que le
calorifère , mais au-dessus
des casiers , et touchant
presque au plafond cintré ,
règne un petit cartouche
en bois sculpté . au milieu
duquel est enchâssé le cliro-
jiomèlre Comme nous l'a-
vons déjà dit , tout est pré-
vu ; et le chronomètre joue
dans le service un rôle trop
essentiel pourquon ne l'ait
pas placé bien en évidence.
C'est au moyen de cet in-
strument que l'employé des
bureaux ambulants, sans
avoir besoin de regarder au
dehors , connaît au juste
la distance qui le sépare
encore do la station vers
laquelle il s'avance , et le
temps dont il peut disposer.
Mais la nuit , s écrie le
lecteur impatient , com-
ment y voir assez bien ?
Au moyen de plusieurs lam-
fies Carcel , placées dans
es angles du bureau ou
fixées solidement au pla-
fond , et qui sont disposées
de manière a projeter, mal-
gré les cahots . malgré la
rapidité du parcours , une
lumière suflisante aussi
égale et aussi calme que
si le wagon-poste restait
en place.
Mais poursuivons notre
description intérieure. Nous
avons dit qu'un casier en
étagère garnissait tout le
pourtour du bureau. Nous
devons faire observer que
ce casier est interrompu
devant les deux fenêtres
latérales qui donnent dans
l'intérieur du bureau De chaque coté
de ces deux fenêtres , et à portée fa-
cile de la main , sont suspendus les
timbres destinés a constater le passage
des lettres par le bureau ambulant.
Devant l'une de ces fenêtres se trouve
un cadre de bois solidement rem-
bourré et sur lequel on timbre les let-
tres sans risque de les endommager.
Les boites contenant les encres à tim-
brer rouge et noire sont en bronze.
Les boîtes à ficelle ,en forme d'urnes .
sont en même métal. Tout est solide et
fait pour résister au temps et aux
chocs imprévus. C'est pour ce motif que
les sièges, bien que commodes, sont
massifs et un peu lourds , excepté l'un
d'eux , qui nous a paru disposé légère-
ment et d'une forme curieuse. Que l'on
se figure une selle montée sur un tré-
pied et que l'on enfourche comme on
ferait d'un cheval , de façon à permet-
tre à celui qui s'en sert de travailler
presque debout, et cependant sans que
les jambes posent a terre , par consé-
quenten se fatiguant le moins possible.
L'avant- bureau des wagons-poste
affectés au service de l'intérieur de la
France , n'est pas disposé de la mémo
manière que l'avant-bureau des wa-
gons-poste consacrés au service de la
corra-ipondance étrangère. Pour le sei-
Sac aux dépèches. Collier pour la fernielure des sacs
aux dépèches.
PurtL'Ieuille des letlres lecoin-
mandées et chargées.
Pesa^je de la correspond uice an^'la
- i^> i*^-Si îli 1^ , - ' --
Nouvel omnibus pour la distribution des letlres Jins 1 •
vice ordinaire lavant-bureau con-
tient des armoires et des casiers
comme ceux que nous avons déjà
décrits. Pour le service de l'étran-
ger, la disposition doilêtre différente.
Ùnelongue table , sans casiers , règne
dans la largeur de lavant-bureau.
Cette table est garnie de balances, et
de poids de différents types , qui ser-
vent à faire la pesée de la correspon-
dance venant des pays étrangers.
Cette correspondance se reçoit en
bloc au poids , à raison de tant les 30
grammes, .^près avoir pesé les pa-
quets entiers, on reprend, l'uneaprès
l'autre , chaque lettre pour la sou-
mettre à la taxe et on vérifie le
poids en détail sur les balances du
plus petit modèle. Ces balances sont
d'une justessi! si parfaite que la tré-
pidation de la marche n'empêche
aucunement de s'en servir avec pré-
cision.
Les portes du bureau ambulant se
ferment à clef et au pêne. Pendant
la marche on ne ferme pas à clef ;
mais, dans la crainte que le simple
pêne ne sorte de la gâche
par l'effet de quelques ca-
hots, et pour prévenir tout
accident , on a pris une
double précaution : on a
ajusté à l'intérieur un dou-
ble verrou et une barre de
sûreté en fer forgé. L'é-
change des dépêches aux
stations intermédiaires .so
fait souvent sans que les
convois s'arrêtent complè-
tement; dans ce cas, la
barre de sûreté sert de
point d'appui au garçon rie
bureau qui , de l'inlérieur.
donne et reçoit ainsi les
sacs les plus lourds sans
danger d'être entraîné par
son fardeau.
Maintenant que nous
connaissons l'intérieur du
bureau ambulant et la plu-
part des objets servant à
l'exécution du service , et
le but de ce service , il nous
sera plus facile de com-
prendre comment les em-
ployés exécutent les tra-
vaux de manipulation. Ces
travauxsontdedeux sortes;
la réception et la réexpé-
dition des dépêches , tant
à l'aller qu'au retour. Les
correspondances de toute
nature , recueillies en route
ouauxpointsdedépart, ar-
rivent pêle-mêle au bureau
ambulant ; elles doivent
en sortir, peu d'instanis
après , classées , triées ,
comptées, réparties entre
une foule de bureaux diffé-
rents dans toutes les direc-
tions possibles. Au moyen
de ce travail qui constilue
l'excellence du service . des
lettres , qui séjournaient
autrefois pendant 10, l'i
et 20 heures dans des bureaux de pas-
sage situés il quelques lieuesseulement
des points de destination , arrivent
maintenant en 15 et 20 minutes , et
peuvent être mises en distribution aus-
sitôt après leur arrivée. La>vilesse se
trouve ainsi plusque centuplée.
Pour renfermer les dépêches , on
emploie des sacs en peau dont on clôt
l'ouverture par un collier de cuivre ,
sorte de cadenas a double plaque , dont
l'une porte gravé le nom du bureau
ambulant et l'autre le nom du bureau
de destination. Ce cadenas s'ouvre au
moyen d'une clef ipii reste dans les
bureaux de destination et dans le bu-
reau ambnlant. On le ferme facilement
par la seule (iression d'un ressort inté-
rieur. Ndusailonsdonnerledessin d'un
sac ainsi fermé et celui du collier ;
ajoutons qu'il y a des sacs de diffé-
rentes grandeurs , suivant le volume
ou le nombre des objets il expédier.
Nous représentons aussi un petit sac
d'une autre forme différente de celle
du premier. Ce petit sac est spéciale-
ment destiné à contenir les lettres
chargées, les letlres recommandées et
les objets précieux que l'on dépose à
la poste avec déclaration estimative du
monlant de leur valeur Ce petit sac .
une fois rempli , est scellé à la cire de
5rS
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL
1 (Miipreiiile du cachet du bureau n.i bulaiit. Inutile d'a-
iouter que ce sac spécial, en raison de son contenu , est
Voliicl de soins et d'attentions toutes particulières. Le clief
(lu bureau ambulant en fait seul I ouverture et la fer-
meture.
Dans le craml dessin destiné a donner une idée de 1 e\e-
nilion du 'scimic , ii"ii< ivpiV'-nitons les eiii|iloyésau niii-
iiient oii le- .li'|„'(lies KTiK- ;i l.i slalion laissée ilernerc
\ieiinent d'(Hn-(lr|ioiiilliv, cl \rnliées: on peut levoiraux
(leliris légers de papier que l'on na pas encore eu le temps
il enlever ; ils préparent les dépêches à laisser à la station
MTS laquelle on s'avance , et qui est proche. C'est le nio-
Mieiitoiile scrMce leihinie la plus jurande activité. Aussi,
\iiycz-les ; (iimme rli;iinii e>l a snn allaire I Quelle promp-
liliide ! (pirllc .iLililc • quel nqiide coup d'œil ! Kt penser
iiiie tout cel.i > ,11 1 uni|ilit sur un plancher mobile qui fuit
.nn- une r.qn.lilr .!.• Kl, 12 et quelquefois i:i lieues a
I lieure;c(>l iiirniilliii\ !.. Voyez: la slalion est proche,
on va arriver ; le nii>u\ement riipide de la inarciii^ lend
dejii il se ralentir, signe (pie \iiiis poii\e/. apercevoir les si-
L'iiaux et que vous allez eiileiidic le Millet darrét. Les ca-
siers snni encore pleins II .semble ipi on on aura pour des
liriiic-i'Hiiciv, a tout disposer ; mais, non, tout est en
(Mille IJ (|ii('l iirdre ! Pour vous , pour moi , ce serait une
iriexlni aille conlusion. Tour eux , c'est l'affaire de quel-
i|iies secondes.
.\ chaque station , on ne se borne pas ù remettre le
*ac destiné pour la localité oii l'on sarréte ; on y remet
.I1I--1 (I :iiilii'- s:ir^ a ii'c\|ic(lici' :mi iihimii de courriers
(1 rliilirjllclicnirlil >lir le- |irlilc~ mIIc- \ "l.-llirs , OU même
a-r/. cliiiL-iin- ilr~ stalioiis Hall- leur relniir surParis , les
bureaux ambulants présentent un avantage de la plus haute
importance; on y fait, avant d'arriver, le tri par quartier
lies lettres pour Paris, Elles peuvent être ainsi , dès leur
irrivée, di,-.hiliii(TS dans les quartiersde la ville, grâce au
service de,- nniiiilm- rhibli par l'ancienne administration
pour le ljaii-|."il r.ipiile des facteurs.
ÛtiKirs iiiornleB.
LA FEMME MODÈLE.
lille ne descend jamais pour déjeuner en pa|)illoteB , elle
ne gronde pas lorsque son mari lui amène un ami à dî-
ner, même •• s'il n'y a rien il la maison ; » elle ne s'oppose
pas il ce que son mari pose ses pieds sur le garde-feu d'acier,
elle ne pousse pas des cris s'il oublie d'essuyer ses bottes
>iir lepaillas.-on placé tout exprés il la porte 'd'entrée. Elle
ne souscrit a aucun cabinet de lecture ; et. quand elle lit un
Kiiiian, elle s'endort dessus Elleconrectioiiiii'lcs pâ:.'- a\ec
1111 lalent tout parliculier, et elle p.. ,-,"!(■ une cniiiwi-ance
profonde des /)«(/(/(»(/« Elle ne p.nlc [.uiiai- |niIiIii|iic , ja-
mais on ne 1 entend ni désirer d être morte , ni regietler de
n être pas un homme, ni fermer brusquement les portes ou
seufermer dans sa chambre à coucher sous le prétexte
qu'elle a un mal de tète nerveux. Elle ne pleure pas faci-
lement , et elle ne croit guère aux attaques de nerfs Elle
iiiiisent il ce qu'il v ail un chien dans la iiiaismi Elle va il
I enlise , mais ce n'est pas pour se moipier îles coilVures des
.iiilr 'S femmes. Elle ne er.nnl |.,is de descenilre a la cuisine
puni chercher (pielqur ( Im-c ,lr cliaiiil pour le souper ; elle
r.iil faire du feu dans sa eliaiiibie a coucher pendant les
1 1 miles nuits d'Iiivtr ; nul brin de poussière n'échappe il son
legard perçant, maiselle n'assomme pas son mari de plaintes
eoiitinuclles au sujet de ses domestiques , et elle no se rend
p,i> malade ii mourir pour un laquais en liviée ou pour un
page en boutons. Elle peut sortir ii pied et marcher sans
.rvoir de petits souliers ou sans être suivie par un JEAMES.
lille préfère la bière de table au vin , et elle ne s'évanouit
p.i> a la seule pensée d'un grog ; en fait , elle ne s'évanouit
l.iiiiais. Elle ne pense pas ipul soit nécessaire d'aller il la
lampagnc pour la >,lllle de m'S rlirl- rni;iliN l-'lle Suit les
modes , il est vrai . mn- ,i |.ln-iriii-:(hiirc,.lrilislance ; elle'
,1 la plus faible alVn li.iii y. — AAr |miii. I,-- Ihjoux , et elle
lialiille ses enfants avec -r- \h'iII(-~ mlies Elle n'est ja-
mais délicate, et elle nui-.' un il il i iiMiyer chercher le mé-
decin seulement parce ipullr m' m niiiint abattue. Une de
se,- amies achétc-t-elle un nouveau bunnet, elle n'en fait
pas la confidence ii son mari , et ne s écrie pas avec euthoii-
<i,isme qu'elle a vu la veille dans la cité un si joli caclie-
iiiiie , s extasiant ensuite sur la modicité du prix. Elle ne
drcachète jamais les lettres de son mari, el elle conserve
-.1 robe de noce avec un respect virginal. Elle ne se trouve
p.is a plaindie si elle reste a la ville le jniir (le< cdiirses
d ,\scot , et elle ne se met pas enpéiiiliMiiril:iii- -mu ai i irir
-,ilon , si elle ne va pas il la campagne Im qur 1 1 ■.in-mi r-i
icrniinée. Elle raccommode ses bas , el elle laii desinnli
Unes au sucre et au vinaigre qui no laissent rien il désirer ;
elle no refuse pas de sortir avec son mari , parce qu'elle n'a
pas une belle robe ; elle demande rarement de l'argent , et
elle aimerait mieux je ne sais quoi que de gagner un
( enlinie sur la dépense du ménage; elle s'habille toujours
pour le dîner ; clic ne cache'jamais le passo-partout : elle
lait rarement la coquette , et la tôto lui tourne trop pour
qu'elle puise valser môme avec un officier.
La femme modèle attend son époux jusipi'aux heures les
moins conjugales , et pourtant elle ne prend pas un visage
>ombrc; elle iies'éirie pas qu'il la tue. S'il revient avec le
jour ou même avec le lait, elle seille le haut du corps pen-
ché sur les ileniiers restes du l'eu ; épi, ml la pendule du
I eg.ird , s'al,u niant ilu moindre bniil , s él.ini-aiit a l,i fenêtre
dès qu'elle eiilerid venir une Miiliire , liemliiaiileile l'riiid et
engourdie parle somiiieil , n'a va ut poiii lui leriir compagnie,
dii'iarit celle longue nml il',itlehle , que l,i M.iirisqui rlierclie
,s,i nniiri iliire dans le buM'et , iiii le grilliui ipii erre auliiur
"l'elle dans la chambre , et ne peiisaiilqu'a riii(]iiielu(le(pie
lui laiisL'son absence , ipi'ii la craiiilequ il ne lui soit arrive
cpiehiue malheur, i;ileimc'l'i''l'l"''l" " '"■"- lain.n- 'l'Vanl
lui; et surtout — eidiilc/lii-iMcn , ni.' r-.l \irjlcn-ire !
— elle ne lui l'ait |.iiii.ii- de irpimlir- |.,r-qii (.Ile le tient
enfin sous le rideau nuptial , et qu elle sait qii il ne peut
plus lui échapper 1
LE MARI MUIILLE.
Il se promène avec sa femme les jours de la semaine . et
un magasin de lingère ne l'épouvante pas. Il a toujoursde la
monnaie lorsqu'on lui en demande , et il n'y fait jamais au-
cune allusion. Il con,-ent volimliers il porter un gros paquet
de papier gris, ou un parapluie de coton . ou des socques, ou
même il tenir 1 enfant sur ses bras dans un omnibus. Il
court en avant pour frapper à la porte quand il pleut. Si la
voiture est pleine , il monte ii coté du cocher. Il ss couche
le premier lorsqu'il fait froid. Il se levé au milieu (ie la
iiiiii pour bercer feulant ou aller voir qui sonne. Il permet
a -a belle-iiiere de loger chez lui. Il boit il sa santé el il
la laisse liliic de (lc|ciiiier dans sa chambre. Il mange delà
viande iniidc >.iii- -e pl.iiiiiln nu suis conserves, el il ne
prend qu iii iliniir micici ,iii\ p,ilé,- et aux puddings.
.lamais Ir h (miml'i' ne lui m'hiIiIc I mp Inrt . la bière et le thé
li-up r,iililc- Il mul .iii\ ,ill;ii|ur- (le iici l's , et une larme
r;ip;ii>c in>l,iiil,iiiriiHnl H iiiel In ne I Ile avec une
robe de \el"iir- , cl il (li>sipe Imis le- iiiiage-a l'aide d'une
excursion a Epsuni ou d'une promenade au parc le diman-
che. Il va régulièrement ii l'église et il mène sa femme ii
l'Opéra une fois par an. Il lui rembourse tout l'argent
qu'elle perd au jeu et il lui donne celui qu'il gagne. Il ne
se met jamais en colère au sujet de ses boutons , jamais il
n'amène d'amis il souper. Ses habits ne sentent jamais le
tabac. Il respecte les rideaux et il ne fume jamais chez lui.
Il découpe, mais il ne se réserve pas le meilleur morceau.
Il respecte la fiction de l'âge de sa femme , el il se brûlerait
pluliil les (Idigls que de toucher Ic tisonnier poli. Jamais il
n'eu lie 1 1,1 11- il 1 iiiM ne , et il ne songerait pas plusâ chasser
un diiiiic,-li(|iic ipi ,1 ( lander le dîner. Il n'a aucun passe-
partout sur la cdii-cieiice.
Le mari modèle permet il sa famille d'aller à la campa-
gne une fuis cli,ique année. Et pendant son absence il reste
il la ville avec un couteau el une fourchette, n'ayant pour
tout siège (|u'une chaise de toi!e écrue , couchant dans un
lit sans rideaux et servi par une femme de ménage. Il va a
la campagne le samedi et il revient le lundi , portant le
linge propre et rapportant le linge sale. C'est lui ipii règle
lesnotes de la blanchisseuse. Il donne sans méliance tout
l'argent ipi'on lui demande pour le ménage el il ferme les
yeux sur les articles intitulés dépenses diverses. Il est très
doux et très all'ectueux , il célèbre ponctuellement 1 anni-
versaire de son mariage ; il ne se plaint jamais si le diner
n'est pas prêt , il fait lui-même le (lejeiiiier si personne
n'est descendu; il permet à sa feiuuie de \,il-rr et de boire
du ])orleren société; il fait loule- -c- ((Muuiission?; solde
toutes ses dépenses, et pleure comme un eiifant ii sa mort,
l'eNFAXI MODtLli
C'est limage de son pore, à moins que ce ne soit le por-
trait vivant de sa mère. Il a le meilleur caractère du monde,
ne crianl jamais, si ce n'est au milieu de la nuit, et ne pleu-
raiil ipie Inr-qii'ou le lave. C'est étonnant comme il reste
lr,iiii|iiille i]iiuii(l il prend sa nourriture. Il comprend tout,
et il pi iMi\ e le ilésir qu'il a de s'instruire en arrachant les
feiiillii-. lie liiii- les livres (jui lui tombent sous sa main, et
sai-i-Miiil lie- lieux mains les gravures qu'on lui montre. Il
n aj.iiiiai- e\i-le un enfant plus joli et plus intelligent. Il a
dit papa ou quelque chose d'approchant lorsqu'il avait à
peine un mois. Il apprend de bonne heure il arracher les
favoris, el il préfère ceux des étrangers. On n'a pas en-
core vu un enfant aussi extraordinaire. Il n'aime pas'
à sortir de chez lui , et il prolonge rarement ses visites
plus d'un jour. Il éprouve une répugnance bizarre pour les
bonnets et le nez de sa nourrice , qu il saisit cl qu il serre
dans ses mains avec une ténacité sauvage pour peu qu'il
soit irrité. Il n'est heureux que dans les bras de sa mère.
Il préfère le parquet ii son berceau d.iiis le piel il ne reste
que le moins do temps po,-sible. Il niue biMiudup a jouer,
il SB plaît il enlever la nappe de l,i lalile , .i ll|■l^er les por-
celaines de la cheminée, ouii ren\ei>ers<i soupe sur n'im-
porte qui II invente un nouveau langage qui lui appartient
en propre, presque avant d'avoir pu parler et qui est par-
faitement iiilelhgible pour ses parents bien ipie personne
ne puisse le comprendre 11 a lesduerli— eniinl- luiMirsen
horreur; a peine a-t-il a.ssi.-le ciih| niiiiule^ ,i nu -peitacle
qiiele pie ipi il m- iiiel a pleurer. Il delesle la peilidie .-i.us
i|llelque liiinie ilUelle e.-,ne lie le IroilipeC, Cl il rCpOU.SSC
une I iiilleiee lie -iieie lei-,pi il s'imagino qu'il y a unepoii-
die 1 ,11 liée au liiuil lue uieilecine est sa plus forte aver-
sion, après l'eau froide ceiiendanl. Il n'a aucun goiit parti-
culier pour la loilelte, car en général il déchire en mor-
ceaux ses plus beaux ajustements, surtout lesdentelles. dés
qu'on l'en affuble. Il veut tout savoir, et il éludie spé-
cialement la fabrication des tambours, l'organisation inté-
rieure des boîtes ii ouvrage el l'anatomie des poupées ,
qu'il préfère de beaucoup sans tête cl sans bras. Il a une
haine instinctive du médecin, cl il lultc avec sesdeux jam-
bes, ses deux bras cl ses premières dents contre ses cajole-
rie- Il aime pa-sionnément les couleurs, el il suce avec un
eiii|>ie— eiiieui el un ,ieliariiemeiil exlraordinaircs tous les
j>iii|eu\ lie Imii> peiiil qu un lui liiiniie. En un mol. il n \
eut j, 1111,11- il eiiliiiil -eiiiblable . el il le prouve en digérant
touf. les biiiibnusdiiiil mi le regale, el eu siir\i\anl s'urliiul
a loules les ilini;iies qiiese dispiilenl le droit de lui admi-
nislrer. pour le guérir quand il est malade, ou le forlilier
lorsqu il se porle bien, ses grands parents des deux lignes,
ou les amis iiiliinesdu mari et de la femme modèles qui lui
ont donné le jour
lldilKiliIll 1'im:h,'
l.ettreM d'un Flâneur.
ClItCCLAIRES , JOCK.SACX ET CANAnDS.
17 septembre 1848.
Semaine électorale, s'il en fnt, monsieur le directeur ; on
ne parle que candidatures, on ne lit que des circulaires, on
ne travaille qu'à la confection d'une liste ; la nuit même, si
on parvient ii .s'endormir, on rêve aussilot urne el scrutin.
Deux amis qui s'abordent ne se demandent plus ; Comment
vous portoz-vous, mais Qui portez-vous! Cesla [icinesi la
Constitution obtient chaque jour une fugitive pensée. L'affi-
che, tolérée par l'aulorite, a repris possession, avec une au-
dace superbe, de tous les murs dont elle avait été obligée
depuis deux mois de respecter le badigeon immaculé , el ,
comme autrefois, elle a rassemblé devant et autour d'elle
des attroupemens plus ou moins bav.inU ou les conversa-
tions sont devenue- (le- di^i u— imi- el de- |,;i' lica lions peu
vertueuses. Les cluli- mil Mnueri h m- |Hiiie- ;i leurs Iftbi-
tués pour leur tenir des di-i mii- (|ue je u e-ei.ns certes pas
vous répéter. Pendant ce tem|i- , le- in.nnn- journaux el
les pamphlets renaissaient de loii- ente- e.iuiiiie les lêtesde
l'hydre de Lerne, et déjà l'on voy.nl riiiler d,ins les rues et
sur les places des groupes de ces fameux travailleurs qui
n'onljamais travaillé et qui ne travailleront jamais qu'à la
désorganisation, — ils disent la réorganisation — de la so-
ciété.
Toutefois, il ne faut pas non plus s'exagérer le danger.
Cette agitation, — passagère je l'espère. — avait une cause,
un prétexte, je dirai même une excuse; la nomination de
trois représentants. Pour bien choisir, il faut connaître Or
comment connaître sans voir , sans entendre , sans sentir,
sans loucher , sans goûter , selon la nature de l'objel qu'on
est tenu de préférer? Lés électeurs ont donc voulu voir et
entendre les amateurs qui sollicitaient leurs voix, et Je les
approuve. Mais .'300, ooo cilnyens ne pa--eiit pas en revue
une cinquantaine de ( .ludidii- ei ne e.iu-eni p,is avec eux
sur une foule de que-iinu- peihiupie- ieli_-ieii-ej, sociales,
artistiques, industiielles, liUeiairc-, liii.iiinerc?, scientifi-
ques, etc., sans qu'il n en résulte un peu de brouhaha. Les
hommes en général et les Erançais en particulier, surtout
les Parisiens, ne sont pas des petits saints, — hélas! Uni
s'en faut. Uassurons-nous donc , monsieur , el constalons
avec plaisir ijue si la tranquillité publique a paru menacée,
elle n'a pas été sérieusement troublée.
L'affiche a pourtanl un reproche à se faire. Elle a abusé
de l'autorisation temporaire qui lui a été accordée; elle s'est
trop amplement dédommagée de ses deux mois de vacances
forcées. Jamais, depuis la révolution de février, il ne s'en était
fait en si peu de temps une si monstrueuse consommation.
A peine celle qu'on venait d'apposer élait-elle collée sur la
couche de ses sœurs ainées qu'elle recouvrait, qu'à son tour
el le d isparaissait pour toujours sous une couche épaisse et ba-
riolée de sœurs cadettes. Tel candidat qui est riche en a a
lui seul placardé plus de \iii;;l eu un jeiir, et chacune avec
un titre différent. U est dillii de d ,(ilr,i|ier plus habilement
son monde. Le charlatan le un nu- Iule n emploierait pas des
moyens plus grossiers, je \eux due plus ingénieux , pour
attirer à sa boutique les badauds de la foire Qui eût pu s'i-
maginer que des princes eldes maréchaux de Erance, voire
même des raffineurs de sucre , se recommanderaient aux
électeurs parisiens, à pou près comme un saltimbanque an-
nonce du vulnéraire, du cirage ou de leau pour — on de-
vrait dire contre — les punaises?
H'OÈtnnons-le. — €'#• ilefÊtifr tttol. — Jt«
nteilleuÊf choijc. — Mttfnntie, etc.
La plupart des affiches de septembre m'ont semblé fort
insignifiantes. Elles se bornaient presque toutes à reproduire
des circulaires déjà publiées dans les journaux. Seulement,
j'ai fait, en les parcourant du regard une observation qui a
son inlérêt Sur cent, j'en ai complé quatre-vingt-dix-neuf
dont les autcursso déclaraient solennellement et pour toujours
amis du p;iu\re p.i- un ne ni,iiiire-l,iil le plus léger sym-
ptôme il alleel mu |inni le nelie .l.ii ,ippris cette nouvelle
avecplaiMi ,1e m -,i\ n- p,i-(pie j eu— e tant d'amis. Pour-
tant, je fax eue, je II ai pu me ileleinlre d'un sentiment de
compassion en faveur des propnel.iires ou capitalistes aux-
quels jélais heureux et lier d être preléré Pour pou que
cela continue , savez-vous que le nielier de riche deviendra
un fort mauvais et fort insupportable métier? . Quant à
moi je ne voudrais pas lexercer maintenanl Désormais. je
mange, je bois, je fume, je pri>e, je jniie tout ce que je ga-
gne, I) abord, le jour du parl.ige \eiiii je n'aurai pas le re-
gret de donner a quelque gr.i ml gaillard de fainéant la moitié
de ma fortune, fruit d'un travail assidu el de privations pé-
nibles .. Ensuite... mais, sans \eii- eiiunieier ici tous les
ennuis, tous les chagrins, tous le- del e- que j'éviterai,
ne me rcsiera-l-il pas jusqu'à ma dernière heure, pour me
leiiuliiii de la richesse, rattachement tendre, profond, dé-
M.iie |, 1—1. unie de MM. les candidats do toutes lesrépubli-
Je m étais lait une véritable fête de lire la proclamation
au peuple, — à son peuple, — du ciloyeii Thoré . , l'ex-ré-
dacteur en chef de l'ex-rniie République . tuée deux fois en
deux mois, une première fois par le pou\oire\écutifau pro-
fit de la paix et de la morale publiipios. une sivonde fois par
un arrêt de tribunal au bénéfice de la République de M. Eu-
gène li.iresle MHisètes prie de ne pas confondre ladite Ré-
piililupie ,i\ec l;i république frani.MW, jeu de mois a parlV
.\l.ii> leisipie , fendant a grand peine li foule innombrable
des amateui'S. j apA\us au-dessus du chapeau Tliori' d'un
petit socialiste à tous crins, la première ligne do l'exorde
.\u beau milieu du portail îles vieilles églises du mojcii âge...
— j'ai peut-être penlu une des dislraclions les plus agréa-
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
5'J
blés de ma vie — je ne me suis pas senti , je l'avoue, le cou-
rage d'entrer dans ce monument
D'ailleurs il y avait à peu de distance une petite circu-
laire qui sollicitait si humblement et si honnêtement mon
attention , qu'il me fut impossible de résister à sa prière.
Elle était grise, mais d'un gris pâle, et sans les ordonnances
de police elle eût eu certainement la candide blancheur de
la neige, du lis ou du cygne. Elle avait un petit tilre mo-
deste qui la distinguait autant que sa couleur de ses ex-
travagantes rivales aux nuances tranchantes, aux airs éva-
porés, aux grandes et grosses lettres Tout en elle me
plaisait, m'attirait, me per.-iuadait d'avance; bref son exté-
rieur aimable et pudibond avait fait ma conquête Je
m'approchai et voici ce que je lus, vous l'avez peut-être lu
comme moi :
— Je me fais canilidal. ...
— Qu'etes-vous I vdlie passd ! votre présent et \olrc avenir !
Bien vile! (!épêcln'Z-vous ! cclutrez-nousl nous qui ne vous con-
naissons pas et qui avons besoin de libéraieiirs.
— Mon passé : Enfant de père et iiiùre modelés suus tous les
rapports...
Et ce jour-la je non lus pas davantage... comme dit
Dante...
Jen'aurais jamais cru, avantd'en avoir les preuves entre
les mains , qu'une révoluiion pût rendre imbéciles ou fous
un si grand nombre d'êtres doués de raison. Les ravages
que la république a faits depuis six mois et qu'elle fait
chaque jour encore dans les âmes ne sont pas moins ter-
ribles que ceux qu on reproche au choléra. Mieux vaut
mourir que tomber dans l'enfance ou dans la démence. Le
nombre des victimes de l'insurrection de juin ne s'élève,
assure-t-on, qu'à 1,600 environ, bien quej'aie entendu hier
encore deux ouvriers qui votaient pour Louis Bonaparte afin
d'avoir le pain à bon marché , affirmer qu'il dépassait
10,000. Mais ne serait-il pas temps de calculer aussi , pour
l'instruction et l'édification du peuple, le chiffre total de tous
les malheureux qui vivent encore physiquement parlant ,
et dont la république dcmocraïi'jue et socia(c a tué à jamais
l'intelligence et le cœur?...
A propos de la république démocratique et sociale, je dois
une mention à ses affiches J'en ai compté plusieurs dans
lesquelles elle se souhaitait à elle-même longue vie et pro-
spérité. Mais si j'étais condamné à faire un choix entre
toutes, je préférerais sans hésiter celle qui s'adressant tout
il la fois aux citoyens et aux citoyennes , priait ces dames
d'accompagner leurs époux et leurs frères jusqu'à l'urne
électorale, pour soutenir, en cas de besoin , leur courage
chancelant (au figuré, j'espère). Je me borne à vous la re-
commander, car j'éprouve le besoin de vous entretenir
quelques instants de deux circulairesmodèlesquun heureux
hasard a fait tomber entre mes mains.
L'une a pour titre : Discours qui sera fait au club dans
la soirée d'aujourdhui, par le citoyen F..., propriétaire
et entrepreneur. En voici l'exorde.
« Je suis un citoyen républicain , mieux et meilleur que peut-
être vous ne pensez pas. Veuillez m'excuser, si dans mes paroles
je fais des fautes» soit pour la manière de m'expliquer ou tenir
un raisonnement qui ne soit pas bien suivi, mes inslructions ne
sont pas assi'z grandes pour pouvoir causer comme il y a beau-
coup d'autres. Mais, c'est ég.Tt, ce que je vais vous direct ce
que je vous dis, prenez le juste; car je n'ai jamais cotmn que le
juste, malgré que plusieurs pourront et pouriaieiit cioiie et le
<lire, je vous observe à présent, cl c'est positivement ce que je
veux vous dire.
» Il n'y a pas un bomme qui soit sur la terre qu'il n'ait des
ennemis, cl suuvenl les ennemis qu'il a ne savent pas pourquoi ;
car si on leur disait la raison pourquoi, ils seraient souvent em-
barrassés de le dire.
n Observez ee que je vous dis là, c'est pourquoi que je vous
ai mis plus haut que mes inslructions n'avaient pas été assez
lorles.
» Ainsi je suis un citoyen qui a eu l'occasion de se trouver
dans bien des circonstances (pie beaucoup de vous n'avez pas
eu, j'ai su les remarquer , les comprendre, les coimaître ; c'est
pourquoi je me présente où je vous le dis, comprenez ma ques-
tion ; je ne vais pas plus loin, n
Moi aussi je vous le dis ; comprenez et je ne vais pas plus
loin , car j'ai beaucoup d'autres révélations non moins cu-
rieuses h vous faire. Ainsi vous ignorez sans doute que
Vinvetiteur de la médecine nalurcUc, M. X.... a découvert
une poiiliquc naturelle ou républicaine, et que si nous l'ap-
pelions il llionneur de nous représenter, vous, moi , et tous
les abonnés de VJllustration , a l'assemblée nationale . il
ferait ajouter à la Constitution qu'on discute en ce moment
des articles d'une incontestable utilité et auxquels per-
sonne, pas même M. Pierre Leroux, n'a encore sonjré.
Exemple :
a Les boissons fermenlées, surtout le vin, élevant les forces
physiques et morales (jui arment les mnins de la fondre popu-
laire, il est d'un besoin impérieux d'en produire le plus pos-
sible.
» Les vêtements sont aussi d'une nécessité absolue. Par con-
séquent, on doit s'efforcer de multiplier le plus possible les lins,
les chanvres, les laines, qui seuls conviennent aux Français ,
parce que ces tissus, comme les cheveux, abi'itenl le mieux
contre la chaleur et le froid , tandis que les colons, ne convien-
nent (ju'aux infimes des contrées brûlantes.
» La nation, en recouvrant sa liberlé en (|uelques heures, a
prouvé par son énergie qu'elle pouvait tout, blnsuite eu biinica-
dant les routes sur les fronlières, ainsi que je l'ai écrit le pre-
mier, la I''r.nice étant invulnérable, et les peuples voisins étant
devenus nos amis, c'est dire que l'arinHc doit être fortement di-
minuée.
n Les impôts sont sacrés, absolument saci'ùs; un centime bien
employé produit des fr.incs; mais pour le rendre tel il faut qu'il
soit unique comme l'impôt immobilier et qu'il pèse sur tous
sans nulle exception. Alors si l'on réfléchit qu'en suivant nos
principes les produits seraient inlinis, la consommation propor-
tionnée ù ceux-ci ; que l'armée, en rendant la jeunesse a la so-
ciété , produirait an lien d'être une charge ; que les deux ou trois
cent mille eiuplnvés qui reviendraient aux travaux communs,
priiduir.ii. nt jusm iiumensémelU en portant tous les jours leurs
pindiiils dans l,i société, et qu'alors les producteurs et les con-
somnialeors pourraient rendre des trésors ù la Hépublique, et
ajouter des millions i> des millions; il est bien vrai que les im-
pôts seraient incalculables, cl que Ton pourrait prélever à volonté
des milliards.
Moins heureux que l'affiche, la presse n'a pasété éman-
cipée, même temporairement. Le double régime de l'état de
siège et du cautionnement est évidemment contraire à l'ac-
croissement de sa nombreuse faiiiilli' ; elle n'a enfanté en
quinze jours que deux ou trois pi-iils aMnicinonts qui sont
mort-nés. J'en excepte, bieneuU'inhi, \ Elmlrde la France,
s,ii^iirr .\iiliiy Foucault, imprimer \,:\t S.ipia, et destinée il
t'iimIiiiiv (Lins la bonne voie l"ii> le-; .inm'iis abonnés de
I v\-(i(i:,tlc (/(■ Fronce et tous li> . I II tir,rii(i\ eus curieux de
suivie la iiieiiie direction. Je n'y coinpivnilspas non plus les
huit ou dix catiards , publiés par la maison Alexandre
Pierre etc.', dont je me réserve de vous parler tout a l'heure,
ni le Guide des électeurs qui ne se charge de mener ses lec-
teurs (|u'ii deux ou trois circulaires , pour lesquels il me
semble épris d'une trop vive tendresse.
Les nuuveau-nés sont ï Impitoyable , le Canon d'alarme
et le Journal des pauvres.
V Impitoyable a paru le dimanche 3 septembre. Il se
vend 1 sou. Il paraîtra ledimanche et le jeudi. Il a un sous-
titre : Journal de tous les Abus publics; et deux épigraphes :
i> Les abus sont des ennemis destructeurs qui minent sourde-
ment l'édifice social.
Jen.- puis rien iirmmersi ce ii'..sl pat- son i,oin,
J :i|.|..!llc Mil L'Iial im c'iial ei Rullit un rripun.
Son rcdacteuren chef, M. Victor Letellier, fonda teurde l'ex-
joiirnal l'Artisan, déclare qu'il a pour collaborateurs tout
le pays. Je n'ai pas lu le second numéro; le premier était
un prospectus-programme peu divertissant, terminé par un
post-sctiptum en l'honneur de M. de Boissy. Du reste ,
M. Letellier se montrait animé des meilleures intentions.
Nous l'attendons à l'œuvre.
Le Canon d'alarme coûte le double de V [mpitoyble ■
10 centimes. Il ne paraîtra qu'une fois parmois, du l" au
o. Son rédacteur en chef, M. Allain , s'est gratifié du titre
d'avocat auquel il n'a aucun droit. (Voyez le tableau.) — Je
serais fort embarrassé de vous exprimer une opinion quel-
conque sur ce journal. J'en ai lu quatre fois de suite le
premier numéro, en le commençant par tous les bouts , et
je n'y ai absolument rien compris. Pour vous donner une
idée "du style, je vous citerai les trois premiers paragraphes
du premier Paris :
0 Parti du sommet des Alpes, un vent mêlé d'éclairs et de feux
s'est déchaîné vers les quatre coins de l'iiorizon. Il s'est eu un clin
(l'œil abattu sur l'Europe; et l'on ne citerait pas en ce momenl
une existence privilégiée contre sa furie.
n Peuples et lojauiiies ont été déracinés comme des arbres.
Un tourbillon de ténèbres et de poussière dérobe le ciel qui sem-
ble fermé.
" Tout est devenu relatif au milieu de l'Océan comme sur la
terre, el, dans cet immense impôt de ruines que les événements
ont prélevé sur le monde, tous tant que nous sommes nous n'a-
vons pas moins besoin de charité que d'énergie. »
Ainsi du reste de l'article, jugez-en par cet échantillon.
Outre cet article , le Canon d'alarme contient un feuilleton,
une fable, une élégie en prose d'un insurgé de juin, diverses
fariboles du même genre , une pièce de vers du citoyen
Raymond Brucker, et environ cent pensées de deux ii cinq
lignes précédées d'un astérisque. Malgré toute ma bonne
volonté, il m'est impossible de vous fournir des renseigne-
ments plus positifs. Tout ce i]ue j'ai cru deviner, c'est que
la couleur de cette énigme n'était pas rouge ; du reste, voici
doux ou trois des pensées que le Canon d'alarme vient de
lancer dans le monde.
« .-. Dans un siècle assez sourd pour être inatlentif au langage
effrayant de l'Eternel, nous ne serions pas très scandalisés qu'un
missionnaire de l'avenir usurpât le uiasqne impassible el se plût
îi cunlrefaire la voix moqueuse du démon pour lancer an milieu
du monde une grète de vérités nécessaiics.
» .-. La première condition pour renouveler l'ordre social de
fond en comble, c'est de refondre l'homme lui-même dans un
nouveau moule, absolument comme s'y prennent les fondeurs de
cuillers d'étain,
n .'.La similitude entre ces deux œuvres peut se formuler de
la SOI te à l'image d'une régie de trois :
Fondeur : tiuiller ; : Dieu : x — l'homme.
» .-. Ce ne sont pas ceux qui possèdent le sof que l'on doit
regarder comme les grands propriétaires: ce sont ceux qui pos-
sèdent des sous.
n .'. Si vous ne comprenez pas ce que j'ai l'honneur de vous
dire, ayez la boulé de le relire trois fois. Le nombre trois est
cabiilibtique. »
Le Journal des pauvres a une a|i]iarcnre plus sérieuse ,
bien qu'il ait pour fondateurs et pour l'iHri'spdiiiJaiilsdeux
ex-pairs de France, MM, de Boissy el il'.Miini-.'-ilii'i' Il sera
mensuel. Le nom de son directeur-gérant fondateur Louis
Deplanque sent terriblement le club et la commission du
Luxembourg, mais au-dessous de son litre on lit :
Travail , Propriété, Asaocialion.
Voyons....
A vrai dire, le premier numéro àa Journal des pauvres ne
contient qu'un article, car je ne puis qualifier de ce nom
une binL;ra|iliir riiliriilc <m le cilnw'ii d'Alton-Shée est com-
paré a MiiiIhmii , ri l.i ieiniprr>- du Projet de Constitu-
tion ; uidiM ri Jihilr, iiililulrilr 1,1 propriété, est sérieuse-
ment tra\ aille et plein iriiiteièt, il lait il coup sûr honneur
a son auteur M. Louis fieplanc]ue. Je suis loin d'en adopter
foutes les idées , cependant je le recommande aux médi-
tations des amateurs.. Il commence ainsi: » Qu'est-ce que
la propriété ? r- C'est le vol, a dit M. Proudhon. A cette
question , je réponds , moi , c'est la liberté
ti A l'œuvre donc I s'écrie M, Louis Deplanque ; à l'œuvre, pen-
seurs de toutes les écoles, économistes, socialistes; à l'œuvre ,
travaillons ù éclairer le peuple ; guidons-levers l'avenir que Dieu
lui prépare, el prenons garde qu'on ne cherche a l'égarer dans
les sentiers de l'erreur, q'iavailloiis surtout a améliorer la posi-
tion matérielle du peuple, ù faire qu'il arrive lui-même i la pro-
priété, lu est tout le problème de la réorganisation sociale, car
aussi bien en théorie qu'en pratique, la propriété c'est l,i
liberté. «
Je mentionne seulement pour mémoire la Guerre, récla-
mation en l'honneur de la guerre signée Henri Carred , et le
Penseur républicain , ramas de mavimes et pensées confec-
tionnées par M. F. Poulet , et j'arrive à la collection des
canards publiés la quinzaine dernière par M. Alexandre
Pierre et C'. Depuis quelques jours on lit dans les annonces
des grands journaux une réclame qui coinmence ainsi :
HUE DES xoïEns, 27, a pabis.
ALEXANDRE-PIEURE et Os
lidUntm' de toutes tes fctlilteg pubtlifUes.
« Font savoir à MM. les libraires el colporteurs qu'ils font pa-
raître régulièrement trois nouvelles feuilles par semaine, annon-
çant les faits les plus sérieux, avec gravures el caricatures.
» MM. les libraires et marthaiids colporteurs trouveront chez
M. Alexandre-Pierre et C"^ une collection de toutes les feuilles
et canards, biographies , gravures et caricatures, etunecollei-
tion de tous les anciens journaux, n
Ce M. Alexandre Pierre n'est point un inconnu ; il a eu
avec la police correctionnelle des démêlés qui l'ont rendu
célèbre. Condamné à quinze mois de prison par le" tribunal
peu de temps avant la Révolution de février, il s'était peu
de lemps après entendu condamnera la même peine par la
cour d'appel. Mais le ministre, alors dispensateur des grâ-
ces, s'empressa d'accorder à l'influence de l'avocat du con-
damné ce que la justice avait cru devoir refuser à son élo-
quence. Sur la demande de M'^ Cauvain , M' Créinieux
ordonna la mise en liberté du citoyen Alexandre Pierre qui,
renonçant au dangereux métier qu'il avait voulu faire .
fonda il la même adresse , au lieu de je ne sais quelle es-
pèce de police suspecte , l'établissement assez original que
vous connaissez maintenant.
Cet établissement , je n'ai point été le visiter, je ne vous
en ferai donc pas la description , mais je puis vous parler
de visu des marchandises, je devrais dire des drogues qui
s'y fabriquent et s'y débitent. Cette quinzaine , M. Alexan-
dre Pierre a tenu ses engagements envers le public , il a
publié cinq nouvelles fouilles.
Le Peuple Représentant , journal mensuel.
La Réponse d'un ours il M. Alexandre Dumas
La Réponse d'un cochon a M. Alexandre Dumas.
La Colère de M. l'abbé de Lamennais.
La Misère vaincue par l'œuvre de M. Roux.
Sur ces cinq feuille une seule , le Peuple Représentant, a
l'apparence d'un journal. M. Alexandre Pierre , qui signe
l'an I" de l'état de siège et qui se dit le cousin du Peuple
du citoyen Proudhon, adresse à M. le procureur de la
République des questions qui me semblent passablement in-
discrètes. Il a tort, en vérité, de se rappeler au souvenir
de messieurs du parquet. Qu'il devienne nioins question-
neur et surtout plus honnête s'il ne veut pas quitter sou
établissement de la rue des Noyers pour venir habiter la
Conciergerie nu quelque autre maison de détention. Opi-
nions piililiqiirs à p.irt , ses spriulahons ressemblent à s'y
mépreniliv a ilrsrsrrnipiriirs. la Répotise d'un cochon Oil
exactement semblable ,1 la Réponse d un ours, t^'cstla mênii'
épître — et quelle épitre ! — sous deux titres différents.
Il a paru encore cette quinzaine un petit livre de llii
pages qui mérite une mention honorable. 11 a pour titre :
Physiologie de la presse, ou catalogue completdes nouveaux
journaux qui ont paru depuis le 24 février iusqu'au 20 août,
avec le nom des principaux rédacteurs. Plus développé, ce
travail eût offert plus d'intérêt; mais tel qu'il est — pour
ne pas parler de quelques erreurs faciles à corriger — il
sera lu et consulté avec profit. L'auteur, qui signe un Chifl'iui-
nier, y a réuni un grand nombre de renseignements utiles
sur deux cent quatre-vingt-trois iournaiw. Parmi cesjour-
naux , j'en ai vainement clierdié un qui avait paru au mois
de mars et qui vient d'être réimprimé. Son titre était pour-
tant assez caractéristique; il s'appelait la Guillotine, par
un vieux jacobin. Grâce a une brave femme qui me pro-
cure . il lies prix raisonnables, tous les journaux défendus,
je puis comlilrr la laruneque je signale dans la Physiologie
de la presse. J'ai sous les yeux, en écrivant ces lignes, ou
exemplaire de la tiiiillnlinr. Spectacle assez peu agréable,
car, entre cesilnix r|ii ji ;i|ilirs : 1793, tout le monde y pas-
sera IHIK, |)risriinr n \ |).i-.-^i'ra, on aperçoit une gravure
sur bois repi'ésriilaiit l.uuis Philippe eiitr'ouvrant son gilet
et sa chemise et montrant sur sa poitrine nue le fameux in-
strument de mort qui a ininiortalisé le nom do Guillotin.
Mais, honnêles gens qui avez la bonté de me lire, n'éprou-
vez aucun saisissement fâcheux en jetant les yeux sur
ces lignes. Il n'y a rien de moins inoffensif que ce canard
signé Olusi Lippephi que d'esprit! ). C'est une lourde et in-
digeste ciinipilatiuii liisturiiiiie ou vous tiiiiivcrez seulement
(les ren.srigiiciiiriils plus 1111 moins aiillirnliipic. sur l,i date
de l'iiivcntidii lie la giiillnlinr, sur (.iiiilliitiii. les exécuteurs
et la famille Sanson, les principales exécutions, et cnlin la
décadence de la guillotine. Il y a plus, l'auteur demande
l'abolition de la peine de mort.'. Quelle infamie ! J'ai bien
envie de dénoncer cet Olusi Lippephi au procureur du roi
comme trompant le public sur la nature de la marchandise
vendue, art, lî'^ du Code pénal. Qu'en pensez-vous? Mais ,
patience! en dédommagement on nous promet pour la se-
maine prochaine le premier numéro de la Gu'tUotine res-
suscitée , une bonne aubaine pour
Le viErx FrANFeri '
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UMVLnSF.L.
Les camps clablis ii Paris cl d.ins les environs ont ('le ri
sont encore, pourio r.iri>ii'n>. un ojjjcl lri>\ ildc iiino.-ili'-:
cela secon(;olt; ile|iiii> ciiii|u.inlc-(|uatrc ans |iaii'il >|>t'i-
lacle, sur une jurande écliulle, ne .s'élail offert a leurs yeu\.
Il faut donc être au moins sexagénaire pour se souvenir
ilavoir vu un grand nombre d'hommes abrités par ces
maisons de toile , maisons très perméables en temps de
|ilnie, surtout au cou nicmcnt de rtmilrc cl avant cpjc
I humidité n'ait resserre les li lires du lissu (In kmiI bien (pic
le chaud et le froiil y |iciiclrcnt plus racilciiienteni circcpic
la pluie ; mais la chaleur y est plus supportable ipie la gelée,
et sans doute nos soldats n'auront pasapprissans une grande
satisfaction que l'on s'occupait de leur préparer des habita-
lions moins légères et susceptibles d'être chauti'ées.
Le camp établi à la plaine des Sablons en 17'Ji, pour les
élevés de 1 École de Mars, est en effet le dernier qui ait pré-
cédé les camps actuels. L'intervalle de temps est assez
long, et nous nous serions fort bien passés de ceuK-ci . puis-
que nous ne lesdevonsqu'aux funestes journées de mai etde
juin; ainsi l'ont voulu les insensés de la veille et de l'avant-
\eille, socialisiez cl cummiiiiislcs
La plaine des Sabliiiis ne ressemblait guère alors il ce que
iiiiusla voyons aiijoiinlhiii : le village de Sablonville. élevé
II y a vingl-cini| ou lii'iilc ans n'cvizlail pas, cl, s.iul les ar-
bresde la roule ipii hingc le lioisde liiiulogiic. on n aurait pu y
apercevoir un bi in di' vcgchilmn Celte routeétait enfermée
dans le camp, qui sciciidait di' la porte Maillot à Neuilly;
en sorte que les piélmis, coi les voitures, étaientforcés
(II' s'acheminer par la vieille route, qui commence à la bar-
rière du Kouie.
Le camp, environné de chevaux de frise et de palissades
peintes aux trois couleurs, renfermait env.ron trois mille
cinq cents élèves ilc -.l'i/.r ;i di\-sept ans , divisés en trois
milleries de fusiliers ci ipu'iipics centuries de piquiers ,
sans compter les ca\;ilicrs cl Icsartilleurs choisis parmi les
élèves que l'on avait jugés les plus propres à ces armes spé-
ciales.
Kn quelques semaines , ces jeunes gens , arrivés de tous
les points de la France, manœuvraient comme de vieux
.soldats ; c'est un miracle que la garde mobile vient de
renouveler sous nos yeux. Les uns et les autres présentent
d'autres points de ressemblance L'École de Mars, appelée,
disait-on, pour servir d appui a Robespierre et à son cruel
système, n'a pas peu contribué a le renverser le 9 thermi-
dor: comme la garde mobile s'est portée avec une coura-
geuse .irdciir a enlever les barricades, quoique les insurgés
lie juin .iticiidis.scnt d'elle au contraire un puissant secours.
H lui dcrlaïc par la Convention que les élèves de l'École
de Mars a\aicnt bien mérité de la patrie, déclaration qui
vient d élrc renouvelée par l'Assemblée nationale en faveur
de la garde mobile.
Que l'on jette un coup d'œil sur le costume des élèves de
l'Kcolede Mars que nous reproduisons ici et dont le modèle
avait été dessiné par llavifl : on y verra la même tunique
adoptée maintenant pour l'armée et même pour la garde
lien Caiiip* <l« Paris.
n.ilionale .\insi. il a f,illu cini|uante-quatre a;ispourquun
vclcmciil (iimmiidcel favorable a la santédu soldat fut géné-
ralciuciil admis, clcncorc en a-l-on laissé de coté une partie
essentielle. Au lieu des épaulettes, assi inutiles et souvent
gênantes que l'on s'obstine a conserver, une peau de bul'lle
Costume des él
recouvrait les épaules des élevés de l'École de Mars, ce qui
aidait puissamment à supporter le poids du sac. Faudra-
t-il cinquante ansencore pour que l'on songe à procurer ce
soulagement k nos troupes? Sauf la forme romaine, le sabre
de l'École de Mars n est autre chose que le poignard actuel
de l'infanterie La ceinture des élèves servaitdecartouchiere
et cela valait bien la giberne si disgracieuscment atUichée
aujourd'hui ii iinceinturon blanchi. Il est vrai que dans l'an-
cienne Hépiililique pas |iliis que SfjusIEmpire, pendant nos
grandes guerres, il n'élaitvenudans l'idée de personne d'im-
poser aux offiiicrs d'infanterie une sorte de demi-sabre de
cav;]|cric, -.uziiciidu de la manière la plus incomuKxie pour
riioimncic |,lcd
Ilipuis le i\ février, nous avons vu plusd'une parorlie de
l'ancienne Itépubliquesans pouvoir y rien découvrir i(uisoil
a l'avantage du temps présent, il s'en faut. — Par exemple .
lin a construit a grands frais une salle pour recevoir le»
1)00 membres de lAssemblée nationale; et ils ne peuvent y
tenir qu'à la condition qu'il y aura toujours une centaine de
représenlanls absents, pour le moins : condition a laquelle
un plus grand nombre se soumet volontiers, si nous en ju-
geons par les scrutins Cette salle d'ailleurs a un autre pe-
tit défaut pour une Assemblée délibérante : c'est qu'on n'y
entend ni les orateurs ni même le président, à moins qu'ils
no soient doués d'une voix de Stentor Eh bien : dans un
mois à peine, une salle avait été construite dans l'enceinte
du camp des Sablons, les3, 300 élèvesyétaienl assis à l'aise
sur des gradins à demi circulaires , comme â l'ancienne
Chambre des députés, ayant devant eux, derrière la tribune
des professeurs une statue de la Liberté, de vingt pieds de
haul l.c. pK.lr.srurs y étaient distinctement entendus de
toulc> le- pl;ii .'■., iiièmeHassenfralz malgré son bégaiement
Tous Ic-s Irais de celte salle avaient consisté dans l'élévation
d'une charpente revêtue en dedans et en dehors de forle
toile peinte aux trois couleurs, et bourrée de foin entre les
toiles; le jour venait d'en haut par un ample vitrage, que
lc< ilclinsmatériels et humains de lexplosion delà poudrière
di' (liiiii'lle vinrent effondrer un jour, au moment d'une
Il que les élevés écoutaient attentivement. Est-ce que
nos architectes auraient moins de génie révolutionnaire que
les architectes de la Convention ?
Il est bien à craindre qu'il en soit ainsi des ordonnateurs
de nos fêtes publiques , comparés à ceux de la première
République. Voici un dessin de cet ancien temps, représen-
tant une fête militaire, exécutée au Champ-d(»-Mars , le
lîll vcnilciiiiairean III, par les élèves de l'École de Mars, en
cclclir:iiinii de l'expulsion des ennemis du territoire fran-
çai> Clic montagne ayant au sommet un arbre touffu delà
Liberté, telle qu'on la voit figurée ici , occupait le centre du
Champ-de-Mars ; la Convention et les autorités constituées
étaient groupées de la manière la plus pittoresque dans les
anfractuositesde cette montagne, qu'avoisinail une colonne
aussi haute que celle de la place Vendôme , et ayant surson
chapiteau une statue de la Liberté , environnée de vingt
tionipettes donnant le signal des évolutions militaires, l'n
fort, élevéà la placeoù débouche maintenant lepontd'Iéna.
élait occupé et défendu par une partie des élèves , pendant
qu'il était attaqué par l'autre partie de l'École, commandée,
comme le fort, par desélèvesdontc'était le tourdecomman-
ilciiienl Dans celte petite guerre, Merlin de Thioinillc cl le
tcprésciiiaiil Milliaud , qui a acquis depuis une grande ré-
piilaiioii cniimic général de cavalerie, s étaient mis, aides-
de-ciimp vchinliiires, sous les ordres des commandants
de l'attaimeetde la défense, aux acclamaliuiis jn\cii-cs de
Idus les élèves. On sent bien ipie le fori ilul s.mln piuii
icrminer l'action , et on peut en voir l'explo^nui sui l.i i;i;i-
Mire; mais ce ne fut pas sans qiiel(|ucs llles^urcs remues
dans l'ardiMir du conibiil
Celle simple dcsci-iplion doit suffiie pour faire juger.
com])aralivciiicnt.de l;i iKiuvrele des l'êtes données sous nos
\ eux d;iiis CCS derniers mois Pour ne parler que d'un seul
(loint . (]u'est-ce que riiiliirme slatue de la Itepublupie oc-
cupant grotesquement le milieu du Cliamp-de-Mars. au lieu
de la monlagne et do la colonne cicvccs il la mt^me place
en 17!lt? Dans la nremierc Ucpulilii]uc lout était grandiose
piircc ipi'on avait la foi, celle loi ipii;i soulevé le monde avant
que le Ccsiir des temps modernes im n soit venu régulariser
les clans Sansduule l.i lièvre re\olulionn,iire a f;iit com-
mettre alors des excès déplorables cpie la présence des en-_
nomis sur le territoire no juslilio pas , mais qu'elle peut"
cxpli(]uer. Certes, c clail uii affreux conlrasle que ce qui se
passait à la place de l;i UcMilulion et à la barrière du 'l'rônc
peiidani ipic l'on cli.inlait dans les fêles publiques :
Peuples qui Rémisiici sous des jougs lyraiiniqiics ,
Vi'iici voir les Kraiiçai'i il leurs fêles ciiiqucs:
Onmparci Sx vos fers cc< Riiirloiidcs légères,
Que porte en s'eiubrassaiil tout un peuple de fièrfs!
Hais n'v a-t-il pas «piclque compensation dans l'expulsion
si pronipio des eiuunii- du >ol de la patrie par les qua-
kirze armées levées il un sii;iic et composées, pour la plus
grande partie , de \olonlaiies sachant il peine charger un
iusil V l est qu'alors , il faul le répéter, on avait la FOI
celte foi oui transporte les montasnes. comme dit Bossuel
'V. L.
Anciiii èlè\c ilo l'iVolc de Mars.
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
61
*'!Jf
Études de mœurs, par Valentin.
■l ^i,!,,S|l;i,,Çi|f]|i|,|ii^.»=._.=_.
'jyfiuif'iiy
Le premier coup de fourchette.
Le dernier coup de fourchette.
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i^%ffuJK ;(
La première coatredaiise.
Li dernière contredzinse.
G-i
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
lies Voyageurs noMveBMX.
BEISE OUBCH miSSl.AND NACH DEM KAUKASISCUEN ISIHMUS.
foya/je à travers lu /iiissiV à t'Islhme du Caucase, fait en 1836,
1837, 1838, par M. Cii. Koch, professeur d'Iiisloire nalurille à
rUiiivcrsitù (l'K'iia ()).
Il est des rontrte dont les tendances de plus en plus positives
de l'esprit liumain n'ont pu altérer encore le prestige poùticpie.
Pendant une longue série de siècles les voyageurs les ont explo-
rées, les géographes les ont décrites, les historiens en ont reiracé
les annales, les savants en ont observé les phénomènes. On ne
peut plus les ranger dans la catégorie de ces pays qui e\cilenl la
curiosité par leur éloignement et occupent l'imagination par le
voile doni ils sont enveloppés. Mais, malgré ;ies nombreux récits
(jui nous en ont parfois assez sèchement révélé l'état physique et
social, ces conirécs privilégiées, nous apparaissent au milieu de
notre prosaïsme dans une sorte de pénombre, enlourées d'un
charme singulier. Telle est celte terre du Caucase, islhme ver-
doyant étrcini par trois mers, barrière de montagnes entre l'Eu-
rope et l'Asie, roc de Prométhée, plage fabuleuse de l'Odyssée,
empire du sommeil, région grandiose, région superbe, habilée
par une race héroïque désignée très nettement dans les périples
de l'antiquilé, traversée par G. de Ruliruquis cl plusieurs autres
voyageurs du moyen .Ige, étudiée par Pallas, Polocki, Clarke,
Klaproth, Parrol, Marigny, Hammer, dépeinle minuliensemcnl
par M. Dubois de Montpcrreux, illustrée par un des chefs-d'œu-
vre de X. de Maistre, par un poëme de Pucbkin, et un spiriluel
roman du jeune et malheureux Lermonlof.
C'est celle contrée qu'un savant allemand a de nouveau entre-
pris de décrire. Pour ceux même qui ont déjà lu les livres des
énivains que nous venons de citer, celui de M. Koch ne sera point
une lecture superllue. Tout en se servant des travaux île ses de-
vanciers, le professeur d'Iéna les a rertiliés sur plusieurs points,
et ses éludes joinles à ses propres observations l'ont mis en état
de tracer un tableau lucide et complet, quoique resserré, de la
Circassie, du caraclère et des mœurs de ses habitants. De plus,
il y a dans sa relalion des pages inléressantes sur ces tribus de
cosaques que le vent des révolutions jeta un jour comme une
nuée d'oiseaux sauvages sur les bords de la Seine. C'est par lu
que nous commencerons noire analyse.
A l'époque où l'empire de Gengis-Kan se dissolvait, où la puis-
sance de Timurs n'avait qu'une courte durée, ou les Kans de
Crimée ne pouvaient foiuler un étal paisible, où les princes de
Russie, divisé» entre eux et opprimés par les Mongols, conser-
vaient à peine quelque pouvoir, où l'on ne savait plus qui élait
maître et qui était esclave, aux quatorzième, quinzième, seizième
siècles on vil apparaître des troupes de hardis aventuriers qui
des sieppes situées entre le Don et le Volga s'avançaient le long
des cûles de la mer d'Azof et sur les bords du Dnieper, envahis-
saient les villes et s'en retournaient dans leur pnlrie chargées de
butin. Les Génois, les Vénitiens, qui possédaient alors des éla-
blissemcnls de commerce sur les rives de la mer d'Azof et de la
nier Noire, cxcilaient surtout la convoitise de ces bondes do pil-
lards. C'étaient les bandes de Cosaques. On a lieu de croircqu'elles
provenaient de la race tclierkcsse (cricassicnne). La première for-
teresse qu'elles élevèrent porta le nom de Tcherkask, et de nos
jours encore les ïcherkesses sont désignés par plusieurs de leurs
voisins sous le n(.ni de Cosaquef. Il faut remarquer en oulre que,
comme les C.sIqMi •.|H(ifrssaieiil le rlirisliaiiisme, ils ne pouvaient
être que llu^-cs nu 1 . lui Kism ^ cl iinri puml Mongols. Enfin, il
élait dans les iiabiludis des Tthui kesses de se livrer au vol et à
la piraterie, et l'on comprend aisénicnl que quelques-uns d'entre
eux, séduits par l'appùl des caravanes qui passaient près de leurs
domaines, aient pris les armes pour les piller.
Quoi qu'il eu soit de leur origine, les bordes de Cosaques s'é-
tabliient dans les steppes du Don, sans femmes, sans eufanis, et
y formèruil nue snrie de république. Avec leurs agiles chevaux,
ils s'élanrainii ilr l,i laiiiili niriii .'i la u. liiiche de leur proie, et,
en ras de |i"mi- , iK iimn il .1 ms Uiir- plaines sauvages un
refuge a-Min-, la ^ pniH. s ihvm s si ll'iii. rentd'entreti uir de pa-
cifiques rel.ilioiis a\ic les ln;u|n.s t;iurrières, et ce fiéau mena-
çant se porla sur lis lerres des princes Nogais, des kans de Ci i-
niée, des domaines d'Azof,
bous le règne de Jean IV, suinoininé le terrible, l'helmau Sé-
riasman donna b .ses tribus une nouvelle oiganisalion il fonda la
ville de Tcherkask. Kn 1522, il reconnut la suprématie de la
Russie, planla des croix sur ses frontières, déclara la guerre nus
peuplades musulmanes, et força la contrée d'Azof à lui payer un
tribul.
Ainsi vivaient dans leur superbe indépendance ces Bédouins des
slcppesiniirllrs, apprryés sur Iniis aviiH s, passioririrs pniir ii m s
chevaux, laill.ilé|ii,iMl .a ri la, ili m, ,r il. s ussaillrs, Il raïa-
lilial
breuses. Les plus liiavrs ilVi.li r i um ■ainil appi-lrs au laiigdr
chefs, et envoies décelé el il'aiilre par l'helmau pour prendre
des lenseignemeirls- el rapporter à liuis frères un projet d'ex-
pédllion.
Bientôt la colonie se divisa. L'amoirr du pillage en entraîna
une parlie sur les bords du Dnieper et du Volga. Les Cosaques
se livrèrent là à des aeles de brigandage que les eiforls des princes
russes ne piiienl léprirniT. Deux habiles marchands, qui avaieirt
plus d'une fuis soiiIVrit lie ces depi c il iliuiis, eurent le bonheur de
l.iiii' luiiiiii r.i liinpiiilii l'isiuil ail iiliiii iixdeceslégionsrapaces.
I)i ii\ lueuiliiis de la riilie famille îles SliogonolT, Jacob et Gré-
goire, animés de celle audacieuse ardeur qui cnllaniinail Pizarre
eu Amérique, résolurent de tenter l'invasion d'une vaste contrée
sur laquelle ils n'avaienl que de vogues noiions, la Sibérie. Us ur-
rniriril eiiviriiu .10(1 AlIrrri.iiiiK il l.illiuaiiiins, déteiminèrent
riirliuau ilii Viilna, Jiriiiak I iimisi i. Il ,i sr juiuilie à eux, etavec
iillr iriiuiir va-ali Ii l a II diiiniiialiiirr russe toule
une rOgioir dont les llusses saiaieiil a pLine le uoiu.
Après l'anéautissenienl de la puissance mongole, après la con-
quête de Kusan el d'AsIrucan, les grands-ducs de Russie firent de
nouveaux elfiirl» pour asservir les Cosaques. La lulle dura long-
temps sairs l'ésultal définitif. Enfin, sous le lègue d'Alexis Micliae-
lowilsch, l'helmau Steriko Rasiu ayanl été fait prisoirnier i la léle
(I) 1 i'..l.
, SlliUBiill, 18«.
de 200,000 hommes, les Cosaques se soumirent. Alexis, par une
prudente politique, leur laissa une parlie de leurs anciens privi-
lèges et leur organisalion militaire; mais le souvenir de leur an-
cienne indépendance fermeulail encore dans leur esprit. Ou sait
l'histoire de Mazeppa et celle de l'inliépide Cosaque Pugalschelf
qui souleva la moitié de l'empire russe el effraya Cathe-
rine IL
Les guerres de la Révolution française firent connaître les Cosa-
ques il l'Europe, el resserrèrent les liens qui les unissaient ii la
Russie. Dès celle époque, ils se sont considérés comme les défen-
seurs de l'empire russe, et ils professent à présent pour leur em-
pereur un dévouement qui ressemble à une sorte d'idolâtrie. La
parole impériale est leur parole suprême. Ils la suivent avcuglé-
nieul I.'hérilier du Irûne porte le titre d'helmon des tribus cosa-
qiiis.'ii il luiiiiiiirlui iiiénie l'iilliiiir i;iii le siippléi- dans ces fouc-
limis. Cpiu laiil ils s,. ra|i|irlleiil, ils perpélueul par la tradition
l'Iiisloire des aiieieiis jours el des linuls fails de leiiis aïeux. Ils
ont des héros populaires dont ils chantent les expluiis comme au-
trefois les Grecs chanlaient ceux de la guerre de Troie.
La terre occupée par celle race singulière est peu cullivée.
Elle pourrait alinieuler une population cinq à six fois plus consi-
dérable. Le Cosaque, avec sa nalure guerrière, n'aime point le
travail des champs. Il ne s'y livre qu'autant qu'il y est contrairil
par la nécessité. Au lieu de labourer les steppes et d'y faire des
irrigations, il s'abandonne au plaisir d'errer à cheval de côlé et
d'autre, el à celui de s'assoupir mollement au pied d'un arbre.
Naguère, par suite de cet éloignement pour le travail, la con-
trée élait souvent désolée par la famine. Pour prévenir un tel
fléau, le gouvernemeril russe a établi de grands magasins où cha-
que Cosaque est leiiu de déposer une partie de sa récolle. Grâce
à celte précaulion, le pays peut mointenont supporter une ou
deux années de mauvaise moisson, et pourtant ses babilanls ont
eu bien de la peine ù adopter celle sage mesure.
Parmi les Cosaques, on trouve les Kalmouks qui, l'été, parcou-
rent les sieppes avec leurs troupeaux de bœufs, de chameaux, s'en
vont de pâturage en pûlurage, puis se retirent en hiver dons lu
province du Caucase.
Les Cosaques n'ont qu'un très petit nombre de beiliaus. Toute
leur olfeclion se concentre sur leurs chevaux. Us en prennent plus
de soin que de leurs femmes el de leurs enfouis.
Lo même incurie qu'ils opporlcnt dons le travail agricole se
mauifcslc parmi eux dans l'emploi des rivières navigables qui sil-
lonnent leur conliée. Ce n'est qu'à regret qu'ils se déterminent à
s'embarquer sur le Don ou sur quelque autre rivière pour s'en
aller échanger une partie de leur récolle ou une cargaison de pcoux
conire des étoffes el de l'eau-devie. Ils se construisent alors un
grossier coirol à voiles non ponté, qui peut porter douze ù quinze
hommes. An moindre venl, celle embarcation vacille comme si
elle était près de chavirer. Le Cosoque y entre pourlont sans
crainle. Comme les Turcs, il a un sentiment de fatalité qui le
porte à braver froidement le péril. Cependonl, comme il est chré-
lien, il n'oublie pos d'invoquer saint Nicolas, 'e patron de la con-
trée. «J'ai lu, » dit M. Kock, « dans la silualion lo plus ciiliqiie,
des Cosaques assis tronquilemenl sur leur mauvais canot, el fu-
monl leur pipe avec une parfaite quiélude. «
Tous les six ans, le Cosaque quiltc sa demeure pour s'en aller,
perrdont le nième nombre d'années, garder les frontières les pins
éloignées de l'empire russe. Ceux qui restent cultivent le sol, pren-
nent soin du béloil el s'arrangent de telle sorte, que ces occupa-
lions lui loissent de longs loisirs pendant l'hiver et l'élé jusqu'il
l'époque de la récolte; ils vivent la plupart du temps dans une
molle indolence, possent de longues heures, ossis sur une peau de
mouton, à firiuer en silence leur pipe. S'ils s'arrachent à celle al-
litude inerte, c'est pour prendre leurs armes, les nettoyer, les polir
jusqu'à ce qu'il n'y resie pas la plus légère loche. Pendant les
jours de frnid, ils se lienncnl au sein de leurs familles, prés du
foyer ardent, et reslenl ainsi séparés du monde err lier.
Le prinlenips réveille leur octivilé et leur donne une nouvelle
vie Les jeûnes rigoureux qui précèdent Pâques attrislent forlpour
eux la fin de l'hiver et leur fout plus vivcmcnl désirer le relo:;r de
la belle saison. A Pâques, tous les habitants de la Slanitzn se réu-
nisseul en plein air. Le cri religieux : f'hristos voskrcss (le Christ
est ressuscité), qui reteiitil dans toute la Russie, est, pour les (Co-
saques du Don, le signe d'une joie universelle. Après celte fêle
solennelle, chaque dinianclie les gens du village vont s'asseoir fio-
lerriellement sur l'herbe verte. Les vieux Cosaques, rangés en
cciTle, raconlenl tour à lour leurs aventures. Celui-ci se vaille des
eoiiibals qu'il a souleiius contre les Circassiens, cet autre ra]'pelle
le leiups où leur gloiii nx empereur les conduisait dans la capi-
tale de la Fiance. Un lioisième narre les hauts fails do leur dur
lielmou Plalolf. Un qualrièuie célèbi'e l'époque où leurs aïeux ne
rcconnaissaienl aucun ni;iîlre dans la vaste étendue des sieppes.
Le jeune homme qui n'a poinl encore quille le loit palernel
écnuie avec avidité ces récils naïfs el enllronsiastes. Mais bientût il
aura aussi lin devoir mililoire à remplir; bientôl il faudra qu'il
ahaiiiluniie pour six longues années amis, fières, pareiils el lo
iriiiir lilli' qu'il vieni d'épouser. Sa femme lui apporle en pleir-
tani. niai^ suis muriimnT, ses armes brillanles et nu soehet rem-
pli ili II m |iii,r aiipu's ilii foyer nalal. Sa mèr'e, qui a souvent
siilu la (Inulriir d'un tel moment, rassemble ses bardes et y joint
quelques proiisious deehoix. Et le Cosaque part pour la Finlande
on les rives du Danube, el sur les plages loinl;iines,. (luand uir
Irisle regret s'empare de son coeur, il songe aux larges plaines ar-
rosées par le Don, il regarde la croix suspendue à son cou près du
sachet où est enfermée une parcelle de la terre natale. Celle lei re
esl pour lui sacrée. S'il tombe malade ou s'il est frappéd'une balle,
il tire le talisman de son sein, le porte à ses lèvres, et meurt en
adressant une dernière pensée à sa pairie.
La femme que le Cosaque a laissée dans sa demeure vil comme
une veuve, à l'écart des fêles du villoge, uniquement occrrpée du
soin d'élever ses enfants et de cultiver son patrimoine. Après sa
longue absence, son mari revient, le fioni hiïlé par le soleil, le vi-
sage ridé par les fatigues; mois il o devant lui une pérspecliie de
six années de lraui|iiillilê diiiiu slique, et ses enfouis, qui oui elia-
ijur ji.ui eiilen.lu pai In il, lui, , luiivut à sa reiiroulie el le soluent
de leurs ,i is ile juiu. M.iis mmiiiui il orriie qu'un de ces pauvres
gordiens de l'empile russe que l'on a cru niorl, Iruuve en renlronl
dans sou pays sa femme reinuiiée el sa maison occupée par un
étranger.
Dès sa première enfance, le Cosaque se prépare par ses exer-
cices à la vie militaire. On lui remet eiire les mains une lance,
ou lui apprend à gouverner un cheval. A peine peut-il manier
un fusil, que déjà il aceompogne son père à la chasse. Tous ses
jeux sont des siurulocres de guerre. Dans sa viellesse, c'e-t lu
guerreencore qui occupe la plus grande place dans ses souvenirs,
qui enflamme sa pensée. A sa mort, il demonde qu'on dépose der-
rière la croix de sou tombeau so lance, son fosil, son fouel.
Les femmes vivent là dans un passif élal de subordination.
L'homme esl, à la letlre, mailre absolu dons sa maison. Les filles
s'assrieienl aux travaux domestiques de leur mère cl ne se mèlenl
oux jeunes gens qu'au mois de moi el de juin, au temps des fêlc'S
de la PenleciJle. Elles se rassemblent alors sur la pelousi-, el l'une
d'elles reçoit solennellement la couronne de la beauté. On lui
donne le lilre de reine [zaritzn). Chacun vient lui rendre ho ii-
moge, et elle choisit un roi qui, jusqu'à l'année suivante, conserve
dans le village une grande iniluence. Après celle double proclama-
tion, la jeune reine s'asseoit sur un siège élevé, tenant à la main
une cruche pleine d'hydromel qu'elle offre généreusebient à ses
sujets. Puis on se range autour d'elle el l'on chante des chants po-
pulaires. En voici un qui peut donner l'idée des naïves coraposi-
lioiis de la race cosaque.
Oh I mon poirier, mon poirier vert (1 ). Sous le poirier repose une
jeune fille, el elle s'écrie : Hélas ! dans quel temps sommesnousV
Les braves guerriers alDigenl les femmes Les amis éloignés tour-
meulent le cœur des jeunes filles. Chaque fille s'est choisi un ami.
— Un ami qui est loin, quelle anxiété ! Un ami qui est près, c'est
une joie perpéinelle Elle conjure son ami de relarder son départ
d'une heure, de lui donner encore un jour, un semaine. Elle veut
le forcer à l'aimer. Le Cosaque répond : On ne me force poinl à
aimer. On n'obtient point mes baisers par la contrainte.
A celle même époque de l'année, les babilanls des slanilzas si-
tuées sur les rives du Don célèbrent aussi la beaulé, les bienfaits de
ce fleuve qui ne leur inspire guère moins de vénération que le Nil
aux figypliens. Ils l'appellenl le doux, le pacifique, ils le cbantcnl
dairs une quoulilé de chansons gaies ou mélancoliques, lis lui ap-
pliquenl l'usage des Russes qui joignent ou nom de famille de
chaque individu le prénom de son père, el comme ce fleuve sort
du lac Jean, dans le gouvernement de Tula, ils le nomme Don
Iwaiiowilich (Don fils de Jean).
Par un beau jour de mai ou dejuin, le fleuve esl couvert de bar-
ques, et des chairls joyeux retentissent sur ses deux bords. Si une
ilc s'élève au milieu de ses flots, c'est là le poinl de réunion, c'est
là que l'on prépare le banquet. Enire celle île el la slanilza, il y
a un mouvement perpétuel de canots qui vont el viennent, lanlôl
appertant de nouveaux promeneurs, lonlùl des provisions : cru-
ches de kvas (2) el d'eau-de-vie, pâtés de pois-on, gibier.
L'un des plus grands plaisirs du Cosaque, pendant Ii-s années
de reposqu'il passe dans son pays, esl la chasse. Autrefois l'helman,
porrr occuper l'aclivilé de sa tribu et exercer son adresse, organi-
sait lui-même de grandes chasses. Des milliers d'hommes enlaçaient
dans un cercle un vosle espace de terrain et se resserraient peu à
peu jusqu'à ce qu'ils formossent une baie épaisse au milieu de la-
quelle on fiiisoil un effroyable carnoge de bêles fauves Placé sur
une houtenr, l'helman observoit toutes les évointions de sa !roupi>,
encourageait l'ardeur des uns, ctiliquail la lenteur des autres, el
applaudissait aux mouvements des plus agiles. Maintenant CCS sortes
de parades guerrières ont cessé. Le Cosnque s'en va seuleniei.l
avec quelques conipoguons à travers les forêts, poursuivant comme
un tjuanclio la gazelle. ou le cheval sauvage avec son loccl, el bra-
vant avec son fusil la force de l'ours, la rage du loup.
La première forteresse foniiée dans les steppes par les Cosaques
fut, cuinme nous l'avoos dit, celle de Tscberkask. Autour decette
forteresse, il se forma peu à peu une ville qui, à la fin du sit-cle
dernier, renfermait plus de dix mille babilanls. Mois elle était
dans une silualion malsaine et exposée aux inondations. Pour la
remplacer, on bàlit à quelque distance, sur une hauteur, une au-
tre cilé qui por-te le nom de Novvo-Tscherkask (nouvel eTscher-
kosk), Legouvernemenl russe a lui-même dirigé cette conslructiun
et lui a donné la régularité des villes modernes de l'Europe. Les
rues sont ti'ées au cordeau, les édifices publics sont larges et éle-
vés . et les maisons, bâties pour la plupart en bois, ne manquent
pas d'une certaine élégance exiérieure. Il y a déjà là quelques in-
slitulions de civilisation : une école élémentaire, un gymnase, un
bazar.
De l'autre côté du Don s'étend une vaste steppe tri-le, inanimée,
où l'on ne trouve qu'à de longues dislances quelque pauvre sla-
nilza servant de relais de poste. Au delà de celle immense plaine
silencieuse esl Slauropol, capitale de la province ciscoucasienne,
terre <le sable brûlée par le soleil, égayée seuleracnl çà cl là, comme
les déserts de l'Arabie, par quelques vertes oasis. Elle occupe un
espace, de 1,630 milles carrés, dont 770 milles sieppes incultes,
125 rivières cl niorois, el 530 sol cultivable. On n'y compte que
186,000 babilanls, la p'uparl colons et soldais russes, les autres
Arméniens, Druses, Ossetes, el les Nogais, el les Kalinouques no-
mades.
Les plus anciens babilanls de celle contrée sont les .Nogais, mé-
lange de race turque el de race mongole. Leur nom leur vienl du
vaillant Nogai qui, vers la fin du treizième siècle, vint s'élabli'-au
nord et à l'est de la mer d'Azof el, dans une de ses expéditions
guerrières, s'avança jusqu'au sein de la Hongrie.
Après lo conquête d'AsIracan (1557), une parl'c des Nogais se
rallia on se soumit à lo puissance russe. Les autres gardèrent leur
iudépeniiance el ne furent assujettis qu'en 1695, lorsque Pierrc-
le-Gr-aud s'empara d'.4zof.
Il existe à présent dans In région ciscaucasienne environ 76,000
Nogais nomades. A leur front étroit, à leurs lèvres épaisses el à
leurs pommelles saillantes, il est aisé de recoiinaitre encore le type
mongol, moins caractérisé cependant que celui des Kalmouks.
D'une nolure indolente el ennemie du travail , ils passent leur*
journées dans une molle oisiveté près de leurs troupeaux el aban-
donnent à leurs femmes lous les soins du ménage. Le gonvcrne-
nieiil russe a essové de les délonrner des habilndes de leur vie no-
made, il a fail en certains endroits construire des villages. Mais
dès que l'été revienl, l'inslinct vagabond l'eraporle clie» eux sur
loule idée de labeur agricole, cl ils s'en vont de pâturage en pâ-
turage ovec leurs Iroupeaux. L'hiver, ils reslenl dans leurs chélives
cabanes, ai'cronpis aulour de leur foyer, souiTrant du froid, sou-
vent de la faim. Apixis celle rude saison, il u'en est pas un qui ne
soit pâle el alfaibli.
La prinripole tribu nomade qui, avec les Nogais, occupe celle
même rêginu est celle des Kalmouks, que a Russie n'est par-
venue à assujettir qu'A la fin du sîiTle dernier. De même que
les Nogais, ils n'onl pu renoncer à leurs habitudes nomades. Mais
(il t:>l«'cili' li!érelri»lilible.
^ le stmlMleilelii iIouK-ur.
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
63
ils se distinguent, au milieu des autres peuplades d'origine mon-
gole , par la vivacité et la gaité de leur caractère. Souvent ils se
réunissent dans des fêtes et accueillenlavec empressement rélr.in-
ger. On connaitia laideur de leur type national, cependant il n>st
pas rare de trouver parmi eux des femmes à la figure gracieuse
qui nattent leurs cheveux a\cc une cot|uettcrie européenne, qui
seulement ont tort d'altérer, selon la conlume orientale, la fraî-
clicurde leur teint par l'emploi journalier des cosmétiques.
Slauropol , clief-lieu de la province ciscaucasienne, est une
ville de deux mille âmes, agréablement située. C'est la résidence
d'un gouverneur militaire et le point central d'un commerce d'é-
change d'étoCfes de soie et de laine , de fourrures et de denrées
coloniales dont la valeur totale s'éîève ù environ 1,600,000 fr. par
an. Les Nogais et les Kalmoucks y amènent du bétail, des peuux
d'Astracan , des tissus en poil de chameau; tes Arméniens y ven-
dent ù un haut prix diverses marchandises.
A quelque? centaines de werstes de Stauropol sont les slanilzas
des Cosaques de la ligne , cordon militaire organisé à peu prts sur
le même plan que celui qui entoure les possessions de l'Autriche
en Hongrie. Pieire-le-Grand en posa les premières bases , Cathe-
rine II l'agrandit. Cette colimie militaire est destinée à protéger
contre les invasions des Circassiens les provinces soumises ù la
Russie. Mais elle ressemble à ces rivières impétueuses qui sans
ci'sse roiigf'nl leurs rives, élargissant leurs lits. Delempsù au'rc ,
elle dépass" sa frontière, s'en va construire une redoute , unefor-
teresse sur le sol ennemi , et resserrede pluscn plus dans ses ma-
nœuvres stratégiques les domaines des Circassiens.
Cette armée de sentinelles cosaques, chargée de conserver les
auciunnes conquêtes des Russes et de leur en préparer de nouvelles,
se compose de neuf rcgiment'i de cavalerie, de trois compagnies
d'artillerie , en tout 13, 20U hommes, dont le chef porte le litre
d'helniau. En cas de besoin , ces 13,000 soldats peuvent être ren-
forcés par 12,000 hommes de la colonie , tous prêts ix quitter le
foyer de la stanilza et le soc de la charrue pour prendre l;i lance.
Depuis 183^, la Ru^-siccntrelienl de plus dans cette même région
nue armée régulière de 70,000 hommes. C'est Cflle-ci qui est une
hturde charge pour le trésor Impérial. Les Cosaques de la ligne ,
grâce â leur régime de colonisation , coûtent fort peu à l'État. Le
sol qu'ils cultivent est affranchi de tout impùt. Ils sont tenus seu-
lement de le défendre. Si le service mililaire les conduit hors d'un
rayon de cent werstes autour de leur staullza , ils ont dioit alors à
une ration de vivres, de fourrage, et ù une solde très minime.
L'oflicier reçoit par trimestre 15 à 17 francs. Le fourrage n'est
p;iyé que du 16 octobre au 16 avril ; le reste du temps , les che-
vaux doivent trouver leur nourriture dans les steppes.
La colonie cos:ique se divise , selon l'âge , en quatre catégories :
Irscnfanls, les ji^uncs gens de dix-huit ù vingt ans , les hommes
(le vingt ù soixante, qui composent l'armée active , lesvieillards,
La moitié des ho:nmes fait le service militaire, l'autre laboure le
wol, prend soin des troupeaux , mais doit entrer en campagne au
premier a,>pel.
De même que le Cosaque du Don , celui de la ligne s'exerce dès
son jeune âge à monter le cheval fongueux, à se servir de ses ar-
mes en le lançant au galop Ses armes et son cheval , voilà ce qui
surtout charme ses regjrds et sourit à son orgueil. Malgré son
humeur sauvage, son cœur n'est point inaccessible aux tendres
sentiments. Implacable dans sa haine et sa ïenge;ince, il garde
avec reconnaissance le souvenir des bienfaits. Confiant et hospita-
lier, il vient avec empressement en aide à l'étranger égaré stir sa
route , et dés que cei étranger a franchi le seuil de sa demeure, il
e''t l'ami de l.i famille. Plus heureux que ses frères du Don, il
n'est point obligé de s'en aller pendant six ans camper à des cen-
taines de lieues du sol natal. Son service ne l'appelle que de loin
en loin hors des limites de sa stanitza. Il goùle les joies du foyer
domestique , il voit ses enfants grandir sous ses yeux ; son devoir
l'oblige â se tenir toujours en éveil , prêt ù prendre sa carabine,
prêt à courir au feu ; mais cet état d'agitation plaît ù son cœur de
soldat. La stanilza qui renferme tout ce qu'il a de plus cher au
inonde est entourée d'une palissade ou d'un rempart eu terre assez
fort pour arrêter au moins quelque temps une troupe ennemie.
La nuit des patrouilles, accompagnées d'une meule de chiens,
circulent aux idenlours de la rustique forteresse. Le jour ce ser-
vice d'observa lion est encore plus actif. Des Cosaques parcourent
le terrain exiérieur, examinant avec soin les champs de roseaux
où souvent se cachent les Circassiens. Des |iostes de soldats sont
établis de distance en distance sur des plutes-Ibrmes en bois , éle-
vées sur quatre pieux à vingt ou quarante pieds au-dessus du sol.
De là le factionnaire promène au loin ses regards ; dès qu'il aper-
çoit quelque mouvement sur la nmntagne, Il allume son majok^
espèce de torche en bois résineux. Aussitôt de poste en po-te
apparaît le même signal. Les cavaliers montent â cheval et se pré-
cipitent vers l'endroit menacé. Les habilanis delà stanilza sont
sur leurs gardes , les portes sont fermées. Souvent ce n'est qu'une
fLiusse alerte. Les torches s'éteignent successivement et le Cosaque
rentre dans sa demeure.
X. MARMIER.
{ La suite au Numéro prochiiin. )
Bulletin bibliosraiiliiqice.
Du gouvernement arabe et de t'inslilution qui doit l'exercer ,
par CuABLBsRicHVBD, capitaine du génie , chef de bureau des
olTaires arabes de la subdivision d'Orlêansville, brochure in-8"
délie pages. — Alger, Rastlde , 1848, 2 francs.
l\r. Charles Riehard , Tauteur de VE/mlc sur niisurrcction du
IKihra , dont nous avons rend» compte il y a deux ans en\iron ,
— l'historien de Bou-Maza en Afrique et son cicérone 6 Paris
— vient de publier sous ce titre : Du gouvernrmcnt arabe et de
l'institution qui doit C exercer ^ une brochure d'un vif inlérêl;
ear elle est remplie d'observations nouvelles et de sages conseils,
cl , dans les circonstances actuelles elle peut être d'une gr;inde
Mtililé pratique. Le style manque peut être en certains passages
(le facilité et de netteté ; mais ces défauts , insignilianls (railleurs
<lans un ouvrage de ce genre, qui n'a évidemment aucune pré-
tention littéraire, ont une explication et une excuse malheu-
rrusemenl trop pkiusibles. Pendant snn dernier séjour à Paris,
M. Charles Richard eut le chagriit de se \oir voler son manus-
crit le jour même oCi il venait de le terminer. Toutes ses recher^
ches pour le retrouver sont demeurées sans résultat. Il a donc été
obligéde le lécrire entièrement à son retour en Afrique , sans au-
tres matériaux que de simples souvenirs, et comme il le déclare avec
raison, c'est lu une de ces tâches pleines d'ennuis et de contra-
riétés qui ne peuvent être entreprises, qu'on en soit certain , sans
un désir profond de dire quelque chose d'utile et de servir une
grande cause.
M. Charles Richard connaît mieux que personne les difficultés
qui s'opposent à l'œuvre de la domination et au gouvernement
du peuple ariibe. Loin de les dissimuler, il les expose avec nue
entière franchise ; mais il ne pense pas qu'elles soient insurmon-
tables. Dans son opinion , si , d'une part , le caractère de ce
peuple, ses instincts, ses tendances nous sont d'une hostilité
irréconciliable, d'autre part, certaines circonstances, indépen-
dantes de lui , nous sont toutes favorables et nous aideront dans
notre entreprise. Pour atteindre notre magnifique but, il nous
faut trois choses : le temps , le nombre et l'institution. Or, nomme
le temps et le nombre sont deux éléments au-dessus des simp'cs
finces de riiomme, il s'occupe seulement de rinstitulion. Un jour
il essaiem de déterminer d'une manière claire quelles sont les
niodifieiitions transitoires qui , en Algérie , doivent servir de pas-
sage â nos institutions. « Pour le moment , je ne traite, dit-il ,
que de l'institution la plus importante , puisque c'est elle qui doit
appliquer les autres et en être le pivot ; il veut parler de celle
<|ui , ù peine ébauchée , est connue sous le nom singulièrement
adminislralif de bureau arabe.
Décrire les caractères généraux du bureau arabe et fixer ses
altribulions futures administratives, judiciaires et n ilitaires ,
telle est donc la lâche que s'était imposée M. Richard. Peut-être
a-t-il accordé une trop grande importance à cette institution ,
peu -être s'esl-il exagéré les services qu'elle est appelée à rendre;
niuis , à coup sûr, nul de nos oOiciers n'était plus capable que lui
de soulever et de résoudre une pareille question , car nul ne l'a-
\aitétJidiée plus longtemps , p'us consciencieusement approfon-
die. C'est nu théoricien pratique ; ses idées s'appuient toujours
sur des faits. Chacun de ses chapitres contient qui Ique révélation
nouvelle sur la chose arabe , comme il dit, qui n'est si peu com-
prÎNe , en général , que parce qu'elle est encore voilée par les mys-
tères de l'inconnu. Ain^-i alors même qu'on ne parlajerait pas ses
opinions sur l'avenir des bureaux arabes, on ne profilerait pas
moins pour cela des renseignements positifs qu'il a su recueillir
pendant son séjour dans la subdivision d'Orléansville et des indi-
cations uliL'S qu'il donne â ses collègues présents et futurs.
« Les nuances ù mille reflets que présente, dit-il , la surface du
peuplearabe, oITrent, commeconséquence, desdiflîcullés très gran-
des dans ta manière d'agir sur lui, nécessitent des études très sé-
rieuses et beaucoup d'observations sur ceux qui sont le moyen
d'action.
» Un chef de bureau arabe , nouvellement arrivé sur un point,
a un long a))prentissage ù faire avant de connaîlre ce qu'il lui
faut pour tenir tous les fils secrets qui remuent le pays cl rendre
de bons services. On peut dire que chaque tribu au moins, pour
ne pas descendre plus bas l'échelle des <livisions , exige un sys-
tème particulier de commandement , et aussi une mesure dilfé-
rente dans ses actes. Ainsi, par exemple, dans le cercle d'Or-
/cntisvitlc , il serait de la dernière maladresse de demander aux
Sebéhhas ce qui peut être facilement obtenu des Onled-Kosséiri ;
et souverainement injuste de punir de la même peine une même
faute dans chacune de ces iribus. Les légistes et les magistrats
qui ne spéculent que sur des sociétés unies , ont de la peine à
admettre la jusiice dans l'inégalité des châtiments pour une
même faute ; rien de plus équitable pourtant devant le droit na-
tuiel , qui domine tous les autres. Vous avez à gouverner un
peuple essentiellement dilTércnt du nôtre : il ne faut pas évaluer
les crimes par leur résultat , c'est-à-dire le mal qu'ils p oduiseiit
réellement, mais seulement par l'importance qu'on leur attribue
dans le pays et le degré d'borieur qu'ils inspîreuL Un Sebéhha
aceoutnmé à payer 15 doiiros le meurtre de son voisin , ne peut
pas êlre puni aus-i sévèrement qu'un Kosséiri , ayant reçu
d'abord de la nature des mœurs moins féroces, et ayant appris
par un corïtacl de cinif ans avec nous combien un crime paicil
est airuce et qoel est le châtiment qui l'attend. Les hommes des
Onled-Joiines , dans le Dahra , qui sont tous voleurs, et qui
e\ 'rreiit eeite piofession hors la loi avec la même sécurité qu'un
bonnetier petit en mettre à vendre ses bonnets , doivent-ils être
sérieiisi'inrni elioiiés avec la sévérité que les h^glslations de tous
les |i;i\s rivilisés eonimandent en parei'le circonstance.
D La cnlMlai^s;lncc des hommes offre des d'flicnltés plus gran-
des eMrnre(ine celle des tribus. Les masses ont des traits saillants,
péri(nli(|nes nu permanents, qui permettent de saisir assez faci-
Icineiit l'ensemble de leurs caractères. L'analyse exacte de l'Arabe
est un dédale ténébreux qui n'est jamais éclairé que par de faibles
lueurs arcidenlelles , et dans lequel il est presque impossible
de marclnr sans faux pas. Quand on interroge un Arab", m'ine
SU'- un fait très indlféi eut , la première inspiration ([ui lui vient
est celle du men»ongc. Il ment non pas toujours par in'érêt,
mais souvent par plaisir et par simple amusement de l'esprit. Le
mensonge, c'est sa poésie; il s'y livre avec entraînement, avec
charme, et, chose curieuse, soit illusion naturelle chez lui,
soit habileté digne d'un meilleur but , il arrive souvent à le co
lorer par cet air respectable de la conviction qui impose toujours.
Quand deux Arabes sont en présence et débattent leurs intérêts ,
ni celui qui a tort ni celui qui a raison ne présente les choses sous
lein- véritable aspecL... On conçoit d'après cela quel délicat dis-
cernement il fani appoitiT dans les relations les plus élémentaires
avec ce peuple de prolées.. »
Un des chapitres les pins curieux de cet utile; travail est celui
qui a l'impôt pour suj( L iW. Richard y prouve qu'on a eu tort
de traiter avec dédain l'impôt et les divers revenus arabes, sous
prétexte qu'ils ne sont pas , quant à présent , d'une grande im-
portance , et qu'ils ne dépasseront jamais une certaine limite.
Ces divers revenus sont au nombre de six. Evaluant ce qu'ils
peuvent produire en totalité, M. Richard arrive ù la somme de
ir> millions, c Somme, dit-il, qui vaut bien la peine d'être
poursuivie, et qu'une bonne constitution des bureaux arabes per-
mi tira d'atteindr-e rapidement, si. comme tout le fait espérer,
la paix daigne nous favoriser du temps nécessaire. » A l'en croire,
elle pourrait facilement être portée de 15 à 30 millions, u Du
reste, ajoute t-il , le chiffre de 15 millions , porté plus haut , n'a
rien de lourd pour la population , ainsi qu'il est facile de s'en
convaincre. Cette somme, répartie sur tonte la population,
donne 5 francs par tète. En France, pays placé dans d'autres
conditions ^\c progrès et de bonheur, l'impôt réparti par têle
doime plus de iO francs. En tenant compte de la dilVérence de
vu'eur de l'argent dans les deux pays , et en admettant , ce qui
est exact, que cette valeur, toujours en proportion inverse de la
rareté , soit en Afrique double de ce qu'elle est en France , les
5 francs de l'Arabe représentant 10 francs, il en résulte qu'i'l ne
paie encore que le quart de ce que donne le contribuable de
France. Quand l'impôt aura atteint la limite de 30 millions, le
contribuable arabe aura encore une charge moitié moins lourde
que celle des Français. Ainsi donc, devant le trésor, lu peuple
vaincu se trouve mieux traité que le peuple conquérant, consé-
quence qui montre manifestement que la pensée d'atteindre suc-
cessi\ement les chiffres posés pêche plutôt par la timidité que par
la hardiesse."
Instruit par l'expérience, M. Richard indique les moyens qui
pourront être employés avec succès par les bureaux arabes pour
tenir et conduire les chefs indigènes, surveiller les hommes sus-
pects, percevoir les impôts, émanciper les femmes, développer le
goilt que manifestent pour les constructions en maçonnerie les
Arabes, qui, en général, n'aiment que médiocrement les tentes,
leur enseigner les premiers éléments de l'agriculture, les déter-
miner à utiliser leur argent, qu'ils ont l'habitude d'enfouir; li-
miter le territoire des tribus, préparer le terrain d'invasion â la
colonisation, etc., etc. Ai-rivé ainsi à leurs atti-ibutions judiciaires,
il démontre l'impossibilité morale et matérielle de l'application
de notre législation à un peuple musulman; il en tiie cette con-
séquence, qu'il faut laisser aux Arabes des lois musulmanes, en
les soumettant à une surveillance intelligente dans leur applica-
tion, et de manière à préparer les invasions successives de nos
lois. Il termine enfin par l'exposé d'un nouveau système d'orga-
nisation mililaire sur lequel nous nous contenterons d'appeler
l'attenlion des hommes compétents.
Après avoir ainsi traité de la fonction, M. Richard consacre un
dernier chapitre aux agents de cette fonction. Constitués par une
décision ministérielle, les bureaux arabes, n'ont été, jusqu'à pré-
sent, qn*une simple mesure. M. Richard, qui voudrait en faire
une institution, pose les bases d'un décret qui aurait pour but
et pour effet de leur donner cç caractère légal qui leur manque.
(I II est bon, écrivait M. Richard en concluant le 1" février
ISâS, il est bon de rappeler souvent la grandeur de l'œuvre pour
aiguiser l'intelligence et l'exciter à bien fairç. Nous n'avons pas
seulement ici ù féconder un sol, nous avons encore ù féconder
un peuple. Le premier de ces deux buts est compris par tout le
monde, le second préoccupe moins les esprits; il est de ceux que
les masses poursuivent presque à leur insu, poussées par le doigt
providentiel qui dirige tout ici-bas. Je serais heureux si j'avais pu
parvenir à dessiner celui-là d'une manière moins confuse, et à
poser quelques jalons de la route qui doit y conduire. Notre tâche
est lourde, ne l'oublions pas, car nous avons charge de peuples
devant la postérité. Gardons-nous donc d'aller au hasard avant
d'agir, assurons-nous de bons instruments; et rappelons-nous
souvent ces pai'oles mémorables de Montesquieu, qui semblent
avoir été dites tout exprès pour nous : « La conquête laisse lou-
jnurs à payer une dette hnmense, pour s'acquitter envers la na-
ture humaine, b
Mclan'ia d'économie potitiq>fc, tome II. — Collection des prin-
cipaux économistes, tome XV. Un volume grand in-S".
Paris, 18^8. Guillaumin. 10 fr.
Encore un volume, — les OEuvres diverses de J.-B. Say , - et
la belle collection des principaux économistes que publie M. Guil-
laumin sera cimiplèle. Le tome XV, le dernier de la collection,
mais ravant-dernier dans l'ordre de la publication, vient de pa-
raître; c'est la suite des Mélanges d'économie •politique. Le pre-
mier volume des Mélanges contenait les principaux ouvrages de
David Hume, Forbonnais, Condillac, Condorcdt, Lavoisier et
Franklin. Le deuxième se compose des matières suivantes : Dia-
logues sur le commerce des blés^ par Galiani ; de la Législation
et du lommerce des grains, par Necker; de ^Influence qu'ont fet
diverses espéas d'impôts sur la moralité, l'activité et Citidustric
drs peuples, par M. de Montyon : la Défense de l'usure, par J.
Benlham. (hacun de ces traités est précédé d'une notice histori-
que sur son auteur et accompagné du commentaire et dénotes
explicatives, par M. Gustave de Molinari.
Correspondance.
M. V., à Paris. — Puisque vous paraissez croire, Monsieur,
que ClUnstration doit savoir mieux que personne où en est la
souscription ouverte en librairie avec primes, il faut qu'elle vous
rassure. Cette souscription est parfaitement autorisée, le Cata-
logue s'imprime et rien ne saurait faire obstacle à uneopéralion
qui assure du travail ù 25,000 ouvriers. La lettre qui vous a fuit
douter est l'œuvre ridicule de cinq citoyens dont l'envie ne peut
pas prijvaloir contre un tel intérêt. Nous savons bien que la Ré-
publique court le risque d'y per-dre le dévouement de M. Char-
pentier et la valeur héroïque de M Feret; on dit même que les
révoltés ont juré de renverser le gouvernement si la souscription
n'est pas interdite. M. Charpentier n'en fait pas d'antres : c'est
lui qui a fait tontes nos révolutions parce qu'on l'a contrarié ,
et sans l'épée de M. Keret, capitaine de la garde nationale, nri
ne sait pas ce qui serait arrivé en juin dernier. Et M. Rigaud ,
drmcll!
Quand vous verrez Fontaine, souvenez-vous de Goujon.
Mademoiselle Z. L. U est probable, iMademoisclle, que le Mo\:-
sicur y consenl'rail, mais quel métier!
M. P. D., à Paris. Nous l'avons déjà dit, Monsieur, les Jour-
nées illustrées de la révolution de 18^8 ne sont pas une repi-o-
dnction de l'Illustration. C'est une histoire complète, une ap-
préciation réfiéchie des idées, un récit fidèle des faits accomplis
depuis février. C'est également la réunion de tous les sujels qui
ont fourni des gravures à tous les recueils illustrés qui traitent de
l'histoire contemporaine en Angleterre, en Allemagne, en Itati"
et en France, La part de l'Illustration est considérable, m-iis
rillnstrutcd London news et la Gazette illustrée de Leipziq ont
aussi fourni une part précieuse à ce livre, digne de votre intérêt
et de votre curiosité.
M. J. W., à Genève. Même réponse.
M. T. D. Il ne nous est pas permis, Monsieur, de nommer
l'auteur.
M H. P. L'abondance des matières a relardé lecoraptc-reudo
de votre cxcelleut Mémoire,
Cà
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
Le Peler-Botte — est-il besoin de le rappeler? — est
une montagne fort extraordinaire de l'Ile-de-France (Mau-
rice) ; elle attire de loin les regards de tous les étrangers
qui naviguent dans ces parages. En effet, elle s'élève à 1 ex-
trémité dune longue chaîne de montagnes, dont elle est sé-
parée par une gorge profonde , bien qu'elle paraisse s'y
rattacher sans solution de continuité. Sa hauteur est de
1,000 mètres. Mais c'est surtout sa forme particulière qui
lui a valu sa célébrité. Elle se termine par un rocher de
100 mètres de hauteur, assez semblable a la flèche d'une
cathédrale, couronné lui-même par un bloc de pierre de
Ascension du Peter-Botte.
20 mètres de haut et de 10 mètres de largeur, qui dépasse
de tous côtés la base sur laquelle il repose. On a appelé ce
bloc de pierre la tète , le rocher le cou, et la partie supé-
rieure de la montagne l'é'paule.
En jetant les yeux sur le dessin ci-joint, on comprendra
mieux encore combien l'ascension du Perter-Botte offre de
difficultés et de dangers : aussi , bien que tentée souvent ,
a-t-elle rarement réussi. Il y a Ifi ans environ , le capitaine
Lloyd parvint jusqu'au sommet. Depuis deux touristes aven-
tureux se sont procuré cette satisfaction , le capitaine Sta-
vely en 1830 ou 38 , et M. Henry Hayter, officier du vais-
Ascension du Peter-Botte le 20 mai 1848.
^'!y» de la Compagnie des Indes orientales, le Samaranii
qui a envoyé à notre confrère de Londres, Vllluslraicd
Lnndon news , le dessin et le récit que nous publions au-
jourd'hui.
« Le 20 mai 1818, dit M. Hayter, nous parlimos en voi-
ture do Port-Louis, éloigné d'environ 11 milles du pied de
la montagne. Nous étions huit. Après un voya^e assez dés-
agréable sur de mauvaises routes , nous arrivâmes chez un
plantoir français , dont l'habitation .se trouve située ii un
demi-mille de la baie, et qui nous accueillit avec la plus
aimable hospitalité. Le lendemain matin, à six heures, nous
nous mettions en route. Trois nègres nous accompagnaient ;
ils porlaiont dis |
tre« dcsiiiir ;i m'i
provisiniis (le liiii
iesdéchaigiMil,. I, „
lourds, car a iliiiq
ils restaient I
|l„.U,l,.
lin liniuliiiii de 10 inè-
dc.
I 11'- in.inclM' ,1 iKiiiv ,ii',i|,eaii , et
I"' M."> M"iis II s v„n,.iit obliges lie
l.iriii;iii\. qui n Vtiiient cependant pas
' iM^l.int ils refusaient de marcher et
iriere
» Il nous fallut d'abord gravir la pente escarpée de la gorge
que domine le Peter-Botte il travers un bois épais, où la
rosée nous mouilla ju.squ'aux os. .\u sortir do ce bois seu-
lement nous pùiiirs nous f.iireunc idée vraie des difficultés
et des daii^i
pnule, ipic ruiiis ili\
II' CHU . qui sr dri'ss.
\n
\ notre droite s'élevait l'c-
iird escalader avant de gravir
au-dessus de nous, couronné
niions liMilciniMil, car la pente
v: le nnnil.riMlcsarliieseldes
nsi utile secours
is , et nous ne
siilide. Souvent
s nous mettions
avec le bruit du
iIcM'nail lie plus en phis vaiili
buis.soMs,|iiin"iisavairnl i.nMcnis,|n ;,l,,i
diminnail a iiii'sinc (|iii. nnii, ikhis rlr\
Irouvinils ,|u .n,-,- p.Miir lill |miiiiI ,1 ,i|i|
lespierirsrl les l,l,„> ,lr rn.-llrr sur 1rs,]
les pieds , roulaient au fond du precipi
tonnerre , et auraient pu blesser dans leur chute ceux de
nos compagnons qui nous suivaient à quehpie dislance. Les
plus grandes précautions étaient donc nécessaires pour soi
et pour les autres : aussi n'allcigntmes nous le haut de
l'cpoKlc qu'après deux heures do fatigue
" Nous nous dirigeâmes ensuite le long d'une crélo ro-
cailleuse très étroite , dominant à droite et à gauche deux
précipices à pic, jusqu'à la base de deux rochers perpendi-
culaires d'environ 13 mètres de hauteur C'était là que tous
les touristes précédents, sauf deux , avaient rebroussé che-
min , effrayés des difficultés en apparence insurmontables
qu'il leur restait à vaincre. Nous tînmes conseil. Après
une longue délibération , où de nombreux avis avaient été
ouverts, nous nous arrêtâmes au parti suivant. Nous po-
sâmes contre la surface presque per[)€ndiculaire du rocher
qu'il s'agissait de gravir le bambou que nous avions ap-
porté pour arborer un drapeau en cas de réussite. Son
bout inférieur était appuyé le plus solidement possible sur
un petit plateau de 50 centimètres de largeur. Je grimpai
jusqu'à l'extrémité supérieure, et je constatai , à ma grande
joie , qu'à partir du point que je venais d'atteindre le ro-
cher présentait certaines inégalités invisibles d'en bas, et à
l'aide desquelles je parvins à me hisser jusqu'au sommet.
Trois de mes compagnons m'eurent bientôt rejoint. Mais
les quatre autres attendirent pour monter que nous leur
eussions jeté une corde solidement attachée ; car la moindre
oscillation du bambou le long duquel nous avions grimpé
comme des chais, aurait pu nous faire perdre l'équilibre et
nous précipiter dans un gouffre de 700 à 800 mètres de
profondeur.
Nous n'étions encore qu'à la moitié du chemin. Un se-
cond bloc de rocher, plus escarpé que le premier et haut
d'environ 7 mètres , fut escaladé seulement avec l'aide des
pieds et des mains, et quelques minutes après nous attei-
gnions le cou sans trop de peine. Restait la tète. Comme elle
surplombe de tous côtés, le secours d'une corde nous était
absolument nécessaire. Le charpentier du .Samarang qui
m'avait suivi jeta un plomb de sonde attaché à une ligne
par-dessus la tête , et quand ce plomb retomba de l'autre
côté, nous y attachâmes une corde qu'il retira et dont il se
servit, pendant que nous la tenions solidement , pour se
hisser jusqu'au sommet , où nous ne tardâmes pas à monter
à notre tour.
Nous ne nous repentîmes pas de notre témérité, car nous
découvrîmes un magnifique panorama , un des plus beaux
sans contredit qu'il soit donné à l'homme d'admirer sur
celte terre. Après avoir arboré le drapeau de la Grande-
Bretagne , nous bûmes à la santé de la reine Victoria avec
du Champagne, et nous entonnâmes en chœur le Godsave
the queen! puis d'autres chansons patriotiques Les habitants
de l'île , qui de tous côtés avaient suivi tous nos mouve-
ments, poussèrent de longues acclamations, et battirentdes
mains quand le drapeau que nous venions d'arborer se dé-
ploya à leurs regards. Avant de descendre, nous déposâ-
mes dans une fente du vénérable crâne du Peter-Botte une
feuille de plomb sur laquelle nous avions gravé nos noms.
Par une singulière coïncidence , nous étions trois -Anglais,
en Écossais, un Irlandais et un Gallois...
La descente ne fut pas des plus faciles; mais nous arri-
vâmes tous sans accident chez notre excellent hôte, où un dî-
ner succulent nous attendait , et le soir du même jour nous
étions de retour à Port-Louis.
Rébus.
ESPLIC.MIOX Df DERNIER «ÉEIS.
I..1 vie est composi'e de biens et de ma
On s'abonne directement aux bureaux . rue de Richelieu,
n" (iO, par l'cuNoi /"runco d'un mandat sur la poste onln?
I.erlievalier et C', ou près des directeurs de poste et de
messagerie* , des principaux libraires de la Krance et de
l'étranger, et descorrespondaiicesde lagencedabonnemenl.
l'.IS. — IMPnitllIUE PE COï!iO>, HCK lit FOCÏ
L'ILLUSTRATION,
Ab. pour Paris. 3 mois, 8 fr. — 6 mois, 16 fr. — Un an, 30 fr.
Prix de chaque N", 73 c. — La collection mensuelle, br., 2 fr. 75.
^» 292. Vol. XII. — SAMEDI 30 SEPTEMBRE 1848.
Bureaux : rue Richelieu , 60.
Ab pour les dép. — 3 mois, 9 fr. — 6 mois, 17 fr. — Un an, 32 fr.
Ab. pour l'étranger, — 10 fr. — 30 fr. — 40 fr.
Histoire de la semaine. i'ortraU <le m. Gat/em , préstdenl au Parlemfnl
<ie Francfort. — Courrier de Paris. — Le banquel du 22 seplein-
bre. Banquet ries Reprêitcnlants dans le jardin du Chtitet. — Caricatures
de Cliam.— Revue agricole. — Leilres d'un iianeur, XI. —
Album moldo-valaque. Vn consul général étranger en voyage^ , il après
M. DoussaiiU: Dames rùtaques en costumes orientaux ; Ruines de l'église ca-
tlioliiiued'Argiscli; Château de Dihrestein sur le Danube; la ville de Bel-
grade, ilessins de M. Bouqu*?r; Czemy-Gcorges , liospodar de Servie; La
princesse Bibesco \ Portrait et signature du sultan Abd-ul-Meijid. — Pas-
sions polillques. par Francis Wpy. —Dieppe et BrIghIOn. Fra-
ternisation des gardes nationattx à Dieppe; Église d'Auffay ; Château de Lon-
gueville ; Port de Dieppe ; Pont-jetee a Brighton ; Vue générale de Brtgliton;
Carte du chemin de fer de Rouen a Dieppe. — Bulletin bibliographique
— Grand festival au Jardin de l'Elysée IVatlODal , avec une
gravure, — RebUfi.
Hiatoire de In seninine.
Ce n'est qu'au commencement de cette semaine que le
résultat d'euî^emble des réélections de septembre a été
connu. Dans la Charente-Inférieure, dans la Corse, dans la
Moselle, dans l' J'onnc, M, Louis-Napoléon Bonaparte a été
élu. Dans lavant-dernier de ces départe-
ments il succède à M. Dornès ; dans les trois
autres il est replacé sur une liste dont sa
démission l'avait fait rayer.
Il en est de même pour le département
de la Seine où M. Louis Bonaparte a obtenu
une cinquième élection. Les deux autres
élus. MM. Achille Fould et Raspail , rempla-
cent M, Thiers et M. le général Duvivier.
Dans la Haute-Loire, M. Charbonnel ,
une autrevictimedesjournéesdejuin , a eu
pour successeur M. le général Rulliiéres .
ancien pair de France , un des ofliciers du
cadre de l'état-major-général frappés par le
décret d'avril.
Dans le Finistère , c'est le nom de M. le
colonel Ledo qui est sorti de l'urne à une
ara i\de majorité.
Dans la Gironde , M. Mole succède à
M. Thiers 11 a été élu par 25,224 suffrages.
Son concurrent , le procureur de la républi-
que du tribunal de Bordeaux , en a obtenu
t,'>,.i71. M Louis Bonaparte a recueilli là
encore 3,420 voix. Les marches électorales
semblent particulièrement , dans ce départe-
ment, fatiguer les citoyens, carsurl73,778
électeurs inscrits , li6,G06 avaient pris part
au vote du 23 avril , 64,220 à celuide juin ,
et 4o,S2a seulement se sont rendus aux sec-
tions le 17 septembre.
Le département de la Mayenne a eu le
bon esprit d'envoyer pour le représenter à
r.\ssemblée nationale M. Chambolle. La vic-
toire a été débattue. L'élu a obtenu 24,239
voix ; son concurrent , M. de la Broïse, en
a réuni 24,200. M. Louis Bonaparte a vu son
nom figurer sur 2.601 bulletins.
Dans leiVord , M. le colonel Négrier a été
nommé en remplacement de son si regret-
table oncle, par 26,123 suffrages. M. Louis
Bonaparte en a compté encore de ce côte
19,683. M. de Genoude , que nous retrouve-
rons dans l'Kcrault , 14,815.
L'Orne a élu M. de Vaudoré , candidat de
l'ancien parti légitimiste. Le vainqueur n'a
pourtant réuni que 10,619 voix sur 38,587
votants. MM. Hippolyte Passy et Mercier ont eu , le premier
7,852 voix, le second 6,238 appartenant a la même opi-
nion. Dans l'Orne encore M. Louis Bonaparte a trouvé 9,734
partisans de son élection.
Le Rhône sera représenté par M. Rivet , qui a obtenu
41, 850 suffrages. Son concurrent était M. Raspail , porté par
les voraces de Lyon .
Dans le Vaucluse, M. Alphonse Gent , dont l'élection avait
été annulée par l'Assemblée , a été réélu par 42.073 voix.
Le défaut d'union a amené ce résultat , car les concurrents
de M. Gent ont réuni ensemble un nombre de voix beau-
coup plus considérable.
Le résultat de l'Hérault nous parvient. M. Laissac a été
nommé à une forte majorité, contre M. de Genoude. On peut
voir que les électeurs , déjà si fatigués d'opérations qui se
succèdent à si peu d'intervalle et de déplacements conti-
nuels , vont avoir encore à procédera des élections nouvelles
dans quatre départements , par suite de la quintuple élec-
tion de M. Louis Bonaparte. On annonce que l'élu de Vau-
cluse , M. Gent . n'a pas pu survi\Te à une grave blessure
qu'il a reçue le lendemain de sa nomination dans un duel
au pistolet avec un rédacteur d'une feuille légitimiste qui
se publie à Avignon. Enfin les départements du Tarn et du
Monsieur de Gngern, président du Pirlemenl de Fn
Calvados ont à remplacer MM. d'.4ragon et Durand , décédés.
Plusieurs des nouveaux représentants ont déjà pris siège
à l'Assemblée. M. Mole , M. Rivet , M. Achille Fould sont
venus s'y asseoir les premiers. Mardi dernier M. Louis Bo-
naparte a assisté au rapport fait au nom du bureau chargé
d'examiner les opérations électorales du département de
l'Yonne. Le nouvel élu , qui au milieu d'un mouvement de
curiosité très vive , était entré accompagné de l'ami de sa
mère et du .sien , son collègue M. Vieillard , et qui s'était as-
sis à côté de ce représentant à la troisième travée de gau-
che , a , après la proclamation par le président de son ad-
mission , demande la parole, que M Marrast lui a accordée.
11 est venu lire d'une voix forte quoique émue , un discours
convenable et court , écouté avec intérêt.
Si le rapport sur les élections du département de la Seine
ne pouvait plus soulever de question quant à M. Louis
Bonaparte , qui venait d'être admis pour l"ionne , il n'en
était pas de même quanta un des deux autres élus de Pa-
ris. M. Raspail , en ce momenldétenuàVincennes, par suite
de son arrestation en flagrant délit lors de l'attentat du
15 mai. Plusieurs questions se présentaient toutes très dé-
licates , celles de savoir s'il y avait lieu d'ajourner l'admis-
sion jusqu'à l'issue du procès dans lequel M. Raspail est
impliqué , ou bien si l'Assemblée, en admet-
tant M. Raspail , autoriserait immcdiatement
la continuation des poursuites conformément
à un réquisitoire déposé par M. le procureur-
général , ou enfin si M. Raspail-, étant déjà
sous la main de la justice au moment de son
élection , les poursuites continueraient de
plein droit contre lui.
'Le procureur-général , M. Corne , est ve-
nu soutenir cette dernière thèse avec force
et talent. 11 a parfaitement établi que les
électeurs ayant pris leur élu sous un mandat
de dépôt , ds l'avaient pris comme il était ,
et que l'Assemblée ne pouvait le recevoir
que comme il avait été pris. Il a fait obser-
ver que s'il avaitdéposéun réquisitoire, c'est
que ne pouvant prévoir l'opinion qu'elle
adopterait , il avait dû , dans tous les cas et
pour toute éventualité , sauve-garder les in-
térêts et l'action de la justice.
Les conclusions fort peu nettesdu bureau ,
les explications contradictoiresque plusieurs
de ses membres ont apportées de ces con-
clusions à la tribune ; la tournure passion-
née que messieurs de la Montagne ont voulu
donner au débat , n'ont pas permis de résou-
dre cette grave question en s'appuyant sur
les vrais principes et en les mettant en lu-
mière. L'élection a été validée. M, Raspail a
été admis , puis immédiatement , sur la de-
mande du ministre de la justice , M. Marie,
l'Assemblée , ayant déclaré l'urgence, a au-
torisé la continuation des poursuites contre
M. Raspail. Le résultatest le même , mais k-
principe souffre.
Ces diverses résolutions ont été prises ,i
une immense majorité. Vingt ou vingt-ciiii|
montagnards, ayant en tête M. Lcdru-Hid-
lin , s'ysontseuls opposés. L'urgence surtout
les indignait ! Ils voulaient que la demande
d'autorisation fut renvoyée aux bureaux . et,
qu'on entendît M. Raspail avant de se |)ro-
noncer. — Nous l'avons entendu le 15 mai !
leur a répondu de son banc M. Dufaure.
Cette discussion a interrompu celle du
projet de constitution qu'il nous faut repren-
L'ILLUSTRATION, JOCJÎNiï, Ul^IYEftSkL. •
f
ili.- lie 11(1 vr n't\r. Niiiis ;i\ioiis dans iiulrn ilcmicr liiillcliii
raruiilr I i„„Hr,>,]r .M ,1c MoilUll lirM .M..lr I' Hn.is ,
llohi lr-n|, ..-nril lir,.uCHl|) |,lu> pr..! |,|IM - ;,ii|Hi,r,l ,\r
viicL:(.u\cri.riiJCJil.ili|uc>-dle5de.-<JM njllc.unr , jv.iMlurun-
vni' ïii (It'liiilc . cl lui a liiit i-clircr son iirrieiideinonl, mais
51. Diipin , (iiii est siins |iiliù inùnio pour les vain.cus, a
ncconi|iat;iic ci'Ui.' ri'li-ailo par une boutade qui se terminait
|)ar ilcuiaridi'rla lili: ilcdcl cii-i'iL'ni'nicnt. mais avec io^a-
ruiilu' lie 1(1 Un l't lii siirrcilhnicf lie I Etat. Cette eonclu-
sifin a de Iro laNoLdlrnicnt accucdlie par l'Assenibléc.
(_lii('l(|ur-. dix n~-iiiii^ se sont partielleuiont eii;;a^ccs sur
I arhrlc iiliiil ,1 la Id.riirdo la pressé, (..luidip»'.- oialcurs
iiinaii iil viinhi i\\ir la mesure du caulioiiru'ua'iil lïd assn-
<Mi'c a l.i [iic^i 1 i|iiiondont lacensure est liappir I, \>-iaii-
IjIit - cl K lii-ii' a projuger une question cpn -la.i idha m u
rcuirnl Msiilia' piiruneloi spéciale. — La uaini' M'^.i\ra
pn'\alu ru ce qui concerne la censure Ihéùtrale et 1 or^aiii-
ïotioji de riiiipiiuierie.
L'arlK le '.I laiiienait encore la question (le la liberté de
rensei-iieiiii'iil M. de Tnie\- n'a pas été plus heureux que
M (le 'm aleiiilierl ; M H'iiiIhIim \ .'^.iiiil-llilaiic , en lui
répniidaiil sC>l prul-èhv lai^r .illri a di> Iniulules trop
ahsnliirs ma s M llidaiiie, au nmii de l.i rommissiiHi , a
pn.ilaihe , .\l lliipil. la \rllh' . mal~d il Il moins
rouilr , 1,1 lll rrlr d rnMiL-nrmrli I -mi-, la ir-ri\cde-r Il-
lioiis dr r,i|iarila. 1 .h' i ;d J e ,|lll serulltlivee.- l'a r lr> lois
et SMii- 1,1 -inNrlIl.ilirrdr I 1.1, il
l.i-i pioiiiie ~.iii- di-i II- iiin qu'ont été adoptes l'arti-
cii- m qui iim-.ieiv I ,idiiii-il.ililé de tous les citoyens aux
eiupldis pulihes et ipii alioliL les liires et disliiirl mus imbi-
luiires: - l'arliele llipn ilerlareriuvic.l.didiledr Innir. les
pro|iriélés; — l'arlu-le l'Jcpii pniMTil a j.im, i- l,i nadi^ra-
lion ; — l'arlirlo 13qui i;iiranlil l.i lilierlc du lra\,iil ri dr
l'industrie , et détermine sou- i]iirlli'- Im nu-- ei d,ins i|m'llr-
conditions s'exercera la prolrrlinii qm a ele priimi>r.iii lr,i-
vail ; — enlin l'article 1 i qui proclame I inviolabililc de la
delte publique et do tous les engagements contractés par
IKlat.
L'article l.'i était destiné à un plus Ion? et plus éclatant
débat et a un Midalune plus i;raiide porlée puliliqur t'.et
article est relalit a la pari que cliaqiii' citn\ eu dmt suppoi-
(ei- d.m-le-cliai'jesdel Idal . el la lamimissmii eu le réili-
ih'lr
iliel
de lu
riail dejielii
maaipdere.
p|,.|rn,.|,l l,M,m■-nnnd,■..,^..
ou pru^re^.-il. Neaiuuuiu.- i el
quiélante pour le pays aux m
l.aiits. Un d'eux , M. Ser\ leia
pour faire trancher la quesimmai la\eiirdii .^\-,lenii' pro-
portionnel , elilasnuleilll >a priipii^ilhni a\ee (airrjir lain-
victioneltalent M Mallnen de la linmir I a niml.nlue.
S'il se fût borné allure Irpn.ia-a la pii,pni1miiiialilr lelle
qu'elle est aujouriTliui élalilie , il eùl iiiirnidie pliisil a>sen-
liment dans ses auditeurs ; néauiiioins la i-onuiiissmii lenait
loujdiiis pour le wi Ii> s i réil.Nimu. M.M de Chareiicey
el Llii'i'belte avaient parle, ■onlrerim|iMl pr.i.-i.'ssif, M.Gue-
rin ravaitilélémlu , mais iiialL-iv lali la di~, ii-mn ne sem-
blait point laire de ijrandspas. ,pian,l,'sl m, ml,' a la tribune
le ministre des linances. M Goudchaux ,li'il,ii,nl pieuilre
la parole conimo représentant, quand le piesaleid ,lii ,im-
seil se levant l'a autorisé ii parler au nom ,lii l-hiim'iii,'-
ment. Le langage d,- M ('.,ai,leli,iii\ . ,pii ,aii|iriiid,iil ,i ,,'ll,'
déclaralion une haiile pmliv pnlilHiiii^ , a ilunii,- [ilniie >,i-
tisfaclion à ceux ,pii , i,iii:iiai,ail ,1e mmi Ii' ^■(hui i ii,aii,'iil
s'eimaLaial,iiiMlr> iiiim\ .ihiiiis liiiamaia ,s iiiiai.ie > pour
la |ao|iralr v\ v^^ in,ilii,' liiiips il a,l ■ pi-i,, >,i lis-
|,i,a„.ii ,111 d,-n de \,iir la proporlmiinaliic s,a leiiM' ni et
e,piilaldeui,'iil applapiee \\ le ministre des liuauce.-< a l'or-
nielleiueut ilemamle , au nom du gouvernement , qu'on nio-
ililiâi lartiili' l.'i en ces li'iuH^s ; « Chacun y contribue en
vrop(,rlioii i]r s,'S I.Hidles el di'salorliine » .M jlulaure ,
au nom (le la i',iiiimissi(m .a.amsi'iin a ,aa ameiidiMiii ni qui
;i ,aeail,ipléau s,TUliuil,',ll\i-mn pi|- dll mhx , iVII,
L'elletilc resserrement ,1,' la iiiai.nilrd,. I \-rmlilc,. au-
lour du pouvoir exéculit , par suile d,.- d,'. Lu ,i|imiin du ^,'-
uéral Cavaignac et de M. Cioudchanx ,iaii~ ,,ai a ,i-i,iii ,
a élé iiiimeusi'. l'eu de jours aupaiiuaid . I,- pii'-i,l,'iil ,lu
Conseil (les ministres , sentant qu'une certaine froideur ré-
gnail dans les rapports du pouvoir avec la représentation ,
iivail provoipie d elle un vole de confiance. C'est une de ces
satisfactions qui ne se refusent qu'à une administration
qu'on est absolument résolu à renverser et surtout qu'on
est en mesure de remplacer immédiatement. 11 ne faut donc
rien conclure de ces votes. Celui qu'il attendait n'a point
clé niarclianilé au général Cavaignac, mais la séance de
lundi lui aura prouvé que les actes enlèvent les voles de
coiiliance avec une toute autre puissance que les simples
paroles,
La question de savoir si l'on aura une ou deux Cbam-
bres a ,-eninien,-é à être déliatlue èi la lin de cette même
sii.m, !■ ,1e bm,li M liu\ eiLii.'r de llauraune , partisan de
deux Cliambres, a,le\,'loppe son opinion dans un discours
s,iii,l,'et pupiaiil, lieaueoupirorateurslui ont suc, (''dé, mais
iusi|u'au m, im, Mit ,111 nous e, rivons , ]ieu oui ajmiléaux rai-
sons ijuil a ilonnées. Quanta ceux ipii les ombaltent, leur
ri'il,' est plus facile ; l'opinion de l'Asseioblée paraît faite
d'avance , et la Chambre unique obtiendra une majorité
considérable.
Klle l'a obtenue : la si''ance de mercredi a eu pour résultat
I,' rifl ,1e rauH'iHlemi'ut de M. Duvergier d,' llauiaiiiu' a
la m,i|onle ,||. ;;;!I1\,mx contre iXW La ipu'slioii ,i ,•!,■ lie-
ballii,. , daiisie te séance , entre M . de Lamartine el M, (l,li
liiii-U,irr,it avec, une vérité , une profonileur, une sincérité
{vv- iiii'sdans les discussions parlementaires. C'est au nom
,1,- p rils du pavs fX de la société que M, de Lamartine a
re, l,imi' nu,' siMile Chambre ; c'est pour parer avec plus do
lapaliii' ,'i <le \igueur aux coups qu'il chaque instant les
laeliiuis piuMut tenter de porter il l'oitlre politique et so-
cial : e l'st 1 ,'l,ili|issenieiit d'unediclature parlementaire ,pie
M ,1,' Lamartine a demandé Daiij;. quatre ans j'hésiteriiis ,
peut lll, ■ a ihl l'oialHur; (Juj,.)Ur,l hiii je ne jaiir'ipnyifis |'^
, pi 'lll la-iir 11 , agit liii^h lie calculer 1,' meeabisnie (te
re>.nil,|i> pins l,iM,r,,ble,s au jeu n-;..,ili,.r ,1,-; p,iiis,urs!
Il s'agit de reunir ilaii> iiiii' -rnl,. ( lumliiv i.mlr l,i |,a,e.
louteîa volonté, l.mle l,i -.hum imiih'Ii' ,Ji' l;i Liaiiri' pour
écraser les fH(itions, sml , ailes, pu menaemd la pi upi irli' lU
la famille, soit celles qui neciuii;iii\,Mit laHé|iidili,pi,'i|ii ap-
puyée sur les assignats et sur l'éclialaud, soil i elli^ijui rê-
vent la chimère d'un Inine impérial ou (j Une lamtiv-révo-
lution. — (ju'auriez-vous fait des deux (Chambres dans les
journées de juin, quand il fallait que les décrets du pouvoir
li''gislalif frappassent comme la foudre et qu'ils fussent pré-
.-rnlés, nnidns publié-,, ixée, dés dan- l;i u éiii,' heure!
,M ,1e I ,>ln,illllii>.i pailr ,11 laiiin I Kl.il ,,\e,- une élo-
qiieii, ,Ma un,' iii,ii;imIi, lan i ,|r Liiii;,!-,, ,pii lll. Il II, 'toujours,
(pioi,pi,ui s\ ,illrnd,' qii I il |iiriiil la panili' dans les
grandes etsol,'nm'llesdi-rii--nms r,rp,,|i,|ant l'elfet |iroduit
parcedi.seinirs iia p.unl p,ii„K-e irlni ilu discours de
Ai. Odilon li.iiinl. qui s,.|,ni rh,i', La- d,' r,'|„milr,.. Si M Odi-
lonBarrol u ., p,is irannpli,' dan- 1,' Ma,', -1 les lieux Cham-
bres ont su,',' Il,' iiMlL'ie -Mil .Hliinialil,' ,ler,'nse, la faute
en est aux circoiislaiices. Le diioius de M, Udilon Barrol
restera comme un monument de raison et d'éloquence.
Quand on voudra revenir aux principes de la liberté, quand
on voudra constituer la lléjiublique , non pour la guerre ,
mais pour la paix et pour I ordre, (juand les factions seront
vaincues ou qu'elles auront désesjiéré, on reviendra au dis-
cours de M, Odilon Barrot.
M. Dupin. au nom de la majorité de la Commission , a
répondu ii M. (Jdilon Barrot; mais tout avait été dit entre
M Odilon Barrot et M, de Lamartine LediscoursdeM. Du-
piii punira ,'lr,' , 'L'ai, 'm, 'lll r,qip,'l,' un jour; mais ce sera
I' ■ melh,' 1 1' ili-niiirs in , laii i ,Hliri mu avec M. Dupin.
In jenii,' ,l,'pi,l,' , .M lliHdii'i, ,u.iii ouvert la séance en
détendant le sysleii e des deux IJiambres avec un vrai
talent.
Le discours de M. Odilon Barrot a étésouvent interrompu
par (1,'s inlerjeeiions di's/, ndaiil de la Montagne; laissons
ci'lti'jiiie ,1 II ,M"iii,ijnr Si- f,i,ili'urs deviennent fous, ses
Inusités n'i'iisiinl |us pin- -pi, ,ii„.|s,
.M, liaillieleui) S.iiiil-lliLinr ,i proposé un amendement
porlaiil ,pic I,' pouMiir li'^isLiiil ,'.| ili'lr-iié /irariso/rcMif/i*
a une seule Chainlire ('.cl aiiirial 'ii eiil , ,|ui est une trans-
ailmii hiinorable, doit être disi ulc dans la séance dejeudi ,
el le sini ,[ui l'attend n'est pas douteux.
Dan- ses séances consacrées à l'ordre du jour courant ,
l'Asseinliléea votéun décret qui ap|ielle l'ftiat ii concourir,
par une subvention extraon'inaii'e de d (IIIO.OIIO, a l'achè-
vement et à l'entretien des , lninns m, maux Ldli-a de |ilus
entendu la discussion géner.d,' .-iii I,' pmji'l ir,'iiseigneiuenl
agricole, discussion il la suile d,' Impielle 1 ajournement (le
ce projet avait été demande (',,'11,' pmposition é;é repous-
sée et l'on passera à la fin de eetle semaine il l'e.xamen des
articles.
Outre les harangues que r.4sseniblée nationale a enten-
dues , il en est une autre que quelques-uns de ses membres,
l'ciix qui siègent sur la crête, sont allés applaiiilirau Chalet
le picmier jour de l'An cinquante-sept de In HrpuhUque
fi'iiiniise , OU, comme nous disons nousaulii's reaclion-
II, m, 's. I,' 2i! du mois ilernier. Si le repas il. ni an-si éiiicé
iliir U' ,lis,',Hiis de M l.edru-Kollin, la cnis n,iliiiii ili's
liquides a du elri' edi,!; aille. L'ancien niemlar ,lii ;.''iiivi'r-
ueuieid. provisoire a ele sans pitié, il a niéine Iraih' Im I du-
rement l'impôt des quarante-cinq centini, s Isl-ii'qnim
aurait mis son nom au bas de ce décret poui Ini inini piiiT '
Les nouvelles de l'étranger ont fail l'onniiin' l'illn s,'-
maine plusieurs faits iiiqu'i Imi- Iii- disnidn- sanulmis
ont éclaté il Francfort aussiliii a|irr-(pir In Mac, In iiaile-
UH'id iialional , sur la queslmn ilr I ,ii nn-.lu'e de .Maliiioc ,
lui a, ,111111 11,'iix ri'pri'si'niinls I,. lues. La lutte, par-
l"i- inli'iH'nipne , a iliiir lim- jiaiis La victoire est de-
mrnirea l,i iii,i|ni ilr il' r.\-s,'iiilili'i' Mais, il côlé de celte
\ 1,1, me ,111 lll' 1 l'Ile iii'Ne , il nous faut mentionner l'agita-
linn qui , aiiiliniii' ,1 \ H'iinc, qui prend des proportious alar-
ma id, 'S lia US la l'i'iis-e-Khénane, surtout à Cologne, sa
capitale el qui paraît mettre tout en question dans le
grand-duché de Bade.
Les noi.velles do la Hongrie sont assez contradictoires. Ce
qui est constant c'csl qu'a Vienne la diète a refusé d'inter-
venir dans la querelle entre les Hongrois el le pouvoir im-
périal.
.\ neiliii, le ininisli're fnnné siiiis 1,1 pi','si,I,'iu'e ,lu mènerai
de riiii'|s,'-| pn'srnl,',, | \-,,m|i|,.,. iial mii,i le ,'l \ ,i ,'sposé
son |ir,i^i',niiiii,' In phaml l,inl d,' ,iiiidialli,'l,ii,li'' 1,'nlalive
re.i, i,iir,', I,' inniM'aii e.ihim'l prend aussi I eiigagiMueul
d,' ilelemli',' pliissiii,','reineiil , ,'l surliiut plus courageuse-
nii'id ,pi,' ses piTiléi'e^seurs ui' lout fait, les prérogatives
neias-auesde la i,i\aide et ,lii p,iovoir executif. Cette dé-
claration a pi',i,luil une si'u.salion 1res vive dans la ville. Le
parti extrême, ih'j.i urite par la conccntralion de troupes
,ip,'r,'e ,l,'puis,piel,pi,'s jniMs au lourde Berlin, el par la no-
iniiialmn du ijeiieiM I de W i iii'jel au l'omm.iiideuieut liecetle
ai'iiii',' , siejiU'i'l 1,111 des , -liais piiurdéli'riniiier une iiou-
\elli' l'xpliismn La siin.ilioii , uimnenee a devenir très cri-
tiipiede ce l'olé.
L armistice réclamé par les amiraux anglais et français a
été accepté simultanément par le roi de Naples et le gou-
vernement provisoire de l'aleriue. l'Iusieurs villes impor-
lanli's nul l'ait leur soumission il l'aiiliMilé ruvale.
L'insurrection deLivourne parait êlredeliiulivenieulcal-
uu'e ; par un ordre du jour dalédu 17 seplemlui' le grand-
duc de Toscane a renvov é chez eux les gai, les nationaux (]ui
étaient accourus il l'ise pour y défenilre son gouvernement ,
H ne croit plus avoir besoin de 1,'iii'S services.
A Home, le souviMiiin pnnlile v ieiil do constituer un nou-
veau ministère choisi par M Kossi , < liargé de l'int(M-ieur.
M. Uossi est l'ancien ambas-adeur de France, qui. après
êlre ni- Italien, est devenu Suisse, Fiançais, et qui est Uo-
main poqrje moment actuel.
qui expirent le i" Octobre doivent
élrerenourelés pour qu'il n'y ait point
inirnuptinn dans l'envoi du Journal.
S'adresser aux hiliraires dans chaque
rillr, aux Directeurs des l'ostes et des
Messageries . — ou enioyer franco
w(i bon sur Paris, à l'ordre de
A. LECHEVALIER tr (.'
rue Itichelieu, 00.
Courrier de l'nriiii.
Si vous vous rappelez notre automne des anciens jours,
c'était la saison des plaisirs candides et des joies paisibles,
peu de paroles el encore moins d'actions; 1 heureux temps
,pie c'était pour les esprits qui se contentent de peu ! Plus
li'alfaires ni de soucis; on allait rêver à la campagne dans
h'sgramis bois, ou bien s'ébattre dans les champs et cueillir
la gripp,' eni-nre verdelelle'. I,' tliéàlre élevait a peine une
voix limide pendaiil ,'i' Inrlnin' mnis d,' septembre, béni de»
aniaids, dis rli,iss|.|irs l'i .|,'s ,'r,ilii'r-, c'était bien la belle
saison. 1,1 11, lu i'e[iusct ,lcs buiiheuis lempérés. Même noire
saison ,'l,id si douce, elle avait l'humeur si commode et si
avi'iiaiil,', ,'lle rendait son inonde si heureux qu'on avait Uni
parla traiter comme on traili- les bonni'sàmescl les gens de
trop facile composition. (_'. ,'l,iii Imiieiirnn' unebeautè, mais
une beauté sur le retour, i|iii, l'enr pi, m,', avait besoin des
ressources de la toilette; l'Ile a\,iii luaii prodiguer ses tré-
sors et déployer ses S|ilendeurs, c'est-a-tlire la sérénité de
son ciel , le doux éclat de ses nuits, el s'embellirde sa cou-
ronne de pampres, de [irés verts et d'arbres dorés, ce n'é-
tait déjii plu- que la pale aulomne, comme disent les élé-
giaqnes, el qui, -mis |iii'texte de se prêter à tous les bon-
heurs, ne ji, lin ail ,'ii a-siirer aucun. Déjii fort attristée dans
les champs ou elle souillait le froid et le chaud dans lu
même journée, elle n'était pas supportable dans la ville où
elle prolongeait la disette des plus grands biens, tels qu»
le sp,', l.icle du forum, l'élotiuence du barreau el les en-
, Ininlemenls du salon.
.M.iisi'iilin les plus difficiles doivent être réconciliés avec
noire automne, et ils ne l'accuseront pas de tiédeur. Ceux
de nos Parisiens qui, comme les grenouilles de la fable.
demandaient un roi, c'est-à-dire une siison ardente et in-
satiable, doivent être contents, I aulomne les dévore On
lui reprochail de n'avoir aucune physionomie, el elle les a
toutes; de s'endormir dans la moleise, el jamais elle ne
fut plus agitée ; de n'olfrir que des plaisir.s d'écoliers, et voilà
qu'elle en jette ii lout le monde.
Pour ne parler que de la présente semaine, les politiques
ont eu le dîner du Chalet, les rentiers la surprise du paye-
ment de leur semestre; voici pour les dilettanli la rentrée
de la troupe italienne, pour les badauds des exercices mi-
litaires et des ascensions: les dînei-s de cérénionie sen-
cliainonlauxconcertsd'agréme.nts;»^ est permis de com-
parer le monde ii un spectacle et d'envisager Paris comme
une scène où se joue la connkiie en tout genre, nousdirons
que toutes ses troupes ont donné
Au premier rang el dans le genre terrible, nous avons eu
une reiirésentation donnée; ar les .alarmisles. On sait qu'en
geiiér.il h's iiiveulious de ces iressicurs sont peu goùlées.
d est vrai qu ils s'eiileiident ineiliocreuient il varier liiur ré-
pertoire. Pour cette luis i','p,'niiant il ne s'agissiiit pas d«
inlir el ,pie le bon sens public
,,il p,is il.ivanlag,' du mass;irre a
i'-s,iiniiu'ul. ni de lempoisoniu»-
, unie la falsilicaliendela lisiino
liions semblables qui londenl a
les Parisiens ont eue jusipi'a pi-é-
la fameuse iiuiie ipii v,i
évente si vite, il n,' s .i;;i
domicile ipii auia Ihii ii
meut des bornes-leid.iin,
populaire . el autres a.s:
«' 'l'ii'
seul d.iiis leui-s marchands de coco: nos alarmistes s'en U^
liaient a un simple enlèvement. Sur le signal donné par un
Itmnulus de la républuiue rouge, cimpianle Uomains delà
.Montagne devaient enlev(M' celle nation sabine des modé-
rés, diie réunion de la rue de Poitiers, qui ne compte guère
moins de trois cents membres. Du reste, les ravisseurs (le-
vaient V nietlre des proci'-dés. el les viclimes n'auraient élo
ploiigei's dios d alVr, nx cachots qu'avec li>s égards dus a
leur lilr,' de represenlant. Cent citadines étaient comman-
,lees p,iur le Iransporl des prisonniers ,dis<Mil toujours Ici
alarmisles, et si ce lour de force a maïupié son effet, il
faut l'attribuer à la pusillanimilé de ceux ,les conjurés qui
n'ont pas trouvé toute la garantie desirible dans leurs
moyens d'exécution Kn même temps, el a une autre lau-
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
nion, les ffiiimes se laissaient enlever le droit d'assister
à un club où ces dames venaient affublées du co-tiinie mas-
culin : « Ail moment où la préfecture de police fut insli- ^
tuée, dit à ce sujet l'historien du Consulat et de l'Empire , i
le désordre était partout; beaucoup-de femmes avaient
"quitte les liabits de leur "sexe, on leur enjoignit de les re-
prendre, attendu (ce ^ont les expressions du préambule)
que les femmes tr^vestie.s sont exposées à une infinité de
désagréments et même aux méprises des agents. » Une
prescription de bienséance imposée aux anciens clubs,
alors SUrluul iiuc !>• Ihmu mac 1rs rrr(|lH'nl:iil, r'rl.iil .vile
qui forimll.ill irllr .■liiii-;' s;i,T,inN'iiirllr : lu,- nus,- ilrmilr
est de ri (j mur (In ni' s.iiiimh li"(i I,i iM|i|H'lri- ;in\ (ujlrnrs
de club t|ui .ilionlciit la Inliune dans une Icnuc nisunis.iiiUv
L'un de ces enllanmiés ayant lait l'autre jour un accroc a
son vêtement essentiel, dans la chaleur de I im|iro\isali(iu,
le président voulut lui ôter la parole : » I.;ms-,'z le |i;iilrr
dirent les assistanls, un sans-culotte peu l lium > cvin imcr
in naturalibus. •• Un alarmiste vousduinl (im' Ir nuinliv
s' accroît de ces réunions où se propagent cl se iiréclienl les
doctrines de Tragaldabas-Proudhon; la vérité la plus vraie
cependant, c'est que les adeptes se dégoûtent fort de cette
viande creuse, et que les plusgrands prédicants, déserteurs
de la capitale, s'en vont transportant leurs prêches dans les
bourgades de la banlieue. L'un d'eux disait hier : » Nous
avons commencé par Montmartre et nous finirons par IJia-
ronton.»
Voici quelque chose de plus réjouissant et de plus neuf :
des gardes nationaux de Paris qui reviennent de Londres,
où ils sont enirés le sabre au poing et le drapeau tricolore
en tète, et John Bull a fail le meilleur accueil a nos compa-
triotes. Ils ont chanté la Marseillaise, et on leur a répondu
par (lod save tlie Icing, en vertu de 1 entente cordiale. Le
drapeau d'Austerlilz et de Wagram, qui est hélas! celui
de 'Waterloo, salué et applaudi par l'aristocratique Angle-
terre, n'est-ce pas lit un petit fait plein d'enseignements?
Nos Français ravis et enchantés, bien que harassés de fa-
tigue, se sont laissé conduire par leurs hôtes à la Bourse,
aux Docks, à Westminster ; six heuresde monuments forcés,
ce n'était pas trop pour reconnaître cette gracieuse hospita-
lité de nos éternels ennemis. Dans VVest-End, une autre
surprise, celle de la collation leur était réservée. L'hôlel.ou
plutôt le palais où on les héberge, estétincelant de dorures ;
sur lesmuiai.li's t,i|ii-sées, ils retrouvent l'image et les in-
signes de leur pays, p.irtout éclatent les initiales i}. F qui
se détacheiU eu li'itrrs monstres eten ronde-bosse sur l'ivon-e
et la porcelaine, si luen qu'ils se croient encore en France ;
on leur permet celte illusion jusqu'au moment ou un indis-
cret leur révèle la véritable signification de ces majuscules
R. F-, c'e.st-a-dire Uothscliild frères. C'est ainsi qu'on
passe la Manche et qu'on se retrouve dans la rueLaffitle.
A propos de riie.^, quand fera-t-on cesser la confusion
qui régne dans les noms attribués à ces voies de communi-
cation? Telle a deux noms, une autre en compte trois, par
compensalion il en est d'anonymes, exemple, la rue ci-
devant Raiiibuteau , baptisée Barbés et que les habitants
intitulent au gré de leur envie , selon la nuance do leur
opinion et la préférence de leur [lolitique. Un s'est élevé
déjjj et on ne manquera pas de s'élever encore contre cette
autre coutume non moins perturbatrice de débaptiser des
rues anciennes pour leur appliquer le nom de personnages
vivants. Le moindre inconvénient de ces substitutions, c est
de donner lieu à des réclamations sans fin; quelquefois
d'ailleurs vous croyez ne frapper qu'une étiquette insigni-
fiante et môme ridicule, et il se trouve que vous attentez à
une illustration. C'est ainsi qu'un contribuable prend fait
et cause pour la mémoire de son aieul, l'illustre (2oquenard,
supplanté par Lamartine. On ne saurait trop approuver ce
noble orgueil de famille sans lequel tant de grands noms
périraient, et après cet exemple personne assurément n'o-
sera plus voter le moindre changement, pas même celuide
la rue Aidard, un nom peu noble, mais qui l'ut, peut-être,
celui d'un glorieux charcutier. « Immortalisons nos conci-
toyens, a dit Fouché dans un rapport connu, mais que ce
ne soit pas aux dépens d'autres immortels, et ne soull'rons
pas le cumul. » Par ces paroles généreuses, Fouché voulait
dénoncer s.ins iliiiilc l'jéronaule Monlgolficr, qui a donné
son nom a |ilii-.i in-ile nos rues.
Notre hMn|is II \ H [laitir tant de ballons, qu'il n'accorde
presque plu^ il ;iiii nlmn à ceux qui ehercheni la gloire sur
cette rouir l;i l, iniiv|iide M.Green, qui s'élève de l'Hippo-
drome Ions h s iliir.iinlies et part pour les étoiles comme
s'il s'agissait il a Un a Nanterre, aura quelque peine à laisser
son nom dans la mémoire des hommes. La curiosité publi-
que a tant d'autres dérivatifs qu'elle n'a pas songé seule-
ment à connaître le nom des quatre audaclouxqui laccom-
Eagnaientdans son voyage. Cependant avec un peu de
onne volonté on peut comparer cette ascens on à celle qui
mit en l'air la ville de Lyon en 1781, il est vrai que c'était
la première. Monigolfier, qui montrait le chemin à Gieen
et à tant d'autres, s'éleva des Brolteaux en compagnie du
princede Ligne, du comte de Laurencin et du marquis de
Bassompierre, et sous les yeux de trois cent mille specta-
teurs. Ballotté d'un bout de la ville à l'autre et jeté finale-
ment, par un coup de vent, jusqu'au coniluent du Rhône et
de la Saône, il alla s'abattre, plus rudement que M.Green,
dans un marais, mais aussi avec infiniment plus de gloire.
L'un' de ses compagnons avait le nez cassé, un autre était
manchot, et Monigolfier lui-même en devint lirerhe-denl,
et c'est dans cet étal victorieux qu'ils luiinl rannins en
triomphe à l'Hôtel-de-ville. L'année pin nlrnir, 1 rN|ir-
rience delà nir)Hf(/ii//;n'eavaiteu lieua 1' n i-, :mi( li.niip-ilr-
Mars, nu 11- lin, , .Insriih et Bernard .Mnii^julliri' M'i.iienl
vus coiiriuini-. ni |i;i'srilCe de la poplllnlmll ri ilr liiiilr la
cour, et tii iiiiiii n ,1 pas manqué de signulcr tout au long
l'événement dans son journal. Devant tant de gloire où en
serait pourtant M, Green.nonobstanlsa soixante-quinzième
ascension, si l'Hippodrome ne |rêtait pas à la nacellj de
rrt(Tii)i(iii(e le lest de ses exercices équestres , si surtout
\' lllnshdiinii nr I aidait pas a gonfler son ballon? Il n'y a
pj- liiii^iriii|i- que la veuvedu dernier de ces Monigolfier a
ijiiiiir , i ii.i, monde après avoir fait une chose aussi rare
a>Miirni ni iine l'invention de sa famille, c'csld'avoir vécu
plus ilr .■nil ans,
•Ir nr sais plus quel philosophe, qui n'était pas un grand
philosophe, prétend qu'il fautchoisic son ininnent pour mou-
rir, et mettre de l'a-propos dans i r ilnnin acte, faute de
quoi, le plus célèbre risque fort ilr ? rn alln comme il était
\rnii. sans plus de bruit etde fanfares. C, est le cas d'un vieux
ilr 1,1 Mi'illr (innédie, de cet excellent Armand Dailly, qui
Mriii ilr iniiinn ; il a mal pris son temps. D'abord, il avait
i|iiille le théâtre depuis plusieurs années, et le meilleur
iniiyen de n'être pas oublié, c'e>t a~>niniu ni de se mon-
livr loiijours en scène; demande/, aux r nlinis et niêiiie
a rrii\ (|ui nelesontpas Armand Daill; \ it de beau > jours
.111 riii-alre-Français, où son naturel, sa joyeuse humeur et
>i L' iirir le faisaient applaudir à coté de Monrose , de Sam-
suii cl des autres de la bonne tribu et de la belle lignée
comique. Tout Frontin qu'il était d'oiigine et de vocation,
Armand n'arriva pourtant qu'assez l-ard au sanctuaire de la
rue Richelieu, et son existence de comédien est un roman il
plii-iriiis chapitres. Le premier s'ouvre en province, et il
ilr\ ail r;;,i\rr plus d'un chef-lieu avant de faire rire Paris,
et il rr^a\',iil si bien que le bruit des éclats de rire parvint
jusqu'à Picard, alors directeur de l'Odéon, qui prit Armand
pour son théâtre et lui donna des rôles il sa taille. Un se
souvient peut-êlre de ces joyeuses soirées des Deiij- l'hiU-
fcertetdu Voyage à Dieppe, où Armand D.iilK l'.ns.iil mer-
veilles sous la livrée de Gaspard et suiis l.i rr.liii,-nlr de
Derbelin ; il était naïf, gai, plaisant et ciinnqiir ?.iiis rllort,
dans cette comédie de Picard, si iialurrllrinml plaisante et
rieuse. Quand la Comédie-Franraisr 1 rui a|ipelé a elle,
Armand se livra tout entier au cnllr ilr rrs \ieux maîtres
toujours jeunes, qui s'appellent lluline, llancourt et Ite-
gnard, et il mit à leur service et jusqu'à la lin ce naturel
exquis, cette allure franche et cette verve joyeuse que nous
avons si souvent applaudie. t:omme Talma, comme Monrose,
comme les plus renommés et les plus habiles, le vœu d'Ar-
mand Dailly eût été de mourir sur son champ de bataille et
déjouer la comédie jusqu'à la dernière extrémité; mais sa
mémoire devenait rebelle et son oreille paresseuse, et les
infirmités hàlèrent pour lui l'heure de la retraite. On voit
qu'il ne devait pas mojrir tout-à-fait oublié.
Les théâtres qui font leur provision d'hiver ne se met-
tent pas en urands frais de nouveautés; la Montansicr s'est
montrée la seule prodigue entre toutes les scènes secondai-
res. Agénor le Oangcreux vous représente un béolieii de
Pans, cherchant partout des propriétés à vendre et par
conséquent à acheter, à l'ett'et d'y dérouvrir des truffes. En
courant par monts et par vaux a la irrlinrlie du tubercule
parfumé, il tombe dans le traqiirnaiil il i lainille de pe-
tits bourgeois qui luicéde,moyeniiaiililrii\ uni inillr francs,
une propriété qui en vaut bien Ir quail .M,i;s 1,' nian lir ne
tient pas, pourquoi? Agénor n■(•^l |'.i> 1.' |),in;;rrni\ |iimii
rien. 11 effarouche la pudeur ilniir hrllr-ninr ilmil 1 ,i.;;r
mûr date des Cosaques et ses prerrJunlsde Lo\elacesu|j-
posé épouvantent l'expérience d une veuve qui rêve des
secondes noces. Mais Agénor arrache un secret par-ci,
usurpe une confidence par-là et fait si bien que, la propriété,
la veuve et les truffes lui restent. Le dénnniiirnl a l'ir en-
trelardé de sifflets, mais la Montansier nr |i;miI |i.i> -r llaU
ter d'avoir deu\ succès par semaine, c'esl bien ,i>srz d'avoir
enlevé celui du Camp de Sainl-Maur. à la pointe du nez
d'Alcide Tousez et au fil de la ba'ionnetto que manie trés-
gcMiliinent mademoiselle Sciiwaneck. La p èce ressemble
a iiMiirs Ir-, pièces OU l'on a planté des soldats et où vieil-
li ni ilr- ;:!, srll.es. On y voit un colonel qui dit à un trou-
pier lilmlm : .. Pacot, j'aurai l'œil sur toi! » etun grognard
(le sergent qui dit au petit de la mobile : » Tu m'as sauvé
la vie.sois mon fils ! » On y voit aussi un mari qui cultive le
calembour, et sa femme qui cultive les sous-lieutenànts,
prnilanl qu'une la nie fiiliclionne se jette à corps perdu dans
lr> (iiirs lin 1-, lin ,111, 1 r qui inspire naturellement au calem-
liiiunjniis rr, ilmililr cmi-a 1 àne : « Je ne m'attendais pas
a Irii'uver ma tante paiiiii tant il'nntrrs 'lentes) et enfin:
j'étais venu pourvoir le caniii, ri mi inr inriilir Ir cancan, »
Quant au drame joué au Tlirairr-l'r.im.Mi- rt (|iii siiili-
tul(' niaisr Pnsritl . vous nmrrMv, 1(111111 11 \ s,iiii'ait trou-
ver Ir pin- jH'lil liiMl |Miiii' nir Diiiir lii~ Ilr rrrueillie
par li.n In il n-iilli i.nl qur I'immI lui ; rii\ . r rst sur
Ceriillilrniriil lirslr.m.ir i|iir 1 aiilriira liali -r . i|iial rr actes
inii se pa-M-nl il, m- rnirrinlr ilr ri.rl-lliu .il I..1 pasMiui du
rr Il iiir ma-ln -llrilrl.a F.nr. n'cI nmirr: rlle a
vu Pascal aux léirs île Vr|■^adlrs ,rlle vml iliir .Sa;iil-Gor-
main), ot un regard a été le lien de leurs cœurs. Pascal a
demandé la main de Marie, qu'on lui a refusée. Séparés
par la volonté de ce frère sans pitié, dès que les deux
amanis se retrouvent à leur insu dans ce couvent de Port-
Royal, ils n'ont rien de plus pressé que de mêler leurs sou-
pirs et leurs larmes; Marie va même jusqu'à accorder un
rendez-vous nocturne à son amant , ainsi marche faction
parmi des aspirations à la grâce et des citations des Pro-
vinciales. Angélique Arnauld, celte fiére et rigide abbesse,
s'ailiinril ^ll:Llll,rl\ iiirnl ilaii> rr ilr.imc ; elle se fait la
riHiipLin.inii' ilr 1 - .iii,ian> iai|iii~ ililrs, et va iiiêmejus-
(|ii ,1 Mi.jn r a l'.i-' .il ;lr ilr inln la main de Marie une
-rr Ir 1(11- 1 m r.is r-l 1,i\,iim1 Ir, rt voici Venir le niar-
,|,,,.,i|r l.a f.irr Ir Irrir ilr la sirliinr Cr m,ili|llis r>t rn-
riiiv rn|ialil ipi il uni a l'.iir , r.l\,l^r p.ir Ir i„i
l'alihay [rriiirr il,' n hmiurs muimUrs , rninine dit Itarinr,
l.a Farr s ari|iiillr ilr la nininii>-iiiii .\\n- une brutaliK'' de
p|■(>l■rdl■^ i|iii Ir iiirt luuL de =iiite a la hauteur des pins vio-
lents tvraiis de mélodrame, après quoi Pascal vient lui réi-
lérersii deniaiide à brùla-pourpoint, et on vous l'accueille
plus rudement encore ijue madame Angélique. Le gentil-
homme insulte le savant, lui jette son gant au visage et
finit par le menacer d'une leltrc de cachet; mais Pascal a
un bon ange qui veille, Pascal est protégé par un frère (de
lait), et il se Irouve que ce Bernard a sauvé la vie au mar-
quis dans les guerres civiles, ol que le marquis n'a rien à
lui refuser, de sorte que le frère donne son consentement
au mariage de la sœur, et toul cela se passe en plein Port-
Royal, dans cette maison si austnr ri si ^.'lave, sous les
yeux des jeunes reli.nieuses, de rassniiinirni 1 Ir .Saint Cyran
et avec la bénédiction de mailamr \ii^i h(|ii!' ; c'est une
grande surprise, mais pas pins Mn|irr i.nilr ipir relie du
dénoùmrnl, ri m \i in 1' 1 'r-l I ' r.is ilr il nr i|iir l,i lin justifie
les moyen- M.nir rrliip^irr aii\ iii;iirni- lin ilnllrr, Marie
aimée (le Pascal et pivlr a 1 epnuscr, suicuinlic aux émo-
tions de ce grand bonheur qui lui tombe du ciel : on la voit
se troubler, pâlir, chanceler, et à son tour Pascal ne peut
supporter celte vue lamentable; alors nous avons le spec-
tacle de deux agonies qui se débattent , c'est l'agonie de
Marie, c'est l'agonie de Pascal ou du moins celle de sa rai-
son.
Je puis bien le porter, moi qui porte le monde,
dil le grand homme à Marie, et de ce moment on comprend
qu'il esl tout-ii-fait fou.
Biaise Pascal est un personnage assurément fort peu dra-
matique, surtout au point de vue où M. Costa (c'est le nom
de l'auteur) l'a envisagé; en outre cette introduction de ce
grand nom et des grandes choses de Porl-linyal dans une
amourette, est loin d'être heureuse ; on pourrait s'étonner
aussi du rôle de comparses niais que In l'.inl.iisir de l'auteur
impose au terril ilr Saint-IX imh ri a la liri'r Aiiui'lii|iir ; car
si la reproduction liilrlr ilr llnsliHir mi dr la lim.m-aphie
n'est pas de premirrr iirrr--ilr il.iiis Ir ili-, , le drame ne
gagnera jamais rien a drliijnii 1 1rs l'Innrni- de la réalité.
Ces restrictions faites, on a |mi h'^n mnii applaudir dans
ce coup d'e-ssai quelque rnlnilr ilr l,i - rnr, ri unefacilité
et parfois une élr.L'anrrilr vn-ilir.iliiiii lu- iin'ritoires. Bref
cet ouvrage surcliaiL'r ilr |irr-;inii.r-r- a- ilriiirsetd'autant
plus ingrats, a élr jmir a\rr Ir /rir, I rii-raibk- et le talent
qui distiu^urnt MM, les coiiir liens Ir.iiiçais
l.e Ban<|iict (lu 99 spiilrnilire.
C'est une grande date que le 22 septem.bre; elle corres-
pond au 1" vendémiaire, qui fut le point de départ de la
nouvelle année et de l'ère républicaine , après que l'une
et l'autre eurent été instituées par l'Assemblée nationale
de 1792.
Nous avons donc inauguré, jeudi dernier. Van 57 de la
République française, et c'est en commémoration de cette
grande ère qu'une portion des membres de r.\ss:!inblée na-
tionale, à laquelle s'était adjoint un certain nombre de
ritovens apparlenniit pour la plupart à la presse et aux
ii|illiliills ilinHirralii|llrs rrliralrs, s'rsl , l- :!.> sr|ilriiilire ,
iviinir an piiliii ilr- ( hainp-KIvsrrs ilil Ir ( hulrl, autour
d un inodcslr banquet dont la [nUerniU faisait l'essentiel,
sinon le seul luxe.
Pourquoi une partie do l'Assemblée seulement, et pour-
quoi pas tout entière, après surtout le vote de conciliation
qui avait, dans la journée même, rallié par un ordre du
jour motivé toutes les fractions de la Chambre? Solenniser
l'avènement de la République, ce n'est pas une question de
parlis. H paraît néanmoins que l'on n'a pu s'entendre, car
cent cinquante ou deux cents membres seulement de la g.iu-
che et de l'extrême gauche, habitués des mêmes bancs, se
sont assis à une même table de quatre cents couverts envi-
ron, préparée sous l'immense tente où s'abritent les spec-
tateurs, durant les représentations et les exhibitions plus ou
moins foraines du pelit théâtre du Chalet.
Ainsi circonscrite, cette réunion, qui eût pu empruntera
l'unanimité un caractère national, se réduisait, ce que nous
regrettons , à una manifestation politique. On n'y remar-
quait aucun des hommes ni du gouvernement, ni de la rue
de Poitiers, et, bien que l'on eût répandu, entre autres
bruits que le général Cavaignac et M. Sénard devaient s y
11 lin Iniis les deux, ni l'un ni l'autre n'a paru.
Cria s r\|ilii|uede soi-même. Le banquet était présidé par
M. Audi y de Puyraveau ; et M. Ledru-Rollin, qui s'unit de
plus en plus avee'^la Montagne, devait en être l'orateur.
On esl parti avant six heures de la sallo des Pas-Perdus,
pour se rendre à celle du festin, dont l'ornemeiitalioii ne
brillait guère que par une simplicité toute républicaine.
Quant au banquet, ce n'était pas'précisément le brouet noir,
-mais peu s'en faut. On sait qu'en général ces sortes de sc-
tennités se recommandent médiocrement par le côté gastro-
nomique. Néanmoins, la vie politique ét.mt iiisullisante a
soutenir son homme, il y faut joindre forcément un récon-
fort d'autre nature. Il courait sur ini,- li'irs un [irlit \riilde
montagne fail pour aiguiser l'appi iii \ii--i Ir- 1 miMves, à
jeun depuis une demi-heure (le\aiit -ix liiii,-iir,- lahlrs sur-
chargées de biscuits et de pâtisseries dciuieusrs qui flai-
raient le fesiin d'opéra-comique, oiil-ils frémi quand on
leur a annoncé que, de par l'ordre supérieur des commis-
saires, le potage ne ferait son apparition qu'a sept heures pré-
cises. Cette partie seule du prii,^r.i!ii .1 i''ii' m inpiileuse-
ment remplie. On avait calcule sur un ■ -rinrr rlnsr a six
heures et demie seiiirinrnl , el il r-l rlair ipir lini avait
r„nn,lrsuri>i..insila|.lir 1 , In- ilr /rIr ilr I; 1,1,'slé-
■nsl.ilrilis mai- Ir m. ■ ih' r..»rr'/i,/ln« ,u,ill pin i-rment
'Miivn'. rr jonr-la l.i ili-ii-nni parlniirlilairr l.r 1111. t du
ir-tr paiMii ilrMMi laiir Iniliiii.' ; Car j'euteuds prcs île moi
ilniv ,1 , 1 1.1 1 1 r- ilriiiaiider au garçon, par inég.irde,
lieux sriir-ilr cntiiii nilinii iliailiiisez par : mélange d'ab-
suiihr ri il,iiii-rilr jinii - ■ l.iirr pivnilr p.itieuce, Aiitre-
fi.isrrla - a|i|irl,ill pii|iill,iirriiiriil ciinsiiltilinn ,\utrestemps,
aulir-siih-Linlil.- l.r iin.t Lia Ir tmii ilrs tables. Les hoiu-
L'ILLUSTRATION, JOURNAL UNIVERSEL.
mes sont aujourd'hui semblables à Niobé, qui ne voulait pas
Hre consolée. Ils sont trop heureux pour cela.
Enfin , le pota!;e désiré se montre, suivi d'un repas servi
par M. L'Amiral , grand restaurateur politique , qui fait
banquets démocratiques, réformistes, phalansliériens et au-
tres, et va en ville, le tout à des prix modérés. Il était
temps; car, un peu plus, le bord de ce bon M. L'Amiral
n'était qu'un vaste radeau de Méduse, et, dans un diner
fraternel, il eût été de mauvais Eoùt de se manger les
lins les autres. 11 y a eu moins cl(! proftKiiin que de lonfii-
sion dans le service, et le rôt a iikiii.|ih', :iim-i 'yir l;i in;i-
roe, sur plus d'une table, sans (|
)ins il en soit n
félicitons. Mai:
Jamais pu étn
(l..n= 1l'
mnri d'In
•p.,!,.
ce iluiil liijll,-> llou>
du moins cela n'a
iiriiiiris , ce qui par
iiirliiilis pour l'or-
i|lir- liilllr iiiiiverts
.|U.. nnlI-X.r.'l-SOnS
.iili> (■iMli>,iiMiii tu-
Mais laissons de côté ces vulgaires détails , et venons
il l'obji't véritable , c'est-à-dire au côté politique de la
M. Audry de Puyraveau, placé à l'extrémité de la table
du milieu entre MM. Ledru-Rolhn et Flocon, a inauguré la
séance en prononçant d'une voix ferme encore, une allo-
cution de circonstance.
« Vive la République démocratique ! •> s'est écrié en ter-
minant M. Audry de Puyraveau, — • Et sociale ! ■■ ont ajouté
par manière de répons quelques voix intrépides, mais iso-
lées. Un petit incident a fait naître un sourire exempt de
loule raillerie aux lèvres dc! la réunion. Au moment même
(III le vi''iiéral)lo président appuyait sur la cécité et Vaveu-
i/linirnl ilr ( ru\ qui ne reconnaissent pas la vérité rcpubli-
( .uni', il :i en lui-iiiéiiie beaucoup dc peine à déchiffrer, et
.-, est vu sur le point d'interrompre, faute d'un suffisant lu-
minaire, la suite de son discours écrit.
Il n'y a eu, au reste, que deux harangues, et cette dimi-
nution d'éloquence constate un progrès dans l'art du ban-
quet. Le Bénédicité, comme on vient de le voir, était échu
il l'honorable M. Audry de Puyraveau, et c'est M. I.edru-
Uollin qui, au monienl où l'on débouchait le Champagne,
s'est chaiLTc ili' iliic 1rs iiràces.
M.Ledrii-K'illMi ,i l.nl, dans un toast très élendu, ce qu'on
nomme un iliMinifs-niinistre , en ce sens qu'il a pris texte
de la réunion cl do son objet pour développer ses théories
et les principes de gouvernement qu d appliquerait s'il re-
montait au pouvoir.
11 a débuté en ces termes :
" CiTOÏESS,
» A l'anniversaire du 22 septembre 1792! à cette mémo-
rable journée où la Convention proclama la République dans
le palais inêiiic où la veille elle avait aboli la royauté!
«Oui, a la Hépublique que nos pères ont décrétée et que
nous avons mission de rendreàjainais durable, en lui don-
nant il. m- li's institutions s(jcialcs une bas(! indestructible!
iAppIduilissimcnls.)
A la Hépublique génie prolecteur des [«>uples, qui
comme nous poussent un cri de délivrance ! A la KépuWi-
que vengeresse des deshérités de la grande famille humaine
qui, à notre exemple, arborent le drapeau démocratique et
sonltraquéspar les derniers représentants des vielles aris-
tocraties! f Bravos. J
» Citoyens, je dis :.4 la République consolidée par les in-
stiiiiiiiiii> -i,( iiiiis ; car, nous qui sommes ici, nous sentons
qui M Ir 11 i-l.itrur ne la fait pas pénétrer profondément
dans li> iiii-, il.ins les mœurs, nous n'aurons encore que le
mot sans la chose: aussi infortunés que nos pères qui n'en
l),lil.lili;l,ili;s He
eiitiiits diSmociMtoi dans le .lardiii du Chalet, le ii septambre 1848.
furent qui' li's |iri.|,lii.i,rs et niî virent jamais la Terre-Pro-
mise q\i ils